"Le temps n’est pas aux mesurettes"

vendredi 1er juin 2012.
 

Parler croissance n’est plus tabou. C’est une avancée  ?

Bernadette Ségol. Que le débat politique se centre désormais sur la croissance est un progrès. Le mot avait en effet été rayé du langage officiel ces dernières années. Mais quels moyens sont discutés pour mettre en place cette croissance  ? C’est là que nous avons des divergences souvent profondes avec les institutions européennes et les gouvernements. Pour eux, il s’agit toujours d’en passer par la mobilisation des fonds structurels européens. Très bien, mais il n’y aura pas de véritable croissance ni de relance de l’économie en recourant une fois encore à ces fonds tout en continuant à s’appuyer sur des mesures d’austérité, injustes pour les travailleurs, injustes pour les peuples. Il faut des mesures plus fondamentales et mettre fin au recours à l’austérité. Ces choix ont conduit à l’échec à la fois économique et politique.

Comment résorber les dettes 
sans en passer par l’austérité  ?

Bernadette Ségol. Relancer l’économie est un préalable. C’est à cette fin qu’il faut mobiliser les capacités de la Banque centrale européenne. Et c’est seulement lorsque l’économie sera relancée, en particulier via des politiques industrielles, et que le PIB et les recettes seront en augmentation que l’on pourra commencer à résorber les dettes. Mais croire qu’elles pourront être remboursées en imposant l’austérité et notamment en flexibilisant encore davantage le travail et en réduisant les salaires, c’est faire fausse route.

Retour à la croissance via une relance de l’emploi et des salaires avant de rééquilibrer les finances publiques, et non l’inverse…

Bernadette Ségol. Oui. Le retour à l’équilibre des finances publiques est une nécessité, mais il faut s’en donner le temps. L’équilibre ne sera jamais atteint grâce à des mesures d’austérité. La situation catastrophique de l’Espagne en est une preuve. Face à la situation économique, sociale et politique très grave de la Grèce, nous rappelons qu’il est beaucoup plus difficile de résoudre une situation sociale que de résoudre une dette. Une dette peut se régler sur vingt ans, une situation comme celle de la Grèce se doit d’être réglée en urgence. Les dirigeants européens doivent mesurer que le temps n’est pas aux mesurettes.

Entretien réalisé par Laurence Mauriaucourt, L’Humanité


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