En ce mois de novembre 2012, le volet éducation du budget est examiné à l’Assemblée nationale. Dans un océan d’austérité, ce pourrait être l’occasion pour le gouvernement d’afficher une rupture radicale avec l’ère Sarkozy. Au lieu de ça, les enseignants sont appelés par leur ministre à « participer à l’effort redistributif » et le garrot se resserre autour du budget de l’Education nationale. L’occasion serait pourtant belle de poser un acte politique fort tout en « redistribuant » la rente de quelques-uns au profit de l’intérêt général : il suffit pour cela d’allouer l’argent public à l’école publique.
Si l’on s’en tient au seul budget de l’Etat, ce sont plus de 8 milliards d’euros d’argent public (10 milliards avec les collectivités locales) qui vont être dévolus en 2013 à l’enseignement privé, que ce soit pour la rémunération des 130 000 professeurs qui enseignent dans le privé ou pour le forfait d’externat. Depuis 1959 et la loi Debré, non seulement la prise en charge de ce dernier se fait « dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l’enseignement public », mais depuis la loi Guermeur de 1977, il est majoré d’un pourcentage permettant de couvrir les charges sociales et fiscales afférentes aux rémunérations et charges diverses des personnels non enseignants de droit privé.
Ça suffit !
Faute de ruptures, la continuité se prolonge en s’approfondissant. A la rentrée 2012, si les 60 000 postes promis par François Hollande se faisaient globalement attendre, le privé pouvait s’enorgueillir d’avoir récupéré 3 210 postes depuis le 6 mai. Vincent Peillon a succombé aux sirènes du lobby de l’enseignement catholique quand bien même 30% des classes du privé ont moins de 19 élèves et 15% moins de 15 élèves. Dans le même temps, l’enseignement public doit se serrer la ceinture et faire face à des classes toujours plus surchargées.
Ça suffit ! Plutôt que chercher à faire des économies sur le dos de nos concitoyens pour nourrir la finance, ce gouvernement doit commencer par rendre à la collectivité ce qui appartient à tous. L’argent public provient d’une source universelle : les contribuables, quelles que soient leurs orientations religieuses ou philosophiques. Cette manne se doit d’avoir un but universel conforme à sa nature même : le financement des services publics, de la solidarité redistributrice et de la protection sociale. L’application de ce principe doit s’effectuer pleinement en faveur de l’Ecole publique et laïque, seule dépositaire de cet intérêt général.
Les dévots de l’enseignement privé peuvent se cacher derrière une équité factice, elle ne résiste pas à l’étude des faits. Seule l’école publique est gratuite quand l’école privée fait payer les familles ; seule l’école publique est tenue d’accueillir indistinctement tout enfant quand le privé peut choisir ses élèves ; seule l’école publique est laïque quand la loi Debré garantit aux établissements privés le maintien de leur « caractère propre » ; seule l’école publique est assujettie aux obligations de service public quand l’école privée n’est pas tenue de re-scolariser un élève exclu…
François Coq et Francis Daspe
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