FMI : Lagarde candidate des banques et du système au poste de directeur

mercredi 1er juin 2011.
 

Soutenue par la France, l’Allemagne, l’Europe, la ministre de l’économie est bien appréciée par Wall Street. Les émergents protestent contre la mainmise américano-européenne. Sans surprise, hier, lors d’une conférence de presse, Christine Lagarde a annoncé sa candidature au poste de directeur général du Fonds monétaire international (FMI) en remplacement de Dominique Strauss-Kahn. La ministre a annoncé avoir pris cette décision « en accord avec le président de la République et le premier ministre ». Menacée d’une possible enquête de la justice française pour «  abus d’autorité » en faveur de Bernard Tapie dans le différend opposant l’affairiste à l’État à propos de la cession d’Adidas, elle a affirmé que dans tous les cas elle maintiendrait sa candidature.

Le gouvernement allemand a annoncé soutenir celle-ci, suivi par la Belgique et le président de la Commission européenne. En France, l’UMP a applaudi. Côté opposition, le socialiste Jérôme Cahuzac s’est contenté d’objecter la menace du procès pour paraître critiquer le choix de Nicolas Sarkozy. Il a probablement voulu atténuer la mauvaise impression donnée par le soutien de Martine Aubry à la candidature Lagarde. Roland Muzeau, porte-parole des députés communistes et citoyens, a dénoncé en Christine Lagarde une « experte (...) en complicité avec les milieux affairistes ». Effectivement, la ministre, ancienne dirigeante d’un cabinet d’affaires de Chicago, est très appréciée par Wall Street. Jean-Luc Mélenchon a affirmé que « ce sont toujours les États-Unis et eux seuls qui ont le dernier mot ».

Quel qu’il soit, le prochain directeur général du FMI sera confronté à cette contrainte et tout donne à penser que Christine Lagarde n’a pas l’intention de la desserrer. On touche là aux limites des réformes engagées sous l’ère Strauss-Kahn. Confrontés à la crise la plus grave depuis l’après-guerre, les États-Unis et les pays capitalistes dominants ont redonné un rôle très important au Fonds, notamment en triplant ses moyens financiers. Cette influence nouvelle participe du tournant de la crise marqué par une intervention publique inédite. Mais, dans la mesure où l’objectif premier de cette intervention est de soutenir la rentabilité des capitaux contre l’emploi, les salaires, les dépenses publiques utiles, elle contribue à relancer toutes les difficultés. On le constate dans les pays européens (Grèce, Irlande, Portugal) où le FMI intervient aux côtés de l’Union européenne, imposant aux peuples des politiques de super-austérité dévastatrices.

Pour que le FMI joue un rôle utile, il faudrait donc qu’il modifie les critères de son soutien aux politiques monétaires des États, qu’il s’émancipe du dollar en mettant sur pied une nouvelle monnaie universelle de coopération. Ce sont là certaines des raisons qui ont poussé mardi le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud à dénoncer l’accord tacite permettant aux États-Unis et à l’Europe de se partager les responsabilités au sein du FMI et de la Banque mondiale, l’Oncle Sam gardant au total le pouvoir. Pourtant, l’Europe a une carte à jouer en acceptant la main tendue des pays émergents.

Pierre Ivorra, L’Humanité


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