Municipales italiennes : La gauche perd moins d’électeurs que la droite et emporte tous les chefs lieux concernés

samedi 15 juin 2013.
 

La gauche gagne Rome et toutes les grandes villes en jeu, mais l’abstention domine le scrutin municipal partiel italien.

Rome a choisi la gauche. Dans la plus symbolique des municipalités ou les Italiens étaient appelés aux urnes, le challenger Ignazio Marino a battu au second tour le maire sortant de droite, Gianni Alemanno, avec 64 % des voix. Les électeurs ont sanctionné sans appel le bilan d’Alemanno. Néofasciste radical passé dans le parti de Berlusconi, Alemanno avait enrôlé dans sa junte municipale de nombreux nostalgiques du Duce au casier judiciaire chargé. Sous son autorité, le trafic chaotique de la Ville éternelle n’a fait qu’empirer. La municipalité n’a pas su faire face à une chute de neige de 5 centimètres. Son mandat a été émaillé de scandales de népotisme, notamment dans les transports publics municipaux. Rome a dû renoncer à la candidature aux Jeux olympiques de 2020 et n’a eu aucune initiative culturelle digne d’une grande capitale européenne. Le seul "succès" dont a pu se prévaloir Alemanno durant sa campagne est l’expulsion de 61 000 immigrés roms...

Âgé de 58 ans, chirurgien de renommée internationale qui a effectué une partie de sa carrière médicale aux États-Unis, Ignazio Marino sera le nouvel édile de Rome. Entré en politique en 2006, il se situe à l’aile gauche du Parti démocrate (PD). Bien que catholique, il milite pour le testament biologique (la possibilité pour tout un chacun de laisser des "consignes" sur sa fin de vie) et pour l’interruption de l’alimentation artificielle des patients plongés dans un coma définitif. Un argument qui avait divisé la péninsule durant la longue agonie d’une jeune femme, Eluana Englaro. Le Vatican avait alors dénoncé "l’euthanasie par omission" prônée par Ignazio Marino. Son élection démontre que le poids politique de l’Église n’est plus ce qu’il était à l’ombre de la basilique Saint-Pierre. La gauche n’a pas gagné, elle a moins perdu que la droite

Mais on ne votait pas qu’à Rome. La gauche s’est imposée dans les 11 chefs-lieux de département en jeu, de Brescia à Trévise, de Sienne à Lodi. Le scrutin prend donc une signification politique nationale. La droite encaisse une défaite cuisante. Elle paie l’effondrement de la Ligue du Nord, décimée par les scandales financiers de la famille Bossi. C’est Silvio Berlusconi qui représente plus que jamais toute la droite italienne, et les sondages le donnent en progression. Le Cavaliere, qui avait senti la défaite arriver, ne s’était pas impliqué dans ce scrutin local qu’il souhaite oublier au plus vite.

Le résultat met en revanche du baume au coeur d’une gauche encore traumatisée par son échec aux élections législatives du mois de mars et en pleine crise d’identité. Son succès s’explique par la déroute du Mouvement 5 étoiles au premier tour. Orphelins de leurs candidats, les électeurs grillini ont voté en masse pour le PD au second tour. Mais rien n’indique qu’ils ont définitivement abandonné le mouvement protestataire de Beppe Grillo.

Le scrutin est également caractérisé par un taux d’abstention jamais atteint dans un pays où l’on vote traditionnellement beaucoup. Ainsi, moins d’un électeur sur deux s’est rendu aux urnes à Rome pour le second tour. Cela signifie qu’Ignazio Marino n’a obtenu que les deux tiers des voix qui s’étaient portées sur les précédents maires de la Ville éternelle. La gauche n’a pas gagné, elle a moins perdu que la droite. Cette instabilité devrait jouer en faveur du gouvernement de coalition d’Enrico Letta. Personne n’a intérêt à provoquer sa chute pour affronter un scrutin national dont le résultat est totalement imprévisible.

Dominique Dunglas


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