"Renouer avec l’État social"

dimanche 15 janvier 2017.
 

Entretien avec Charlotte Girard, cocoordinatrice du projet de la France insoumise.

Le programme « l’Avenir en commun » de la France insoumise propose à la fois des mesures d’urgence pour éradiquer la pauvreté, mais aussi structurelles pour changer de système.

Pourquoi la lutte contre la pauvreté est-elle présentée comme l’un des axes majeurs du programme « l’Avenir en commun »  ?

Charlotte Girard Neuf millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France. C’est insupportable. Il ne s’agit pas du tout d’un épiphénomène passager. La pauvreté et l’accentuation des inégalités sont au cœur du système néolibéral et capitaliste actuel. La réalité est que nous débordons de ressources, mais qu’elles sont incroyablement mal réparties. C’est sur la spoliation massive des biens qu’une multitude souffre et que de très rares nantis prospèrent dans l’opulence inutile. Nous souhaitons empêcher l’accumulation indéfinie par quelques-uns en prélevant à un pourcentage très élevé tout revenu au-dessus de 20 Smic. La fiscalité est ici un levier central. L’objectif d’une société digne et égalitaire est impossible sans taxation du capital, sans impôts sur le revenu véritablement redistributifs et sans lutte contre l’évasion fiscale. Notre objectif est de renouer avec l’État social, de réintégrer les plus vulnérables dans le circuit de la solidarité nationale, où chacun paie selon ses moyens en étant protégé selon ses besoins.

Cette question doit donc être au cœur de la campagne présidentielle  ?

Charlotte Girard Agir de manière conséquente contre la pauvreté, c’est avant tout refuser le système tel qu’il est. Le point de vue sur la pauvreté est politique. Soit l’on considère comme François Fillon que c’est un phénomène naturel, qu’il y a des gens forcément plus faibles, sans remettre en cause les hiérarchies sociales, et même en les renforçant, selon la théorie du ruissellement, selon une logique d’entretien de la pauvreté par la charité couplée à une attaque en règle de la Sécurité sociale. Soit l’on considère que les inégalités ne sont pas naturelles, qu’elles sont entretenues par un système et qu’elles peuvent être vaincues. Il s’agit d’une vision du monde. À nos yeux, la Sécurité sociale est un trésor national, et doit devenir intégrale avec une couverture à 100 % pour tous. Il s’agit ici de fraternité organisée.

Quelles sont les mesures d’urgence de la France insoumise contre la pauvreté  ?

Charlotte Girard Nous souhaitons éradiquer la pauvreté avec un plan personnalisé qui tient compte de la situation de chaque individu. Nous prévoyons de plus la création d’une « garantie dignité » qui revaloriserait les minima sociaux afin que le niveau de vie des citoyens ne puisse plus jamais être en dessous du seuil de pauvreté. Nous voulons lutter contre le surendettement en restructurant la dette privée des personnes, en forçant les banques à offrir le système public bancaire à même de sortir de situations dramatiques dans lesquelles elles ont souvent un rôle délétère. Notre objectif est aussi d’atteindre zéro sans-abri avec des propositions systématiques d’hébergement d’urgence, de logement et d’accompagnement durable. Nous souhaitons également instaurer la gratuité de l’accès aux biens communs comme l’eau, l’électricité et le gaz dans les quantités nécessaires à la vie digne, et enfin lutter contre le non-recours aux droits sociaux. Nous souhaitons aussi revaloriser le salaire minimum.

Entretien réalisé par Aurélien Soucheyre, L’Humanité


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