Hollande n’a rien entendu ! Pour une politique de gauche maintenant !

mardi 20 mai 2014.
 

Texte de Frédéric Lutaud, membre du Bureau national du Parti socialiste

Après la sévère défaite des municipales François Hollande vient de nommer Manuel Valls premier ministre. En choisissant la figure la plus droitière du Parti socialiste pour conduire son gouvernement, nous mesurons combien le Président de la République s’est coupé des Français. Le message était pourtant clair. En faisant d’un scrutin municipal un moyen d’expression national, l’électorat de gauche a condamné le « Pacte de responsabilité » et sanctionné deux ans de montée continue du chômage de masse. Autrement dit, les Français attendent la politique de gauche pour laquelle ils ont voté.

Les Français n’ont pas voté pour une « politique de l’offre » et la baisse du « coût du travail » qui n’est que l’autre nom du dumping social. Ils n’ont pas voté, non plus, pour une politique d’austérité préconisant 50 milliards de coupe budgétaire. Partout celle-ci creuse un peu plus les déficits et provoque toujours plus d’exclusion. La revalorisation négligeable des minimas sociaux et l’allongement des cotisations retraite ne concourent pas à les rassurer D’ailleurs, la consommation des ménages recule maintenant pour le 4e mois consécutif. Avec l’apparition de 900.000 nouveaux pauvres, la crise s’étend un peu plus tous les jours.

Par contre, « l’adversaire », la finance reste bien présent. La séparation des banques de dépôt et des banques d’affaire promise n’a pas eu lieu. La taxe sur les transactions financières au niveau européen est mise à mal. Pendant ce temps, les 500 plus grandes fortunes économiques de France ont augmenté leur patrimoine de 25 % en 2013 et la somme des dividendes versés par les entreprises est deux fois et demi supérieure à celle consacrée à l’investissement. Tout cela sous un gouvernement socialiste.

Le plus grave reste encore l’échec de la politique de l’emploi qui n’apporte aucune solution crédible au chômage de masse. « Les chiffres du chômage vont dans la mauvaise direction » a admis le ministre du travail Michel Sapin mais « nous n’allons pas changer de direction ». Pourtant, nous savons que les 30 milliards d’exonérations fiscales accordées aux entreprises ne permettront jamais l’embauche massive pour surmonter le chômage de masse. L’inconséquence de cette politique face à la préoccupation n°1 des Français est suicidaire. Elle ne peut que pousser dans les bras du Front national une population livrée à la désespérance.

En choisissant de poursuivre plus en avant le « Pacte de responsabilité », Manuel Valls tourne définitivement le dos à l’électorat de gauche et aux militants du Parti socialiste qui ont fait la campagne pour le président de la République.

Pour l’essentiel de son discours de politique générale, nous pouvons retenir 36 milliards de cadeaux fiscaux pour les entreprises qui vont venir gonfler pour les profits des actionnaires. La suppression de toutes cotisations sociales au niveau du Smic va créé des « trappes à bas salaires » et multiplier les travailleurs pauvres. Des allégements fiscaux pour les plus modestes sont prévus au lieu de refonder un impôt citoyen et progressif, sans que ne soit explicité leur financement, si ce n’est, nous le devinons, indirectement par les ménages. Surtout, quand la poursuite du plan d’austérité budgétaire de 50 milliards accompagné d’un « nouveau projet de loi de finances pour des économies nouvelles » vont démanteler les recettes fiscales. Et pour couronner le tout, une confiance aveugle en la croissance en totale contradiction avec les ambitions écologiques affichées par le Premier ministre. Bref, la Ve République fait la démonstration magistrale de son mépris à l’égard d’un parlement contestataire et d’une population qui vient de sanctionner dans les urnes deux ans d’exercice du pouvoir. Le changement passe aussi par le changement des institutions, prochaine bataille du Parti socialiste.

C’est avec la plus grande inquiétude que nous entamons la deuxième partie du quinquennat. Car le modèle de développement défendu par le gouvernement n’est pas seulement à bout de souffle, il rentre aussi en contradiction avec les enjeux de l’époque. Le chômage de masse ne pourra être vaincu sans partage du travail, la crise écologique ne trouvera d’issue sans un engagement résolu dans la transition énergétique et la mise en œuvre d’une économie circulaire. Enfin, les investissements d’avenir ne pourront avoir lieu sans que soit arraisonnée la finance comme l’avait promis François Hollande. Ce qui implique une réorientation de l’Europe et un autre pilotage de la masse monétaire.

Nombreux sont les membres du Bureau national qui n’ont cessé d’alerter la direction du Parti socialiste et d’interpeller les ministres du gouvernement. Un texte unitaire « Il n’y a pas qu’une seule politique possible » a rassemblé la signature de plusieurs sensibilités du parti. Rien n’y a fait. La direction du Parti socialiste reste sourde à nos revendications.

Après la nomination de Jean-Pierre Jouyet à l’Élysée et Manuel Valls à Matignon, nous assistons à la candidature de Jean-Christophe Cambadélis, plus que sujette à caution. Changer les hommes pour que rien ne change met en péril l’avenir du Parti socialiste. Les mois à venir seront ceux de la mobilisation militante et du rassemblement des forces de gauche, à moins que ne les devance l’embrasement des luttes sociales.


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