Oui, Il y a bien la gauche et la droite ! (Par Patrick Le Hyaric)

jeudi 9 mars 2017.
 

« Le clivage qui est [sic] dans notre pays, c’est un clivage entre le repli et l’ouverture, entre les conservateurs et les progressistes  » déclare M. Macron. La cheffe de l’extrême-droite dit avec d’autres mots la même chose en évoquant un clivage « entre les mondialistes et les patriotes ».

Chez l’un, l’opposition permet d’endosser le rôle de magicien moderne, ouvert au grand large de la mondialisation capitaliste ; chez l’autre, de solidifier sa vision raciale et communautariste de la France. Chez les deux, se trouvent ainsi toujours évacuée la question sociale, celle de l’égalité et bien entendu l’opposition entre le travail et le capital.

Rien de tel pour camoufler la responsabilité des puissances industrielles, financières et du numérique dans l’état du monde.

Il est malheureusement vrai que l’idée de gauche a pu servir de tenue de camouflage aux promoteurs de la mondialisation capitaliste et de l’Europe ultra-libérale qui ont profité de l’affaiblissement du mouvement social et de l’idée communiste.

Ils furent nombreux les testateurs de M. Macron à tenter d’emporter la famille socialiste vers « l’avenir radieux » du libre-échangisme sans foi ni loi, exceptées celles de la finance et du profit.

La construction européenne fut un de leur terrain de prédilection où, à chaque étape, se célébraient les noces entre la droite et la gauche sociale
- démocrate.

Ce type de construction a été présenté comme le seul possible, le seul capable de garantir paix, prospérité et indépendance vis-à-vis des Etats-Unis. On voit ce qu’il en est aujourd’hui avec M. Junker, président de la Commission européenne, lançant un pathétique : « Au secours, fuyons ! ».

L’entente cordiale sur le dos du monde du travail est aujourd’hui mise en cause par une réalité à bien des égards désastreuse. Bien que soutenus par une vaste entreprise de dépolitisation des enjeux économiques, sociaux, culturels et environnementaux, ses promoteurs considèrent aujourd’hui que leur avenir n’est pas assuré.

Les méthodes de gouvernement convoquant de grandes coalitions ou l’effacement des souverainetés populaires ne leur suffisent plus pour garantir la passivité, voir e l’acceptation des populations. Il leur faut donc aller plus loin. C’est à cela que sert la candidature de M. Macron qui fait d’ores et déjà cohabiter dans son équipe de campagne élus socialistes et de droite.

Déjà en 1992, Mme Guigou, alors ministre des affaires européennes, faisait meeting commun avec M. Giscard d’Estaing et F. Hollande posait aux cotés de M. Sarkozy en une de Paris Match pour faire avaler le Traité constitutionnel rejeté par nos concitoyens. Il est utile de méditer les raisons pour lesquelles l’extrême-droite comme les libéraux souhaitent réinventer de nouveaux clivages et remodeler le paysage politique.

Cette nouvelle conflictualité sert de tremplin à l’extrême-droite qui a toujours combattu l’opposition entre gauche et droite pour défendre l’idée mythifiée d’une France communautarisée. Il n’y a pas meilleur moyen de pousser dans ses griffes, les ouvriers et salariés victimes des délocalisations et désindustrialisations. Deviennent ses proies, celles et ceux qui ont déjà tant perdu et que la mondialisation capitaliste menace de tout perdre ; ceux qui sont contraints à « la mobilité », au chômage, au déclassement social.

En somme, l’ensemble de celles et ceux que la fameuse note du laboratoire d’idées Terra Nova publiée en 2011 considère perdus pour « leur » gauche car jugés inaptes à comprendre les avantages de la globalisation capitaliste !

Réaffirmer l’ambition de reconstruire la gauche sur des bases sociales et unitaires est aujourd’hui une nécessité pour affronter les deux menaces qui avancent de front et dont les incarnations politiques espèrent tant jouer les duettistes au second tour de l’élection présidentielle.

Dire que cette reconstruction est affaire de valeurs est juste et nécessaire mais s’avère à l’évidence insuffisant, sinon nous n’en serions pas là. Etre de gauche, c’est aussi assumer la conflictualité entre travail et capital, salaires et profits, progrès social et conservatisme, égalité et droits contre privilèges, souveraineté populaire et gouvernance, dignité humaine et mépris de classe, solidarité et racisme.

Autour de ces combats, valeurs et engagements, il nous semble possible de fédérer une majorité de nos concitoyens. Encore convient-il pour cela de dissiper le brouillard idéologique entretenu par ceux qui ont tout intérêt à empêcher la solidarisation des citoyens et la création d’un large front potentiellement éruptif et transformateur, indispensable pour écrire les premières pages de ce qui pourrait être le vrai « antisystème » : une première République sociale.


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