François Hollande est-il déjà en apesanteur ?

samedi 15 septembre 2012.
 

Ce dimanche soir 10 septembre, François Hollande a voulu compenser ses reculs sur ses petites promesses de campagne par un ton très volontariste :"j’accélère", inversion de la courbe du chômage "d’ici un an", « deux ans pour redresser le pays »...

2) François Hollande sur TF1 : Pas de changement de cap dans la marche forcée à l’austérité

Le président de la République a confirmé sa volonté d’appliquer à la France un plan d’austérité sans précédent de 30 milliards d’euros (soit deux fois le plan Fillon de fin 2011) et la poursuite de la réduction des effectifs de la fonction publique, pourtant déjà saignée à blanc, hors éducation, justice et ministère de l’intérieur.

Le cap de la saignée est donc maintenu. Mais l’expérience a démontré que les saignées étaient souvent mortelles.

Pour ce qui est du redressement de la France, le discours de François Hollande a cette fois clairement pris un nouveau cap : celui qui consiste à favoriser le patronat au détriment des travailleurs. En filigrane de son intervention, on a pu entendre flexisécurité et augmentation de la CSG plus une fiscalité écologique sur laquelle il ne s’est pas étendu.

Et s’il a eu des mots fort aimables pour les chefs d’entreprises, les salariés ont été les grands oubliés. Les travailleurs auront compris que l’état de grâce était terminé : lorsque les plans sociaux sont engagés, il est trop tard pour intervenir a dit le président. Les salariés de PSA, Sanofi et des autres entreprises en butte aux plans sociaux savent donc maintenant qu’ils ne peuvent compter que sur leur lutte. de même pour la loi contre les licenciements dans les entreprises distribuant des bénéfices.

C’est à un agenda de l’enlisement social-libéral et non à celui du redressement industriel auquel nous avons eu le droit.

Mais à quelques semaines de l’examen par le Parlement du traité européen de l’austérité, il est paradoxal que ce traité ait été le grand absent du discours.

Pourtant, en persévérant dans sa volonté de respecter les diktats libéraux de l’austérité, en psalmodiant son ode à la croissance sans interroger notre système économique, François Hollande maintient le cap de la récession.

Aussi, l’urgence n’est pas au compromis patronat-travailleurs mais au rejet du traité européen pour permettre le passage à une meilleure répartition des richesses et à la conversion écologique de notre économie.

Martine Billard, co-présidente du Parti de Gauche

1) François Hollande se donne deux ans de "redressement"

Le président de la République a annoncé, dimanche sur TF1, qu’il allait "fixer un agenda du redressement" de la France en deux ans.

« J’accélère ». Pour signifier qu’il entend la souffrance des Français face à la crise, entendre les sondages qui virent au rouge, le chef de l’Etat bouscule le calendrier car « l’inquiétude est là », concède-t-il lors de son interview sur TF1 hier soir. « En situation de combat », dit-il, et intégrant une prévision de croissance de 0,8% en 2012, soit moins encore que le 1% prévu jusqu’ici, il prend un engagement, « d’ici un an », assure-t-il, la courbe du chômage, repartie à la hausse en franchissant la barre des trois millions de chômeurs sera inversée.

Il y avait urgence pour François Hollande. Sondage après sondage, le moral des Français plonge tandis que leur désillusion sur la capacité du chef de l’État à tenir ses promesses grandit. « Dans cette période marquée par la montée des prix, les plans sociaux et la hausse du chômage, la chronologie des besoins des Français ne correspond pas à celle de l’action gouvernementale », reconnaissait-il vendredi. Hier soir, reprenant ses engagements de campagne, c’est dans le ton qu’il a souhaité faire la différence, et dans le temps : il se donne « deux ans pour redresser le pays », fixant « cap et rythme ». « Tout sera engagé, décidé d’ici la fin de l’année 2013, pour des résultats dans ce que j’appelle l’Agenda 2014. » "Je sais où je vais. Je le dis aux Français : j’assumerai toute la responsabilité, je m’expliquerai régulièrement devant les Français", a dit le chef de l’Etat. Même s’il dédouane Bernard Arnault au passage, « il prendra sa part » dans le patriotisme économique assure-t-il.

Six Français sur dix plutôt mécontents

L’urgence se manifeste : selon une enquête Ifop pour le Journal du dimanche, ils ne sont plus que 48 % à estimer qu’il tient ses engagements de campagne, contre 57 % au mois d’août. Selon un autre sondage, BVA pour le Parisien, près de six Français sur dix (59 %) se disent « plutôt mécontents » des débuts du quinquennat, Ils sont 55 % à juger que François Hollande « ne va pas assez loin dans le domaine des réformes » et 57 % qu’il « ne répartit pas équitablement les efforts demandés entre tous les Français ». Selon le baromètre mensuel BVA publié jeudi, 67 % (+ 13 points) disent être plutôt moins confiants en l’avenir de la situation économique de la France. « Parce qu’il y a la situation européenne (…), la souffrance sociale des Français, parce qu’il y a la montée du chômage, il doit redéfinir le cap », a dit vendredi sur 
Canal Plus un proche du président, le ministre du Travail Michel Sapin.

Le président de la République a concédé hier soir des aménagements à la taxe exceptionnelle de 75 % sur les revenus dépassant 1 million d’euros : CSG et CRDS seront inclues, et feraient baisser le taux réel à 67%. La Cour des comptes l’a dit : « il faut trouver 33 milliards d’euros. » François Hollande détaille : « 10 milliards par des économies budgétaires ». Trois ministères « prioritaires » ne seront pas inquiétés : Education, Sécurité (Intérieur) et Justice. « Tous les autres ministères seront mis à contribution. Nous ne dépenserons pas un euro de plus en 2013 qu’en 2012, et nous stabiliserons les effectifs de la Fonction publique. » 10 milliards seront prélevés sur les entreprises, par le rabotages des niches fiscales. Enfin 10 milliards sur les ménages, « notamment les plus favorisés », avec l’instauration d’un taux marginal de 45% pour les revenus supérieurs à 150 000 euros par part.

Pour autant, l’accélération est une illusion d’optique, pas un réel infléchissement de la politique menée. Ainsi, "les exonérations de cotisations sociales pour les heures supplémentaires demeureront dans les entreprises de moins de vingt salariés", a déclaré le président sur TF1, ajoutant que "les heures supplémentaires demeureront. Elles seront toujours payées davantage que les heures normales ». Au fond, pour faire accepter cette politique, il compte sur ces 64 % des Français « prêts à faire des efforts pour redresser les comptes », selon un sondage Ifop pour Sud Ouest Dimanche, qui témoigne cependant d’un léger tassement par rapport à une précédente enquête publiée fin juillet (67 %).

Pour une réforme du marché du travail

« Il n’y a qu’une priorité, c’est l’emploi : ça commence avec les emplois d’avenir, ça va continuer avec les contrats de génération, ça va se 
prolonger avec la négociation sur la sécurisation des parcours professionnels  », avait détaillé le chef de l’État à l’issue d’une visite vendredi à l’usine d’embouteillage d’Évian. Le gouvernement a donné le coup d’envoi de cette 
délicate négociation qui devra, d’ici à mars 2013, proposer une réforme en profondeur du marché du travail, en 
inventant une « voie » entre la « déréglementation et la surréglementation ». Une voie étroite, quand il faudrait une voie nouvelle.

Lionel Venturini et Grégory Marin, L’Humanité


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message