Le Front de Gauche répond aux questions des agriculteurs

samedi 31 mars 2012.
 

Pendant plus d’une heure, Ambroise Mazal, un des animateurs du Front de Gauche de l’Agriculture a répondu le vendredi 23 mars aux questions des internautes du site Terre-Net.

Circuits courts, production biologique, Ogm, politique agricole commune, développement des territoires, régulations des prix, retraites, place de l’agriculture française dans l’échiquier agricole européen et mondial, défense des actifs agricoles et de revenus rémunérateurs, représentativité syndicale, aménagement du territoire, politique d’installation, etc. : retrouvez ci-dessous les réponses que le Front de gauche a apporté, en direct, aux questions des terrenautes.

- 1) Question de Boufmi : bonjour en ces temps difficile je suis dans une région de France ou le gel de février 2012 à détruit une surface importante de blé environ 30/40 ha pour mon exploitation bien ce risque est assurable mais l’expetise me conseille de resemer tout en sachant que mes fourniseur manque de semence il me donne peu d’espoir d’obtenir toutes mes reservations ;pensez vous que cet une bonne solution d’interdir a tout prix les semence d’ogm en sachant qu’il en manqurea cette année est ce la bonne solution de laiser des terres sans production même en bio le gel a fait du dégat cet hiver .J’attends une réponse solide de basse et projetée dans l’avenir .

Ambroise Mazal : Il y a 2 choses dans la question : d’une part la question des OGM et nous nous pensons que la recherche doit se dégager des interêts des multinationales et permettre aux paysans d’être plus autonomes vis-à-vis de leurs choix techniques. Et à ce titre, les OGM nous semblent un fausse solution. Alors que dans notre histoire agricole, nos institus de recherche ont su montrer qu’ils pouvaient créer des variétés plus résistantes et plus adaptés sans pour autant poser la brevetanilité du vivantau profit des grandes firmes. Deuxième élément, à notre avis, l’agriculteur face aux imtempéries doit être soutenu par l’Etat et non par des assurances privées. Et nous tenons beaucoup à réhabiliter un fond de calamités public qui soit capable de répondre à ces catastrophes naturelles.

2) Question de Mono44 : Quand les politiques réagiront-ils face à la délocalisation des productions de certaines régions vers d’autres en appauvrissant les premières et rendant les secondes dépendantes d’un système productif les condamnant à travailler toujours plus pour gagner moins ?

Ambroise Mazal : Nous ne répondons pas bien sûr au nom « des politiques », dont la plupart n’ont effectivement pas fait preuve de beaucoup de courage ni de volontarisme pour enrayer la spécialistation régionale des productions, la concentration des exploitations et la baisse de l’emploi agricole, et le sacrifice de filières entières… Pour ce qui est de nos engagements au Front de gauche, nous défendons une agriculture paysanne, écologique et relocalisée, grâce à des paysans nombreux, à travers les 45 mesures de notre programme « Pour une agriculture écologique et créatrice d’emplois, des campagnes vivantes, une alimentation de qualité pour tous », que nous avons élaboré avec ceux qui ont rejoint l’Appel du Front de gauche de l’agriculture, paysans, syndicalistes, chercheurs, enseignants, et simples citoyens.

3) Question de HM : Dans le passé, des ministres d’agriculture socialistes, comme Edith Cresson et Louis Lepensec ont essayé de faire évoluer l’agriculture dans le sens de vos propositions et ont échoués car ils se sont heurtés au monopole syndical qui verrouille la profession. Selon vous, l’agriculture doit-elle rester la chasse gardée des organisations agricoles patentées avec les conséquences que l’ont connaît ou bien est-elle devenue l’affaire de toute la société ? Si oui, cela suppose une remise à plat de la gouvernance de la profession : Chambres d’agriculture, CDOA, SAFER…Et peut-être le regroupement du Ministère de l’agriculture dans un grand ministère de l’environnement, de l’alimentation et de l’agriculture qui s’adresserait à tout le monde, où les organisations de consommateurs, de protection de la nature seraient autant les interlocuteurs que les seules organisations agricoles patentées qui prétendent parler au nom des agriculteurs. Seriez-vous prêts à engager la remise à plat de la gouvernance de la profession sachant qu’une telle initiative déclenchera les foudres du syndicat majoritaire ?

Ambroise Mazal : Oui, nous sommes absolument convaincus que l’agriculture est une question de société. Et que dans ce cadre le débat sur l’agriculture et l’alimentation ne doit pas être confisqué par les suls syndicats agricoles et encore mois un seul fusse-t-il majoritaire, même si les syndicats ont bien évidemment toute leur place. Nous sommes déjà engagés à ce que d’une part la gouvernance de l’agriculture et de l’alimentation (chambres, SAFER, Office et interprofessions…) soit ouverte à l’ensemble des acteurs, c’est-à-dire tous les syndicats, les collectivités territoriales et les associations. Et d’autre part, nous pensons que l’Etat doit aussi assumer ses responsabilités et se réengager sur des objectifs de politiques agricoles qui répondent à l’intérêt général.

Question de lakoi : bonjour, j’aurai 2 questions : -Les graines de culture ogm rentrent en grande quantité en Europe donc en France aussi.Si elles sont dangereuses pour la consommation, pourquoi sont -elles autorisées ?Puisque aparremment ce n’est pas le cas, pourquoi ne peut- on cultiver en France les Maïs résistant aux insectes ?D’autre part BASF vient de produire une pomme de terre résistante au midiou.Si elle est cultivée, elle permettra une économie de traitements substancielle .Quand va s’arrêter cette hypocrisie qui pénalise les agriculteurs français ?La France ne paye-t-elle pas une amende suite à l’interdiction de la culture de maïs bt ?Avec le déficit que nous avons on pourrait faire cette économie. _allez- vous accélérer l’uniformisation de la règlementation sociale en Europe ?Les filières françaises des fruits et légumes sont en grandes difficultés.Allons -nous devoir nous contenter de fruits et légumes insipides et utilisant des produits interdits en France ? Ps:je cultive du maïs ,un peu de blé et de colza sur 40ha et les revenus de mon exploitation sont la moitié du seuil de pauvreté.

Ambroise Mazal : Il y a plusieurs questions : 1) Il y a une hypocrisie autour de l’interdiction des graines OGM. Le Front de Gauche s’est clairement prononcé en faveur de l’interdiction totale des OGM de plein air sur tout le territoire européen pour des raisons à la fois sanitaire, environnementale et d’autonomie des agriculteurs face à des firmes qui ont brevetabilisé le vivant. Dans le même temps, nous sommes pour ques les institus de recherche agricole français et européens disposent de plus de moyens pour accompagner les agriculteurs vers la transitionaécologique de l’agriculture et l’autonomie des systèmes d’exploitation. 2) Sur la question des fruits et légumes, c’est l’exemple même de filières qui d’une part n’ont jamais été régulées et où on assiste à des sur-productions cycliques qui entrainent la chute des prix et la ruine des exploitants les plus fragiles. D’autre part, ce sont des filières où la grande distribution agit sans vergogne et sans contrainte aucune de la part de l’Etat pour confisquer la plus-value dans le processus de commercialisation. Et enfin, c’est une filière confrontée aux importations à bas prix extra-communautaire du fait d’accords de libre-échange avec des pays tiers. Notre solution au Front de gauche : prix minimum, préférence communautaire, coefficient multiplicateur imposé à la grande distribution et régulation de la quantité de production. 3) Notre objectif : que les revenus des exploitations agricoles cessent d’être scandaleusement sous le seuil de la moyenne des revenus des autres travailleurs. C’est une question de choix politique !

Question de Ttitouan27 : Sous l ‘égide de l’actuel président nous avons connu la naissance du grenelle de l’environnement et tout ce qui s’en suit. Ecophyto 2018 etc. Le G20 agricole a donner lieu a d autres propos qui ne sembe pas aller en adéquation avec le reste. Quelle est la vision et l’orientation que souhaite donner chaque candidat a l’agriculture ?

Ambroise Mazal : Pour nous au Front de gauche, le G20 a été une vaste « pantalonnade ». La crise alimentaire mondiale et la volatilité des prix ont obligé à poser des bonnes questions. Mais l’on voit ques les solutions ne sont pas au RDV : aucune exclusion du monde financier sur les marchés agricoles mondiaux, refus de recourrir à des outils de régulation (stocks régionaux, prix minimum au sein des espaces commerciaux régionaux, concerntation internationale). Les producteurs du monde restent soumis aux intérêts des grandes firmes commerciales et des acteurs financiers… Pour notre part, nous sommes pour la sortie de l’agriculture de l’OMC, pour un rôle plus fort du Conseil pour la sécurité alimentaire de la FAO et l’encouragement de politiques agricoles communautaires dans les grandes régions du Monde. La coopération et la concertation plutôt que la mise en concurrence des agricultures du Monde !

Question de Cane : Comment arrêter la disparition des petites exploitations, est-ce qu’il y a vraiment une volonté ?

Ambroise Mazal : Non, il est clair qu’il n’y a pas eu jusqu’à aujourd’hui de volonté de maintenir les petites exploitations, comme le montrent les chiffres du recensement de l’agriculture de décembre dernier qui révèlent la perte d’environ un quart de l’emploi agricole ces 10 dernières années. Pour autant, des mesures seraient possibles pour garantir des revenus, comme le député Chassaigne (PCF) et ses collègues du Front de gauche l’ont proposé en décembre : prix minimums correspondant aux coûts de production, obligation pour la grande distribution d’une meilleure répartition de la valeur ajoutée, conférence annuelle multiacteur sur les prix… Il est également urgent d’enrayer la libéralisation des marchès agricoles, qui provoque la ruine des producteurs et surtout des plus petits. Le Front de gauche propose non seulement le maintien mais la création d’emploi agricole (300 000 sur 5 ans de mandature), grâce à la régulation des prix et des marchés, la maitrise du foncier, et une déconcentration des filières les plus productivistes, telles que le porc et les volailles.

Question de TPACAP : Bonjour, que proposez-vous pour les agriculteurs double actif, sachant que la MSA nous fait payer des doubles cotisations ? Nous payons des cotisations pour l’activité principale qui n’est pas l’agriculture et nous payons aussi des cotisations à la MSA qui ne servent à rien, sauf l’assurance accident. tout le reste est bénéfice pour la caisse . Merci de prendre ma question en considération Salutations presidentielles.

Ambroise Mazal : C’est effectivement un cas de situation qui pénalise la pluri-activité, qui a toute sa place dans le monde agricole. Pour autant comme vous le dites, une part des cotisations sert bien à contribuer à l’assurance accident prise en charge par la MSA. Il y a vraissemblablement un besoin d’avoir une approche plus fine pour éviter de pénaliser les pluri-actifs. Au Front de gauche, nous sommes par ailleurs pour la suppression du statut de cotisant solidaire qui s’apparente là aussi à une pénalisation injuste de certains producteurs.

Question de Vince : Nos ministres actuels nous promettent d’interdire les ogm. Conséquence, la France entretient une hypocrisie puisqu’on en importe tous les jours pour nourrir nos animaux. Quelle est votre position ?

Ambroise Mazal : Nous sommes clairement opposés aux OGM, dont les risques environnementaux et sanitaire sont encore trop importants pour se permettre de faire plaisir les yeux fermés aux multinationales des semences. Nous voulons effectivement mettre fin à l’hypocrisie actuelle, en assumons notre position au sein de l’Union européenne. Par ailleurs, sur la question de l’alimentation animale que vous évoquez, nous souhaitons mettre urgemment en oeuvre un plan de reconquête de l’autonomie européenne en protéines végétales plutôt que d’avoir recours aux importations latino américaines, par ailleurs destructrices des paysanneries locales et de la forêt…

Question de Mono44 : Vous pouvez leur demander de ma part quand est-ce qu’ils comptent prendre leurs responsabilités envers l’agriculture et la gérer plutôt que d’en laisser la gestion à un syndicat dont ce n’est pas le rôle puisqu’un syndicat doit justement avoir un rôle de contre pouvoir et non pas de pouvoir.

Ambroise Mazal : Vous posez là la question de la cogestion historique de l’agriculture entre l’Etat et la FNSEA, qui nous apparaît aujourd’hui dépassée. Comment justifier en effet aujourd’hui que les élections professionnelles du monde agricole ne soient pas, à l’instar des salariés, basées sur le principe de la représentativité proportionnelle ? Mais aussi, comment justifier que le rôle des pouvoirs publics et de la société civile ne soit pas plus affirmé sur une question qui les concerne au premier plan ? Nus pensons que l’agriculture est une véritable question de société, c’est pourquoi nous souhaitons réformer la gouvernance à la fois des Chambres d’agriculture, des SAFER et des offices spécialisés, de manière à instaurer une représentativité syndicale plus juste, mais également élargir la gouvernance aux associations et aux collectivités pour favoriser l’intérêt général sur les intérêts particuliers. Dans le même temps, nous sommes convaincus que l’Etat devra assumer plus clairement ses responsabilités par la mise en place d’un cadre législatif, et devra être le garant des objectifs de sa politique y compris face aux intérêts corporatistes.

Question de Michel14 : Partout, nous lisons (et constatons) que nous consommons deux fois plus de foncier que les allemands. On nous demande de produire plus alors que nous avons toujours moins de terre pour y parvenir. Que proposez-vous pour arrêter la création de zones commerciales toujours plus grandes, zones artisanales qui sont souvent peu exploitées ?

Ambroise Mazal : Je ne suis certain des chiffres que vous avancez… ce qui n’enlève rien de la réalité de la disparition sans cesse continue des terres agricoles, qui sont un frein à la fois pour la transition écologique de l’agriculture que le Front de gauche appelle de ses voeux, et pour la relocalisation de la production. Deux réponses à votre interpellation : nous ne croyons pas qu’il faille nécessairement produire plus… pour qui ? nous sommes excédentaires sur beaucoup de filières par rapport aux besoins européens, et le monde n’a pas nécessairement besoin de (toutes) nos exportations qui souvent déstabilisent les marchés et paysanneries au niveau local, tandis que la réponse à la faim dans le monde passera nécessairement par la mise en place de politiques agricoles nationales/régionales. Par ailleurs, sur la préservation des terres agricoles, là aussi l’Etat et les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités, et fixer des contraintes plus fortes pour limiter la multiplication des projets immobiliers/industriels. Sinon, on pourra toujours pleurnicher sur la disparition des bonnes terres agricoles !

Question de Stephanie : La réforme de la Pac, telle qu’elle se profile, se traduirait par de fortes baisses des aides à l’élevage alors que les revenus des producteurs sont les plus faibles. Comment comptez-vous y remédier ?

Ambroise Mazal : Vous avez raison de vous inquiéter ! Plus généralement, la réforme de la PAC telle qu’elle apparaît aujourd’hui est marquée par une approche libérale fidèle à la politique de la Commission européenne. La disparition des outils de régulation des marchés (fin des quotas laitiers, suppression des droits de plantation viticoles, fin des Organisations communes de marchés, etc) et de protection des filières (altération de la préférence communautaire à travers la multiplication des accords commerciaux de libre-échange, suppression du recours aux outils d’intervention en cas de crise, etc) seront dramatiques pour le maintien de nos filières et de l’emploi agricole. C’est une agriculture à deux vitesses que l’Europe nous propose aujourd’hui, avec le maintien de niches « de qualité » d’un côté, tandis que la plupart des agriculteurs auront du mal à tirer leur épingle du jeu… Mais le sort de la PAC n’est pas encore joué ! Dans la perspective d’une victoire de la gauche, nous devrons prioritairement engager de nouvelles alliance au niveau européen pour préserver notre agriculture européenne, ré-équilibrer les aides, et maintenir les outils de protection et de soutien aux filières… et en premier lieu l’élevage.

Question de Escatien : quel seront les propositions du front de gauche sur l’avenir de la PAC et du devenir de l’agriculture française dans toute la diversité de ses territoires

Ambroise Mazal : Le Front de gauche est fermement engagé, avec ses partenaires du Parti de la Gauche européenne et nos euro-députés à Bruxelles pour le maintien d’une PAC forte et à budget égal et qui garantisse les revenus à tous les agriculteurs. Mais la prochaine PAC doit aussi prendre en compte des enjeux de société et s’engager en faveur du soutien à l’emploi, à l’aménagement équilibré du territoire, à la prise en compte des enjeux écologiques, de la qualité de l’alimentation et de plus de justice dans la répartition du budget entre anciens et nouveaux pays membres. Cela implique de renforcer la conditionnalité des aides sur des critères d’emploi et environnementaux et de revoir la répartition du budget.

Question de leschaumes : Quelle est la position de Jean-Luc Mélenchon sur la libéralisation des droits de plantation en viticulture ?

Ambroise Mazal : Le Front de gauche y est totalement opposé ! Comme d’ailleurs à la suppression des quotas laitiers. Ce sont des questions que nous poserons avec âpreté à nos partenaires européens. Les producteurs de toute l’Europe ont besoin de plus de régulation, de visibilité et de garantie de prix, pas de libéralisation qui met en concurrence les producteurs entre-eux.

Question de Jeanbon : En 2010, la conféderation paysanne a demandé à être représenté dans l’interprofession laitière. Certains syndicalistes ont même fait une grève de la faim. Êtes vous pour modifier les règles pour que tous les syndicats participent aux interprofessions ?

Ambroise Mazal : Cette mobilisation de la Confédération Paysanne a reçu le soutien clair et ferme des élus et des responsables des partis du Front de gauche. Nous avons annoncé très clairement déjà notre engagement à réformer les régles de la représentativité syndicale dans les différents espaces de gouvernance, que ce soient les Chambres ou les offices interprofessionnels. L’agriculture a besoin de tous ses syndicats !

Question de Sylvain57 : Etes-vous favorable à un crédit d’impot « travail du dimanche » ? Concrètement cela consisterais à essayer de stopper l’hémorragie du nombre de producteurs de lait en reconnaissant l’astreinte de la traite du dimanche. D’un point de vue technique, l’état accorderai un crédit d’impot de 52 X 8 heures c’est à dire 416h à 9€ qui donnent 3744 € . Cette somme serait divisée par le nombre de foyer fiscaux pour les GAEC ou autres formes sociétaires. Les salariés agricoles ou les vétérinaires par exemple nous coutent plus cher alors que notre lait n’est pas payé plus . Moralement, ce crédit d’impot serait moins choquant que la prime charbon des cheminots par exemple. Ce crédit d’impot serait à déduire de la base d’imposition et non du montant de l’impot . ( Donc son nom n’est peut-etre pas juste d’un point de vue fiscal ). De ce fait, vu le faible niveau d’imposition des producteurs de lait, le manque à gagner pour l’état serait minime. C’est une mesure peu couteuse mais symbolique.

Ambroise Mazal : Plutôt que des crédits d’impôts ou autres mesurettes, c’est à une politique de prix et de garantie des revenus que le Front de gauche veut aller. Vous citez la filière laitière, qui a connu une grave crise des prix ces denrières années, et va connaître de profonds bouleversements encore avec la suppression des quotas laitiers imposée par la Commission européenne et les gouvernements de droite au nom de la « libre-concurrence », ce qui va entrainer comme dans d’autres filières le cycle infernal « hausse de la production/chute des prix/ruine des plus fragiles/concentration des exploitations/re-hausse de la production, etc ». Un gouvernement du Front de gauche assumera ses objectifs de maintien de l’emploi par le maintien des quotas, la fixation d’un prix minimum imposé à la grande distribution et coopératives. C’est avec des revenus que les prodcuteurs de lait pourront payer leur coût de remplacement du dimanche…

Question de Sylvain57 : Comment pensez vous qu’il soit possible de produire de la viande au cours de l’amérique latine, du lait au cours de l’océanie et des céréales au cours de l’europe de l’est en ayant des charges françaises et des contraintes environnementales qui nous obligent à laver plus vert que vert ?

Ambroise Mazal : Vous évoquez là la politique ultralibérale de l’Union européenne cautionnée par les gouvernements de droite, qui multiplient les accords de libre-échange avec les grandes puissances agricoles du monde. Il est clair que le choix de notre alimentation n’est pas réaliste sans disposer des outils de souveraineté alimentaire et de préférence communautaire. Il est urgent d’enrayer la concurrence déloyale d’importations agricoles de produits dont les normes sociales et environnementales sont à mille lieux des nôtres, et qui entraine la ruine de nos filières et la concentration des outils de production. Nous assumerons notre politique et mettrons un veto à la multiplication des accords de libre-échange au niveau européen. Pour autant, c’est la seule solution pour préserver notre agriculture, et non le sacrifice des objectifs de bon sens écologique que l’agriculture productiviste doit parfois retrouver…

En tant que « 3ème homme » depuis ce matin, quels sujet spécifiques aux questions agricoles pouvez vous, Front de Gauche, introduire (ou ré introduire) dans le débat pour pousser les autres partis à se positionner ? Quid de la spéculation sur les marchés de matières premières qui irait en accord avec votre mobilisation plus large sur les questions financières ?

Ambroise Mazal : Vous posez effectivement la question de la clarté des priorités de nos partenaires y compris à Gauche face à la question de la financiarisation des marchés agricoles. Il n’est pas supportable que les revenus des producteurs dépendent des aléas et des intérêts des » boursicoteurs » à Chicago ou à Londres. Jean-Luc Mélenchon s’est clairement positionné pour la sortie de l’agriculture de l’OMC, pour la protection des marchés régionaux et pour l’exclusion des acteurs spéculatifs des marchés agricoles, en accord avec notre priorité pour l’économie productive plutôt que la spéculation financière. Le travail plutôt que le capital ! Autre sujet sur lequel nous voulons convaincre nos partenaires dans la perspective d’un gouvernement de Gauche : la priorité à l’agriculture paysanne pourvoyeuse d’emplois et respectueuse des écosystèmes. La politique, c’est faire des choix dans le soutien aux différents modèles agricoles.

Bonjour, president du syndicat agricole MODEF de l’Allier (03),je me préocupe beaucoup des petites et moyennes exploitations agricoles si importantes dans l’existance du tissus rural.Pour moi je pense qu’il serait bienvenu dans votre programme ( vue la situation dans laquelle se trouve bon nombre de nos collegues), de prévoir une proposition visant à un désendettement des petites et moyennes exploitations agricoles garantes de l’autonomie alimentaire de notre pays ,productrice d’une alimentation saine et d’un comportement positif sur l’environnement .Nos exploitations familiales ayant pour beaucoup investie dans des periodes fastes afin d’ameliorer leur outil de travail, se retrouvent aujourd’hui acculées financierement par cinq années d’augmentation vertigineuse des charges.Seriez vous pret Monsieur MELANCHON à étudier cette proposition avec nos syndicats et en faisant en sorte bien sur que seule les petites et moyennes structures en soient bénéficiaires ? Le malaise est grand dans nos campagnes( même s’il est occulté par bon nombre de politique),ne nous decevez pas et je pense que nous pourrons faire du bon travail ensemble. Amicalement et bonne campagne, Jean pierre FOURNIER.

Ambroise Mazal : Merci pour cette question en cours de tchat. Il est effectivement nécessaire de reconstituer un pôle bancaire dédié au soutien aux agriculteurs et bien évidemment aux exploitations les plus pourvoyeuses d’emploi. Il ne nous paraît pas acceptable que le Crédit Agricole ait été destitué de cette vocation. Par ailleurs, vous soulignez à juste titre la question de l’endettement des exploitations qui est la source notamment du désespoir de nombre de producteurs (en particulier dans le bassin allaitant de votre région) et qui parfois les acculent jusqu’au suicide. OUI, un plan de désendettement des exploitations est nécessaire auquel les pouvoirs publics, les syndicats et les acteurs économiques doivent être associés. Mais c’est aux causes qu’il faut s’attaquer : d’une part, arrêter d’encourager systématiquement à l’investissement (par exemple, l’octroi d’aides uniquement pour une plus grande mécanisation et non pour l’autonomie des systèmes agronomiques), d’autre part, enrayer l’érosion des prix et des revenus qui pousse à la concentration des outils de production. Il incombe au prochain gouvernement de Gauche de redonner espoir et envie aux actuels et futurs paysans. Trois fermes valent mieux qu’une grande !

Ambroise Mazal n’a pas eu le temps de répondre aux nombreuses questions que vous lui avez posée pendant cette heure de Tchat en direct. Il s’est engagé à y répondre. La rédaction de Terre-net Média les publiera dès qu’elle les aura reçues.


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