Pour une loi contre les discriminations territoriales

mercredi 11 avril 2012.
 

Le Smic, l’école, le logement social. Le projet du Front de gauche défend les quartiers populaires explique le maire de La Courneuve, Gilles Poux, qui se bat contre les inégalités.

Que les « quartiers populaires » n’apparaissent pas comme un thème à part entière de la campagne électorale, cela n’a pas l’air de déranger à première vue Gilles Poux, maire de La Courneuve (Seine-Saint-Denis). Car, sur le fond, « la situation des quartiers populaires nous renvoie à une crise profonde de notre société ».

Ici comme ailleurs, le chômage massif, le pouvoir d’achat, la précarité ou l’échec scolaire arrivent en tête des préoccupations. Simplement, ces problèmes sont « beaucoup plus aiguisés » dans cette ville où le Secours populaire a vu le nombre de bénéficiaires bondir de 40% ces dernières années, où le taux de chômage dépasse les 15% et où celui des jeunes dépasse allègrement les 30% dans certains quartiers.

« Le candidat du Front de gauche, quand il défend le Smic à 1 700 euros, des moyens pour l’école pour se battre contre les inégalités et l’échec scolaire, des logements sociaux, il parle d’abord des habitants des quartiers populaires. Quand Jean-Luc Melenchon appelle à mettre fin à une Ve République qui n’a jamais été en capacité de défendre l’intérêt des classes populaires, il défend les intérêts des quartiers sans forcément les stigmatiser », poursuit Gilles Poux.

À un mois du premier tour, cela n’exempte pas le Front de gauche de s’adresser à ces couches populaires. « Il est de notre responsabilité de leur dire que nous nous battons pour elles, et surtout avec elles, pour parvenir à rompre avec une logique de relégation sociale. »

La bataille pour l’égalité, menée par le Front de gauche, n’empêche pas non plus ce maire communiste de préparer, pour juin, une grande loi-cadre contre les discriminations territoriales. « Loin de permettre d’avoir plus de moyens pour remédier aux différences, les politiques publiques alimentent et creusent les inégalités en banlieue. »

Gilles Poux a récemment porté plainte auprès de la Halde contre ces discriminations. « Quand les conseillers de Pôle emploi doivent normalement suivre une centaine de chômeurs, ils doivent en gérer près de deux cents à La Courneuve. » Il suffit de voir la queue qui se forme chaque jour à la porte du bureau de poste pour comprendre que les Courneuviens n’ont pas les mêmes conditions d’accueil que les Parisiens. « La Poste ne met pas assez d’effectifs à disposition alors qu’elle est le seul établissement à accueillir facilement des bénéficiaires du RSA, surreprésentés dans la ville, ou pour accueillir un public qui a plus de difficultés avec la langue française. » Sans parler des 3 000 postes dans l’éducation nationale obtenus en renfort en Seine-Saint-Denis, en 1998. Aujourd’hui, tous supprimés. « Sur les trois postes d’enseignants détachés dans les écoles primaires pour apporter une aide supplémentaire, il n’y en a plus qu’un aujourd’hui. »

Toutes les bonnes intentions pour les quartiers populaires ne servent à rien, « si l’on ne s’oppose pas à la réduction des dépenses publiques ou si l’on veut fixer comme objectif le retour à l’équilibre des comptes publics d’ici à 2016 ». Avis à François Hollande.

Sarkozy n’a pas non plus à se draper en défenseur des quartiers, comme il l’a fait devant les militants UMP, sous prétexte de rénovation urbaine. À La Courneuve, où elle avait été impulsée dès 1986, les projets, qui se sont accélérés avec l’Anru, ont certes permis d’améliorer les conditions de vie de nombreux habitants. « Mais cet effort important doit s’accompagner d’un effort similaire à même d’améliorer la situation sociale, sinon cela ne servira à rien. »

Un poste de police fait symbole

L’antenne du commissariat, dans la cité des 4 000 de La Courneuve, pourrait servir d’allégorie de dix ans de politique de droite envers la banlieue. « Dans le cadre d’un projet de rénovation urbaine, elle a été complètement remise à neuf », raconte le maire, qui a financé les 380 000 euros de travaux. C’était en 2005, après la fameuse visite de Sarkozy, venu promettre un « nettoyage au Kärcher » et des renforts policiers après la mort du petit Sidi Ahmed. Mais le poste de police flambant neuf a fermé au bout de huit mois à peine. « Par manque de moyens, les policiers n’ont pas pu le maintenir ouvert, explique le maire. Il a même accueilli La Poste, qui était en travaux. » Et tant pis pour les habitants.

Pierre Duquesne


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