Ouverture des barrages hydroélectriques à la concurrence« La France a abdiqué sous les coups de semonce de Bruxelles »

jeudi 1er janvier 2015.
 

Interview de Richard SIMON-LABRIC (CGT Energie territoire Sud-Ouest)

Comment s’est passé cette ouverture à la concurrence des barrages ?

En 2010 c’est bien Sarkozy qui a ouvert à la concurrence ce dossier. En 2013 la députée Marie-Noëlle Battistel (PS), rapporteur de la mission parlementaire sur la mise en concurrence des barrages hydroélectriques, parlait de solutions alternatives à l’ouverture à la concurrence du parc hydraulique français. Mais le 14 octobre 2014, dans le projet de loi sur la « Transition énergétique pour la croissance verte », les députés PS et EELV ont voté deux articles de loi qui ouvrent clairement les portes au privé d’une cinquantaine de concessions hydrauliques. La France devient ainsi le seul pays de l’union européenne à « abdiquer » sous les coups de semonce de Bruxelles. En optant pour la création de Sociétés d’Economie Mixte, la Ministre de l’Ecologie Ségolène Royal prévoit un tout autre scénario, confiant 34% de la gestion des ouvrages aux collectivités locales et 66% aux opérateurs. Lesquels ?

On peut s’interroger quand l’on voit qui exploite les concessions des autoroutes.

On peut s’interroger quand en 2010 une douzaine d’entreprises de 7 pays différents s’étaient manifestées !!

Par ailleurs, si EDF se porte bien candidat sur l’ensemble des appels d’offres, on peut légitiment se demander de quelle entreprise on parle. En effet, la désignation de Jean-Bernard Lévy à la tête d’EDF SA et la nouvelle composition du conseil d’administration (L. Parisot ancienne présidente du MEDEF) concomitante à l’adoption de cette loi interrogent sur l’avenir du service public de l’énergie.

Que pensez-vous du vœu du Front de Gauche à la dernière Assemblée du Conseil régional ?

Les électriciens et gaziers apprécient cette initiative du Front de Gauche car elle permet de tomber les masques. Le PS et l’UMP en votant contre cette motion montrent qu’ils ont des convergences de vue pour libéraliser le secteur de l’énergie (même si le groupe UMP se dit attaché à des valeurs gaullistes du service public).

Lors de l’action du 4 novembre, les électriciens ont manifesté en occupant les usines de production et en se rassemblant devant le Conseil Régional pour demander des explications sur leur vote aux différent groupes sur la motion déposée par le groupe Front de Gauche.

En conclusion, ces rencontres ont permis de mettre en place le principe de rendez-vous de travail en vue de préparer le débat au Sénat et à l’Assemblée Nationale avec l’UMP et le Front de Gauche. Le PS n’est pas intéressé sur le principe de rendez-vous. Le groupe EELV qui s’est abstenu sur la motion sera vu dans les jours à venir, car l’actualité dramatique de cette période (barrage de Sievins) a modifié les disponibilités des élus.

Merci au Front de Gauche de contribuer à lever le silence sur ce scandale

Quels sont les enjeux de cette ouverture à la concurrence de la concession des ouvrages hydroélectriques ?

La première conséquence est la fin du modèle de l’électricité et du gaz de service public à la Française. Celui-ci comprenait deux volets : un projet industriel national et un projet social fort, émancipateur et un formidable point d’appui pour tous les autres salariés.

Deuxième conséquence, un nouveau modèle facteur d’accroissement des inégalités énergétiques et d’enrichissement des industriels du secteur de l’énergie et des spéculateurs.

Alors que le récent rapport sur la précarité énergétique vient d’être publié, le choix du chèque énergie ne voit pas de source de financement pérenne. Alors que dans le même temps les dispositifs existants (tarifs sociaux) se voient abrogés.

Troisième conséquence, un avenir de plus en plus incertain pour l’ensemble des salariés des industries Electriques et Gazières et au –delà. Rien dans la loi n’est inscrit concernant les garanties sociales des travailleurs de notre secteur industriel.

Les filières de production, de transport et de distribution sont touchées par la volonté du gouvernement de transformer en profondeur cette industrie.

Il est une évidence que la fermeture annoncée de tranches thermiques, nucléaires et la privatisation des concessions hydrauliques auront des conséquences pour les emplois des sites concernés mais aussi pour les sous-traitants, les fournisseurs.

Si la loi est promulguée en l’état, il s’agit via la régionalisation et la territorialisation de l’ explosion d’EDF ,ERDF et GRDF. Il s’agit de régionaliser la gestion de l’énergie avec des régions riches en énergies et d’autres pauvres. Seule perspective de cette logique : plus de privatisation (ouverture de capital ), à terme suppression de la péréquation tarifaire, hausse des tarifs, plus de précarité énergétique, altération de la sûreté des réseaux électriques et d’approvisionnement.

UN GRAND GACHIS, UN DE PLUS !!


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