Ca sent le pétrole au large du Cameroun

lundi 12 février 2007.
 

La Cameroon Oil Transportation Company (Cotco), filière du consortium américano-malaisien dirigé par ExxonMobil, a reconnu, le 19 janvier, qu’une fuite accidentelle d’hydrocarbures avait eu lieu quelques jours plus tôt à une douzaine de km au large des côtes de la ville de Kribi. L’oléoduc qui relie le Tchad au Cameroun, exploité par Cotco, a eu une fuite en pleine mer. Or il n’a été mis en service qu’en 2003. Un peu plus de trois ans plus tard, c’est d’ores et déjà la fuite ? Rassurant pour l’avenir. Visiblement, ce serait une défaillance du système d’évacuation d’eau qui serait à l’origine de l’incident.

La filiale d’ExxonMobil est incapable de chiffrer la quantité de pétrole déversée dans l’océan, mais bien sûr elle est "minime" d’après la Cotco. Quand une pollution a lieu et qu’on n’arrive pas à en évaluer l’ampleur, elle est toujours minime pour son responsable. Les habitants de Kribi sont extrêmement inquiets, même si aucune galette noire n’a été aperçue sur les plages camerounaises.

Trois ans avant le début de la construction de cet oléoduc, soit en 1997, les ONG locales évoquaient déjà pourtant les graves risques environnementaux que faisait courir à toute la région ce projet. A l’époque, elles avaient même tenté de convaincre la Banque mondiale de ne pas financer cet oléoduc. Celle-ci, n’écoutant comme d’habitude que la loi des monnaies sonnantes et trébuchantes, l’avait toutefois financé en partie.

Long de 1.070 km, dont 890 en territoire camerounais, le pipeline Tchad-Cameroun a été inauguré en 2004. Il permet d’évacuer sur la côte Atlantique le pétrole pompé par le consortium d’Exxon Mobil dans les gisements de Doba (sud du Tchad). Cet acte a marqué officiellement la phase d’exploitation du pétrole tchadien par les multinationales Exxon Mobil, Chevron et Petronas.

Cet oléoduc Tchad-Cameroun constituait le plus grand projet de développement jamais réalisé en Afrique Subsaharienne, censé amélioré la qualité de vie des populations riveraines des deux pays concernés. Le plus "drôle" dans cette affaire, c’est qu’il était présenté comme un modèle du genre en matière de développement et de réduction de la pauvreté. Et bien c’est une réussite ! Les Tchadiens et Camerounais, en plus des problèmes économiques majeurs qu’ils subissent, ont donc droit maintenant à de nouveaux ennuis grâce à la Banque mondiale et à Exxon Mobil, la pollution massive, dont bientôt peut-être une marée noire.

Le maire de Kribi, Grégoire Mba Mba, a de plus appris l’incident dans la presse et la Cotco a mis cinq jours à reconnaître qu’il y avait eu une fuite. Ce sont les récits des pêcheurs, parlant de larges nappes de pétrole se déplaçant sur l’océan, qui ont commencé à provoqué un début de panique dans la population. Le gouvernement camerounais pour sa part, toujours pas doté d’un plan national d’urgence contre les incidents pétroliers, alors que c’était prévu dans le projet de l’oléoduc, n’a pas vraiment réagi. Ajoutons que 75% des habitants de Kribi vivent de la pêche (photo), et que depuis que le pipeline est là, ils trouvent de moins en moins de poissons.

En voilà une réussite ! Bravo à la Banque mondiale et bravo aux multinationales d’hydrocabures. Alors que se réunit en ce moment même à Paris le GIEC (groupe d’experts sur l’évolution du climat) avec des dizaines de scientifiques spécialistes du réchauffement climatique, on peut constater que les grands de ce monde s’occupent de notre avenir, un avenir fait de baignades dans une mare de pétrole par une température moyenne de 50°C.


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