Meurtrie mais soulagée, la société civile salue la fin du sarkozysme (Politis)

jeudi 10 mai 2012.
 

Ils en ont bavé pendant cinq ans : les acteurs de la société civile expriment leur soulagement après la défaite de Nicolas Sarkozy, mais attendent François Hollande de pied ferme.

« On est très contents », soupire Pascale Taelman, présidente de l’association des avocats de France. Comme ses homologues, représentants des professionnels de la santé, de l’éducation, de l’action sociale et de toutes les victimes directes ou indirectes du « sarkozysme », l’avocate a accueilli avec soulagement l’élection du candidat socialiste, dimanche 6 mai.

Pour ces représentants de la société civile, il était urgent de tourner une page : « Depuis 2002, toutes les structures de la Protection judiciaire de la jeunesse ont été massacrées », tranche par exemple Sonia Ollivier, du SNPES- PJJ FSU. Nous n’avons plus d’outil pour accompagner les mineurs et le pouvoir a multiplié les mesures électoralistes répressives. » « On s’est heurté à un mur, on avait l’impression d’être non compris ou méprisés », raconte Didier Minot du Collectif des associations citoyennes, qui s’est battu contre les coupes de subventions et la « marchandisation » du secteur associatif.

La défaite de Nicolas Sarkozy « sanctionne l’arrogance d’un président au service d’une oligarchie insatiable », salue sans ambiguïté l’Association pour la taxation des transactions financières (Attac) qui mise toutes ses forces dans la bataille contre les politiques d’austérité. Changer de discours

Ces forces, qui ont ferraillé pendant cinq ans contre la majorité de droite, en appellent à « une reconstruction » des politiques publiques et, en premier lieu, un apaisement des discours. Le chapitre qui s’ouvre est « apte à guérir la France du populisme », espère Pierre Henry, directeur général de France Terre d’asile qui estime, dans un communiqué, que « “l’hystérisation“ des questions migratoires, [et] la désignation de boucs-émissaires (...) ont dressé les Français les uns contre les autres. » « C’est toute une philosophie qu’il faut changer. Revenir à une notion de solidarité, réapprendre à nous intégrer », ajoute Pascale Taelman concernant la justice.

Cette « rupture symbolique » est aussi attendue dans l’éducation, où François Hollande devra d’urgence présenter « des signaux positifs et un discours sur notre rôle dans le service public », espère Frédérique Rolet, enseignante du second degré et co-secrétaire générale du SNES-FSU. Ou dans la politique d’aide aux plus démunis, touchés par « une période assez stigmatisante pour les plus pauvres, avec l’idée qu’on serait un peuple d’assistés, au point que beaucoup de gens renoncent aujourd’hui aux prestations auxquels ils ont droit », observe Nicole Maestracci, présidente de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars) François Hollande devra gérer l’urgence et donner des gages

Quant aux actes, les premières déclarations et les engagements de campagne de François Hollande nourrissent des attentes. « Les priorités données à l’éducation et à la jeunesse nous laissent espérer un infléchissement de la politique pour l’éducation populaire », se réjouit Didier Minot.

Dans l’Éducation nationale, un secteur « sinistré » par le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le Président socialiste devra pallier l’urgence en recrutant dans les quartiers populaires, premières victimes des suppressions de postes, selon Frédérique Rolet.

« On attend de voir », temporise aussi Sonia Ollivier, du SNPES- PJJ FSU, qui dit craindre le « courant sécuritaire du PS » incarné par Manuel Valls. « Car le programme de Hollande prévoyait un doublement des Centres éducatifs fermés, dont nous n’avons aucune évaluation, qui constituent souvent une violence institutionnelle. »

« Le soulagement est grand, mais l’espoir est fragile », recadre aussi Attac. Car François Hollande devra rapidement composer avec la pression des marchés financiers et de ses partenaires européens sur l’adoption d’un Pacte budgétaire européen, qui interdit les déficits publics. Vigilance et mobilisation

« Les forces progressistes n’ont aucun droit à l’erreur, poursuit Attac. En cas d’échec en France, la droite et l’extrême droite (...) ramasseront la mise de la déception et du désespoir. » Alors chacun s’arme de détermination et appelle à la vigilance. « L’alternance est positive si elle s’accompagne d’une véritable alternative », prévient Pascale Taelman.

Attac se dit même prête à investir le terrain social, « à l’image de juin 1936, mais dans une dynamique d’emblée européenne, nous pouvons imposer nos exigences ».


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