Tsipras dépose une loi de salut social qui défie Merkel

lundi 23 février 2015.
 

Athènes va demander l’extension temporaire du plan de «  financement  », mais tient bon sur le refus de poursuivre les politiques d’austérité et les mesures «  toxiques  » des mémorandums.

L’Eurogroupe lui pose un ultimatum ? Alexis Tsipras réplique en appliquant son programme anti-austérité.

Mardi, devant le groupe parlementaire Syriza, le premier ministre grec a annoncé le dépôt d’une « loi de salut social » dont les premières dispositions seront examinées dès aujourd’hui à la Vouli, après l’élection hier du président de la République, le conservateur Prokopis Pavlopoulos. « La Grèce n’accepte pas les conditions et les ultimatums. (…) Il n’est plus tolérable que certains se comportent comme s’ils considéraient la Grèce comme une colonie, et les Grecs comme les parias de l’Europe », a lancé Tsipras, après que les discussions entre ministres des Finances de la zone euro ont tourné court lundi, Athènes refusant de se plier aux conditions « inacceptables » posées à l’extension de l’accord de prêt qui arrive à échéance le 28 février. Confirmant les déclarations de son ministre des Finances, Yanis Varoufakis, le chef du gouvernement a accusé le chef de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, d’avoir remplacé in extremis par un « nouveau texte » celui que la partie grecque était prête à signer, qui « faisait allusion à l’extension de l’accord de financement et non à celle du mémorandum ».

Les dettes mettent en danger de larges franges des classes populaires

Comme un défi au ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, qui presse Athènes de « s’engager de manière claire, solide et crédible à remplir le programme » d’austérité dicté par ses créanciers, Tsipras a ensuite décliné les principales dispositions des lois sociales qu’il compte faire adopter sans délai. Les premières prévoient la protection de la résidence principale pour les familles menacées par les saisies immobilières et l’étalement sur cent mois, pour les plus démunis, des remboursements de prêts ou des arriérés dus à l’État ou aux caisses de sécurité sociale. Ces mesures seront soumises au vote dès vendredi, le gouvernement ayant recours à la procédure d’urgence. « Nous allons réguler les dettes privées envers les banques et protéger les familles menacées d’expulsion. Les dettes mettent en danger, à court terme, de larges franges des classes populaires », explique la députée (Syriza) Sia Anagnastopoulo.

Autre volet social sur lequel Tsipras compte agir très vite, la restauration du droit de négociation collective et le retour des conventions collectives, suspendus par les mémorandums. « Durant toutes ces années de crise, le droit du travail a été démoli. Des mesures désastreuses pour le monde du travail ont été adoptées, dans l’unique but de déréguler le marché du travail pour l’adapter aux dogmes du néolibéralisme. Ces mesures n’ont généré aucune économie pour l’État. Nous allons réparer cela, restaurer des garanties collectives », poursuit Sia Anagnastopoulo. Les négociations à Bruxelles, assure-t-elle, sont « indépendantes de l’application du programme de lutte contre la crise humanitaire pour lequel nous avons été élus ».

Ferme sur ses engagements de campagne, Tsipras exclut toutefois le scénario d’une « rupture ». « Avec l’Europe, nous voulons une solution », a-t-il insisté. En fait, Athènes devrait se résoudre à demander aujourd’hui l’extension pour six mois du plan de « financement », mais avec un programme intermédiaire débarrassé des dispositions « toxiques » des mémorandums. L’accord sur un tel « programme pont », auquel Berlin s’est jusqu’ici opposé, laisserait à la Grèce, confrontée dès mars à des échéances de remboursement, du temps pour renégocier sa dette avec ses créanciers. « Nous travaillons dur pour aboutir à un accord loyal, mais qui exclut l’austérité, le mémorandum qui a ruiné la Grèce, la présence toxique de la troïka. Toute autre solution équivaudrait à achever notre pays. Nous ne sommes pas les mandataires du passé, nous ne sommes pas des gestionnaires des mémorandums, le salut ne vient pas en persévérant dans l’erreur », a-t-il expliqué devant les députés Syriza.

En coulisses, par crainte des conséquences en chaîne que provoquerait un « Grexit », une sortie de la Grèce de la zone euro, les pressions internationales sur Angela Merkel se sont renforcées ces derniers jours. À Athènes, les membres du gouvernement affichent leur optimisme sur l’issue des négociations, évoquant, en cas d’échec, l’éventualité d’un plan B.


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