Santé et pollution de l’air : le capitalisme socialise les pertes… même en vies humaines

vendredi 10 avril 2015.
 

Les yeux piquent, le nez coule, le souffle est court. Encore un pic de pollution de l’air, contre lequel Ségolène Royal a plus que tardé à prendre des mesures comme la gratuité des transports en commun et la circulation alternée, élections départementales obligent.

Mais les pics de pollution, qui devraient être beaucoup plus fréquents avec le réchauffement climatique, ne sont que la pointe de l’iceberg de la pollution atmosphérique.

Selon l’Institut de veille sanitaire et son programme de surveillance Air et santé, « 95 % de l’impact sanitaire de la pollution de l’air est provoqué par la pollution de tous les jours ». La Commission européenne avait chiffré à 42 000 morts prématurées en France, et 386 000 en Europe, l’impact sanitaire des seules particules fines. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l’OMS, classe depuis 2013 la pollution de l’air dans la catégorie « cancérogènes certains ». La liste des maux de la pollution aérienne est longue : asthme, bronchite chronique, cancer du poumon, accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde, ou problèmes placentaires. Des études récentes suggèrent même que le stress oxydatif cérébral peut favoriser une érosion des capacités cognitives (attention, mémoire de travail, etc.) et majorer l’anxiété.

Quant à ceux qui savent chiffrer le coût de nos vies, comme la Commission des comptes de l’économie et de l’environnement, ils estiment que le coût des dommages sanitaires de cette pollution (décès prématurés, hospitalisations, bronchites chroniques, journées d’activité restreinte…) se situe en France entre 20 et 30 milliards d’euros par an. Le capitalisme nous coûte cher !

Car quand les gaz de l’automobile, notamment diesel, et les rejets de l’industrie s’allient pour multiplier les méfaits de l’ozone et des particules fines au niveau de nos poumons, si quasiment rien n’est fait au quotidien pour lutter contre ces pollutions, c’est bien que nous sommes au cœur du moteur de profit du système capitaliste et productiviste.

Alors les mesures d’urgence ne suffisent pas. Il faut agir sur les causes pour éviter de nouveaux pics de pollution et surtout la pollution au quotidien. Ce n’est pas seulement lors des pics de pollution que les transports en commun doivent être gratuits, c’est tous les jours que la gratuité, les horaires, le maillage, la qualité, l’interfaçage des transports en communs publics doivent être au rendez-vous. C’est tous les jours que les déplacements doux, pistes cyclables, voies vertes, voies piétonnes, doivent être développés. Il faut sortir du diesel.

Plus largement, c’est toute l’organisation capitaliste de la société qui doit être revue. Le capitalisme stocke et déplace en tous sens sur les routes les marchandises pour son plus grand profit. La spéculation immobilière expulse les salariés toujours plus loin en périphérie des villes. Les capitalistes préfèrent les profits de l’industrie automobile et les bas coût du transport routier au développement des transports en commun, du ferroutage ou du transport fluvial, puisqu’ils ne paient pas le coût de la pollution. Socialisation des pertes, y compris en vies humaines, et privatisation des profits.

Selon le Réseau Action Climat, le transport représente aussi près de 26 % des gaz à effet de serre (GES). En France comme en Europe, les émissions de GES liées au transport connaissent une progression quasi ininterrompue. Une augmentation de plus de 23 % depuis 1990. Alors qu’il faudrait diviser par quatre nos émissions de GES d’ici 2050 pour simplement « stabiliser le climat », on prévoit au minimum un doublement du trafic de personnes et de marchandises d’ici 2020 si rien n’est fait. Mais développer des transports sobres en carbone va à l’encontre de la logique du capitalisme.

Alors en cette année de Cop 21 autour du réchauffement climatique, un seul mot d’ordre : changeons le système, pas le climat. Cela nous aidera aussi à respirer !

Frank Cantaloup


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