Eric Zemmour lâché par les siens

lundi 29 décembre 2014.
 

Le licenciement d’Éric Zemmour de i>Télé me pose problème. Peut-être surtout parce qu’il a lieu à i>Télé. Car sur cette chaîne de télévision, il était opposé à Nicolas Domenach. Il ne soliloquait donc pas comme à RTL. Et Nicolas Domenach ne lui laissait jamais rien passer. C’était donc au sens strict un débat, c’est-à-dire qu’il opposait des points de vue radicalement contraires. Ce débat était donc l’occasion de déconstruire les « arguments » de Zemmour. On peut regretter que progressivement il ait imposé ses thèmes et contraint Domenach à un éternel recommencement. Jusqu’au point de donner au face à face un air de disque rayé. Mais du moins entendait-on de quoi penser et s’interroger.

Bien sûr, la chaine i>Télé étant une entreprise privée, elle embauche et licencie qui elle veut, comme n’importe quelle entreprise privée. Je ne voudrai pas cependant, compte tenu de la part que j’ai pu jouer dans la situation avec la publication sur ce blog de l’interview donné par Zemmour en Italie, que l’on m’attribue une demande qui n’a jamais été la mienne. Je n’ai jamais cru à la victoire de nos idées par les méthodes de la censure et de la répression.

Le licenciement de Zemmour n’est pas utile au combat que je mène contre ses idées. Alexis Corbière, qui coordonne au PG la bataille culturelle contre les idées d’extrême droite, et moi, nous nous sommes exprimés par un tweet commun sur ce thème dans ce sens. Lui et moi étions en même temps conscient que nombre de nos amis affichaient une juste et saine jubilation de voir qu’une limite avait été atteinte et un adversaire pris à revers. Ils nous donnaient le point, à juste titre. L’interview italienne de Zemmour est la goutte avec laquelle nous avons fait déborder le vase ! Pour autant, pour l’honneur et l’identification de notre camp, il est indispensable de prendre des distances avec des licenciements de journalistes écartés du fait de leurs idées. Cette responsabilité doit rester le fait de sa corporation qui manifeste alors toute l’inanité de sa prétention à la neutralité. Elle prouve le contraire quand elle l’embauche en sachant qui il est et le laisse délirer des mois durant. Elle prouve le contraire quand elle le licencie au motif d’un écrit reproduisant simplement ce qu’il a déjà dit des dizaines de fois sur les antennes.

Plutôt que de blacklister Zemmour, ce qui serait utile et fécond c’est que le point de vue que je porte avec de nombreux intellectuels et polémistes de ma famille d’idées soit plus souvent et donc mieux entendus. Qu’il soit autorisé à être énoncé dans le calme et le sérieux, sans l’habituelle humiliation des séances de catch à cinq ou six « invités » face à autant de journalistes en embuscade avec des graphes bidons, vidéos surprises et autres répugnantes méthodes que l’on connaît. Que l’on nous donne notre place au lieu de nous confiner aux espaces résiduels ou au rôle de supplétifs de l’audimat, lanceur de saison, nom d’accroche pour générique et ainsi de suite. Que l’on puisse proposer des noms qui ne soient pas le mien pour des émissions ou des chroniques, sans obliger ceux qui le portent à dire des gros mots pour être remarqué et invité ! Si RTL veut à présent mettre à distance l’impact des diatribes d’extrême droite de Zemmour qu’il n’aggrave pas le mal en pensant le mettre à distance. Plutôt qu’un licenciement, une embauche ! Qu’il y ait enfin des chroniqueurs de notre famille, des polémistes de notre courant d’idée, comme un fait normal, qui va de soi. A part Raquel Garrido sur BFM, où sommes-nous ?

Bien sûr, rien ne va changer après cet épisode. Mais les malins qui voient la toile comme un lieu de relégation devraient se souvenir qu’à la fin les catacombes gagnent : Zemmour a reçu un coup fatal depuis un simple blog, amplifié par des petits malins qui croyait me flétrir comme d’habitude sans se rendre compte qu’ils propageaient une information dont il ne comprenaient même plus la violence humiliante pour des dizaines de milliers de nos concitoyens. Une violence face à laquelle ils étaient incapables de réaction ou de sensibilité alors que le même Zemmour en répétait les arpèges au fil des jours à la radio et à la télé, dans leur langue. Le sommet dans cet épisode est qu’il doit tout à un mot : « déporter ». Je l’ai repéré dans la question du journaliste italien et mis en scène par mon titre ou figurait le nom de Zemmour. Une technique ordinaire de la manipulation médiatique. « Machination ! », a hurlé Zemmour pris au piège de ses propres méthodes. Et combien de petits malins ont aussitôt repris leur treillis de combat pour insinuer immédiatement que j’aurai inventé le mot !

Nouvelle déroute ! C’est le journaliste italien qui reconnait qu’il l’a ajouté parce qu’il « n’avait pas la place » de mettre un mot plus long. Si j’avais payé qu’aurais-je pu avoir de plus disqualifiant pour cette profession qu’un tel aveu ? D’autant que cette défense revenait à absoudre le « polémiste » des infamies qu’il avait proférée dans le reste de l’interview. La déroute du parti médiatique est totale. C’est lui qui truque les mots pour faire du sensationnel au mépris de la parole qu’il rapporte. Ici c’est « déporter » comme ce fut « purification éthique » à mon sujet à la une de « Libération ». C’est lui qui propage une fausse nouvelle sans rien vérifier pour battre les œufs en neige. Et c’est enfin lui qui fait la censure et combat une idée en faisant taire celui qui l’émet ! Nous l’avons absolument et entièrement pris au piège de toutes ses tares : sensationnalisme, règlement de compte personnel, panurgisme, et ainsi de suite. Moralement, notre victoire est totale ! Cela me suffit si ceux qui me lisent l’ont compris et s’ils ont ainsi fortifié leur compréhension de la nature de la nuit que nous traversons, notre lampe à la main.

Sur le plan du combat contre l’extrême droite nous n’avons pas de raison de pavoiser. C’est peut-être le contraire. On se souvient de l’épisode Robert Ménard. Aigre et glapissant, l’icône de « Reporters sans frontières » incarna un temps la sainteté intrinsèque du parti médiatique. Les financements américains de l’association attestaient la bonne mentalité. Encensé en dépit des propos plus que confus qu’il tenait sur toutes sortes de sujets avant d’en tenir de si odieux à i>Télé (déjà), Ménard fut expulsé comme Zemmour vient de l’être. Déjà, la corporation laissa tout faire, tout dire jusqu’à la nausée. Cet organisateur d’une infâme agression contre les athlètes chinois à l’occasion du passage de la flamme olympique, reçut les pamoisons de toute la bonne société pour ce traquenard honteux dont n’importe quelle conscience libre comprenait l’ahurissante manipulation. Après un passage bien rémunéré par le Quatar, il finit comme héros et martyr de l’extrême droite, maire de Béziers, la ville de la crèche. Eric Zemmour est d’un autre calibre intellectuel que Ménard. Craignons qu’à présent il soit auréolé par l’acharnement du PS, combattant de la vingt-cinquième heure, qui a surgi au dernier moment pour exiger grossièrement son licenciement. Quelqu’un peut-il demander au PS de ne plus se mêler des choses qui comptent ?


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