Mélenchon, c’est l’anti Le Pen

mardi 15 novembre 2011.
 

Un article rédigé par l’un des contributeurs réguliers du Plus (Nouvel Observateur) mérite une réponse. Le titre de ce billet pose une question : "De Mélenchon à Le Pen : la crise économique rapproche-t-elle les extrêmes ?" Question à laquelle, on l’a compris, une fois l’article lu, tout est fait pour que le lecteur se dise : oui, ces deux là disent la même chose.

Je voudrais dire combien je trouve ce type d’analyse affligeante et dangereuse. Affligeante d’abord. Aucune analyse sérieuse du discours du Front de Gauche confronté à celui du Front national n’est proposée dans cet article. Aucune.

L’auteur de ce billet qui se présente comme un "observateur politique" n’a manifestement pas pris le temps de lire le programme du Front de Gauche "L’Humain d’abord", déjà vendu à plus de 200.000 exemplaires, ni celui du FN. C’est regrettable. Si ce monsieur avait pris le temps de faire ce travail minimum avant d’écrire, il aurait pu constater combien les propositions du Front de Gauche sont à l’opposé de celles du FN. Voici quelques exemples.

Nous voulons fixer par la loi un écart maximum entre les salaires, le FN est contre. Nous voulons augmenter le SMIC à 1700 euros. Le FN est farouchement contre. Nous proposons, en France comme en Europe, de libérer l’économie et la société de la domination des actionnaires, des banques et des marchés. Le FN veut sortir de l’euro pour continuer à mener la même politique libérale. Nous défendons la laïcité. Le FN stigmatise nos concitoyens musulmans mais se tait sitôt qu’au profit d’autres confessions, certains bafouent la grande loi de 1905.

Une banalisation du discours

Enfin, le Front de Gauche pense qu’en 2012, il faut mettre au cœur de l’action politique le partage des richesses, alors que le FN n’en dit rien et montre encore les étrangers et l’immigration comme principaux responsables de la crise. J’arrête. Cette liste pourrait continuer longtemps. J’invite donc notre "observateur politique" à me citer une seule proposition programmatique qui serait commune entre le Front de Gauche et le FN.

Mais, ce type d’analyse n’est pas seulement affligeant par sa superficialité. Elle révèle un parti pris nuisible à la démocratie. Je m’explique. Si, sitôt qu’un responsable politique de gauche dénonce avec conviction les injustices flagrantes du monde dans lequel nous vivons et qu’il propose des mesures de rupture avec cet ordre injuste, une voix s’élève pour l’insulter, le traiter de démagogue, le comparer à l’extrême droite, alors il n’y a plus aucun débat politique possible.

Si sitôt qu’un homme de gauche reparle, pour les mettre au cœur de son action, "d’ouvriers" de "salariés", de "pauvres", et s’indigne du fait qu’il y ait des "riches" qui voient leur fortune augmenter en pleine crise, ou des "patrons" qui se comportent de façon scandaleuse avec leurs salariés, une voix s’élève pour dire que c’est le vocabulaire de l’extrême droite, alors nous avons perdu la bataille des mots. Et c’est grave.

Avec une telle logique, seule une poignée de responsables politiques, jugés, on ne sait pourquoi et par qui, "réalistes et raisonnables", seront pris au sérieux dans les médias et l’injure servira d’argument pour faire taire les autres.

Enfin, la petite musique jouée contre Jean-Luc Mélenchon sur l’air de "méfiez-vous de lui, même si ce qu’il vous dit vous plaît, il ne vaut pas mieux que Le Pen" est indigne et blessante. Elle est aussi une façon indirecte d’aider Mme Le Pen à banaliser son discours xénophobe.

Gare donc, être blogueur occasionnel a des exigences. La première d’entre elles est de se défaire de sa paresse en travaillant son sujet. La seconde est de ne pas se cacher derrière un nom pompeux "d’observateur politique" quand on cherche en fait à faire passer son opinion partisane. La troisième est le respect pour les personnes et leur combat.


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