Le rétablissement du droit à la retraite à 60 ans est une question majeure pour la primaire comme pour la présidentielle 2012 (Gérard Filoche)

mardi 27 septembre 2011.
 

Ce n’est pas un jeu de chat et de souris ni de petite phrase. C’est une question aigüe, sensible, décisive. C’est là-dessus depuis 2010 que Sarkozy a plongé dans les sondages, parce qu’il a voulu tuer la retraite à 60 ans.

8 millions de français ont manifesté au moins une fois en 2010 contre la sale loi Sarkozy-Woerth-Fillon de pillage de nos retraites. Il y a 75 % de l’opinion qui est profondément attaché au retour au droit à la retraite à 60 ans.

Un droit c’est un droit, ça ne se mégote pas. Les 35 h c’est les 35 h ça n’est pas à la carte. 48 h c’est 48 h, la durée maxima d’ordre public social. Le Smic est le même pour tout le monde, ça ne se mendie pas branche par branche. L’ordre public social ne se découpe pas en tranches. 60 ans c’est 60 ans, ce n’est pas une retraite à la carte. L’ordre public social dans ce pays, ça signifie encore quelque chose.

Le droit légal de prendre sa retraite à 60 ans, c’est un droit, pas une obligation : mais c’est un droit pour tous, pas découpé en rondelles.

Je n’arrive pas à comprendre la pression qui s’exerce sur la position de Martine Aubry quand celle-ci semble s’excuser à la télévision : « – Je ne suis pas une caricature, je ne défends pas la retraite à 60 ans pour tous ». Au contraire, il faut défendre vigoureusement UN DROIT OUVERT A TOUS contre les vraies caricatures de ceux qui fabulent sur une société avec des centenaires partout : ils n’ont jamais regardé de prés le corps des humains qui travaillent entre 55 et 65 ans, encore moins un homme devant son marteau-piqueur, (il y a 1,2 million d’ouvriers du bâtiment)… Et il faut arrêter, hélas, de parler de l’allongement de l’espérance de vie : il est lié à la retraite à 60 ans et aussi au maintien d’une politique de santé pour tous. Aux USA, cela fait de nombreuses années que l’espérance de vie recule. Et même si elle augmentait, quelle importance, si le travail, lui n’augmente pas réellement au-dessus de 55 ans.

Pas un syndicaliste de ce pays, pas un salarié qui ne regarde pas cette question de prés et qui ne soit pas troublé actuellement par ce que dit Martine Aubry. Alors qu’on veut mobiliser pour la soutenir, c’est le principal point d’interrogation.

Il y va du sort de millions de salariés, de femmes surtout : retour vers une retraite misérable ou non ? Car ce dont il s’agit, c’est du niveau de la retraite perçue : y aura t il baisse massive du niveau de vie des retraités ou non ? Dire qu’on redistribue les richesses et baisser drastiquement le niveau des retraites, c’est tromper. Dire qu’on refuse l’austérité et la rigueur et l’imposer aux personnes âgées, c’est tromper. Dire qu’on lutte contre le chômage des jeunes et vouloir maintenir les « seniors » au travail, c’est tromper. Nous sommes en plein boom démographique depuis 11 ans. Il n’y aura pas de recul du chômage de masse, sans réduction du temps de travail sur la semaine, sur l’année, sur la vie. A quoi ça sert de défendre les 35 h en allongeant (d’ailleurs en vain) la durée du travail sur la vie ?

Et attention, les salariés sont avisés, ils ont largement débattu en 2010 de la question des retraites, ils savent ! La question des retraites vaut des millions de voix.

Si on dit « le retour à l’âge légal de 60 ans, ce ne sera pas pour tout le monde », il y a des millions de salariés qui le perçoivent comme un très mauvais signal. Qui est le « pas pour tout le monde » ? Les jeunes qui commencent à avoir un CDI en moyenne vers 29 ans ? Les « seniors » dont 1 sur 2 est au chômage à 55 ans (et cela s’est aggravé ces dernières années).

La vérité c’est que dans la vie réelle, les salariés cotisent 36 annuités.

On n’est pas dans le fantasme, là, mais dans la réalité. Depuis que la droite a imposé 40 puis 41,5 annuités, c’est allé à l’envers dans la vie réelle, les salariés ont été obligés de travailler moins, ils sont licenciés, chômeurs, inaptes, malades, écartés du travail à partir de 55 ans. Dans ces conditions, imposer 41, 5 annuités, c’est les faire sauter à la perche sans perche. Ils n’y arrivent pas. Cela se traduit par 5,5 années de décote donc une retraite infiniment plus basse avec laquelle il n’est pas possible de vivre décemment. C’est une mort sociale.

Et pourtant dans la lettre de Martine Aubry diffusée à un million d’exemplaires aux Français : « Je veux vous parler de la France », il est écrit (page 5) : « …le rétablissement du droit à prendre sa retraite à 60 ans, et à taux plein pour ceux qui ont commencé à travailler tôt ou exercé des emplois pénibles… ».

Il faut être clair : ceux qui sont fatigués, usés et qui ont commencé tôt doivent pouvoir partir AVANT 60 ans. Dés l’âge de 55 ans, 2 maladies sur 3 sont en effet liées au travail, la biologie du corps humain est inchangée et, dans le bâtiment ou dans les transports et d’autres métiers à forte pénibilité physique et mentale et horaires atypiques, c’est cela qui se discute ! Dix ans de travail de nuit c’est 15 ans de vie dépensée. Idem pour les 3X8, 4X8, etc. Ce ne sont plus les coups de grisou qui tuent mais les accidents cardiaques et vasculaires, il y en 250 000 par an et entre 1/3 et 50 % sont liés au travail ! 100 000 hommes et 50 000 femmes meurent entre 60 et 62 ans, doivent-ils avoir cotisé toute leur vie sans bénéficier d’un seul jour de retraite ?

Entre 60 et 65 ans ce sont les plus belles années de la retraite, et entre 60 et 65 ans, ce sont les plus dures années au travail. Pour tout le monde.

Tous les salariés doivent avoir le droit de partir à 60 ans s’ils le souhaitent et de façon décente sans décote. Le nombre d’annuités nécessaires pour le taux plein peut être discuté, mais il ne peut être irréaliste. Si c’est 41,5 annuités, seul un petit nombre est en position de l’atteindre à 60 ans, voir à 62 ans dans l’état actuel du marché du travail.

L’honnêteté, c’est de partir du réel, de le reconnaître : si la moyenne de travail réelle des Français est de 36 annuités, c’est le chiffre qui doit être retenu comme référence. Si on réussit à faire reculer le chômage et que cela augmente dans la vie réelle et que cela monte à 37, puis 38, puis 39, puis 40, que le nombre d’annuités cotisées exigées suive ! Mais fixer un objectif inatteignable, c’est inacceptable, c’est une tromperie.

Pour le financement, il y a une variable que la droite s’est toujours refusée à faire jouer alors qu’elle les a sans cesse baissées : il faut faire varier les cotisations salariales en fonction des besoins du paiement des retraites.

Gérard Filoche


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