De l’élection présidentielle à une Assemblée constituante

mercredi 29 juin 2016.
 

Une Assemblée constituante est la seule source de légitimité

Par André Bellon Président de l’Association pour une constituante

et Alain Policar du Centre de recherches politiques de Sciences-Po (Cevipof)

La crise de la représentation et l’opprobre dont la classe politique fait l’objet ne peuvent trouver une réponse dans la volonté de généraliser le mécanisme des primaires pour désigner les candidats aux élections présidentielles. La première étape d’une profonde réforme de nos institutions, réforme dont chacun ressent l’urgence, tout particulièrement devant la montée des identitarismes de toutes sortes, consiste à faire de la volonté populaire la seule source de légitimité du pouvoir, c’est-à-dire concrètement à élire une Assemblée constituante en lieu et place de cette grande farce qu’est l’élection du président de la République au suffrage universel. Farce tragique, parce qu’elle contribue puissamment à dissimuler la réalité de l’extension de la misère et de la précarité.

On a souvent dit les Français attachés à ce mode de désignation. Rien n’est moins sûr. Il est dès lors grand temps d’attirer l’attention sur l’imposture, au regard des principes minimaux de la démocratie qu’elle représente. Cette imposture avait déjà été clairement perçue il y a près de 170 ans. Dans un discours prononcé devant l’Assemblée constituante le 6 octobre 1848, Jules Grévy s’inquiétait du caractère exorbitant des pouvoirs que l’on projetait de confier au président de la République. Ce dernier disposerait en effet de la « force matérielle » de l’ancien roi (c’est-à-dire la concentration des pouvoirs) et de la « force morale » nouvelle que confère le suffrage universel (« nouvelle », parce que le roi, dépositaire de la souveraineté historique, ne la possédait pas). La conscience du danger de la perversion bonapartiste, en tant que moyen de contourner les contre-pouvoirs, n’est donc pas nouvelle.

Notre régime politique est devenu une République autoritaire, exclusivement soucieuse de stabilité administrative, par nature méfiante à l’égard des subversions populaires. On a pu observer, notamment le 29 mai 2005, ce que le pouvoir politique avait fait de la volonté citoyenne. On n’en sera nullement étonné  : la logique profonde de notre Constitution est l’atrophie des oppositions par le jeu de la personnalisation et, corollairement, la mise à l’écart du Parlement. Cette logique entre en congruence avec la mondialisation capitaliste dont les conséquences les plus délétères sont l’oubli du rôle des conflits sociaux dans l’espérance démocratique.

L’objectif principal d’une constituante est donc de refonder la société autour de la réappropriation de ce bien collectif qu’est la vie publique. C’est retrouver l’esprit du projet jaurésien qui décrivait l’histoire du mouvement ouvrier comme celle de la participation des prolétaires à la construction, par la conquête de l’autonomie, de l’espace public. Le soutien actif du peuple aux choix politiques doit permettre non seulement de redonner son sens à la démocratie nationale mais aussi de configurer de nouvelles solidarités internationales.

Face à ces défis, l’urgence est bien de changer le système tout entier. C’est pourquoi nous appelons à remplacer la présidentielle par l’élection d’une assemblée constituante. Cet appel a déjà été signé par plus de 700 citoyennes et citoyens  : www.change.org/p/citoyennes-...


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