Lettre de Christian Picquet ("LCR unitaire") à Pierre Zarka ("PC unitaire") sur la construction d’une force unitaire anti-libérale

samedi 3 mars 2007.
 

Tu le sais, la situation est on ne peut plus complexe. Si la rencontre de Montreuil a rassemblé la majorité des collectifs qui refusaient de s’incliner devant la politique de division de la majorité de direction de la LCR comme devant le coup de force de la direction du PCF, il en est d’autres qui sont restés en marge du processus relancé les 20 et 21 janvier, sans qu’il s’agisse pour autant de ces collectifs de circonstance dont la création n’eut d’autre objet, en prévision des assises de Saint-Ouen, que de créer de toutes pièces une « majorité » en faveur de MGB.

De surcroît, si l’actuelle coordination nationale bénéficie de l’adhésion de plusieurs courants politiques (celui des communistes unitaires, de la LCR unitaire, d’AlterEkolos, des Alternatifs, de CCAG, des Objecteurs de croissance et, à titre d’observateur, des républicains de gauche), il est douteux qu’elle soit ralliée, dans un proche avenir, par le PCF, la majorité directionnelle de la Ligue ou encore PRS. Dans ces conditions, il est impossible de se bercer d’illusions quant au fait que la coordination actuelle des collectifs serait désormais devenue l’unique structure légitime au sein de laquelle pourraient se poser - et se résoudre - toutes les questions relatives à la bataille de l’unité antilibérale.

En d’autres termes, et sauf à n’envisager avec ces organisations que des relations épisodiques, ou à croire que les discussions à venir à propos des législatives pourraient exclusivement se dérouler sous forme de rapports bilatéraux entre la coordination et les forces politiques en question, il s’impose de réfléchir à un cadre national souple, de liaison et d’échanges, où pourraient se retrouver les courants politiques partie prenante de Montreuil, les partis qui en étaient absents, les collectifs dans toute leur diversité (quelles que soient les options qu’ils retiennent pour cette présidentielle), les nouvelles réalités militantes apparues ces dernières semaines, ainsi que les personnalités ayant participé depuis le début à l’aventure du rassemblement antilibéral.

J’ai lu, ici et là, que ce type de cadre ne devrait éventuellement concerner que les courants politiques. Je crains que ce ne soit une fausse bonne idée. Tout ce qui pourrait recréer une coupure entre les sensibilités politiques organisées et les collectifs, ou accréditer l’idée qu’une telle coupure se traduirait à travers l’existence de deux structures séparées, me paraît de nature à entretenir la confusion, de fausses oppositions, voire un sentiment d’opacité sur les centres de décision hautement préjudiciable.

Peut-être le compte-rendu qui en a été fait prête-t-il à confusion, mais la dernière (l’ultime !) réunion du CIUN a tout à la fois enregistré * que cette structure avait perdu sa fonctionnalité originelle (du fait de la rupture intervenue en décembre),

* qu’elle ne pouvait dès lors plus assumer le rôle qui était le sien jusqu’à cette date vis-à-vis des collectifs,

* mais qu’il n’en fallait pas moins travailler à la formation d’une nouvelle structure permettant de poursuivre le dialogue et d’agir en commun chaque fois qu’il serait possible (dans les échéances politiques autant que dans les mobilisations sociales).

L’existence d’un tel cadre serait de nature à faciliter, entre toutes les composantes prêtes à s’y retrouver, les discussions visant à aboutir, aux législatives, à des candidatures unitaires labellisées ou, à défaut, à procéder à une répartition des circonscriptions (sachant, comme il a été justement décidé à Montreuil, que les collectifs restent souverains et qu’il leur appartient d’engager les démarches dès aujourd’hui pouvant amener au maximum possible d’accords locaux).

Pour vérifier qu’une telle structure soit possible, il a été décidé, non seulement de consulter l’ensemble des sensibilités concernées (à ma connaissance, les Alternatifs ont déjà fait connaître leur accord et désigné une délégation pour participer à un tel cadre), mais également de mettre en chantier un texte qui actualiserait l’appel du 10 mai et les conclusions essentielles du document « Ambition-Stratégie ». L’objet de la réunion convoquée le mardi 13 février n’est, dès lors, pas de perpétuer le CIUN, mais d’engager un tel processus..

A cet égard, l’idée n’est absolument pas de multiplier les espaces de confrontation unitaires. A l’inverse, rien ne doit, me semble-t-il, conduire à considérer que l’échec intervenu en décembre entérinerait définitivement les fractures avec la LCR et avec le PCF. Sur ce plan, au-delà de la question à propos de laquelle nous échangeons maintenant, toi et moi, je crois désormais indispensable de poser devant le mouvement des collectifs le débat que Claude Debons soulève dans une récente contribution, et que tu abordes à ton tour dans ton courriel : l’objectif reste-t-il la convergence de toute la gauche antilibérale ?

A travers certaines discussions, à Montreuil ou au sein de la coordination nationale, il me paraît que la tentation existe, chez certains de nos amis, de concevoir la campagne autour de José Bové comme un changement de configuration, qui amène à ne plus se poser, du moins dans l’immédiat, que la question de la délimitation d’un nouveau courant politique entre le PCF et la LCR. Comme toi, je considère que cette option, aussi légitime soit-elle, reviendrait à rétrécir considérablement l’ambition du rassemblement, à se situer très en deçà de la réponse nécessaire aux défis du moment politique présent. Je crois donc qu’il ne faudrait pas que « l’affaire du CIUN » qui, encore une fois, n’en est pas une, vienne obscurcir ou différer cette clarification indispensable.

Bien amicalement à toi.

Christian Picquet


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