Monsieur Bayrou n’a ni programme ni majorité ( Jean Pierre Chevènement)

lundi 26 mars 2007.
 

Le discours de François Bayrou, homme au demeurant fort sympathique, et que je trouve même courageux dans la détermination qu’il a mise depuis cinq ans à prendre ses distances avec l’UMP, n’en reste pas moins étonnement creux.

S’agissant de la Constitution européenne, il se propose simplement de la rendre « lisible » (discours du 12 février, repris le 5 mars 2007). Quel changement sur le fond veut-il y apporter ? Je l’ai cherché en vain. Sur l’histoire de l’idée européenne - la mise en commun, par exemple, du charbon et de l’acier en 1951 qui nous aurait ensuite évité la guerre, ce n’est qu’un tissu de balivernes et de radotages, que les références pieuses à Robert Schuman, priant, ne peuvent soustraire à un esprit critique même moyennement développé.

De même sur l’Ecole, François Bayrou veut restaurer « la discipline et l’excellence scolaires » (discours de Toulouse du 5 mars 2007). A la bonne heure ! Mais comment compte-t-il s’y prendre ? Nous ne le saurons jamais. Aucune conception claire de l’Ecole n’apparaît jamais dans les discours de cet ancien ministre de l’Education Nationale.

M. Bayrou veut réduire la dette et donner un socle social à la République. Mais sur quelles mesures concrètes déboucheront ces pieuses intentions qui risquent fort de s’avérer contradictoires ? Là encore nous resterons dans le flou le plus total.

Comme tout le monde, M. Bayrou veut sauver le climat et économiser l’énergie. La vérité est que M. Bayrou n’a pas de programme. Il énonce les problèmes sans leur apporter de solution. Il n’a pas non plus de majorité mais c’est moins grave : on trouve toujours des gens pour venir au pouvoir, surtout si c’est pour ne rien faire. M. Bayrou propose ainsi de recréer un grand « parti démocrate ». Il me semble que cela a déjà existé : cela s’appelait le « Centre Démocrate », au temps lointain de M. Lecanuet, quand M. Bayrou lui servait de gratte papier.

Certains croient trouver une analogie entre le positionnement de M. Bayrou « ni droite ni gauche » et ce que fut ma démarche, en 2002 : « Au-dessus de la droite et de la gauche, il y a la République ». Rien n’est moins vrai. Outre que je n’ai jamais employé l’expression : « Ni droite, ni gauche », ayant toujours déclaré que celles-ci continueraient d’exister, j’entendais dépasser ce qu’il y avait effectivement de dépassé dans une gauche qui avait oublié le peuple, et une droite qui s’était détournée de la nation. Je voulais déjà redresser la construction européenne, revoir les statuts de la Banque Centrale européenne, réformer l’Etat et les services publics, renouer avec la politique industrielle, relier éducation et « sûreté ». Rien de tout cela chez M. Bayrou.

M. Bayrou ne veut rien dépasser du tout. Il veut redoubler ce qui à droite et à gauche est déjà dépassé. Il répéterait le déjà vu. Il ferait radoter l’Histoire. (Le 12 mars 2007)


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