Réfléchir sur les crises : l’étude des cycles économiques passés

vendredi 29 avril 2011.
 

Comment anticiper l’évolution du capitalisme mondialisé et peser sur elle  ? Nous l’indiquions la semaine dernière, l’étude des cycles économiques passés marqués par des périodes de croissance, suivies par d’autres de difficultés, permet une certaine anticipation des crises et peut aider 
à leur trouver des solutions. La réflexion 
sur la grande dépression des années 1930, au siècle dernier, a été de ce point de vue un moment très important. Elle a notamment nourri les propositions du grand économiste anglais John Maynard Keynes en faveur 
d’une intervention publique de soutien à la fois à l’investissement et à la demande sociale afin de lutter contre le chômage et redresser l’économie. Celles-ci, en opposition avec les théories libérales dominantes, ont aidé à trouver une issue à la crise après guerre -et contribué à la phase d’essor de l’économie occidentale durant la période dite des trente glorieuses.

Cette crise des années 1930 a également inspiré un autre grand économiste, l’Autrichien Joseph Schumpeter (1883-1950). Lui s’est particulièrement intéressé aux cycles longs d’une soixantaine d’années mis à jour par Nicolas Kondratieff en centrant son explication sur le rôle de l’innovation. C’est l’apparition d’innovations majeures, d’un progrès technique, stimulé par la recherche du profit, qui entraîne le développement de l’économie. Durant cette période d’une trentaine d’années, l’économie progresse. Mais la généralisation de l’innovation épuise la capacité de celle-ci à assurer des profits et à promouvoir la croissance et explique le retournement du cycle, la crise qui s’étale elle aussi durant une trentaine d’années.

Dès la fin des années soixante, tirant parti notamment de ces travaux, l’économiste marxiste et communiste Paul Boccara 
a affirmé que le capitalisme entrait dans une nouvelle phase de difficultés après l’essor de l’après-guerre. Poussant plus loin les analyses de Marx, il a montré que l’accumulation effrénée de capitaux matériels et financiers 
par rapport à la production, l’excès d’exploitation des travailleurs exacerbés par la révolution technologique en cours sont à l’origine des crises. Il a aussi montré le rôle des transformations institutionnelles et politiques, avec, par exemple, les nationalisations à 
la Libération, dans la résolution des crises. Sur quoi peut déboucher cette fin de longue phase de difficultés que nous vivons aujourd’hui avec la crise de 2007-2008 et ses suites  ? Pour Paul Boccara sur un possible dépassement du capitalisme et un début de changement de civilisation. Mais cette histoire-là n’est pas encore dans les manuels, elle est à écrire.

Pierre Ivorra, L’Humanité


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