« Clairement, ce traité est le même qu’hier » (Barbara Romagnan, députée PS)

samedi 22 septembre 2012.
 

François Hollande avait annoncé sa volonté de renégocier le traité budgétaire européen. 
Qu’en est-il de celui qui sera proposé, en octobre, au vote des parlementaires  ?

Barbara Romagnan. Clairement, ce traité est le même qu’hier. Il va être présenté au Parlement, ainsi qu’une loi organique. Le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, va prononcer une déclaration sur les perspectives européennes. Mais fondamentalement, même si certains pensent que des avancées ont été obtenues et que je récuse le terme de trahison que d’aucuns pourraient porter à l’encontre de François Hollande, il n’en demeure pas moins que, pour moi, ce traité est inchangé.

Que peuvent être selon vous les conséquences politiques, économiques et sociales d’un tel traité en France  ? Peut-il constituer un frein 
au changement  ?

Barbara Romagnan. C’est justement parce que nous pensons qu’il aura des conséquences négatives que nous serons quelques-uns, pas très nombreux, à voter contre ce traité. Les engagements de François Hollande étaient construits sur la base d’une perspective de croissance de 1,7 % et d’un objectif de ramener le déficit public à 3 % du produit intérieur brut en 2013. Or – et François Hollande le reconnaît lui-même – la croissance sera au-dessous de 1 %. Il va donc falloir prendre des mesures de réduction des investissements prévus ou augmenter plus qu’envisagé les prélèvements, ou même les deux. Et, indépendamment de la situation sociale que cela crée, on ne pourra pas respecter les engagements que nous avons pris devant les Français durant la campagne électorale en matière de pouvoir d’achat, d’amélioration des conditions de vie. Il risque donc d’y avoir une dégradation de la situation sociale. Cela pose problème, car ce n’est pas pour cela que nous avons été élus.

Le pacte de croissance obtenu par François Hollande modifie-t-il votre opinion 
sur le traité lui-même  ?

Barbara Romagnan. Non, car si l’ambition est de résoudre le problème des déficits, c’est l’inverse qui va se produire. Penser que l’on pourra régler les problèmes de déficits et relancer la croissance en menant des politiques d’austérité est une erreur. Cela va conduire à la récession, donc à l’augmentation des déficits et en aucun cas résoudre les problèmes économiques et sociaux que nous connaissons aujourd’hui.

Dans un propos récent, Jean-Marc Ayrault, premier ministre, affirmait que voter contre le traité conduirait à «  affaiblir la France  ». Comment réagissez-vous  ?

Barbara Romagnan. Je réfute cet argument. Ce n’est ni affaiblir la France ni même le président de la République que de voter contre un traité qui nous posera de grandes difficultés pour mettre en œuvre la politique de changement pour laquelle nous avons été élus. 
Au contraire.

Sur une telle question, avec de tels enjeux, ne serait-il pas nécessaire que soit organisé un vaste débat public avec la possibilité pour les Français de se prononcer par référendum  ?

Barbara Romagnan. Bien sûr, le débat avec les Français est 
indispensable. Mais mesurons que la discussion parlementaire participe de ce débat, devant et avec les Français. Je ne suis pas opposée par principe au référendum. Mais les parlementaires ont aussi leur responsabilité. Nous avons été élus il y a quelques mois, et cette question de l’Europe est l’une de celles qui fut au cœur des campagnes électorales et du vote des électeurs. D’autre part, les référendums sont parfois détournés de leur objectif. Le débat doit se mener au Parlement et chacun devra prendre ses respon-sabilités.

Entretien réalisé par Max Staat, L’Humanité

Conférence de presse Un Monde d’Avance : appel des « députés pour le changement »

Conférence de presse commune gauche du PD français et gauche du SPD allemand ce mercredi 25 juillet 2012. " Pour pouvoir mettre en œuvre ce pourquoi on a été élu, il est nécessaire, à défaut d’être suffisant, de faire sauter un certain nombre de verrous libéraux en Europe."

Barbara Romagnan (députée du Doubs) :

La présence du représentant de Forum DL 21 prolonge et renforce notre démarche engagée avec la signature commune de l’ « Appel des députés pour le changement », présenté en préambule de notre contribution. Celle-ci ne correspond évidemment pas à une simple et pauvre volonté de se démarquer, encore moins une façon de marquer une défiance. Nous sommes tous loyaux et en plein soutien du gouvernement. Mais la vie du Parti socialiste ne se résume pas à la vie du gouvernement. Notre analyse est que la liberté de ton qu’il y a pu avoir pendant le débat des conventions ou les primaires socialistes, ont permis de faire gagner la gauche. Faire vivre le débat, c’est donc une manière d’être utile à la gauche, au gouvernement, à François Hollande, de faire en sorte que cette expérience de gauche soit réussie. Nous avons donc souhaité verser aux débats du congrès un certain nombre de réflexions et de propositions.

Faire sauter le verrou libéral en Europe

Pour pouvoir mettre en œuvre ce pourquoi on a été élu, il est nécessaire, à défaut d’être suffisant, de faire sauter un certain nombre de verrous libéraux en Europe. L’Europe n’est pas libérale par nature, elle l’est par des décisions et des choix politiques ce qui signifie qu’on peut inverser cette tendance. Pour cela, on a évidemment besoin de trouver des marges de manœuvre et notre stratégie, c’est notamment de créer des alliances en Europe, en particulier avec les Allemands, acteurs majeurs de la construction européenne.

Le calendrier de résorption de la dette n’est pas raisonnable. Bien sûr, il faut résorber la dette, mais notre sujet c’est celui du calendrier et des priorités. Le programme sur lequel s’est engagé François Hollande s’appuyait sur une perspective de croissance qui était aux alentours de 1,7. Aujourd’hui on parle plutôt de 1,2 voire moins. L’agenda européen de résorption du déficit étant extrêmement contraint, il ne permettra pas de respecter les engagements pris lors de la campagne. Il n’est pas raisonnable de s’astreindre à un tel calendrier.

Pour une Europe démocratique.

Européens fédéralistes convaincus, nous n’avons pas de souci avec le dessaisissement de la souveraineté nationale au profit de la souveraineté européenne mais à la condition que celle-ci soit démocratique. Le problème aujourd’hui, c’est qu’un pouvoir national démocratique, résultat d’une élection, serait transféré à une autorité sans aucune légitimité en la matière justement parce que non élue. C’est bien aux citoyens de décider ce qu’on doit faire des deniers publics et des politiques qui vont être menées.

En France aussi, changer le rapport au pouvoir.

Le congrès est aussi pour nous l’occasion de réaffirmer des choix forts qui ne sont pas impactés par le verrou libéral. Parmi ces options fondamentales sur la question du rapport au pouvoir et de la démocratie, le non-cumul des mandats est un élément hautement symbolique. La démocratie ne se résume pas à cela, mais pour re-crédibiliser la politique, il faut avoir un soutien citoyen. Cela passe notamment par le respect de cet engagement et sa mise en œuvre urgente sans attendre encore 2014, 2015 ou je ne sais combien.

2) Pacte budgétaire européen : la gauche du PS pose ses conditions

Considérant que le pacte budgétaire européen n’a pas été renégocié, les animateurs d’Un monde d’avance, l’aile gauche du PS, veulent faire bouger les lignes et menacent, sinon, de ne pas ratifier le traité.

Si, au plan européen, le « verrou libéral conservateur » ne saute pas, il sera difficile « de tenir les engagements sur lesquels les Français nous ont élus ». C’est ce qu’a expliqué mercredi, lors d’une conférence de presse, la députée socialiste Barbara Romagnan, proche du ministre Benoît Hamon et animatrice, à ses côtés, du courant de la gauche du PS Un monde d’avance. Elle exposait, en présence d’élus de l’aile gauche du parti social-démocrate allemand, le SPD, la contribution intitulée «  Réaliser le changement  » dont ils sont signataires en commun.

[Barbara Romagnan au côté de Benoit Hamon]

Et pour cause, l’Europe y tient une place centrale, notamment pour souligner que «  le verrou conservateur emprisonne plus que jamais les choix politiques des États  ». Le texte propose donc de faire «  sauter deux verrous  »  : le premier, celui du pouvoir de la Commission européenne, «  cet organisme supranational non élu  » qui «  avalisera le budget de chaque État et donc ses politiques 
publiques  »  ; et le second, celui du «  traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance  » qui «  incite les États à inscrire dans leur Constitution ou dans une loi organique (une règle d’or) d’équilibre budgétaire  ». D’ailleurs pour Veit Swoboda (SPD), «  ce pacte est politiquement faux, économiquement aberrant et socialement injuste  ». Il rappelle que 23 députés du SPD sont signataires de la contribution avec Un monde d’avance et ont voté non au Bundestag, le parlement allemand, lorsque ce traité fut ratifié.

Que le débat ait lieu au sein du ps

Pour Barbara Romagnan, cette contribution commune «  montre que notre démarche ne vise pas à se démarquer du gouvernement ou à être déloyal avec Jean-Marc Ayrault  » mais se propose pour objectif que «  le débat ait lieu au PS car, pour réussir le changement, des choses doivent changer en Europe  ». Considérant qu’il sera «  difficile de résorber les déficits aux rythmes proposés  » et que, malgré «  d’importantes avancées en matière de croissance obtenues par François Hollande, le pacte budgétaire européen n’a pas été renégocié pour l’instant  », la députée PS du Doubs avertit  : « Si rien ne bouge, nous pourrions ne pas ratifier celui-ci lors d’un vote au Parlement.  » Cependant, la députée veut croire que, d’ici là, le débat pourra faire bouger les lignes. «  Notre contribution n’a pas pour enjeu le congrès du PS, mais l’Europe et la réalisation du changement  », poursuit-elle, précisant que le texte trouve «  un écho  » bien au-delà des 26 parlementaires signataires.

D’ailleurs, pour l’instant, la question de savoir si le courant Un monde d’avance présentera ou non une motion en vue du congrès du PS de l’automne «  n’est pas tranchée  » : cela dépendra de «  l’évolution des discussions  » qui s’engagent «  parmi les militants du PS  », explique Barbara Romagnan. Quant à savoir si les animateurs de ce courant en appelleront à un référendum sur l’Europe, la députée déclare  : « Nous n’avons pas, pour l’heure, pris de position mais nous n’avons pas d’opposition de principe.  »

Max Staat


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