Portugal : Un espoir, mais quel champ du possible  ?

mardi 15 décembre 2015.
 

Le 4 octobre 2015, le peuple portugais a choisi de rejeter la droite. Ce faisant, il a choisi, pour la première fois depuis la ­révolution des œillets de 1974, à côté d’un nouveau record d’abstention, de faire cesser l’alternance habituelle avec le Parti socialiste et de donner presque 20 % à la gauche  : Parti communiste (PCP), Verts, Bloc de gauche (BE). Ainsi, PS et gauches ont une majorité absolue au Parlement. Le président et les droites ont mis cinquante jours pour tenter de diviser le PS, vomir leur anticommunisme avant de céder le pouvoir au socialiste Antonio Costa. Étonnant en Europe de voir un Parti socialiste prôner une sortie de l’austérité qu’il a lui-même fait entrer au Portugal. Il a ainsi sauvé sa place. L’échec de la thérapie austéritaire est criant. L’émigration est plus forte que sous le régime fasciste de Salazar. L’état d’urgence social et humanitaire équivaut à la Grèce. Le déficit budgétaire a atteint plus de 7 % en 2014 et devrait être au-dessus de 3 % cette année.

La dette publique est à plus de 127 % du PIB. Le pays a été ramené plus de dix ans en arrière. La gauche soutient sans participer. L’engagement est sur l’ensemble de la législature (quatre ans). Le programme de 256 pages est déjà à l’œuvre au Parlement. C’est l’alliage d’une politique de relance du pouvoir d’achat et de promotion de la ­démocratie et des droits. Une union libre où chaque parti défend son programme tout en avançant ensemble dès que cela est possible.

Une bataille pour l’hégémonie culturelle et politique est donc engagée. Par exemple, le droit d’adoption des couples homosexuels et la fin des entraves à l’IVG sont déjà votés. Sont entrés au Parlement et au gouvernement des militant-e-s handicapé-e-s, de couleur, plus de femmes et de jeunes. «  De vraies gens  » pour citer l’un des slogans de campagne du Bloc de gauche.

Pour autant, le PS, sous la pression, a fait «  promettre  » à la gauche la non-remise en cause des traités européens et de l’Otan. Le PS fait office de tampon avec les maîtres de l’Europe. Lesquels sont affaiblis devant les peuples depuis leur chantage avec Tsipras en Grèce et par les saignées austéritaires. Ni la France ni la RFA ne respectent les règles des traités européens. Une faille utile au PS. Le programme propose que «  l’Union européenne soit rééquilibrée  », un progrès «  partagé par tous  » et que le principe d’égalité entre les États soit respecté. Une ­commission parlementaire sur la soutenabilité de la dette externe est créée.

La débandade des socialistes en Europe et la montée des gauches tels Syriza en Grèce ou Podemos et Izquierda Unida en Espagne, la victoire de Corbyn au Labour, le Sinn Fein en Irlande… Peut-être qu’un axe politique nouveau en Europe est en cours de création  ? Certaines de ces forces sont accompagnées par des réseaux d’économistes en recherche d’alternatives (Thomas Piketty, Joseph Stiglitz…). La plupart sont membres du groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE). La ­prochaine rencontre internationaliste pour un «  plan B  » en Europe (les 23 et 24 janvier prochains) devrait voir nombre de personnalités de cette mouvance, et d’autres portant les voies de la sortie de l’euro (PC ­portugais), travailler sur les moyens concrets pour sortir de l’impasse des traités européens. Antonio Costa résistera-t-il à ceux qui ont fait fléchir Tsipras  ? Le PS joue sa survie. PCP et BE travaillent la conscience du peuple et le rapport de forces pour tenir leurs engagements.

La droite veut emporter l’élection présidentielle de janvier 2016 afin de dissoudre le Parlement dès le 4 avril suivant. Le PS n’a pas de candidat officiel, ses membres ont le choix entre deux des leurs et une personnalité de gauche.

PCP et BE ont leur candidat. L’objectif est de mobiliser, rassembler de concert le plus de voix éparses pour obliger la droite à un second tour et tenter de l’emporter au second. Il est évident que les actions du nouveau gouvernement et de l’Assemblée vont compter dans la mobilisation des citoyen-ne-s pour poursuivre l’expérience nouvelle d’une politique non austéritaire.


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