De Besancenot à Poutou... Où en est le NPA ?

mardi 25 octobre 2011.
 

3) Le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) s’enfonce dans la crise (article Le Monde)

Difficile moment que cette campagne présidentielle pour le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).

Depuis qu’Olivier Besancenot, candidat du parti en 2002 et 2007, a annoncé en mai qu’il ne se représenterait pas, le NPA s’enfonce chaque jour un peu plus dans la crise. Et la décision d’élire une "coordination de campagne", qui fait revenir sur le devant de la scène des anciens de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) comme Alain Krivine ou François Sabado, ne devrait pas arranger la situation.

Le but de cette coordination : "L’animation de la campagne au jour le jour", explique Alain Krivine.

Mais pas question d’y voir autre chose : "Il ne s’agit pas du tout d’une autre direction ! se défend M. Krivine. Ce n’est pas une double organisation.""S’il y a des désaccords sur certains points politiques importants, ce sera le comité exécutif [la direction du parti] qui tranchera, affirme également Christine Poupin, une des deux porte-parole du NPA. Cette coordination aura une légitimité à organiser mais pas à trancher."

Autre son de cloche chez Myriam Martin, également porte-parole du parti, qui pointe une "dualité de directions qui peut surprendre" : "Il y a une ambiguïté qui demeure avec cette volonté de formaliser les choses. Un certain nombre d’entre nous n’était pas opposé à un élargissement du comité exécutif, mais pourquoi l’élire ? Ça laisse dubitatif sur l’efficacité de tout ça..."

UNE "DIMENSION DE TYPE JURASSIC PARK"

Cet épisode illustre une nouvelle fois les divisons profondes qui minent la direction du parti ces derniers mois. Après le congrès de février, le NPA s’est scindé en deux, notamment sur la question du positionnement vis-à-vis du reste de la gauche radicale. D’un côté, aujourd’hui majoritaires, les partisans d’une ligne dure, hostiles à toute discussion avec le Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon. Parmi eux, Olivier Besancenot, Alain Krivine ou Christine Poupin.

De l’autre, les partisans d’un dialogue plus ouvert avec le reste de la gauche de la gauche. Parmi eux, Pierre-François Grond, ancien bras droit de Besancenot, Myriam Martin ou encore Guillaume Liégard, trésorier du parti. Ce dernier voit dans le retour de Krivine et Sabado une "dimension de type Jurassic Park".

"C’est un signal envoyé, affirme-t-il. Ces derniers mois, on est dans la continuité de la négation de ce qu’a été le NPA". A sa création en 2009, le parti d’Olivier Besancenot voulait tourner la page de la Ligue communiste révolutionnaireet ambitionnait de devenir un grand parti de masse. Neuf mille militants avaient alors poussé la porte du parti. Aujourd’hui, officiellement, ils ne sont plus que 6 000.

"C’EST UN BOULOT TERRIBLE"

Illustration de ces divisions, le choix en juin de la candidature de Philippe Poutou, un ancien de Lutte ouvrière (LO). L’enthousiame des troupes pour faire campagne pour cet ouvrier métallurgiste de 44 ans n’est pas toujours au rendez-vous. Inconnu du grand public, le candidat plafonne autour de 0,5 % quand le facteur de Neuilly avait fait 4 % en 2007.Une candidature qui complique d’autant la chasse aux parrainages.

"C’était le même problème quand Besancenot s’est présenté pour la première fois, souligne Alain Krivine. Les signatures, ça représente un effort matériel énorme pour les militants : il faut faire des centaines de kilomètres, revenir plusieurs fois. C’est un boulot terrible."

Officiellement, une centaine de promesses de parrainages ont déjà été engrangées. Rien d’inquiétant cependant pour Alain Krivine, lui-même candidat à la présidentielle de la LCR en 1969 et 1974 : "Il y a du boulot mais on reste confiants." D’autres voient le temps filer et sont moins sereins. "On va demander aux militants de mettre les bouchées double pendant les vacances de la Toussaint", indique Myriam Martin. "Même dans la majorité, il y a un problème de conviction", affirme pour sa part Guillaume Liégard, avant de lâcher : "Ce ne sont pas les 100 premières les plus faciles à obtenir, mais bien les 100 dernières."

LEMONDE.FR Raphaëlle Besse Desmoulières

2) Quand Poutou va mal... (article Le Parisien)

A peine entamée, la campagne présidentielle du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) semble déjà grippée. Depuis qu’Olivier Besancenot a décidé de renoncer à se porter candidat, les troupes peinent à soigner désaccords et tensions. Et la désignation surprise pour 2012 de Philippe Poutou, un ouvrier de 44 ans inconnu du public et des militants, n’a rien arrangé. Autopsie d’un malaise.

Un candidat mal préparé.

Pour remplacer la figure emblématique du facteur Besancenot, le NPA a misé sur le profil de Philippe Poutou : ouvrier, responsable syndical (CGT) dans son usine automobile de Blanquefort (Gironde). « L’avantage avec lui, se réjouit Alain Krivine, dirigeant historique du parti, c’est qu’il tranche avec tous les candidats. » Poutou n’est pas un professionnel de la politique, mais un militant de la base. « Ça le rend sympa, mais il n’est pas au niveau, persifle un membre du parti trotskiste. Etre militant ne suffit pas, candidat à la présidentielle, c’est du boulot ! » Or Poutou manque de temps pour se préparer.

D’abord, parce qu’il y a quatre mois, il n’imaginait pas une seconde se lancer dans la course. Ensuite parce qu’il travaille cinq jours sur sept. « J’ai de longues journées », concède le candidat qui profite des allers-retours à Paris pour lire les fiches que lui concoctent ses « camarades ». Son emploi du temps devrait être allégé prochainement, mais cela suffira-t-il ? « Beaucoup de militants en doutent  », soupire une dirigeante.

L’ombre pesante de Besancenot

Le facteur de Neuilly (Hauts-de-Seine) a beau avoir décidé de ne pas être candidat du NPA, il continue d’aimanter l’attention des caméras. « On va faire campagne ensemble », justifie Poutou.

Officiellement pourtant, Olivier Besancenot n’est pas porte-parole. Juste un « militant comme les autres ». L’ancien candidat reste toutefois bien plus présent que les deux porte-voix officiels du parti, Myriam Martin et Christine Poupin. « On ne comprend pas très bien cette situation, rouspète un membre de la direction. Quand on dit qu’on veut redevenir un militant de base, on laisse la place. » A moins de vouloir revenir pour se poser en sauveur de l’extrême gauche ? « C’est exclu ! » jure l’entourage du facteur.

De son côté, le « petit nouveau » ne voit pas d’un mauvais oeil la présence de « l’ancien » qui le « briefe régulièrement ». Ce dimanche, la direction du NPA compte toutefois clarifier la question du statut de Besancenot dans la campagne.

Deux lignes en conflit

L’annonce du départ de Besancenot a fait éclater au grand jour les divisions du NPA. Depuis le mois de juin, deux tendances s’opposent. D’un côté, les tenants d’une ligne dure qui veulent se tenir à l’écart du Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon. Parmi eux, Poutou, Besancenot et une partie des historiques, dont Krivine. De l’autre, les partisans d’un dialogue plus ouvert avec toutes les forces à la gauche de la gauche. «  Le rejet de Sarkozy est extrêmement fort, on devrait pouvoir embrayer plutôt que de s’enfermer », déplore un dirigeant du parti.

Ava Djamshidi

1) France : où en est le NPA ? (par Alain Krivine)

Beaucoup s’interroge aujourd’hui sur le NPA, sa crise, voire sa quasi disparition, en tous cas son échec. Après avoir été encensé pendant près d’un an, sa mort est annoncée quasiment chaque semaine dans les médias français. Et pourtant il est toujours là mais il importe de connaître ses problèmes car ils ne concernent pas que la France.

En effet on assiste en Europe à un véritable paradoxe : alors que la crise du système capitaliste est plus évidente que jamais et qu’elle a réussi à convaincre par ses conséquences sociales dramatiques des millions de gens que ce système était injuste et intolérable, les organisations anticapitalistes n’en n’ont pas profité et connaissent même des difficultés : cf l’échec électoral du Bloc de gauche au Portugal, la stagnation de Die Linke en Allemagne, les difficultés de l’Alliance Rouge et Verte au Danemark ou des coalitions Antarsya et Syrisa en Grèce. Cette crise systémique voit plutôt se développer l’extrême droite populiste ou des courants radicaux comme les Indignés (Espagne, Portugal ou Grèce). Parfois elle a permis l’explosion de véritables révolutions, mais qui ne débouchent pas encore sur des solutions anticapitalistes (Tunisie, Egypte, Syrie, Libye etc..).

En France, le NPA s’est construit, il y a deux ans avec 9000 adhérents dont moins de 3000 issus de la LCR, son candidat Olivier Besancenot obtenant près de 5% à l’élection présidentielle et apparaissant dans tous les sondages comme un des hommes politiques les plus populaires du pays. Aujourd’hui le NPA a un peu moins de 5000 adhérents (3200 votants à la dernière conférence nationale, il y a quatre mois) dont la moitié n’était pas à la LCR, Il est traversé par de nombreux débats et certains parlent d échec du projet. Signalons que la situation du reste de la gauche de gauche n’est pas plus brillante : Quelques groupes avec quelques centaines de militants. Le seul parti qui a, pour le moment, réussi à stabiliser sa chute historique étant le PC, grâce à un front unitaire constitué essentiellement avec une scission de gauche du PS (2 à 3000 militants) derrière un ancien ministre Jean Luc Mélenchon. L’axe de son parti (le Parti de gauche) c’est : La révolution par les élections.

Le PC n’est plus une force nationale, mais reste une référence. Il est organisé autour de ses derniers bastions électoraux (environ 8000 élus et quelques centaines de mairies) avec des scores dans ces places résiduelles qui peuvent atteindre 20%, alors qu’ils ne sont que de 2 ou 3% dans le reste du pays. La moyenne d’âge de ses 70.000 adhérents est assez élevée. Si le Front de gauche a réussi à enrayer la chute du PC, il ne bénéficie pas pour le moment d’une dynamique que susciterait la crise. Et stagne autour de 5 ou 6%.

En revanche le ras le bol contre le gouvernement et le système est très fort. Il s’est manifesté, il y a plusieurs mois par une succession de journées de grèves générales et de manifestations de rue massives pour protester contre un nouveau système de retraite Mais l’absence de grève générale prolongée a fatigué les travailleurs et a abouti à l’échec de tous ces mouvements impulsés et controlés par les directions syndicales sans aucune possibilité de structure d’auto-organisation. Aujourd’hui, dans ce climat de ras le bol ou tout est possible, les travailleurs sont déboussolés ne croient plus en aucune alternative et s’ils donnent la majorité au PS lors de la prochaine présidentielle, ça sera uniquement pour chasser Sarkozy.

La création du NPA

Elle est dans la logique de ce que nous avons toujours expliqué dans la LCR : à savoir que pour des tas de raison historiques, la section française de la IVe Internationale, politiquement indispensable, ne pouvait avoir la prétention de rassembler tous les révolutionnaires et que quand les conditions le permettraient il faudrait s’ouvrir à des gens d’accord avec nous sur les tâches mais pas forcément sur tous les bilans historiques. Or, il y a deux ans, le pays connaissait de fortes mobilisations sociales dans une période de radicalisation politique. On sentait que des milliers de gens, notamment des jeunes étaient attirés par l’anticapitalisme sans pour autant se réclamer du « trotskysme » et ne se reconnaissaient plus dans la gauche institutionnelle (PC et PS). Le projet du NPA en devenir était donc de rassembler le maximum de militants sur une base anticapitaliste claire : indépendance de classe, refus de toute cogestion institutionnelle avec le PS et donc de toute coalition gouvernementale PS-PC, internationalisme, féminisme, écologie. Bref, des bases essentielles où nous laissions en débat, outre le bilan du passé, tous les problèmes stratégiques de prise du pouvoir et de sa gestion.

Ainsi nous faisions appels aux inorganisés mais aussi aux libertaires, aux écologistes anticapitalistes, aux militants PC, aux altermondialistes, aux militants syndicalistes ou associatifs. La plupart des nouveaux adhérents qui répondirent à cet appel n’avaient jamais été organisés politiquement. Leur point commun était d’en découdre avec la droite et les fascistes sans faire confiance à la gauche. Quelques dizaines sont venus du PC ou des libertaires, quelques uns des Verts. Enfin plusieurs groupes (Fraction de LO) ou tendances organisées sur le plan international (IST et CIO) sont entrés dans le NPA en plus de la IVe Internationale. En revanche à la différence des regroupements anticapitalistes au Portugal ou au Danemark, aucune organisation de la gauche radicale en tant que telle n’a accepté de se joindre au processus. La LCR en tant qu’organisation s’est donc retrouvée seule pour aider à construire ce nouveau parti A cette étape, la percée médiatique assez exceptionnelle dans l’opinion d’Olivier Besancenot nous a aidé considérablement même si, en même temps, elle faussait un peu les analyses. Combien de gens nous demandait d’adhérer au « parti d’Olivier » et qu’il « devienne Président »... Ainsi grâce à Olivier mais surtout au message qu’il faisait passer pour des millions de gens, nous nous sommes retrouvés à 9OOO avec des niveaux de politisation et d’exigence très différents.

Au sein même du parti, certains débats ou divergences politiques ont été plus ou moins consciemment occultés mais vont ressurgir quand Olivier décidera, il y a quelques mois, de rester à la direction du parti mais de ne plus être son porte-parole. Entre temps quelques milliers d’adhérents vont disparaître du fait des nouvelles difficultés de la situation politique et du militantisme. Souvent ils restent à nos cotés mais ils avaient eu trop d’illusions et le militantisme quotidien d’aujourd’hui ne les attire pas. Peu sont partis pour des raisons politiques, peut-être quelques dizaines, nous trouvant trop « sectaires » ont rejoint le Front de gauche.

C’est dans cette nouvelle conjoncture à la fois riche d’explosions possibles mais lourde des défaites passées que des débats assez durs traversent le parti, la plupart du temps animés par des anciens de la LCR. Si quasiment tout le monde est d’accord, au moins en principe, avec la tactique du Front unique dans l’action avec les réformistes, il y a divergences tactiques ou stratégiques sur la frontières des alliances, notamment électorales avec le PC et le Front de Gauche. Si là encore presque tout le monde est d’accord de ne pas participer à un gouvernement avec le PS et le PC, une forte minorité pense qu’on peut faire des alliances électorales avec ces forces gouvernementales quitte à les lâcher quand viendra le moment où elles soutiendront un gouvernement de gauche. La majorité du NPA pense que si l’unité est indispensable dans l’action, il ne faut pas créer d’illusions sur le plan électoral d’autant plus qu’une bonne partie de nos sympathisants reprochent justement au PC tout ce qui est magouille électorale et institutionnelle. Il y a donc un débat à venir sur tous les phénomènes de radicalisation en cours et comment elle s’exprime. Et c’est vrai que nous touchons désormais deux types de public différent : un public de gauche assez politisé et relativement vieux qui pensent que nous sommes sectaires et qu’on devrait être l’aiguillon radicale d’une union de toute la gauche et un public plus jeune et plus populaire qui d’ailleurs s’abstient souvent aux élections et qui ne veut plus entendre parler de tous ces jeux institutionnels et n’a pas plus confiance dans la gauche que dans la droite avec souvent cette réflexion : « Au moins Olivier, il est comme nous ».

Certes les débats sont parfois plus difficiles au NPA avec toujours la crainte de les voir monopolisés par les anciens de la LCR. Ceci dit quoi qu’en pensent certains, il ne faut ni regretter la LCR ni considérer que notre démarche de regroupement a été un échec.

Il y a des périodes dans l’ histoire où les révolutionnaires sont tellement isolés que leur sale tâche est de se regrouper entre convaincus et de maintenir le drapeau en attendant de meilleurs vents. C’est ce que la IVe Internationale a justement fait. Nous étions 120 quand j’ai adhéré au PCI dans les années 60... mais on ne peut pas continuer à théoriser cette situation quand la période change totalement comme aujourd’hui avec une crise sans précédent du capitalisme, la disparition du stalinisme et partout de nouvelles générations de combattants. C’est à nous avec elles de refonder des outils et des perspectives révolutionnaires adaptées à la nouvelle période avec tous les hauts et les bas qu’on va connaître Malgré toutes ces difficultés conjoncturelles, le NPA a une audience que n’avait pas la Ligue. Ses militant(e)s sont partout présent(e)s voit parfois à l’origine de structures unitaires avec toute la gauche politique et syndicale (lutte sur les retraites, défense des immigrés, droit des femmes, écologie, défense de la santé etc..). L’annonce de la non candidature de Besancenot a fait le tour des médias pendant plusieurs jours.. A nous maintenant de faire connaître le nouveau candidat à la présidentielle, Philippe Poutou dirigeant ouvrier CGT d’une des rares grève à succès pour sauver plusieurs centaines d’emploi chez Ford à Bordeaux.

La grande difficulté à laquelle nous sommes confrontés est celle du seuil de crédibilité politique. Le NPA est connu et reconnu dans les mobilisations, Olivier souvent accueilli avec enthousiasme à la porte des entreprises ou dans la rue, mais dans la période de crise terrible que nous connaissons, la masse des travailleurs ne croient pas en nos solutions qui impliquent une telle mobilisation qu’elles deviennent utopiques et alors c’est le choix simpliste des mots d’ordre populistes ou, quand la droite est au pouvoir, le vote utile PS pour la chasser parce que c’est le minimum crédible. D’un certain point de vue, la crise est venue trop tôt et avec des effets terribles, au moment où commençait seulement à se construire dans plusieurs pays une gauche anticapitaliste. Cependant tout est possible y compris de profondes explosions sociales dans une période où le mouvement ouvrier est en pleine recomposition et où la crise n’en est qu’à ses débuts. Le développement des gauches anticapitalistes en Europe est lié aux mobilisations à venir et à notre capacité à construire une organisation à la fois ouverte et unitaire mais aussi ferme sur les grandes options révolutionnaires.

Alain Krivine


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