Mélenchon fait place comble pour son premier meeting de campagne (par LILIAN ALEMAGNA, Libération)

samedi 9 juillet 2011.
 

Jean-Luc Mélenchon a réussi son décollage. Pour son premier meeting de campagne, en plein air, place de la Bataille de Stalingrad à Paris, le candidat du Front de gauche pour la présidentielle a réuni hier soir plus de 4000 personnes. Arrivé sur scène après les interventions de tous les leaders des formations qui composent cette alliance à la gauche du PS, le coprésident du Parti de gauche (PG), accoudé sur son pupitre, savoure ce qu’il vient de réussir avec ceux qui sont assis derrière lui : présenter un candidat commun de la gauche radicale à la présidentielle. Performance ratée en 2007 avec l’échec des collectifs antilibéraux qui avaient suivi la victoire du « non » au traité constitutionnel européen. Le député européen prévient ses concurrents : « Il est fini le temps de l’éparpillement ! Enfin nous pouvons avancer ensemble devant le pays ! »

« L’heure des caractères »

Jean-Luc Mélenchon porte son uniforme traditionnel de campagne : costume noir, chemise blanche, cravate rouge sombre. Le « bruit et la fureur » ont été remplacés par un ton plus lent, posé, toujours haut mais plus solennel. Parfois plus proche de l’imitation du Général de Gaulle que des effets oratoires traditionnels du tribun Mélenchon. Effet de surprise garantie. L’ancien socialiste vante le « sens du sérieux et des responsabilités » du Front de gauche.

« La saison des tempêtes est revenue dans l’histoire, se lance-t-il. Tout ce désordre est le fait d’un capitalisme fou ! » Les « frères et soeurs grecs » sont célébrés, comme sont condamnés « les belles personnes qui [ont] dépecé [leur] pays ». « L’heure des caractères a sonné », reprend Mélenchon avant de rendre hommage à l’action syndicale. « Le premier devoir d’une conscience libre... c’est de résister ». Le public le coupe : « Ré-sis-tance ! Ré-sis-tance ! » « La France n’a rien à faire en Lybie »

Le candidat « salue » alors « les militants communistes » qui l’ont investi à 59% puis leur donne les gages qu’ils souhaitent. « Notre bataille, notre Front de gauche tâche de mettre ses pas dans les vôtres ». « Nous ne sommes pas réunis pour célébrer un candidat mais notre force collective », a-t-il précisé en début de discours. Du « je » maintes fois reproché par les alliés communistes, l’ancien socialiste passe au « nous ».

« Place à l’humanité », s’enflamme-t-il. Il répète ses axes de campagne : « récupérer » les « 195 milliards passés des poches du travail à celles du capital », la titularisation des « 800.000 précaires » dans la fonction publique, « interdiction dans les entreprises, petites ou grandes, qu’il y ait plus de 5% à 10% de contrats précaires » avec un « CDI [qui] redevienne la règle », un salaire maximum avec une échelle de un à vingt et une « planification écologique ».

Sur le plan international, Jean-Luc Mélenchon répète sa revendication d’une sortie des troupes française d’Afghanistan mais aussi de Lybie où « la France n’a rien à faire » puisque c’est « une guerre civile ». « Nous avons fini de défigurer la révolution qui avait commencé à naître », justifie-t-il après avoir soutenu dans un premier temps l’intervention.

Internationale et Marseillaise

Pas un mot sur ses anciens camarades socialistes français, ni sur Sarkozy et le gouvernement Fillon, une courte critique du Front national de Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon reste sur son terrain : donner une identité à sa candidature Front de gauche. Il appelle ainsi « le pays à se mobiliser comme il l’a fait en 2005 et renouer le fil qui s’était rompu après les 55% des Français qui ont dit ’’non’’ à l’Europe libérale ». L’ancien ministre de Lionel Jospin finit en citant tout un couplet de Ma France de Jean Ferrat. Il en a tiré son slogan de campagne : « La France, la belle, la rebelle ». Internationale et Marseillaise en clôture devant les drapeaux rouges et tricolores.

Dans les coulisses, Pierre Laurent se réjouit du « signal envoyé ». « Les gens sentent qu’il peut se passer quelque chose de ce côté de la gauche », assure le chef du PCF. Sous une tente, Clémentine Autain, ancienne adjointe au maire de Paris apparentée communiste, nouvelle venue dans le Front de gauche, est tout sourire : « C’est la première fois qu’on fait tous un meeting politique ensemble qui ne soit pas lié à une contestation sociale, qui ne soit pas un ’’non’’ mais un ’’oui’’. Ça fait tous dix ans qu’on attend ça ». Après le crash de Dominique Strauss-Kahn, le refus de décoller d’Olivier Besancenot, les turbulences que rencontrent les écologistes et l’attente que s’imposent les socialistes avec la primaire, Jean-Luc Mélenchon et le Front de gauche sont le premier équipage à être en ordre de marche pour 2012.


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