"Le combat de Chavez n’est pas mort avec lui"

vendredi 15 mars 2013.
 

INTERVIEW - Alexis Corbière, secrétaire national du Parti de gauche et proche de Jean-Luc Mélenchon, réagit pour Metro à la mort d’Hugo Chavez. Il refuse que l’on "caricature" le président vénézuélien.

Jean-Luc Mélenchon a tenu un point presse très solennel sur la mort d’Hugo Chavez mercredi, avant un rassemblement organisé en fin d’après-midi à Paris. C’est un jour de deuil pour le Parti de gauche ?

Oui, le deuil politique d’une grande personnalité. Hugo Chavez meurt, mais comme l’a dit Jean-Luc, le combat qu’il portait ne disparaît pas avec lui. Chavez s’inscrit dans la lignée des figures sud-américaines, de Bolivar à Allende, Che Guevara...

Qu’est-ce que vous retenez de son action ?

L’œuvre sociale réalisée dans son pays : la pauvreté, l’analphabétisme ont reculé. Et surtout, la participation électorale a augmenté. Entre 2003 et 2006, on est passé de 11 à 16 millions d’inscrits sur les listes électorales. Cet homme, qui faisait de la pédagogie politique à la télévision, a remobilisé les Vénézuéliens. Dans ses discours, il leur parlait d’histoire, de géopolitique. C’était du haut niveau, d’une qualité politique bien supérieure à ce que nous faisons en France. Il s’exprimait de manière populaire, avec humour, parce qu’il savait que c’était comme cela que des millions de femmes et d’hommes se réintéresseraient à la politique, et que sans cette implication il ne pourrait rien faire.

Peut-on dire qu’il est un modèle pour le Parti de gauche ?

On n’aime pas ce mot. Le Venezuela est un pays particulier, avec des caractéristiques différentes de celles de la France, et personne ne se prend pour Chavez ou quoi que ce soit. En revanche, il est une source d’inspiration. Et la mission du Parti de gauche, c’est aussi de rétablir la vérité et de refuser la caricature. Je suis allé au Venezuela et j’ai été frappé par le fait qu’il y a un pluralisme politique dans ce pays. Quand vous allez dans un kiosque à journaux, la presse anti-chavez est la plus présente. En France, on a raconté que c’était une dictature, mais c’est stupide.

"Si le modèle de démocratie, c’est Chavez, pour moi c’est non merci et au revoir", déclarait Daniel Cohn-Bendit cet été, tandis que des ministres socialistes critiquaient également le voyage en Amérique latine de Jean-Luc Mélechon...

Daniel Cohn-Bendit est un crétin ! C’est quoi son modèle ? Guy Verhofstadt ? Le fait qu’il y ait eu plus de 60% d’abstention lors des dernières européennes, ça ne lui pose pas de problème ? Ce monsieur n’y connaît pas grand chose en réalité. Au Venezuela, il y a un processus civique, citoyen, rien n’est possible sans passer par les urnes. Ce que j’observe par ailleurs, c’est que l’Amérique latine a longtemps passionné la gauche française, y compris les socialistes. Quand François Mitterrand a été élu premier secrétaire du PS en 1971, son premier déplacement a été le Chili de Salvador Allende. Aujourd’hui, dans le petit monde socialiste, ils prennent tout cela pour de la vaste rigolade : pour eux un dirigeant d’Amérique latine, c’est quasiment le général Tapioca des aventures de Tintin. Au Front de gauche, on va sur place, on regarde et on essaie de comprendre.

Est-ce qu’il y a du Chavez en Mélenchon ?

Il y a peut-être du Mélenchon en Chavez... Non, encore une fois, ça n’a aucun sens. En revanche, il y a une affection indiscutable de Jean-Luc vis-à-vis de cet homme, et je crois savoir qu’elle était réciproque. Mais ce qui nous intéresse, c’est que le combat de Chavez n’est pas mort avec lui. Rafael Correa réélu en Equateur, Evo Morales en Colombie, Pepe Mujica en Uruguay... Cette Amérique latine "rouge" continue à se développer, à aller à rebours des politiques d’austérité, à tenir tête à l’impérialisme américain. Et nous considérons que nous sommes un des maillons de cette chaîne qui traverse l’océan.


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