Une vision nouvelle - notre Europe sociale 1ère partie (congrès du Parti Socialiste Européen, décembre 2006)

vendredi 12 janvier 2007.
 

Rapport présenté au 7ème Congrès du PSE par Poul Nyrup Rasmussen (Président du PSE Président fondateur de Notre Europe Premier Ministre du Danemark) et Jacques Delors (Président de la Commission européenne 1985-1995). Ce long texte est caractéristique de la social-démocratie européenne d’aujourd’hui par son absence totale d’analyse de la réalité (développement du capitalisme financier transnational, urgence sociale, rôle de l’Union européenne dans la marchandisation du monde, braderie des biens publics...) et sa validation des projets politiques libéraux ( stratégie de Lisbonne).

Avant-propos

Il y a un an, le PSE a lancé une nouvelle initiative : Pour une nouvelle Europe sociale.

C’est dans le cadre de notre responsabilité conjointe en tant que co-auteurs et co- présidents que nous présentons au PSE le rapport sur la nouvelle Europe sociale. Ce rapport est issu d’un processus de débats et de réflexions internes qui a duré une année et auquel ont participé tous les partis membres du PSE, le groupe socialiste du Parlement européen, le groupe socialiste du Comité des régions, PSE Femmes et ECOSY.

Nos états providence, notre Europe sociale, n’ont cessé de glaner des succès durant tout le XXe siècle. Au cours des 50 dernières années, l’Union européenne a fortement contribué à la richesse et à la création d’emplois dans nos états membres. Le Marché unique et l’Union monétaire et économique constituent des jalons historiques. Dans cette nouvelle ère de mondialisation et dans le contexte de sociétés vieillissantes, les conditions pour la survie de nos états providence ont fondamentalement changé. Les citoyens, les partis et les gouvernements sont confrontés à des choix politiques cruciaux.

Quelle direction prendre face à la mondialisation ? Que faire pour affronter les conséquences du changement démographique ? Et que pouvons faire pour assurer la cohésion future de nos sociétés ?

Nous savons que la mondialisation offre de nouvelles chances et opportunités. Toutefois, parmi nos citoyens, beaucoup ont une perception bien différente de l’avenir. Nos sociétés sont confrontées à un risque croissant de fracture sociale permanente entre ceux qui reçoivent une bonne éducation, obtiennent de bons emplois, et de nouveaux gains grâce aux possibilités offertes par la mondialisation et ceux qui manquent de qualifications, n’ont pas d’emploi, sont exclus et luttent pour joindre les deux bouts.

C’est la cohésion de nos sociétés qui est en jeu. C’est pourquoi nos sociétés de bien-être dans toute l’Union européenne ont besoin de suivre une nouvelle et même direction. Tel est l’objectif de notre nouvelle Europe sociale : forger une direction commune pour l’avenir ; Présenter une feuille de route, un cadre stratégique permettant de réviser, reconcevoir et réformer le modèle social européen tel qu’il existe dans ses différentes versions. Notre objectif est d’en garantir la survie en tant que modèle doté de valeurs uniques de solidarité, d’inclusion et de justice sociale pour tous.

La nouvelle Europe sociale se fonde sur un examen des réalisations du passé et sur la perspective de ce que nous pouvons obtenir dans les 10 à 20 prochaines années, si nous faisons les bons choix, dans nos états membres ainsi qu’au sein de l’Union européenne. Il est exclu de se lancer dans une course vers le bas en raison de la mondialisation et des pressions de la compétitivité, ou de tomber dans une concurrence fiscale désastreuse entre les états. Ceci n’a jamais été l’objectif de l’Union européenne.

Dans cette nouvelle ère de mondialisation, il faut conjuguer la justice sociale et la sécurité avec le plein emploi, la croissance et la compétitivité. Plusieurs évolutions positives au sein de l’Europe démontrent que cela est possible. Nous parviendrons à préserver nos valeurs les plus chères si nous agissons et faisons les bons choix.

Telle est l’ambition de notre rapport : inspirer des réformes progressistes ; inspirer le processus de réforme de l’état providence au sein du modèle social européen ; lemoderniser sans l’affaiblir ; le modifier de façon à ce qu’il favorise l’habilitation et l’autonomisation des peuples au sein de sociétés plus inclusives et plus étroitement unies.

Un allié indéniable dans ce processus sera une Union européenne renouvelée et plus forte. Notre feuille de route pour la nouvelle Europe sociale est prête à être soumise au débat politique et à la prise de décision.

Résumé

• Le but de la nouvelle Europe sociale est de fournir un cadre stratégique permettant de réviser, reconcevoir et réformer le modèle social européen tel qu’il existe dans ses différentes versions, sur la base des réalisations du passé et d’une perspective des réalisations possibles au cours des 10 à 20 prochaines années.

• La nouvelle Europe sociale est basée sur une vision nouvelle d’une croissance intelligente qui favorise le plein emploi, des sociétés inclusives et durables, un concept de croissance qui vise à aider les populations de l’Europe à répondre aux besoins de la génération actuelle sans pour autant compromettre la capacité des générations futures de satisfaire leurs propres besoins.

• La nouvelle Europe sociale est une initiative qui invite les socialistes et les sociaux-démocrates, les syndicalistes, les entreprises progressistes, les membres de mouvements de la société civile et tous les acteurs intéressés dans toute l’Europe à se réunir pour façonner de nouvelles politiques.

• Il faut non pas réduire mais améliorer les politiques économiques et sociales afin que les sociétés de bien-être en Europe soient plus inclusives, fortes et durables.

• La nouvelle Europe sociale servira de feuille de route pour faire des choix politiques et mettre en place des mesures à tous les niveaux politiques, de l’échelon local aux échelons européen et mondial.

TEXTE DU RAPPORT

Il existe une autre voie

Le modèle social européen existe et son existence est due aux efforts des gens ordinaires, des syndicats et des partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes. Il est le résultat de notre combat au cours des 100 dernières années dans nos pays respectifs et c’est graduellement que nous tous, les gens, les partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes et les syndicats sont parvenus à créer les états providence que nous connaissons. Ils constituent notre Europe sociale.

L’Union européenne est en effet un groupement unique d’états-providence fondé sur notre conviction que l’inclusion sociale et les résultats économiques vont de pair.

Le modèle social européen existe en tant que réalité sociale et en tant qu’ensemble de valeurs partagées. Les états providence de l’Europe présentent beaucoup de caractéristiques communes qui les distinguent d’autres régions du monde. Nous en sommes les créateurs et il nous incombe de le renouveler de façon à en assurer la survie et la prospérité au cours du XXIe siècle pour le bien des populations européennes.

D’aucuns affirment que la mondialisation est en train de miner l’état providence. Les politiciens conservateurs et néolibéraux ne cessent de répéter le même message : l’argent se meut dans le monde entier ; les capitaux vont là où les barèmes fiscaux et les coûts du travail sont les plus faibles et où les niveaux de réglementation sont les plus laxistes. Ils affirment que les pays sont dans l’obligation de rivaliser en déréglementation, laissant ainsi les vies des gens et l’avenir de nos sociétés entièrement aux mains des forces du marché.

Pour le PSE, l’essence même de l’Union européenne n’a jamais été la concurrence entre les états ou un marché pour le dumping social. Nous croyons en la concurrence équitable, libre et transparente entre les entreprises sur le marché unique. Celui-ci a constitué et constitue encore une source importante de nouvelles recettes et de création d’emplois. Il n’est toutefois pas suffisant pour garantir l’inclusion, la cohésion et le développement durable dans l’avenir.

Le PSE a décidé de formuler une ligne de direction commune qui est appelée à constituer une alternative cohérente à la perspective néolibérale. Il existe une autre voie qui implique ni course vers le fond, ni dumping social, ni érosion de nos états - providence. La voie néolibérale n’est même pas nécessaire d’un point de vue économique. Il existe une voie meilleure et encore plus compétitive. Il existe une voie moderne et inclusive.

La nouvelle Europe sociale prétend construire des passerelles entre une société postindustrielle et une société mondiale. La mondialisation n’implique pas nécessairement une course vers le bas. Nous savons qu’il est possible de mettre en place cette passerelle tout en gardant nos valeurs et nos identités en rénovant nos sociétés de bien-être. Les réussites observées en Europe en sont la preuve.

Chaque version du modèle social européen à sa propre histoire, sa propre structure, son propre point de départ. Les échanges de bonnes pratiques ne peuvent être utiles que dans la mesure où les spécificités locales, régionales et nationales sont dûment prises en compte.

Ce que nous pouvons faire ensemble est mettre en place un nouveau programme qui conjugue la compétitivité économique, la justice sociale et la pérennité de l’environnement. Nous devons faire les bons choix pour garder le meilleur du passé et nous en servir de base pour construire l’avenir.

Nous ne pouvons toutefois rien faire sans le soutien de nos populations. C’est pourquoi il faut comprendre les sentiments d’incertitude des gens quant à l’avenir. Beaucoup de travailleurs sont de plus en plus souvent confrontés aux difficultés et aux risques dérivés d’un environnement professionnel de plus en plus compétitif. Et ceux qui n’ont pas d’emploi se sentent de plus en plus marginalisés et leurs chances de trouver à l’emploi sont de plus en plus maigres dans beaucoup d’états membres.

À ces difficultés s’ajoute un ensemble d’autres éléments qui sont perçus comme des menaces pour leur qualité de vie, dont les réformes douloureuses des pensions et du marché du travail et les migrations illégales, qui ne font qu’aggraver ce sentiment d’incertitude. C’est pourquoi un sens nouveau de la coresponsabilité, des droits et des obligations s’imposent pour tous les citoyens, les entreprises, les gouvernements, les syndicats et tous les acteurs de la société. Le modèle social européen est capable de survivre et, dans cette démarche, une Union européenne rénovée et consolidée sera un allié déterminant.

NOTRE PROPRE VOIE

Nous proposons une ligne de direction commune qui garantisse que nos partis membres et nos gouvernements fassent des choix politiques de manière cohérente, qui soient complémentaires et non pas contradictoires dans l’ensemble de l’Union européenne. Il s’agit de réformer et de coopérer afin de créer une nouvelle situation démocratique et sociale où tous soient gagnants en Europe.

Telle est l’option, l’option politique, que nous avons décidé de faire : une nouvelle vision qui conduise à une rénovation des stratégies et des politiques parmi les partis et les gouvernements socialistes et sociaux-démocrates pour l’avenir de la démocratie sociale européenne.

C’est ensemble que nous devons façonner cette nouvelle vision, cette nouvelle ligne de direction sur la base d’une analyse lucide et d’une pensée novatrice et audacieuse. La nouvelle Europe sociale est une orientation pour réviser, concevoir et réformer à notre façon. Notre nouvelle Europe sociale se fonde sur les réalisations du passé et sur la perspective des réalisations possibles dans les 10 ou 20 prochaines années.

La nouvelle Europe sociale constituera un programme non seulement pour demain mais pour les années à venir ; un agenda et une feuille de route pour la mise au point de politique et la prise de décisions à tous les niveaux politiques, des échelons locaux, régionaux et nationaux aux échelons européen et mondial. Nos niveaux démocratiques ne rivalisent pas entre eux mais se complètent dans le contexte d’objectifs communs clairs ; seuls varient les instruments qui diffèrent selon que nous travaillons à l’échelon européen, à l’échelon national, ou à l’échelon local ou mondial.

La nouvelle Europe sociale implique un nouveau rapport avec les gens ordinaires. Cette initiative prétend apporter des réponses pertinentes aux préoccupations des gens, une ambition qui doit inspirer les partis et les gouvernements socialistes et sociaux-démocrates dans leur travail de rénovation de nos états providence afin de réaliser des objectifs communs.

1. Beaucoup à gagner et beaucoup à perdre dans les 10 à 20 prochaines années

Il y a énormément à gagner au cours des 10 à 20 prochaines années, énormément de riches possibilités si nous faisons les bons choix, et il y a énormément à perdre si nous ne relevons pas les nouveaux défis à la lumière de nos valeurs, si nous fermons les yeux, si nous refusons de moderniser notre propre voie et laissons les conservateurs et les néolibéraux en faire à leur guise ! Telle est l’essence de la nouvelle Europe sociale.

Les dividendes potentiels sont là : la coopération européenne et l’élargissement de l’Union européenne à 27 états membres constituent le cadre d’un nouveau développement économique et social durable dont les potentialités sont énormes. L’Europe est un acteur économique à l’échelon mondial, le marché unique est la plus grande économie du monde.

L’Europe est à la fois un des moteurs de la mondialisation et aussi l’une des victimes : nous ne devons pas nous adapter de façon passive ; nous pouvons prendre l’initiative pour façonner l’avenir.

L’amélioration des niveaux de vie et des conditions de travail a permis aux populations européennes de vivre plus longtemps et de façon plus saine. L’Europe est capable de transformer les nouvelles connaissances, l’innovation et des technologies en un nouveau bien-être pour la majorité.

Il existe dans le même temps des risques d’inégalité croissante entre les riches et pauvres, entre les jeunes et les plus vieux, d’érosion de la cohésion dans une population de plus en plus variée, et de dégradation galopante de l’environnement. Et pourtant, il n’est pas trop tard pour aborder ces défis si nous faisons les bons choix.

Ceci ne sera possible qu’avec la participation et la confiance des gens. Il s’agit donc d’habiliter la société, les gens, les entreprises, les syndicats, bref tous les agents, pour qu’ils se préparent au changement. Il s’agit de faire en sorte que les gens aient confiance en eux et en leurs capacités dans un contexte de constante mutation.

Des décisions doivent être adoptées sur la façon de parvenir à des sociétés qui soient inclusives, sur la base d’emplois décents, d’un dialogue social, des droits et des opportunités pour tous. Des décisions doivent également être prises pour trouver un nouvel équilibre entre la population en âge actif et une population passive en augmentation. Des décisions doivent être prises sur la façon de mettre définitivement l’Europe sur la voie du développement durable. Il s’agit donc maintenant de prendre des décisions cohérentes dans un contexte intégral.

2. Le modèle social européen se porte bien, merci !

Le modèle social européen n’est pas la définition d’un seul système de bien-être mais l’expression des caractéristiques communes des états providence européens.

Au sein de ce modèle social européen, nos histoires et structures varient mais nous avons beaucoup plus de caractéristiques en commun que de différences. Que ce soit dans les pays nordiques, les nouveaux états membres de l’Europe centrale et de l’Est, dans les pays méditerranéens ou continentaux ou au Royaume-Uni, ce sont toutes les populations européennes qui appartiennent à notre nouvelle Europe sociale.

C’est aussi ensemble que les états providence européens doivent se rénover. Ce processus de rénovation passe par la reconnaissance des points forts du modèle social européen. Celui-ci est en meilleure santé que beaucoup de politiciens de droite et de commentateurs ne l’affirment.

Une des principales caractéristiques du modèle social européen est la grande importance qu’il accorde à l’état providence, à savoir au secteur public. Toutefois, le rôle du secteur public a parfois été négligé dans les débats politiques.

Ceci est, à notre sens, une erreur car le secteur public joue de fait un rôle crucial dans les résultats de l’Europe en termes économiques et sociaux. Le secteur public fournit des biens publics, une protection universelle contre les risques sociaux tels que le chômage et la pauvreté. Le secteur public est un facteur incontournable pour déterminer les conditions du marché du travail, en particulier dans le dialogue social. Il est déterminant dans la réalisation pratique de la solidarité, de la justice sociale, de l’inclusivité et de la cohésion.

Étant donné la part substantielle du PIB (33 pour cent à 55 pour cent) que représentent les budgets gouvernementaux et du secteur public, celui-ci joue, en Europe, un rôle majeur au sein de l’économie, en particulier dans la production de biens et des services. Le secteur public sert de colonne vertébrale aux sociétés européennes et de cadre pour l’économie de marché ; il est à la fois une condition requise pour l’économie sociale de marché en Europe et un rempart contre le développement d’une société de marché. De nombreux enseignements peuvent être dégagés de l’étude du fonctionnement de nos états providence et du rôle du secteur public.

Pour la pensée conservatrice et libérale, le secteur public a toujours été considéré comme une entrave à la compétitivité économique. Dans les cas les plus extrêmes de pensée néolibérale, le secteur public est perçu comme un « frein » à la compétitivité. Ce concept est démenti par les secteurs publics actuels en Europe.

Beaucoup de pays européens ont réussi, dans le cadre de partenariats solides entre les secteurs publics et privés, à faire de l’inclusion sociale et de la protection de l’environnement des moteurs de développement.

C’est là que réside l’essence même d’un état providence moderne et actif. Apprendre chacun des expériences de l’autre est la seule façon de pouvoir rénover les états providence européens, en s’inspirant des meilleures réalisations du passé pour en tirer parti pour l’avenir.

L’Union européenne en tant que telle a également été déterminante dans le développement de nos états providence. Les valeurs et les objectifs énoncés dans les traités européens, la charte des droits sociaux fondamentaux, la création du marché unique, la législation sociale et sur l’emploi, les fonds structurels et de cohésion, le dialogue social européen, la création de l’Union économique et monétaire, sont autant d’éléments qui ont joué un rôle crucial dans le développement et la prospérité de nos états providence.

Par rapport à d’autres régions du monde, les états providence européens ont obtenu de meilleurs résultats en termes de réduction des niveaux de pauvreté et des inégalités, de répartition des richesses et de conciliation entre la vie professionnelle et familiale. Il est un fait que des pays européens occupent neuf positions sur dix parmi les pays qui ont la meilleure qualité de vie au monde. Telle est l’Europe sociale actuelle.

Ces réalisations sont les assises sur lesquelles nous allons construire la nouvelle europe sociale, aborder les problèmes actuels et relever les nouveaux défis qui se posent aux sociétés de bien-être européenne au XXIe siècle. Ces nouveaux enjeux sont le vieillissement de la population, les changements climatiques et la pression croissante sur l’environnement, la révolution technologique et la concurrence grandissante de la Chine, de l’Inde et d’autres nations dans une économie mondialisée. Les problèmes non résolus sont le chômage, la pauvreté et l’inégalité qui sévissent dans la plupart des états membres de l’Europe. Les pays européens doivent améliorer leurs performances dans les domaines de la croissance économique, de l’emploi, du savoir et de l’innovation, de l’éducation, de l’inclusion et de la cohésion.

Notre mission est claire : renforcer et rénover les états providence européens. Il ne s’agit pas de préserver nos états providence tels quels : nous savons que ceci serait voué à l’échec.

Nous savons aussi qu’il n’est ni acceptable ni soutenable de maintenir la situation actuelle sans apporter de réponse aux problèmes réels et aux nouveaux enjeux.

Si nous échouons dans nos tentatives de renouvellement des état providence européens, les premières victimes en seraient les populations européennes. Investir dans la nouvelle Europe sociale revient donc à investir dans leur bien-être et leur prospérité.

Les socialistes et sociaux-démocrates sont fiers des valeurs et des résultats obtenus dans nos états providence au sein de l’Union européenne, dans notre Europe sociale, mais nous ne pouvons pas nous déclarer satisfaits car beaucoup reste encore à faire et beaucoup de défis restent encore à aborder.

3. Pourquoi nous avons besoin de la nouvelle Europe sociale

L’Europe est aujourd’hui confrontée à de nouveaux problèmes résultant de la mondialisation, des nouvelles technologies, de l’évolution démographique, de l’élargissement de l’UE et des changements climatiques. L’Europe est à la traîne en matière de savoir et d’innovation et dans le domaine de l’éducation. Dans la plupart des pays, nous n’avons pas encore trouvé de réponse durable à ces nouveaux défis. Nous courons le risque de voir de plus en plus de gens marginalisés et exclus du noyau de la société.

• Trop de gens restent exclus des possibilités d’emploi de qualité et de l’éducation pour adultes et de la reconversion ;

• Trop d’enfants abandonnent l’école ;

• Trop de jeunes connaissent des systèmes d’éducation de mauvaise qualité et des difficultés pour trouver un emploi ;

• Trop de femmes sont privées de l’accès à l’égalité au travail et dans la société ;

• Trop de personnes handicapées ne reçoivent pas le soutien voulu pour une intégration réussie à la vie professionnelle ;

• Trop de gens qui sont arrivés en Europe comme réfugiés ou immigrants éprouvent de grandes difficultés à s’intégrer à nos sociétés ;

• Trop de gens vivent encore en marge de la société, voire dans la pauvreté ;

• Trop de pression est exercée sur les ressources naturelles en raison de l’existence de technologies et de styles de vie caduques.

Tous ces éléments sont des déficiences du passé qui doivent être résolues à la lumière des nouveaux défis auxquels nous sommes confrontés.

Le scénario pour l’avenir de nos états providence a changé. La seule façon de parvenir à l’emploi, à la cohésion sociale et à la durabilité est de prendre l’initiative dans la modernisation et la réforme des conditions actuelles. Nous avons décidé de mettre en place une alternative à la perspective néolibérale. Nous savons qu’il existe une voie alternative, non pas seulement en théorie mais aussi dans la pratique.

Nous revendiquons la nouvelle Europe sociale.

Cette nouvelle voie s’inspire des cas de succès probants qui existent déjà en Europe. Certains états membres ont conjugué l’inclusion sociale, les résultats économiques, la durabilité et une main-d’oeuvre hautement qualifiée dans le cadre d’un secteur public sain et viable, un secteur privé et compétitif et une société civile forte. Le résultat de cette combinaison est le plus haut niveau de qualité de vie dans le monde.

Nous n’approuvons pas l’approche conservatrice du « ruissellement » selon laquelle la plus grande priorité doit être accordée aux objectifs économiques, au détriment des considérations sociales et environnementales. Cette perspective est dépassée et vouée à l’échec.

Nous estimons que l’état providence peut être bien plus qu’un protecteur de dernier ressort.

Nous souhaitons transformer l’état providence en un tremplin dynamique pour les populations européennes qui investit dans leurs capacités et leur avenir.

Il existe une corrélation entre, d’une part, un secteur public fort et moderne et, d’autre part, un faible taux de pauvreté et un taux élevé d’emplois.

Dans l’avenir, le secteur public doit jouer un rôle central pour promouvoir la capacité d’innovation et de restructuration, tout en allouant des ressources propres pour favoriser la croissance et l’emploi, la durabilité et l’inclusion sociale en Europe. En résumé il ne peut y avoir d’emploi suffisant, stable et de qualité sans un état providence qui fonctionne bien et il ne peut y avoir d’état providence viable sans emploi suffisant, stable et de qualité. C’est pourquoi il n’est pas question, pour les socialistes et les sociaux-démocrates, de réduire ou de contraindre secteur public. Il s’agit de moderniser et de mieux oeuvrer pour réaliser nos objectifs.

Nous devons créer le cadre nécessaire à une nouvelle sécurité, à une nouvelle prise de conscience, à une nouvelle capacité de la société et des individus de vivre de travailler dans un contexte de mutation constante qui est le résultat de l’économie mondialisée et des nouvelles technologies. Dans cette démarche, les socialistes et des sociaux-démocrates doivent être les chefs de file.

Les états-providence européens ne peuvent se développer et assurer un meilleur avenir à leurs populations que si les socialistes et les sociaux-démocrates d’aujourd’hui s’engagent vis-à-vis de l’interdépendance des pays dans lesquels nous vivons et nous travaillons. Il s’agit d’être actif à tous les niveaux : local, régional, national et européen.

Nous nous engageons, socialistes et sociaux-démocrates, à faire en sorte que les développements économiques, sociaux et environnementaux se renforcent mutuellement.

Nous considérons qu’un secteur public moderne et des politiques sociales bien conçues constituent un facteur qui favorise la productivité et la inclusivité. Le secteur public doit se baser sur des valeurs solides et se régir par des objectifs clairs. Nous considérons également qu’une nouvelle gestion des ressources naturelles est un élément fondamental pour une nouvelle vision des politiques économiques, une vision de croissance intelligente et écologique.

La nouvelle Europe sociale est fondée sur les valeurs socialistes et sociales-démocrates de la démocratie, de la liberté, de la solidarité, de la dignité humaine, de la justice sociale et de légalité. Le principal message qui émane de ce programme est que de nouvelles politiques publiques ainsi qu’un nouveau dialogue social visant à la prospérité, l’inclusion et la durabilité s’imposent pour faire contrepoids aux puissantes forces du marché qui menacent de conduire à l’exclusion sociale et la dégradation de l’environnement.

Les socialistes et les sociaux-démocrates européens s’engagent à définir une nouvelle voie vers l’avenir, à savoir une nouvelle Europe sociale. Parce que notre avenir ne peut être basé sur la rivalité entre les états, le dumping social ou fiscal. Parce que nous n’avons pas encore pleinement tiré parti de tout ce que nous avons en commun au sein de l’Union européenne et de notre interdépendance mutuelle. Parce que nous n’allons pas accepter que l’inégalité et l’insécurité s’aggravent dans les populations européennes. Les transformations que subissent la société et l’économie exigent également de nouvelles réponses politiques.

Chaque individu doit être à même de développer son potentiel dans l’Europe actuelle ; personne ne doit être laissé pour compte.

4. Notre feuille de route pour la nouvelle Europe sociale

Notre feuille de route pour la nouvelle Europe sociale est une perspective de l’avenir de la social-démocratie dans les états membres et dans toute l’Union européenne.

Notre intention est de transformer l’état providence en un état actif, qui investit dans les gens, qui anticipe les problèmes, qui développe les potentiels, plutôt que d’intervenir uniquement lorsque les choses se compliquent. Il s’agit donc de passer d’un soutien passif à la création de nouvelles opportunités. Nos sociétés de bien-être doivent :

• Être orientées vers le plein emploi et l’inclusion sociale ;

 Se baser sur la pérennité de l’environnement ;

 Devenir des tremplins dynamiques pour la réalisation dans toutes les étapes du cycle de la vie dans le contexte d’une nouvelle société basée sur le savoir ;

 Se fonder à la fois sur les droits et les obligations - les droits collectifs pour les opportunités et les responsabilités individuelles ;

 Promouvoir un dialogue social plus intense ;

 Faire participer la société civile au dialogue et aux partenariats.

L’Union européenne et ses états membres peuvent réaliser tout cela sur la base de stratégies claires et d’une feuille de route commune.

Dans toute l’Union européenne, les gouvernements et les partis politiques sont confrontés à des options de réforme. L’idée fondamentale de la nouvelle Europe sociale est que ces options de réformes doivent aller dans le même sens, à savoir le sens de la démocratie sociale moderne à laquelle nous aspirons en tant que socialistes et sociaux-démocrates d’aujourd’hui.

La nouvelle Europe sociale doit être une entreprise collective. Il faut rénover nos sociétés de bien-être sur la base de droits et d’obligations. Ces droits et ces obligations doivent être clairement perçus par les individus et les gouvernements, ainsi que par les entreprises, les syndicats et d’autres agents.

La construction d’un nouvel état providence plus actif doit donc s’inscrire dans le cadre d’un processus dynamique de participation en vue du développement. Ceci est la meilleure façon de créer la nouvelle Europe sociale qui réponde aux besoins des populations européennes.

Cette feuille de route est un facteur important pour les choix de réforme dans chacune des différentes versions du modèle social européen : pour les pays continentaux, les pays méditerranéens, les pays nordiques, les états membres d’Europe centrale et de l’Est et pour le Royaume-Uni. En déterminant une ligne de direction commune, nous nous assurerons de nous apporter un appui mutuel, plutôt que nous fragiliser les uns les autres, et de nous inspirer mutuellement, plutôt que nous contredire les uns les autres, et donc de tirer pleinement parti de notre interdépendance.

La feuille de route est une stratégie globale dans laquelle chaque niveau démocratique, qu’il soit local, régional, national ou européen, évolue dans le même sens pour parvenir à des objectifs communs. À chaque niveau démocratique, les socialistes et les sociauxdémocrates doivent adopter une nouvelle approche et avoir recours à de nouveaux instruments pour faire face aux défis actuels.

Dans ce rapport, nous proposons que l’Union européenne soit un partenaire actif pour accorder la priorité aux gens : investir dans les gens, s’assurer que l’Union européenne soit fondée sur l’économie sociale de marché et ne se transforme pas en une société de marché.

L’état providence ne peut évoluer dans une direction positive, à savoir travailler pour un meilleur avenir pour les gens ordinaires, que si les socialistes et les sociaux-démocrates d’aujourd’hui s’engagent vis-à-vis de l’interdépendance des pays dans lesquels nous vivons et nous travaillons. Il s’agit d’être actif tous les niveaux politiques. Il y a énormément à gagner d’une meilleure coopération au sein de l’Union européenne.

Le principal message qui émane de ce programme est que de nouvelles politiques publiques et un dialogue social rénové s’imposent à tous les niveaux : Des politiques et un dialogue visant à la prospérité, à l’inclusion et à la durée, qui fassent contrepoids aux puissantes forces du marché qui conduisent à l’exclusion sociale et à la dégradation de l’environnement.

L’Union européenne est un facteur extrêmement important pour l’avenir de nos états providence. Nous proposons que soient appliquées des stratégies basées sur les trois éléments fondamentaux de l’Union européenne :

• La concurrence entre les entreprises

• La coopération entre les pays

• La solidarité entre les citoyens.

Dans une Union européenne de 27 états membres, cette approche à trois piliers offre la possibilité de tirer parti de la plus grande force économique d’un marché unique élargi en vue de progresser vers le développement durable.

À mesure que la concurrence se développe entre les sociétés dans toute l’Union européenne, une plus grande coopération est nécessaire entre les états membres afin que cette prospérité accrue soit mise au service des personnes.

La nouvelle Europe sociale représente une nouvelle vision de croissance intelligente dont le but est le plein emploi et la création de sociétés inclusives et viables.

L’Union européenne peut apporter une valeur ajoutée importante. L’Europe doit agir de façon à :

• Renforcer la coopération économique au sein de l’Union européenne pour promouvoir une croissance plus dynamique et accroître le nombre d’emplois de qualité ;

• Garantir une concurrence équitable et transparente entre les sociétés sur le marché unique, évitant une course vers le bas ou le dumping social ;

• Tenter de parvenir à la pérennité de l’environnement et combattre le changement climatique ;

• Améliorer les conditions de travail de la population ;

• Promouvoir l’éducation et les compétences dans une société du savoir, l’inclusivité, la recherche et le développement, l’innovation ;

• Encourager le développement régional ;

• Appuyer cette région afin qu’elle devienne la société du savoir la plus unie, la plus compétitive et la plus viable du monde ;

• Garantir une économie sociale de marché dans laquelle des services publics fonctionnent sur la base de l’universalisme, afin de promouvoir l’inclusion sociale, la cohésion et le développement économique.

Il s’agit fondamentalement de faire un choix de société.

Il faut choisir si nous allons prendre la voie royale ou la voie secondaire vers la compétitivité économique. Notre stratégie en matière de concurrence doit être basée sur l’excellence, sur une infrastructure, des services publics et une protection de l’environnement de haute qualité et sur des connaissances et des compétences de pointe. Il serait stérile, pour l’Europe, de tenter de faire concurrence sur la base de bas salaires ou de normes peu exigeantes : notre secret est de concurrencer sur la base de l’excellence.

4.1. Une stratégie progressiste pour parvenir au plein emploi

Il ne peut y avoir d’emplois suffisants, stables et de qualité sans un état providence qui fonctionne bien et il ne peut y avoir d’état providence viable sans emplois suffisants, stables et de qualité. Cette interaction est essentielle dans le modèle social européen d’aujourd’hui.

C’est pourquoi il importe d’appliquer une stratégie à double volet : parvenir au plein emploi tout en rénovant l’état providence. Nous sommes conscients que les gens n’accepteront pas de réforme tant qu’ils n’auront pas accès à plus d’emplois et à des emplois de meilleure qualité. Or, une croissance à long terme ne sera viable que si de nouvelles réformes sont appliquées. Pour parvenir au plein emploi et rénover l’état providence il faut faire appel à tous les instruments dont nous disposons à tous les niveaux démocratiques : aux échelons local, régional, national et européen. Cette stratégie doit constituer une démarche coordonnée et simultanée des différents états membres de l’Union européenne.

L’objectif majeur est le plein emploi puisqu’il contribue à la réalisation de la plupart de nos objectifs dans le cadre de la nouvelle Europe sociale où se conjuguent le développement économique et l’inclusion sociale ; l’égalité ; le vieillissement actif ; l’éradication de la pauvreté ; et la promotion de la solidarité, pour n’en citer que quelques-uns.

La première chose à faire est de mettre l’emploi au centre de la politique économique non pas en renonçant à la stabilité mais en mettant au point des politiques convergentes.

Il faut reconnaître que les gens vont devoir changer d’emploi beaucoup plus souvent que leurs parents ne l’ont fait dans le passé. Et ce, non pas parce que ces changements constituent un objectif en soi mais parce qu’ils sont le résultat du rythme plus rapide de l’économie mondiale et du changement technologique. Notre mode de vie moderne s’inscrit dans un environnement en constante mutation. Et ceci ne changera pas. C’est pourquoi les socialistes et des sociaux-démocrates doivent s’attaquer d’emblée à ce problème en prévoyant de nouvelles modalités de sécurité qui permettent aux populations d’affronter les changements de manière confiante.

L’avenir doit être basé sur la sécurité durant la transition, en apportant un soutien aux personnes dans la recherche et le maintien de leurs emplois, pour leur permettre de passer d’un emploi à l’autre de façon rapide et effective, et d’améliorer leur capacité tout au long de leur vie professionnelle. Le marché du travail doit devenir inclusif. Il faut renforcer les institutions du marché du travail, les rendre plus dynamiques dans l’interaction entre les secteurs public et privé. Les principes directeurs de cette démarche doivent être le dialogue social et la responsabilité commune de tous les agents.

À l’avenir, les politiques progressistes doivent être axées sur le message suivant : nous ne pouvons plus garantir des emplois pour la vie mais nous pouvons garantir la création de plus en plus d’emplois dans l’avenir qui viendront remplacer les emplois du passé. Il s’agit donc de créer les conditions de la sécurité du travail, à savoir de nouveaux emplois et des emplois de meilleure qualité tout au long de la vie professionnelle, par rapport à l’emploi pour la vie du passé. Le concept futur de sécurité de l’emploi est celui du développement du potentiel des individus afin qu’ils profitent des changements. Il s’agit donc d’investir dans les individus.

Pour parvenir au plein emploi, les états membres doivent appliquer les politiques suivantes :

• Nous devons mettre en place une politique active et novatrice en matière d’investissements afin de promouvoir la croissance dans le cadre des objectifs de la stratégie de Lisbonne et parvenir à une croissance durable qui est une condition préalable aux réformes du marché du travail ;

• Une politique active en matière de marché du travail basée sur un traitement nouveau et juste avec les chômeurs. Un cadre de droits et d’obligations pour l’état et la personne, prévoyant des bénéfices importants en cas de chômage et des politiques actives sur le marché du travail, en particulier en matière d’éducation et de formation, pour favoriser le retour à l’emploi et la reconversion en cours de service ;

• Un nouvel arrangement pour faire de la sécurité d’emploi une perspective solide et durable. Une interaction active entre les secteurs public et privé afin de favoriser la reconversion ; la sécurité doit être renforcée tout au long de la vie professionnelle ;

• Un travail décent basé sur un salaire minimum décent défini dans les conventions collectives ou par la législation des états membres, de façon à contribuer à la disparition du phénomène des travailleurs pauvres, y compris l’économie informelle précaire ;

. Application stricte des politiques de lutte contre la discrimination et pour l’intégration active des minorités ethniques et des immigrants au marché du travail ;

• Des mesures pour renforcer le rôle et la participation des partenaires sociaux, en particulier le dialogue tripartite ;

• La matérialisation de la responsabilité sociale des entreprises dans un cadre de nouveaux droits et obligations pour tous les agents intervenant dans nos sociétés, y compris le devoir de contribuer aux finances publiques et de supprimer les pratiques injustes en matière de travail ;

• Des droits et des obligations précis pour les employés des secteurs public et privé en cas de licenciements collectifs inévitables. L’obligation de notification préalable pour permettre la mise en place de politiques actives d’investissement dans les communautés et les régions touchées ;

• Des politiques ciblées pour venir à bout du chômage de longue durée, stimuler l’emploi des jeunes et des travailleurs plus âgés, notamment par l’éducation et la formation de deuxième chance.

L’Union européenne peut apporter une énorme valeur ajoutée par :

• La mise en place d’une coordination économique effective au sein de l’Union économique et monétaire (UEM), en particulier pour appliquer une stratégie simultanée de croissance et d’investissement telle qu’elle a été proposée par le PSE.1 Cette démarche est une condition requise pour parvenir à une croissance économique plus dynamique et à plus d’emplois sur la base des réformes progressistes du marché du travail ;

• L’élaboration de lignes directrices dans le domaine économique afin de parvenir à un équilibre plus cohérent entre les objectifs de stabilisation sur les plans de l’inflation et monétaire, et les emplois réels et la stratégie de croissance. Ces lignes directrices dans le domaine économique devraient servir de base pour garantir l’application d’une politique économique concertée de promotion de la croissance à l’échelon européen, notamment un nouvel ensemble de propositions de stratégie pour une croissance intelligente et écologique.

• La promotion de conseils du travail à l’échelon européen ;

• La mise au point de nouvelles lois du travail au sein de l’UE pour protéger les employés contre les emplois précaires ;

• La création d’un objectif de salaire minimum au niveau de l’UE en termes de PNB par habitant ;

• La reprise d’un dialogue social tripartite sur certains sujets prioritaires tels que l’apprentissage tout au long de la vie et les manières de parvenir à « un travail plus intelligent, et non pas plus dur » ;

• L’amélioration du contrôle, de la transparence et de la responsabilisation des pratiques de responsabilité sociale des entreprises, moyennant la création d’un ensemble de base de normes concertées régissant le comportement des entreprises ;

• Le remaniement du budget de l’UE afin de promouvoir la base financière nécessaire à de nouveaux investissements en recherche-développement, en innovation, en politique d’apprentissage et dans d’autres domaines prioritaires fixés à Lisbonne.

Des politiques relatives au marché du travail et une politique volontariste en matière de croissance économique doivent permettre de revitaliser l’économie européenne et redonner confiance à la main-d’oeuvre européenne. Une confiance réelle dans le fait que les changements ne constituent pas une menace mais une opportunité ; une organisation moderne du travail et des politiques actives sur le marché du travail, ainsi qu’un solide dialogue social sont des éléments qui permettront d’avoir une main-d’oeuvre équipée pour affronter les mutations, de façon à ce que les changements industriels puissent être gérés sur la base de conditions de travail et de vie décentes.

4.2. Savoir et innovation - les clés pour une croissance intelligente et écologique

Les nouvelles technologies peuvent combler le fossé qui existe entre l’économie et l’environnement et entre l’économie et les gens. L’Europe est chef de file dans le développement de nouvelles technologies mais nous ne sommes qu’au seuil d’une nouvelle ère. La stratégie de l’Europe pour parvenir à la compétitivité économique doit être basée sur l’excellence dans l’utilisation du nouveau savoir et de l’innovation, plutôt que sur des bas salaires et des normes laxistes.

L’Europe est à la traîne dans l’investissement en nouvelles connaissances, à la fois en ce qui concerne la recherche-développement et l’éducation et la formation. Actuellement, les dépenses en recherche-développement restent inférieures à 2 pour cent du PIB. Pour parvenir à l’objectif de l’UE qui a été fixé à 3 pour cent du PIB pour les investissements, il faut accroître de façon notable les dépenses à la fois publiques et privées. Il est donc indispensable de prendre un engagement résolu pour développer les investissements. Les dépenses publiques doivent être restructurées dans la plupart des pays européens. Il faut améliorer les incitations pour encourager les entreprises à investir dans le savoir. Les universités et d’autres organisations publiques de recherche doivent mettre en place une nouvelle coopération avec l’industrie et améliorer les systèmes d’innovation. Les dépenses en recherche-développement ayant une rentabilité élevée, l’économie européenne pourraient croître de 10 pour cent supplémentaires d’ici à 2025.

En outre, les investissements en recherche-développement et en innovation doivent contribuer au développement et au déploiement de technologies durables afin de combattre la menace du changement climatique et tenter d’établir un équilibre écologique. En Europe, de nombreux événements catastrophiques intervenus depuis 1980 peuvent être attribués à des manifestations climatiques extrêmes : inondations tempêtes, sécheresses et vagues de chaleur. Les premières victimes des envolées des prix énergétiques sont les plus pauvres : dans toute l’Union européenne, des millions de personnes vivent dans la pauvreté énergétique. Les effets du changement climatique vont exacerber ces tendances et exercer des effets extrêmement néfastes sur le développement économique et social en Europe et aussi dans le monde.

La transformation à grande échelle de nos économies présente un potentiel énorme de croissance : la vieille tradition de gaspillage de ressources naturelles et d’investissements insuffisants en savoir doit céder le pas à des technologies nouvelles et viables et à des investissements tournés vers l’avenir. Chaque décision d’investissement implique un choix entre des technologies anciennes ou des technologies nouvelles et plus durables, entre une croissance traditionnelle et une croissance intelligente et écologique. Les nouvelles technologies respectueuses de l’environnement constituent un élément clé pour améliorer la qualité sociale et de l’environnement tout en encourageant la croissance et l’emploi.

Nous devons exploiter le potentiel du marché unique pour créer des connaissances et des innovations. Pour ce faire, il faut améliorer, et non pas diminuer, les réglementations. Le projet Galilée de l’UE sera également un instrument essentiel pour mener à bien une politique industrielle axée sur l’innovation en Europe. La dimension européenne contribuera ainsi à promouvoir les connaissances et d’innovation, favorisant dès lors une croissance intelligente et écologique et la création d’emplois.

Avec le développement des nouvelles technologies, la société est devenue de plus en plus exigeante : les citoyens réclament des services améliorés et plus rapides, une plus grande transparence et une administration plus conviviale. Les socialistes et les sociaux-démocrates doivent être les premiers à répondre à ces nouvelles demandes.

Afin de promouvoir les connaissances et l’innovation pour parvenir à une croissance intelligente et écologique, l’union européenne et les états membres doivent s’efforcer de :

• Accroître de façon substantielle les investissements publics et privés en recherchedéveloppement pour réaliser l’objectif de 3 pour cent du PIB en recherchedéveloppement fixé par l’UE à l’horizon 2010 ;

• investir dans des formes durables d’énergie et l’efficience énergétique ;

• améliorer l’attrait des universités européennes pour les étudiants et les chercheurs ;

• promouvoir un rapprochement entre les universités, les institutions de recherche et le secteur privé de façon à ce que la recherche en innovation se reflète dans l’économie ;

• coordonner plus étroitement les investissements et promouvoir les projets transeuropéens ;

• pratiquer l’échange systématique d’informations entre les organismes d’innovation ;

• encourager le savoir et l’innovation dans le marché unique ;

• déployer le projet Galilée afin de mettre en place une politique industrielle européenne orientée vers l’innovation ;

• ancrer l’utilisation des nouvelles technologies dans les services publics.

4.3. Apprentissage depuis le début - et apprentissage pendant toute la vie

Les sociétés de bien-être de l’Europe n’atteindront pas la compétitivité sur la base d’une réduction des salaires ou des normes mais sur l’excellence dans le domaine des connaissances et des compétences. L’apprentissage depuis le début et l’apprentissage pendant toute la vie, à savoir la prise en charge de qualité pour la petite enfance, en passant par les écoles et les universités, jusqu’à l’éducation et la formation avancées, sont au coeur de la nouvelle Europe sociale.

Il est évident que les pays qui n’ont cessé d’investir dans les enfants, l’éducation et les compétences sont également ceux qui sont en mesure de relever les nouveaux défis. Nos systèmes d’éducation et de soins doivent énormément progresser pour répondre aux exigences de la société moderne. Accorder la priorité aux enfants est aussi investir dans l’amélioration de leurs chances dans la vie.

Par conséquent, notre première priorité est d’assurer une prise en charge universelle de haute qualité de la petite enfance en tant que service public aussi fondamental que les soins de santé ou l’éducation dans nos états providence dans toute l’Europe. Il s’agit donc de concentrer l’investissement sur les enfants : de permettre un apprentissage précoce et favoriser le développement des compétences sociales et cognitives. Ceci est particulièrement important pour les enfants de familles immigrantes car cette étape représente la première occasion d’apprentissage de la langue et de l’intégration.

Notre deuxième priorité en matière d’apprentissage et de donner à nos systèmes éducatifs dans toute l’Europe un caractère inclusif et d’excellence.

Nous devons garantir que les enfants provenant de tous les milieux et les meilleures chances de succès sur le plan éducatif de l’éducation primaire jusqu’au troisième cycle.

Nous savons que ceux qui ont le plus besoin d’éducation et de formation sont aussi ceux qui en reçoivent le moins. Il est temps de changer cette situation ; il est temps d’établir de nouvelles priorités dans nos investissements en matière d’éducation.

Nous savons aussi que les personnes qui présentent les qualifications les plus faibles sont confrontées à un plus grand risque de chômage et de pauvreté. Cette situation est inacceptable. Notre société ne doit pas permettre pas cette situation : nous devons investir davantage dans l’enseignement secondaire et les compétences, davantage dans l’éducation professionnelle, davantage dans l’éducation des adultes et davantage dans la formation des travailleurs occasionnels, c’est-à-dire adopter une politique éducative qui s’applique obligatoirement à tous.

Trop de jeunes gens abandonnent l’école primaire sans poursuivre leurs études. Cet abandon implique une triple perte : pour les jeunes eux-mêmes, pour nos sociétés actuelles et pour nos sociétés futures. Nous savons qu’il existe une alternative : dans certains états membres de l’Europe, plus de deux tiers des personnes qui avaient abandonné l’école accèdent actuellement à l’éducation supérieure. Il s’agit d’adapter nos systèmes scolaires et d’ouvrir l’accès à l’éducation supérieure. Dans le cas contraire, ces citoyens et nos sociétés risquent de connaître une augmentation du chômage à long terme, une pauvreté persistante et ont moins de chance de pouvoir récupérer le temps perdu plus tard grâce à l’éducation pour adultes.

Notre troisième priorité est que l’éducation des adultes fasse partie intégrante de nos systèmes éducatifs. Cette démarche doit être à la base des résultats économiques de l’Europe, de notre stratégie de création d’emplois de qualité et du concept même de développement personnel. Dans le cadre de ces droits et de ces obligations, il appartient à chaque citoyen de s’intéresser à l’apprentissage mais il appartient aux institutions collectives, dans le cadre de leurs obligations, d’assurer un accès réel à l’apprentissage tout au long de la vie.

Faisons un nouveau bond dans nos investissements en matière d’éducation. L’Europe doit trouver les façons de faire progresser la chaîne de valeur. Pour ce faire, nous sommes conscients du rôle essentiel que jouent des personnes hautement qualifiées et motivées pour continuer à apprendre tout au long de leur vie. Cette possibilité ne doit pas être réservée à quelques-uns mais être accessible à tous. Nous voulons un système éducatif riche en savoir où les enseignants et les étudiants soient des partenaires, où l’éducation fasse l’objet d’une actualisation constante.

L’apprentissage pendant toute la vie doit devenir une réalité dans tous les pays européens.

Ceux qui dépendent le plus d’une éducation et d’une formation postscolaires, à savoir les chômeurs et les travailleurs peu qualifiés, sont ceux qui ont le moins d’opportunités de formation. Il est temps de changer cela et d’investir dans une éducation de seconde chance réelle pour tous ceux qui en ont besoin, qu’ils aient ou non un emploi.

Les gagnants qui ont accès à l’éducation et à la formation pour adultes travaillent tous à temps plein dans de grandes sociétés, dans le secteur public, dans des services commerciaux, la banque où les finances. Si nous n’intervenons pas, les perdants de l’économie actuelle seront ceux qui travaillent dans les petites entreprises, qui ont des emplois à temps partiel ou de services traditionnels, en particulier les travailleurs plus âgés, les femmes et les jeunes.

Notre quatrième priorité est que les pays européens démocratisent la participation à la société numérique. Les personnes désavantagées n’ont souvent pas accès ou ne possèdent pas les compétences nécessaires pour participer activement à la société du savoir. Environ 30 à 40 pour cent de la population de l’UE ne profite guère ou pas du tout des TIC.

La révolution en matière de connaissances, de technologie et de mondialisation exige une approche radicalement différente de l’apprentissage dans la société et sur le marché du travail. Il faut réformer les politiques de bien-être afin de :

• mettre en place une couverture universelle de haute qualité dans la prise en charge éducative de la petite enfance et des enfants ;

• faire en sorte que les résultats et les bénéfices de l’éducation et de la formation soient indépendants du milieu socio-économique et d’autres types de désavantages ;

• mettre fin à l’abandon scolaire précoce ;

• instituer un droit à l’éducation pour adultes pour tous ceux qui manquent de qualifications de base ;

• améliorer le système d’éducation professionnelle de façon à pouvoir répondre de façon rapide et pertinente aux risques de délocalisation et de changements structurels dans le secteur privé ;

• encourager les entreprises à communiquer au plus tôt leurs besoins en compétences de façon à garantir une reconversion professionnelle dynamique et pertinente par l’application des programmes d’acquisition de compétences et de formation professionnelle ;

• assurer l’actualisation permanente du matériel et des équipements pédagogiques ;

• assurer une transition fluide des jeunes gens vers le monde du travail ;

• accroître les investissements et réformer le système d’éducation de troisième cycle ;

• démocratiser l’accès et la participation à la société numérique.

L’Union européenne sera un partenaire important dans la construction de nos sociétés du savoir :

• nous devons promouvoir des incitants par l’intermédiaire des fonds structurels et d’éducation de l’UE en faveur de l’éducation et de la formation ;

• les fonds de l’EU pour l’éducation pourraient être utilisés pour contribuer à la matérialisation du nouveau droit à l’éducation des adultes pour tous ceux qui ne possèdent pas les qualifications de base ;

• nous devons redoubler d’efforts pour parvenir à une société de l’information inclusive, en particulier pour mieux définir et matérialiser les nouveaux droits, tout en précisant le rôle des autorités et des services publics dans le développement de l’accès aux technologies numériques et en établissant un étalonnage des performances en Europe dans la réalisation des objectifs ;

• l’éducation et la formation doivent être placées au coeur de la stratégie de Lisbonne.

Le patrimoine le plus précieux de l’Europe est sa population, notre main-d’oeuvre. L’Europe doit contribuer à surmonter les barrières qui maintiennent tant d’européens en deçà du niveau voulu de qualification et en dehors de la population active. L’éducation et l’acquisition de compétences font partie d’une politique dynamique et active sur le marché du travail dont le but est de garantir que les personnes possèdent les compétences requises par les nouveaux emplois.

**** Rendre nos sociétés vieillissantes proactives

L’Europe est une société vieillissante, ce qui représente à la fois un succès et un défi important. Les plus de 65 ans, qui forment aujourd’hui un quart de la population de l’UE, représenteront plus de 50 % des citoyens d’ici 2050 - grâce à l’amélioration des conditions de vie et de travail et aux progrès remarquables des traitements médicaux.

En même temps, la proportion des personnes âgées par rapport à la population active totale connaîtra une hausse brutale pour l’UE-25, passant de 37 % en 2003 à 48 % en 2025 et à 70 % en 2050. Cela signifie qu’il y aura moins de 1,5 travailleur par retraité en 2050, tandis qu’il y en a actuellement presque trois.

Nous nous trouvons face à un double défi : la tendance indique que les systèmes de pension seront inévitablement soumis à de grandes pressions. En même temps, il sera difficile d’assurer un taux acceptable d’emploi dans les services sociaux, les services de santé et l’éducation, parmi d’autres services publics.

C’est sans doute ce qui nous attend si nous ne faisons rien. Mais nous ne serons pas passifs, mais proactifs. Nous aborderons ce défi de front, à notre façon.

L’agenda de la réforme inclut une stratégie à trois volets. Tout d’abord, nous devons faire en sorte que davantage de personnes soient actives sur le marché du travail. C’est la meilleure façon de rendre les systèmes de pension durables et d’assurer un nombre suffisant de travailleurs dans le secteur des services publics. C’est pourquoi nous devons réaliser notre stratégie progressive pour le plein emploi. Cela signifie :

• Réduire le chômage par des réformes et des investissements massifs dans les domaines du marché du travail et des systèmes d’éducation ;

• Augmenter le taux d’emploi des femmes et des jeunes ;

• Permettre aux travailleurs plus âgés de rester plus longtemps sur le marché du travail grâce à une approche adaptée et non-discriminatoire ;

• Assurer une meilleure intégration des immigrants et des minorités sur le marché du travail ;

• Créer une nouvelle stratégie inclusive pour les plus vulnérables, aidant ceux qui le peuvent à trouver du travail.

Deuxièmement, les systèmes de protection sociale pour la retraite et les soins aux personnes âgées doivent être réformés à notre façon. Si ces réformes ne suivent pas nos idées, basées sur la justice sociale et la solidarité, les perdants seront les plus défavorisés, qui tombent dans la pauvreté en vieillissant.

Ainsi, il est essentiel de maintenir et même d’améliorer, dans certains pays européens, les garanties minimales de retraite pour empêcher la pauvreté des pensionnés. L’épargne privée peut jouer un rôle complémentaire à la pension de base, mais ne devrait pas se substituer au système public.

Les pensions de base de l’Etat devraient en effet être complétées par des pensions professionnelles obligatoires, même si les inégalités inhérentes à l’emploi - par exemple entre les hommes et les femmes - devraient aussi se refléter dans les dispositions de retraite. Les retraites fixées par des conventions collectives devraient jouer un rôle encore plus important dans l’avenir en tant qu’élément d’une stratégie de retraite plus cohérente et juste et de notre stratégie pour le plein emploi.

Troisièmement, nous, socialistes et sociaux-démocrates, devons prendre l’initiative de former une nouvelle approche proactive au phénomène du vieillissement. Les pays européens doivent dans l’avenir se concentrer sur la qualité de la vie, la santé et l’activité en tant que nouveau mode de vie, fondé sur des droits et obligations.

Le lien entre l’activité et la santé est toujours aussi important à un âge avancé. Donc, la contribution apportée par les gens plus âgés à la société ne devrait pas se limiter à l’emploi rémunéré au début de la vieillesse. Elle devrait englober le travail bénévole et beaucoup d’autres activités réalisées par les personnes âgées. Les citoyens plus âgés ont une richesse de connaissances et d’expériences qu’ils doivent pouvoir partager avec la société.

Les politiques publiques doivent être réformées à notre façon pour assurer la survie des régimes de pension et les soins aux personnes âgées :

• Achever la réforme des systèmes de pension partout en Europe pour que les personnes âgées puissent compter sur des retraites adéquates, équitables et financièrement durables, qui ne reproduisent pas les inégalités sociales ;

• Adopter une nouvelle approche active et préventive face au vieillissement ;

• Garantir les soins aux personnes les plus âgées ;

• Développer une nouvelle façon de partager notre responsabilité commune dans le domaine des soins aux personnes âgées. L’Union européenne peut apporter une valeur ajoutée parallèlement aux efforts des Etats membres en ciblant :

• La hausse de la croissance pour créer davantage d’emplois de meilleure qualité, par le biais de la stratégie du PSE pour des politiques d’investissement coordonnées ;

• La promotion des réformes des systèmes de pension, sur base de l’équité et de la durabilité financière, tout en assurant la non-discrimination entre les hommes et les femmes dans ces systèmes ;

• La garantie de droits à la pension pour les travailleurs en mouvement, y compris les travailleurs migrants.

**** L’inclusion sociale et la cohésion

Le grand nombre d’Européens vivant sous le seuil de pauvreté (68 millions sont pauvres ou en situation précaire) nécessite une amélioration substantielle de la façon dont l’Europe envisage la sécurité sociale. La perte du travail ne doit pas signifier la pauvreté pour les chômeurs et leurs familles. L’incapacité ou la vieillesse ne devraient jamais entraîner la misère. Les enfants ne devraient pas grandir privés d’une alimentation équilibrée, d’une éducation de qualité ou du droit à une enfance heureuse.

Nous considérons le plein emploi comme un élément fondamental d’une société inclusive.

Nous avons besoin de meilleures politiques sociales, et non pas d’une réduction des politiques sociales, parce qu’il y a un potentiel énorme de prospérité et de bien-être si nous poursuivons de meilleures politiques d’inclusion. Celles-ci doivent être exhaustives dans leur approche. Elles ne peuvent pas se limiter à offrir un filet de sécurité de revenu minimal.

Notre ambition de sociétés fondées sur l’inclusion et la cohésion doit s’appuyer sur un large agenda de réforme de tous les systèmes sociaux européens.

Un agenda englobant la garde d’enfants, l’éducation et la formation, les réformes du marché du travail et la protection sociale. Pour donner à ceux dans le besoin de meilleures chances de s’intégrer dans la vie active et au sein de la société.

Il doit aussi englober les politiques publiques relatives à la participation à la société : logement, transport, ressources culturelles, participation à la démocratie et à la gouvernance, société civile et inclusion numérique au sein de la société émergente de l’information. Donc, l’inclusion sociale exige une stratégie à multiples facettes pour la participation sociale, économique, culturelle et politique.

Le secteur public doit jouer un rôle fondamental. En modernisant nos services publics et nos politiques pour l’inclusion, nous devons aussi voir comment intégrer le concept des droits et obligations. Les citoyens menacés par l’exclusion ont des droits et des responsabilités pour empêcher leur exclusion. Cette approche en matière de politique sociale transmet le message suivant : « vous avez beaucoup à offrir, vous pouvez faire une différence, vous pouvez développer vos talents, une vie meilleure est à portée de la main. » En rendant nos sociétés proactives pour inclure tous les citoyens, il est crucial d’assurer l’avenir de nos services publics, par des cadres législatifs régissant la prestation de services publics à travers l’Union européenne. Il doit y avoir une frontière claire entre l’économie de marché et la prestation de services publics à tous les citoyens.

La persistance de la pauvreté et des inégalités en Europe exige une nouvelle vision des systèmes sociaux dans la nouvelle Europe sociale. Il faut :

• S’engager aux niveaux national et européen pour développer une stratégie exhaustive et intégrée pour lutter contre la pauvreté, s’appuyant sur la participation sociale, économique, culturelle et politique ;

• Atteindre le plein emploi et améliorer le capital humain pour lutter contre la pauvreté parmi les chômeurs, les inactifs et les personnes à faible revenu ;

• Permettre l’emploi des femmes en offrant des services universels de garde d’enfants et en offrant des soins aux personnes âgées ;

• Favoriser une vieillesse active pour s’attaquer à la pauvreté et à l’exclusion sociale ;

• Appuyer les services publics - en tant qu’élément clé pour assurer l’inclusion - et préserver l’accès universel à ces services d’un bout à l’autre de l’Union européenne.

Le rôle de l’Union européenne doit s’exercer autour des axes suivants :

• Présenter une nouvelle directive cadre pour les services d’intérêt économique général ;

• Etablir des directives sectorielles pour la santé et les services sociaux, pour que ces domaines ne soient pas mis en péril par la concurrence du marché ;

• Réaliser des analyses d’impact sociales contraignantes de la législation proposée au niveau de l’UE ;

• Améliorer la cohésion sociale à travers l’Union européenne par le biais des Fonds structurels et des Fonds de cohésion.

**** Diversité et intégration - Des éléments dont on ne peut se passer

L’immigration en Europe a posé de nouveaux défis et dilemmes ces dernières années. Nous avons besoin d’une approche équilibrée et cohérente qui aborde toutes ses dimensions. En tant que socialistes et sociaux-démocrates, nous insistons sur l’importance de respecter les droits fondamentaux des individus.

Ce dont il faut se réjouir, c’est que l’Europe, région de diversité, de paix et de prospérité, soit une destination attrayante pour les immigrants ou les réfugiés. L’immigration a été positive et importante pour les systèmes sociaux de l’Europe, fournissant de la main-d’oeuvre et de nouveaux talents et compétences en Europe. En général, l’immigration a contribué positivement à l’économie de l’Europe, avec de plus en plus de gens actifs sur le marché du travail dans des secteurs clés où il y avait un besoin de main d’oeuvre.

Le revers de la médaille, c’est que la hausse de l’immigration en Europe a ces dernières années créé des problèmes d’intégration et un nouveau sentiment d’incertitude parmi certains groupes de la population. Cela constitue un terreau fertile pour les mouvements politiques populistes et a encouragé la création de nouveaux partis d’extrême-droite, ainsi qu’un climat d’hostilité face aux migrants dans certains Etats membres.

Bien que l’immigration ne soit pas une solution durable en soi, elle représente un élément de la solution au problème critique du vieillissement de la population européenne pour les années à venir. L’immigration ne peut pas être une alternative durable au plein emploi des Européens ou à la création de marchés du travail inclusifs. L’immigration ne peut pas et ne doit pas être utilisée comme un moyen permettant de remettre à plus tard les réformes nécessaires de nos systèmes de sécurité sociale, confrontés au vieillissement de la population. Gérée de manière adéquate, l’immigration en Europe peut toutefois contribuer à créer un nouveau dynamisme et un nouvel élan, non seulement grâce aux immigrants qualifiés, mais aussi à ceux qui le sont moins mais qui peuvent venir combler des emplois au sein de certains secteurs clés de l’économie.

Cependant, il faut faire de l’immigration et de notre population migrante actuelle un facteur positif et dynamique de nos sociétés. Pour ce faire, les Etats membres doivent changer leur politique par rapport à l’immigration et aux immigrants en général. Les pays européens n’arrivent tout simplement pas à intégrer les immigrants avec succès. C’est pourquoi dans la nouvelle Europe sociale, l’immigration et l’intégration doivent aller de pair. Il faut voir l’immigration à la lumière de notre effort commun pour plus d’emplois de meilleure qualité, dans le cadre de notre stratégie progressive pour le plein emploi. Sans davantage d’emplois de qualité sur les marchés du travail de l’Europe sociale, l’intégration des immigrants échouera et ces derniers se replieront sur l’économie informelle, ce qu’on appelle aussi le « travail au noir. »

Nous avons toujours insisté sur le respect de la diversité, de la tolérance et des droits fondamentaux pour tous. Nous nous trouvons devant un besoin indéniable de créer un nouveau consensus sur l’immigration. Nous avons besoin d’un cadre clair autour de notre diversité et de notre avenir commun.

Besoin d’ouvrir des canaux d’immigration légale parce que l’autre option est « l’économie parallèle, » le chômage caché et la nouvelle exclusion sociale.

Besoin de s’attaquer à l’immigration clandestine.

Besoin de protéger les droits fondamentaux des migrants et des demandeurs d’asile.

Besoin d’une meilleure intégration des immigrants au sein de la société.

L’Union européenne doit donc élaborer une politique commune d’immigration et d’asile, assortie de nouveaux efforts pour l’intégration positive dans les Etats membres. Cette politique commune doit se fonder sur la solidarité européenne entre les Etats membres et avec les pays d’origine. Le partage des coûts et des responsabilités, et l’octroi de droits et d’obligations pour tous constituent de bons points de départ. Il faut également mettre l’emphase sur la coopération directe avec les pays d’origine pour promouvoir le codéveloppement et la migration légale et lutter contre l’immigration clandestine. Nous avons besoin d’une approche européenne cohérente et exhaustive, s’appuyant sur l’intérêt mutuel et la coopération à long terme. Les travailleurs migrants ne sont pas et ne devraient pas être traités comme de simples unités économiques, un réservoir de main d’oeuvre fluctuant selon les cycles de l’économie européenne.

Trop de migrants travaillent toujours dans l’économie informelle. Leurs conditions de travail ne respectent pas les droits et les normes du travail ; ces ouvriers migrants ne sont pas protégés. Au sein de la nouvelle Europe sociale, de nouvelles politiques publiques pour combattre l’exploitation doivent voir le jour. Nous devons faire en sorte que les principes de la dignité humaine et du travail décent soient respectés de tous, puisqu’ils figurent au coeur de la Charte européenne des droits fondamentaux.

Les canaux de l’immigration clandestine doivent être fermés, grâce à une coopération efficace entre les Etats membres de l’Union européenne. On observe actuellement une violation constante des droits de l’homme provoquant des décès et de l’exploitation. Il faut donc lutter de front contre le travail forcé, l’esclavage et la traite des êtres humains, en réalisant un contrôle des frontières intérieures plus intégré et plus efficace, et en faisant preuve d’une plus grande solidarité lors du partage du fardeau lié à la réception des immigrants ayant été victimes d’exploitation. Des sanctions sont nécessaires pour protéger efficacement les migrants.

Nous, socialistes et sociaux-démocrates, avons une tâche essentielle à réaliser pour promouvoir l’accueil des immigrants dans nos sociétés.

Nous voulons mener des efforts pour « une alliance des civilisations, » incluant le respect de la diversité culturelle et religieuse, conformément à la Charte européenne des droits fondamentaux. Le combat contre le racisme et la xénophobie doit s’appuyer sur des stratégies pour l’intégration et le plein emploi. Un dialogue plus approfondi doit aussi être initié avec les communautés migrantes et les minorités ethniques, notamment les communautés musulmanes établies en Europe. Il est aussi important de lancer un dialogue entre l’Europe et les pays islamiques en particulier.

L’intégration des immigrants doit aussi se fonder sur des droits et obligations. Droits à l’égalité de traitement et à la non-discrimination dans la société d’accueil et sur le marché du travail. Devoirs d’apprendre la langue du pays d’accueil comme condition préalable à l’intégration, de respecter les valeurs européennes telles que l’égalité entre les sexes, et de contribuer à la société. Ceux-ci sont essentiels pour établir la confiance, le respect et la cohésion parmi tous les groupes de la société. Dans beaucoup d’Etats membres, on observe de bons exemples d’intégration, s’appuyant sur l’égalité des droits et obligations et sur de nouveaux partenariats. Le secteur public a aussi donné l’exemple en assurant l’égalité des droits sur le marché du travail.

Les socialistes et les sociaux-démocrates, les Etats membres et l’Union européenne doivent coopérer activement et aider les pays d’origine à lutter contre les causes réelles de la migration : pauvreté et sous-développement. Ce qui s’inscrit dans un processus beaucoup plus large, qui vise à supprimer les causes premières d’agitation, les violations des droits de l’homme, les guerres civiles et même le terrorisme. Nous insistons sur l’importance d’un nouveau code de conduite pour l’immigration au niveau de l’UE, pour que les Etats membres de l’Union européenne s’engagent à adopter une politique d’immigration basée sur des critères clairs et éthiques. La politique de migration devrait prévenir l’exode des cerveaux des pays en voie de développement et encourager plutôt « la circulation des cerveaux, » par le biais de visas d’entrée flexibles, de congés et de politiques de retour destinés aux migrants économiques.

Il faut réformer la politique d’immigration et d’intégration pour :

• Promouvoir l’intégration des immigrants, encadrée par des droits et des obligations permettant l’égalité de traitement et la non-discrimination ;

• Lier les politiques d’admission et d’intégration dans des stratégies communes au niveau national ;

• Développer la confiance au niveau de la gestion des flux migratoires et s’attaquer aux défis posés par l’intégration, surtout au niveau des communautés locales ;

• Etablir le droit et l’obligation pour les immigrants d’apprendre la langue du pays d’accueil ;

• Assurer l’intégration des enfants de migrants par le biais des crèches et des systèmes d’éducation ;

• Lutter contre le travail au noir, la précarité et l’exploitation en imposant des sanctions financières aux employeurs ;

• Développer une politique cohérente pour l’intégration des immigrants sur le marché du travail, y compris dans le secteur public ;

• Prévoir des congés flexibles et des possibilités de retour pour les migrants qualifiés, en collaboration avec les pays d’origine, en insistant sur le concept de la « circulation des cerveaux. »

Au niveau de l’UE, nous devons :

• Etablir une procédure commune d’admission au sein de l’UE pour les migrants économiques, qui soit combinée à la coordination des politiques d’admission nationales ;

• Adhérer pleinement aux Principes de base communs pour l’intégration de l’UE ;

• Prendre l’initiative de développer une alliance des civilisations ;

• Intégrer la gestion des flux migratoires dans la politique de développement de l’UE et prévoir un nouveau partenariat avec les pays d’origine ;

• Faire la promotion des valeurs communes européennes ;

• Renforcer la coopération et l’assistance technique entre les services de contrôle frontaliers des Etats membres et FRONTEX (Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures) pour protéger les droits fondamentaux des migrants et lutter contre la traite des êtres humains.

**** Le travail décent - Notre ambition mondiale

Pour construire une Europe sociale forte, nous avons besoin d’apporter une dimension sociale forte à la mondialisation. La nouvelle Europe sociale s’est ralliée à l’Agenda pour le travail décent présenté par l’OIT et qui donne la priorité à quatre objectifs stratégiques : Emploi et création d’entreprise, Droits au travail, Protection sociale et Dialogue social. La nouvelle Europe sociale militera pour l’intégration de l’Agenda pour le travail décent dans les politiques de l’UE telles que le développement et le commerce.

L’Agenda pour le travail décent fait aussi partie d’une solution à long terme pour les migrants : il établit des conditions de stabilité et de prospérité dans les pays en développement, ce qui pourra réduire la pression de l’immigration clandestine en Europe à long terme.

L’agenda du développement ne se résume bien sûr pas au travail décent ; les socialistes et les sociaux-démocrates doivent aussi s’engager autour des autres enjeux.

En effet, un nouvel équilibre est nécessaire entre les pays en développement et les pays développés au sein de notre monde globalisé. Un nouveau débat devrait s’engager pour savoir comment atteindre cet équilibre. La réalisation des objectifs du Millénaire des Nations Unies doit rester un élément central. L’Union européenne et ses Etats membres devraient renforcer le dialogue avec d’autres pays industrialisés et en développement sur les grandes questions liées à cet équilibre :

- un régime commercial plus juste ;

- une nouvelle approche de la propriété intellectuelle, y compris des médicaments génériques contre les maladies mortelles comme le sida et la malaria ;

- la réalisation de l’objectif de 0,7 % du PIB pour l’aide au développement ;

- la façon d’intégrer les pays en développement dans la lutte contre le changement climatique et pour la protection de l’environnement ;

- l’annulation de la dette pour les pays en développement ;

- et la réforme des institutions globales.

Outre l’action politique, les progressistes doivent construire un large consensus au sein de la société civile, du monde des affaires et des syndicats en faveur du travail décent. À cet égard, les initiatives lancées et soutenues par le PSE, son groupe parlementaire au Parlement européen et le Parti socialiste international, comme le Forum progressif global, pourraient jouer un rôle important.

*** Un nouvel accord pour la participation de tous - Droits et responsabilités pour tous

Les sociétés de cohésion qui feront la promotion de la démocratie participative représenteront sans doute le facteur compétitif principal dans l’économie globale du 21ème siècle. Car les gens, les idées, l’apprentissage tout au long de la vie, le développement personnel et l’interaction entre tous les acteurs de nos sociétés permettront aux Etats sociaux européens d’être à la pointe du développement économique et social durable.

L’inclusion - le fait de ne laisser personne en marge - est au coeur de nos efforts communs.

Nous devons effectuer les réformes nécessaires pour être sûrs que nous permettions à tous de vivre, de travailler et de progresser dans l’avenir.

Nous devons élaborer une politique d’inclusion qui permette à nos sociétés de rendre les citoyens maîtres de leur destin et qui ne favorise pas la passivité et le sentiment d’inutilité.

Les gens ne se sentiront jamais perdus dans des sociétés proactives, il y aura toujours de nouvelles opportunités, et personne ne restera en marge. Voilà notre nouvelle Europe sociale proactive. Des droits et des obligations pour tous qui cimentent la cohésion de la nouvelle Europe sociale.

Le devoir du gouvernement est d’assurer que tous les citoyens aient accès aux services publics, comme l’éducation et la protection sociale, et de garantir des droits politiques, civiques, sociaux et de travail, ainsi que de fournir les conditions pour le plein emploi et l’inclusion dans la société. Le droit du gouvernement est de s’attendre à ce que les individus et tous les autres acteurs de la société contribuent au système de sécurité sociale.

Les entreprises ont le droit d’attendre la stabilité, la justice et la transparence dans les conditions de concurrence ; leur devoir est de contribuer aux finances publiques et de soutenir la réalisation du plein emploi, en aidant à améliorer les habiletés et les compétences de la main-d’oeuvre et en jouant un rôle positif dans la société en appliquant les principes de la responsabilité sociale d’entreprise.

Le droit des syndicats est de s’organiser, de négocier les conventions collectives, de se battre pour défendre les intérêts des travailleurs et de jouer un rôle dans le dialogue social tripartite ; leur devoir est de contribuer à la construction d’un marché du travail inclusif.

Les individus ont le droit de participer pleinement à la société et au marché du travail ; leur devoir est de profiter de l’enseignement ou de la formation de haute qualité qui s’offrent à eux et de tous les autres moyens permettant d’enrichir les ressources humaines et sociales, dans leur propre intérêt et dans celui de la société dans son ensemble.

Les droits et obligations s’appliquent à tous les membres de la société. Les organisations de la société civile ont aussi un rôle important à jouer.

Elles gagnent du terrain car elles peuvent combler une lacune existant entre le marché et l’Etat, entre les entreprises et le gouvernement. Elles représentent une combinaison unique de structures privées et d’objectifs publics.

La façon dont s’organise la société civile et ses fonctions diffèrent d’un côté à l’autre de l’Europe, reflétant ainsi les stades de développement social différents de nos sociétés. Même si l’Europe peut être très différente sous cet angle, on observe de nombreux points communs au niveau de la responsabilité sociale et de la participation, ce qui constitue un fondement privilégié à la coopération nécessaire pour relever les défis de demain, ainsi qu’une force pouvant se mobiliser pour la réforme du modèle social européen.

Le temps des politiques et de la gouvernance verticales et descendantes (top down) est révolu. Il est maintenant l’heure d’engager tous les acteurs de la société, en utilisant les capacités et l’expérience de chacun d’eux pour cibler nos objectifs communs. Sans une participation au sens le plus large, nous ne réussirons pas à présenter ce nouvel agenda comme étant un élan positif pour toute la société.

La nouvelle Europe sociale est une invitation lancée à tous les acteurs de la société pour qu’ils participent et s’engagent dans ce nouveau projet.

Elle sera créée sur base d’un débat et d’un dialogue pour servir de modèle de participation active des citoyens partout à travers l’Europe dans le cadre de l’élaboration des politiques du 21ème siècle, pour moderniser les Etats sociaux de l’Europe et nos démocraties.

**** La nouvelle Europe sociale est-elle abordable ?

Dans la nouvelle Europe sociale, l’Etat social ne rétrécira pas, mais deviendra plus proactif !

L’argument traditionnel des conservateurs et des néo-libéraux a toujours été celui de l’Europe ne pouvant pas se permettre nos sociétés de bien-être - et le modèle social européen - à cause des pressions exercées par la mondialisation. Mais cette argumentation est devenue un cliché, sans aucun fondement en réalité. Il n’y a en effet aucune preuve qui démontre que les pays ayant de larges secteurs publics soient minés par des pressions découlant de la mondialisation ou de la concurrence.

Les décisions concernant les investissements directs étrangers dépendent de beaucoup plus que le simple environnement fiscal du pays d’accueil en question. Une bonne gouvernance, la transparence, la stabilité, une main-d’oeuvre fortement qualifiée, de hauts taux d’innovation, des infrastructures de qualité et des services publics efficaces, voilà ce qui joue un rôle crucial pour attirer les investissements dans un pays. Un secteur public moderne et fort et des politiques sociales bien développées sont des facteurs productifs. Les sociétés de l’Europe ont engrangé de nombreux succès sur la voie de la justice sociale, du développement économique et du développement durable en tant qu’objectifs interconnectés.

Un habile dosage de nouvelles réformes progressives et d’une politique de croissance ciblée rendra non seulement nos sociétés plus compétitives et plus inclusives, mais améliorera aussi les finances publiques.

Le chômage est beaucoup plus coûteux pour les individus et les sociétés qu’on ne pourrait l’imaginer. Une faible croissance, un taux de chômage élevé, le manque de qualifications et des structures obsolètes se traduisent par des recettes fiscales peu élevées et de grandes dépenses publiques pour nos sociétés. L’intervention par le biais de politiques publiques visant à attirer de nouveaux investissements, à atteindre le plein emploi et à assurer la durabilité par une croissance respectueuse de l’environnement sera beaucoup plus rentable et avantageuse pour les finances publiques au moyen ou long terme que les lourdes dépenses réelles de non-intervention.

Voilà pourquoi les perspectives à long terme de financement de la nouvelle Europe sociale existent réellement. Les initiatives détaillées dans ce rapport, qui visent à créer une nouvelle société de bien-être inclusive, contribueront au développement durable positif à long terme. Il s’agit de rendre nos sociétés actives et dynamiques - tant dans le privé que dans le secteur public.

À cet égard, la modernisation du secteur public est importante, et il convient de comprendre qu’une responsabilité publique forte est la meilleure façon de se battre contre la pauvreté et de construire une société inclusive. Il suffit de comparer l’Europe et les Etats-Unis : les dépenses de sécurité sociale de ces deux sociétés sont largement comparables si on inclut les dépenses sociales privées et publiques. Elles se situent entre 25 % et 35 % du PIB total de la société. Cependant, la grande différence entre les deux sociétés se situe sur le plan de la répartition : la distribution des revenus et la pauvreté !

Dans un système où les dépenses privées liées aux risques sociaux jouent un rôle important, la capacité d’un individu de financer son assurance devient cruciale. Aux Etats Unis, plus de 40 millions de citoyens n’ont aucune assurance-maladie ! Néanmoins, les Etats Unis dépensent plus pour la santé que l’UE : 14.7 % pour les Etats Unis et une moyenne de 7,6 % pour les pays de l’UE. Et pourtant, les citoyens américains ont une espérance de vie inférieure à celle des Européens.

Les socialistes et les sociaux-démocrates européens n’ont aucun doute : ce dont nous avons besoin pour notre nouvelle Europe sociale, ce sont de meilleures politiques sociales, et non pas une réduction de ces politiques ! Un meilleur apprentissage tout au long de la vie, des investissements dans la garde d’enfants, des politiques de travail actives et inclusives, une intégration efficace des immigrants, et la possibilité pour chacun de contribuer à la durabilité à long terme de la société d’abondance.

La nouvelle Europe sociale est non seulement accessible, mais essentielle pour assurer la viabilité des finances publiques, comme le montre l’annexe de notre rapport.

Il y aura six grandes façons de financer la nouvelle Europe sociale. Entre autres :

1. Obtenir une croissance économique plus élevée par le biais d’une stratégie d’investissement simultanée à travers l’Union européenne et d’une meilleure coordination de la politique économique. Il est essentiel qu’une telle stratégie soit mise en oeuvre au cours des prochaines années. Il s’agit d’investir dans les domaines de l’éducation, des politiques actives du marché du travail, de la R & D, de la garde d’enfants et des autres priorités de la stratégie de Lisbonne. Il est important que ces investissements aient lieu simultanément partout en Europe.

Si tous les Etats membres participaient à une telle stratégie européenne simultanée d’investissement, les synergies sur le marché intérieur conduiraient à une augmentation annuelle du PIB de 0,7 % et 0,9 % pour l’UE 15 et pour l’UE 10, il y aurait une croissance de 0,7 % supplémentaire pour la première année et d’autres augmentations de la croissance au cours des années suivantes.

Après 4 à 5 ans, on créerait 4 millions de nouveaux emplois. Les effets à long terme seraient encore plus importants, une fois les investissements entièrement absorbés.

2. Améliorer la productivité pour une plus grande prospérité

L’investissement dans la connaissance - l’éducation, la formation et l’apprentissage tout au long de la vie - pour utiliser efficacement les technologies modernes permettra d’améliorer la productivité horaire, produisant ainsi plus de richesse.

3. Améliorer l’emploi et réduire le chômage

Atteindre l’objectif d’un taux d’emploi de 70 % d’ici 2010 - il est de 64 % aujourd’hui - permettrait de générer 7,7 % de plus de PIB en 2025.2 La nouvelle Europe sociale devrait cibler un taux d’emploi encore plus élevé, étant donné que certains Etats membres excèdent déjà le taux cible de 70 % de la stratégie de Lisbonne.

4. La durabilité

Atteindre l’objectif R & D de 3 % du PIB d’ici 2010 et maintenir 3 % du PIB par année générerait 10 % de plus de PIB pour l’économie européenne d’ici 2025 selon le meilleur scénario (3 % supplémentaire selon les prévisions les plus conservatrices).

L’efficacité énergétique permettrait de réduire de 20 % la consommation d’énergie d’ici 2020, ce qui représenterait une économie allant jusqu’à 60 milliards d’euros. Les investissements dans des formes d’énergie durable créeraient aussi des emplois et une croissance durable.

5. Changer la structure des dépenses publiques

Effectuer des changements au niveau de la consommation, et passer de transferts improductifs comme la préretraite, de subventions et d’investissements improductifs dans les technologies obsolètes à des investissements productifs - dans la protection de l’enfance, une politique de marché du travail active, l’éducation et la formation, l’apprentissage tout au long de la vie, les TIC et les sources d’énergie renouvelable.

La plupart des Etats membres de l’UE-15 pourront le faire sans augmenter leurs dépenses publiques. Néanmoins, la majorité des nouveaux Etats membres devront graduellement accroître leurs niveaux de dépenses publiques à mesure que leurs économies se développent.

6. Le budget de l’UE

L’Union européenne peut aussi contribuer au financement de la nouvelle Europe sociale par son budget, qui vient compléter les budgets nationaux. Pour avoir une idée de ce que représente le budget communautaire, pour la période 2007-2013, on a fixé un montant total pour l’UE élargie de 862,363 millions d’euros, ce qui représente 1,045 % du RNB de l’UE. Bien que modeste face aux budgets nationaux, le budget de l’UE doit jouer un rôle important pour générer des synergies et permettre d’atteindre les objectifs de l’UE. Outre ces six possibilités de financer la nouvelle Europe sociale, l’Union européenne doit agir comme un allié pour protéger les systèmes sociaux de l’Europe du dumping fiscal. Les initiatives visant à éviter la concurrence fiscale injuste font partie intégrante du processus de sauvegarde de la cohésion de l’UE. Le marché unique a besoin d’une approche coordonnée pour la fiscalité des entreprises, commençant avec la coordination des taux d’imposition sur les sociétés.

Dans ce rapport sur la nouvelle Europe sociale, des calculs macro-économiques complémentaires ont été réalisés, ce qui documente l’effet positif à long terme des changements structurels du marché du travail et du reste de l’économie, augmentant la participation au marché du travail, réduisant le chômage structurel et augmentant la productivité.

La mise en oeuvre de la stratégie du PSE pour la croissance et l’investissement au cours des 4 à 5 prochaines années et la réalisation de notre stratégie à long terme pour la nouvelle Europe sociale nous présentent un avenir fondé sur le financement durable de sociétés d’abondance actives, l’excellence sur le plan de la performance économique, l’inclusion sociale et la durabilité environnementale.

En associant une stratégie d’investissement à plus court terme à une feuille de route à long terme, nous voyons que nos systèmes sociaux du 21ème siècle se révèlent non seulement abordables, mais productifs et durables. Comme le montrent les calculs macroéconomiques, la nouvelle Europe sociale créerait de nouveaux emplois pour presque 10 millions de personnes d’ici 2020, en plus des emplois créés dans le cadre des politiques actuelles. Les comptes courants et les finances publiques seraient en meilleure forme ; les citoyens de l’Europe vivraient mieux. Et les générations futures profiteraient d’une croissance intelligente, respectueuse de l’environnement et nous protégeant contre la pollution et le changement climatique.


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