Henri Weber et sa fausse alternative au Front National

mardi 19 avril 2011.
 

Hiérarque du PS, Henri Weber a de l’entregent. En 2007, à l’occasion de son mariage avec sa compagne de toujours, Fabienne Servan-Schreiber, plus de 800 personnes participèrent au pince-fesse sous le chapiteau parisien du Cirque d’Hiver. Que du beau monde : des artistes, des journalistes, des hommes et des femmes politiques, des patrons du CAC 40. Alain Minc y croisait le PDG de L’Oréal, Kouchner, fringant ministre, retrouvait ses anciens camarades socialistes, et l’inénarrable Gérard Miller eut ce mot, rapporté par la presse : « Si on n’est pas là ce soir, c’est qu’on n’existe pas socialement ». Une version « de gauche », en quelque sorte, de l’aphorisme énoncé plus tard par Séguéla : « Si on n’a pas de Rolex à 50 ans, c’est qu’on a raté sa vie ».

Henri Weber est un homme précis. Dans une tribune libre publiée dans le Monde au lendemain du second tour des cantonales – intitulée : « le FN, un programme antinational »
- , le député européen du PS déroule chiffres et statistiques pour dénoncer les propositions avancées par l’extrême droite en matière économique, particulièrement celle qui concerne la sortie de l’euro. Et de donner en contre-exemple de ces mauvaises manières « les gouvernements européens grec, portugais, irlandais, espagnols (qui) tournent résolument le dos à la politique réactionnaire proposée par le Front national  ». Misère !

Il n’est pas dans notre propos d’engager le débat sur la sortie ou non de l’euro, ni de discuter du «  programme » économique du FN, pour le moins indigent et parfaitement contradictoire depuis que le père a passé le relais à la fille. Mais force est de constater que le soi-disant réalisme de gauche – réalisme rampant devant la finance - défendu par Weber consomme le divorce entre les « élites progressistes » et le monde du travail. Et ouvre un boulevard à l’extrême droite.

Ainsi, il n’existerait pas d’alternative à la politique imposée par la commission de Bruxelles et le Fonds Monétaire International, politique dont les pays cités par Weber font douloureusement les frais ! Ce n’est d’ailleurs pas l’appel incantatoire à la formation d’un gouvernement économique européen qui rassurera les classes populaires et les classes moyennes, prises dans l’étau de la mondialisation financière et qui aspirent à une alternative que la gauche-caviar leur interdit expressément d’envisager !

C’est cette désespérance qui alimente l’abstention et le vote Le Pen.

Il n’est donc pas étonnant qu’à treize mois de l’élection présidentielle, la situation politique prenne une tournure singulière. Marine Le Pen caracolant en tête dans les sondages, reste donc à savoir qui l’affronterait au second tour, le PS ou l’UMP. Certes, le champion de la droite est passablement discrédité, y compris dans son propre camp. Mais le peu de profit qu’en a tiré la rue de Solférino aux cantonales, face à une abstention massive et à un FN à 20%, n’autorise à aucun optimisme.

C’est dans ce contexte préoccupant que la direction du PS vient de rendre public son projet. A sa lecture, les bras nous en tombent ! Trois ans après le début de la pire crise économique depuis les années 30, alors que le monde entier vit un bouleversement sans précédent, nos bons camarades nous indiquent audacieusement la voie : réinventer les emplois jeunes et la police de proximité ! Il fallait y penser ! La crise de l’euro, le pacte européen de compétitivité concocté par Sarkozy et Merkel ? Soyez confiants braves gens, demain les socialistes européens raseront gratis. Sortir du libéralisme, se donner des armes pour contrer la finance ? Inutile de les chercher, la rue de Solférino n’y pense même pas.

Ce projet asthénique n’ouvre pas de réelle perspective de changement de cap dans notre pays. Il ne peut pas servir de base à l’indispensable rassemblement de la gauche en 2012.


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