Il faut écouter Tsipras

dimanche 27 mai 2012.
 

Alexis Tsipras était ce lundi de passage à Paris. Cet homme est le principal dirigeant de Siriza, deuxième formation politique et premier parti de gauche d’un pays, la Grèce, qui concentre aujourd’hui l’attention de tous les gouvernements européens parce que s’y joue en partie l’avenir de l’Europe. Et pourtant, personne, à part le Front de Gauche, n’a reçu Tsipras.

Laurent Fabius, le ministre des affaires étrangères, déclarait le jour même sur Europe 1 « il faut bien qu’on explique sans arrogance à nos amis grecs que s’ils veulent rester dans l’euro, ce qui est je crois une majorité d’entre eux, ils ne peuvent pas se prononcer pour des formations qui de fait les feraient sortir de l’euro ». Il ne pensait hélas pas au PS grec, le PASOK, ou à la droite qui ont conduit la Grèce à la ruine et l’euro au bord du gouffre en appliquant les plans d’austérité de la Troïka. Non, il visait Siriza, favori des sondages pour les législatives du 17 juin prochain. Mieux vaudrait donc voter pour un candidat de droite que pour l’autre gauche ? C’est un propos grave pour un homme de gauche. Cela mérite au moins une franche discussion pour convaincre les hérétiques. Mais ni Fabius ni aucun de ses représentants n’a accepté, sans arrogance, de discuter avec un homme qui porte des propositions alternatives, au moins pour les connaître voire pour les critiquer. Et le PS ? Lui aussi aurait pu recevoir Tsipras, au nom de l’internationalisme dont il se réclame. Porte close à nouveau de ce côté-là.

Ainsi va l’Europe austéritaire sur ses rails meurtriers. Le vote des peuples compte pour du beurre. « La Grèce doit respecter ses engagements ». Moscovici et Schauble, les ministres de l’économie français et allemands, réunis lundi aussi à Berlin, l’ont répété. Cette position condamne à elle seule l’Europe ! Elle légitime un coup de force. Lesdits engagements n’ont jamais été souscrits librement par la Grèce mais imposés par la Troïka. Ils ont été rejetés sans ambiguïté par le vote populaire. De quel droit pouvons-nous les infliger au peuple grec ? Ils sont inatteignables. La Grèce est plus endettée aujourd’hui qu’elle ne l’était avant dix plans d’austérité. Ces nouvelles saignées l’anémieraient davantage. Cet entêtement fragilise toute la zone euro. La dette grecque était de 298 milliards avant les plans d’austérité. Le coût du sauvetage pour l’Union s’élève déjà à 340 milliards. Que d’économies aurions-nous fait en appliquant la proposition du Front de Gauche d’un prêt direct de la BCE à l’Etat grec !

L’obstination dans l’erreur conduit à la surenchère dans l’énormité. Désormais on explique aux Grecs qu’ils risquent de sortir de l’euro s’ils votent mal. Mais les traités européens ne prévoient aucun dispositif permettant d’exclure un pays de l’euro ! Quel bobard inventera-t-on demain pour faire revoter les Irlandais si leur referendum le 31 mai conduit au rejet de la règle d’or ? Comme cela jusqu’à quand ? Je comprends qu’on ne puisse changer le cours de l’Europe en quelques semaines. Mais les représentants de la France doivent au moins agir pour cela. Ils disposent de l’autorité du vote populaire. Partout en Europe une autre voix est attendue et beaucoup espèrent que la France la portera. Quant à nous, nous faisons notre part du travail. Nous travaillons à améliorer concrètement le rapport de forces pour changer d’Europe en faisant voter massivement Front de Gauche aux législatives.


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