Comment expliquer l’écart entre la dynamique de campagne de Mélenchon et son score final ?

dimanche 29 avril 2012.
 

C’est un résultat paradoxal que celui de Jean-Luc Mélenchon. Très honorable et en même très décevant. "C’est un bon résultat même si on s’était pris à espérer plus", expliquait, dimanche soir, Marie-Pierre Vieu, de la direction nationale du PCF. Porté par une dynamique de campagne positive, des sondages en constante hausse, et des militants toujours plus nombreux aux meetings, le candidat du Front de gauche avait monté la barre de ses exigences au fil des semaines. Si en début de campagne, il visait un résultat à deux chiffres, dans la dernière ligne droite, il souhaitait devenir le troisième homme, devant Marine Le Pen.

Au final, l’eurodéputé devra se contenter de la quatrième place et d’un score de 11, 11 % des voix. Forcément le score a été jugé décevant à l’aulne des ambitions. Il n’en reste pas moins que c’est le meilleur score des communistes depuis 30 ans et le 15,35 % des voix de Georges Marchais.

Pour le Front de gauche, il y a eu incontestablement un effet vote utile. "Dans les dix derniers jours de campagne, il y a eu une coalition contre le Front de gauche", souligne Martine Billard, coprésidente du Parti de gauche, qui pointe les différentes histoires qui sont sorties dans les médias sur les relations entre M. Mélenchon et Henri Guaino ou Patrick Buisson. "Marine Le Pen a aussi été de nouveau présentée comme pouvant accéder au second tour, avec une volonté de sanction des électeurs", ajoute Eric Coquerel, secrétaire national du PG.

Traumatisme du 21 avril 2002

Un avis que partage Frédéric Dabi, directeur adjoint de l’Ifop. Selon lui, François Hollande a eu "l’intelligence de ne pas parler de vote utile, mais de la nécessité de le placer en tête au premier tour". M. Dabi souligne également que, dans les dernières enquêtes d’opinion, M. Mélenchon était en légère baisse. Il note surtout que, parmi ses électeurs, il y avait le plus fort taux d’indécis (29 % alors que l’estimation nationale était à 26 %). "Ce qui structure le vote ces cinq dernières années, c’est le vote anti-Sarkozyn avec un désir d’alternance fort, juge-t-il. Tant que le traumatisme du 21 avril 2002 sera présent, une épée de Damoclès pèsera sur la tête du candidat à la gauche du PS."

"Mathématiquement", l’appel au vote utile "dégonflait Mélenchon", estime Stéphane Courtois, directeur de recherches au CNRS, spécialisé dans l’histoire du communisme. "Mais il faisait illusion car il a siphonné très largement les voix de l’extrême gauche, ajoute cet historien. Si on reprend la percée de l’extrême gauche en 2007, on arrive presque à 10 %", un score proche de celui réalisé par M. Mélenchon. Pour M. Courtois, ce résultat serait donc, au final, assez logique.

Pour Roger Martelli, historien du communisme, ancien du PCF aujourd’hui à la Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), "il y a aussi, du côté des sondés, plus de déclarations de sympathies que de réelles intentions de vote en faveur du Front de gauche". M. Martelli souligne également qu’"il y a pu y avoir une sorte de masque de cette dynamique militante". "Il peut y avoir un décalage entre la densité militante et la dynamique électorale", note-t-il en prenant l’exemple de Georges Marchais en 1981. "Mais ça demeure positif, car cela montre une potentialité à la gauche de la gauche, conclut-il. Et ça souligne qu’on peut espérer encore mieux."


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