Analyse de la stratégie anti-unitaire du NPA

dimanche 24 août 2014.
 

À droite de la droite, un Front National uni.

À gauche de la gauche les divisions subsistent : le NPA est devenu le Nouveau Parti Autiste.

Texte du 12 mars 2011

Introduction : la dialectique marxiste.

L’une des difficultés majeures de la lecture du Capital de Karl Marx et plus généralement de la maîtrise de la pensée marxiste, ne réside pas dans la compréhension des définitions techniques des concepts économiques, ni même dans la formalisation quantitativiste plus récente de la théorie de la valeur à l’aide du calcul matriciel qui n’existait pas encore du temps de Marx, mais dans la compréhension de ce que sont le matérialisme dialectique et le matérialisme historique qui sous-tendent leurs développements. Raison pour laquelle, il est difficile de comprendre cette pensée sans avoir au préalable étudié la logique dialectique du philosophe Hegel dont Marx a fait une récupération critique. Ainsi, par exemple, la compréhension de la valeur et de la forme valeur est à la fois philosophique et économique.

Il ne suffit donc pas de se réclamer, par exemple, de la socialisation des moyens de production et d’échanges, de proclamer que la lutte de classes est le moteur de l’Histoire, de réciter que "L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ” :, etc. pour être marxiste. Encore faut-il avoir assimilé cette pensée dialectique et être capable de l’appliquer dans les différents domaines de la science (en particulier des sciences humaines), de la philosophie, de l’économie, de la politique, c’est-à-dire d’appréhender les phénomènes de ces différents domaines dans le développement de leurs contradictions internes et externes. D’autre part, comme le rappelait Lénine, en étudiant la philosophie marxiste, il est nécessaire d’avoir une approche multilatérale des phénomènes, on dirait aujourd’hui multidimensionnelle et pluridisciplinaire.

Il est donc clair que la pensée marxiste ne peut être dogmatique et ne peut calquer sur le réel des schémas préconstruits. Même si la dialectique de la partie et du tout, la dialectique de la forme du contenu font de Marx un précurseur de la systémique du XXe siècle, le marxisme n’est pas un système et ne défend pas plus un esprit de système. L’approche historique nécessite d’analyser les rapports politiques dans une dynamique évolutive et contradictoire, avec sa part d’aléatoire, tenant compte notamment des changements dans les rapports de force entre groupes sociaux.

À l’opposé de cette méthode historique et dialectique, on trouve des postures intellectuelles et affectives calées sur des représentations statiques, monoblocs, substantialistes et mécanistes dont l’intégrisme (de la catéchèse marxiste laïque à l’intégrisme catholique, par exemple) est une forme particulière parmi d’autres.

Le communautarisme identitaire ; le clanisme, qu’il soit de nature syndicale, associative, politique, religieuse, favorisent ce mode de fonctionnement mental non dialectique. (Mais sans aller chercher ces exemples extrêmes, la pensée libérale est le plus souvent non dialectique).

L’archaïsme de ce mode de fonctionnement clanique vient de loin et le recours à l’anthropologie politique nous permet de mieux comprendre le comportement archaïque de certains adhérents de formations politiques. Le clanisme distingue l’intérieur et l’extérieur (du clan), le pur et l’impur (un des éléments source du racisme), les dépositaires de l’ordre et de la cohésion et les fauteurs de désordre et de dissociation, etc. Jugements à l’emporte-pièce, généralisations abusives, stigmatisations, utilisation de boucs -émissaires , réductionnisme en tout genre, etc. deviennent alors monnaie courante dans un tel contexte clanique. Le "handicap social" de cette pensée dialectique est qu’elle est plus complexe, plus abstraite, moins spontanée qu’une pensée mécaniste souvent simplificatrice. Elle demande donc un effort intellectuel non négligeable, pour qui n’ a pas l’habitude de l’utiliser.

La trilogie du NPA : du discours au réel.

Examinons maintenant la nature politique du NPA en se référant à ses propres thèses.

Pour se donner une base de discussion, nous allons examiner, à la lumière de sa pratique, sa trilogie : unité, radicalité, indépendance qui constitue son schéma directeur.

L’unité.

Dans un article intitulé : Une exigence d’unité et de radicalité, par Pierre-François Grond, on peut lire :

"... Dès lors, l’exigence d’unité et de réponses radicales face à une crise globale sont les enjeux déterminants de cette séquence. Il s’agit de savoir, au-delà de mobilisations larges et unitaires contre le pouvoir, si la gauche radicale sera au rendez-vous. Au rendez-vous des luttes et des confrontations sociales. Au rendez-vous des réponses anticapitalistes, de la définition d’un programme de rupture face au défi de la crise générale du système…

... Elle doit s’unir pour favoriser les mobilisations et les résistances, elle doit s’unir autour d’un programme de rupture et avec une stratégie indépendante du PS. C’est la condition de la reconstruction d’un nouveau mouvement émancipateur" (source : http://www.npa2009.org/content/une-... )

Or ces propos encourageants ne constituent que de séduisantes déclarations sans rapport avec la pratique réelle du NPA.

Une unité autour d’un programme ?

En effet, alors que le front de gauche essaie de constituer un programme commun de rupture pour la gauche du PS (appelée aussi l’Autre gauche, la gauche de la gauche, la gauche antilibérale, etc, peu importe la terminologie), le NPA ne fait aucun effort pour participer à l’élaboration de ce programme partagé. Or l’élaboration d’un programme alternatif à la gauche réformiste et au programme réactionnaire de démolition des acquis sociaux constitue un enjeu essentiel, absolument fondamental non seulement pour battre la droite électoralement, mais surtout pour permettre aux luttes sociales de mieux se développer et d’avoir un débouché politique. En refusant de participer à la construction de ce programme en commun avec toutes les forces antilibérales ou anticapitalistes, le NPA devient un allié objectif de la grande bourgeoisie, dont précisément l’un des objectifs principaux est d’empêcher la constitution et la popularisation d’un tel programme unitaire qui puisse remettre en cause son hégémonie. Pourtant de nombreuses expériences historiques, dont celle de mai 68, ont montré que, même avec des mouvements de masse de longue durée, les luttes sociales pouvaient déboucher sur un renforcement de la droite ou à la mise en place d’un pouvoir autoritaire s’il n’existait pas de programme unitaire de rechange porté par une gauche organisée digne de ce nom. Nous allons examiner les raisons d’un tel refus.

Une unité d’action ?

D’autre part, remarquons que les luttes sociales unitaires récentes ne se sont pas constituées à l’initiative de quelques groupuscules dont le NPA, mais à l’initiative de différentes organisations syndicales qui ont su construire, non sans difficultés il est vrai, une unité de combat et de propositions.

Mais, une fois de plus, sans alternative politique claire, ce mouvement social reste fragile et permet au pouvoir en place une intransigeance arrogante.

Cette dialectique entre nécessité d’un programme unitaire alternatif et les luttes sociales échappe complètement ou NPA, non pas dans les mots, mais dans la pratique effective.

Essayons d’identifier les causes d’une telle attitude.

On peut lire dans les principes fondateurs du NPA de février 2009 : "C’est dans le mouvement social que progresse la prise de conscience, que l’idée d’un nouveau monde s’élabore, que la satisfaction des exigences populaires pose la question de qui dirige la société…." (Source http://fr.wikisource.org/wiki/Princ... )

Contrairement à une représentation schématique et fantasmagorique du mouvement social, l’unité et la conscience politique ne naissent pas spontanément dans l’action même si celle-ci contribue à les renforcer. Avant même l’action de manifester ou de faire grève, les motifs et les analyses présidant à l’action sont déjà dans la tête du manifestant ou du gréviste : l’action n’est pas la cause mais l’effet. La continuation ou l’arrêt d’un mouvement social ne se réalise pas plus spontanément : elle résulte d’une analyse individuelle et collective (et notamment de la part des représentants syndicaux), des rapports de force et des enjeux.

En réalité, le NPA ne dispose pas d’une théorie révolutionnaire, ou disons plus simplement d’une réflexion rationnelle et réaliste profonde, qui lui permettrait d’avoir une pratique révolutionnaire. Il comble ce vide théorique par la croyance quasi religieuse en la magie révélatrice de l’Action. C’est en participant à des manifestations et à des grèves, de préférence les plus larges et plus longues possibles, que la classe opprimée, inventerait en quelques mois voire même quelques jours un nouveau projet de société et un programme de gouvernement au service du Peuple, et ce, cela va sans dire, grâce aux conseils éclairés du NPA dont la vocation naturelle serait dans un tel contexte d’augmenter considérablement ses effectifs.

"C’est par le développement et la généralisation des luttes, des grèves généralisées et prolongées que l’on peut bloquer les attaques, imposer des revendications. C’est le rapport de forces issu de la mobilisation qui peut permettre la mise en place d’un gouvernement qui imposera des mesures radicales en rupture avec le système et engage une transformation révolutionnaire de la société" (source : principes fondateurs du NPA) Alors une fraction du NPA se dit, avec LO : À quoi bon donc se prendre la tête, se fatiguer, à élaborer collectivement un projet de société et un programme de gouvernement ? Cela ne sert à rien ! Les masses populaires en lutte, l’élaboreront eux-mêmes et nous serons là pour les aider !

Mais les aider comment ? En participant aux luttes, étendard au vent mais aussi : "Nous participons aux élections pour défendre nos idées, pour rassembler très largement la population autour de notre programme." (Congrès fondateur).

Ouf ! la référence à un programme existe tout de même ! C’est le programme du NPA !

Mais dans quel contexte un tel programme pourrait s’appliquer ?

" À l’échelle nationale, l’application d’un tel programme impliquerait la confrontation avec les classes dominantes, et exigerait une formidable mobilisation populaire, susceptible de faire émerger de nouvelles formes de pouvoir qui donneraient à un gouvernement anticapitaliste les moyens de sa politique." (Congrès fondateur).

En effet, mais alors comment un programme élaboré par un parti – groupuscule isolé pourrait-il avoir l’appui des masses populaires

nécessaire à son application ?

En fait un tel programme devrait impliquer, dès le départ, un maximum de forces pour participer non seulement à son élaboration mais aussi à son explication et sa diffusion auprès de la population. Ce ne peut être qu’un programme partagé par le maximum de forces politiques situées gauche du PS et non par l’une quelconque force isolée telle : le POF. FASE, POI, POF, NPA, PG, PCF, M’PEP, etc. L’Histoire a tranché : l’absence d’un tel programme unitaire se solde par un score électoral ne dépassant pas 10 % globalement.

Le PCF, le PG, le GU ont tiré les leçons de cette expérience : ils font l’effort d’élaborer un programme commun. Un nombre croissant de militants des autres formations au niveau local, dont celle du NPA, ont pris conscience de cette nécessité. Des dirigeants du NPA ont même quitté leur parti ayant bien compris que cette politique clanique, qualifiée à juste titre, d’isolationniste, n’avait aucune efficacité politique et ne faisait qu’accentuer les divisions.

Mais soyons juste, ce clanisme n’est pas une spécificité du NPA, à gauche du PS !

En résumé, sa conception de l’unité d’action ne s’articule pas sur une analyse rationnelle et stratégique sérieuse du mouvement social dans sa réalité concrète mais repose sur des représentations fantasmatiques de celui-ci. Bien entendu, je ne remets absolument pas en cause ici la sincérité, la générosité de ses quelques centaines ou milliers de militants qui se joignent, pour les soutenir, aux associations et aux syndicats en lutte, avec parfois pour toute récolte, de violents coups de matraque.

Une autre raison qui explique le refus de la direction du NPA de travailler avec le front de gauche pour le programme partagé est qu’elle considère cela comme un ralliement, une sorte d’alignement sur le PG et le PCF. Or, comme le rappelait Marine Le Pen lors d’un débat avec Jean-Luc Mélenchon, pardon, comme le rappellait Olivier Besancenot : " Mélenchon se revendique toujours des années Mitterrand et de la gauche plurielle. Il laisse la possibilité entrouverte d’appliquer, demain, son programme avec le PS. C’est une différence entre nous." (Libération. Mélenchon se revendique toujours des années Mitterrand et de la gauche plurielle http://www.liberation.fr/politiques... ).

Sans évidemment confondre les idées du NPA et du FN qui sont diamétralement opposées sur un grand nombre de points, il est intéressant de réécouter le débat Mélenchon - Le Pen entre la 32e et 38e minute du débat : http://www.dailymotion.com/video/xh...

Pendant ces six minutes, les accusations contre Mélenchon sont identiques à celles du NPA ! On peut se demander pourquoi. En fait, dans les deux cas, nous avons affaire à une pensée non dialectique, schématique, formaliste qui ne replace pas le comportement politique de Jean-Luc Mélenchon dans une dynamique historique. Nous allons examiner ce point plus loin.

Radicalité.

Les radicaux, c’est nous. Les autres ne sont que des réformiste ou social-traîtres ! Voilà comment on pourrait résumer brièvement la posture du

NPA.

Le NPA n’a pas pris acte ni de la création du parti de gauche, ni du changement stratégique du PCF.

On peut lire dans le texte de son congrès fondateur qui n’a pas été modifié par ce congrès de février 2011 ceci :

"Sans nous substituer aux luttes sociales, nous devons les impulser, y participer pleinement, y proposer nos idées et y faire nos propositions d’action car nous savons que c’est par la mobilisation la plus large possible que l’on peut stopper l’offensive capitaliste, imposer des avancées sur le terrain social, démocratique et écologique, ouvrir la voie au socialisme." ce qui complète ce qui a été dit ci-dessus. Le texte poursuit :

"Les partis de la gauche institutionnelle (PS, PC) et leurs alliés Verts ont abandonné depuis longtemps cette perspective. Le PS et le PCF n’ont plus de socialiste ou de communiste que le nom. Les Verts ont bradé leurs ambitions écologistes.

Au pouvoir, la gauche institutionnelle, dominée par le PS, tourne le dos aux aspirations populaires.

Dans l’opposition, elle n’organise pas la riposte contre les attaques de la droite et du patronat.

S’enfonçant dans la crise et perdant sans cesse du terrain électoral et militant, le PCF se laisse de plus en plus satelliser par le PS. Cependant il existe encore dans ce parti une force militante que nous retrouvons à nos côtés dans certaines de nos luttes."

On retrouve ici un discours typique d’une pensée non dialectique et clanique : jugements à l’emporte-pièce, pas de référence à une réalité concrète contradictoire, etc.

On oublie que Mélenchon a voté non au référendum européen de 2005, que le PG défend un programme très différent de celui du PS et est en fait plus proche de celui du NPA ; le PCF, sauf dans 7 régions, a fait alliance avec le PG et non avec le PS au premier tour des dernières élections régionales : le terme de satellisation est donc faux. D’autre part, les militants du PCF, n’attendent pas le NPA pour être présents dans les luttes sociales.

Radicalité dans l’action ?

Bernard Thibault, après consultation des salariés, appelle-t-il à l’arrêt d’un mouvement ? Alors celui-ci sera taxé par le NPA et LO de capitulard, de traître à la classe ouvrière, de vendu au Medef, d’avorteur ou freineur des luttes sociales, etc. Ce genre de jugements à l’emporte-pièce, s’explique à la fois pour des raisons de composition sociologique des partis dits d’extrême gauche, mais aussi par l’absence de pensée dialectique s’exerçant dans le monde concret.

Évidemment, il existe des situations exceptionnelles où la grève illimitée est envisagée par les salariés : cela survient dans les situations où ils n’ont plus rien à perdre : fermetures d’usines, licenciements massifs, ou existence de caisses de solidarité permettant de tenir longtemps.

Mais on ne peut ériger en règle générale ce genre de situation. Cela peut survenir aussi dans le cas de mouvements de masse exceptionnels mais dont le déboucher politique favorable aux salariés n’est pas pour autant assuré, surtout si une organisation politique alternative de masse n’est pas prête à prendre le pouvoir.

D’autre part, en se référant à l’ouvrage de Karl Marx, l’idéologie allemande, on peut se poser cette question : qu’est-ce qui peut faire dans les conditions matérielles d’existence que l’on puisse défendre de telles idées dites "radicales" ?

La réponse est ici simple et chacun pourra le vérifier, à quelques exceptions près, en interrogeant les personnes concernées : pour se permettre d’entreprendre une grève illimitée hormis les situations décrites ci-dessus, il faut pouvoir disposer de revenus permettant de tenir : celui du conjoint (ou de la conjointe), ou des parents ou d’un membre de la famille ou d’un ami, disposer d’une épargne, ne pas être étranglé par des échéances de remboursement d’emprunts ou le paiement d’un loyer relativement élevé, ne pas avoir de charges parentales importantes, ne pas être facilement licenciable, ce qui devient de moins en moins évident dans un contexte de précarisation généralisée de l’emploi.

Ces critères sont vérifiés pour une grande majorité des adhérents du NPA qui n’imaginent pas que ces critères ne sont certainement pas vérifiés pour la majorité du monde salarié. Ainsi ce genre de réalité concrète échappe aux responsables du NPA dont la pensée et pratique politiques sont hors-sol.

La pratique politique de division du NPA est donc en contradiction totale avec ses déclarations qui ne constituent donc qu’un rideau de fumée.

Radicalité économique ?

Un certain nombre de principes de base figurent dans les principes fondateurs mais aucun programme politique précis permet d’apprécier la faisabilité des mesures radicales affichées.

Des déclarations du type : "interdiction des licenciements boursiers" ne veulent rien dire si l’on ne définit pas les moyens politiques institutionnels nécessaires à leur réalisation.

Rappelons, pour ne prendre qu’un exemple, que l’article 107 de la loi de modernisation sociale proposée par les socialistes et communistes en 2002 a été rejetée par le conseil constitutionnel suite à un recours de la droite : il s’agissait en l’occurrence d’encadrer les licenciements !

Oui, bien sûr, dans les principes fondateurs du NPA on peut lire  : " Nous voulons en finir avec les institutions antidémocratiques de la Ve République (révocabilité des élus, représentation proportionnelle dans les assemblées,...)", mais la refonte des institutions nécessite une réflexion beaucoup plus profonde que ce genre de slogans électoraux.

C’est la raison pour laquelle le parti de gauche considère comme prioritaire la construction d’une VIe république en rupture avec la cinquième. Radicalité économique est indissociable de la radicalité politique sur le plan institutionnel.

En fait ce mot de radicalité n’a de sens que relativement à une situation économique historique donnée. Prendre des dispositions économiques et politiques pour que l’échelle des revenus soit de 1 à 20 constituent-ils une position radicale ? Oui et non, tout dépend des références que l’on se fixe.

Quoi qu’il en soit, cela constituerait un progrès considérable par rapport à la situation actuelle dont l’éventail des revenus est de très loin beaucoup plus large.

Radicalité dans le non-respect de certaines lois ?

Par exemple, dans les principes fondateurs on peut lire : :" sans hésiter à sortir du cadre étriqué de la légalité pour obtenir satisfaction, en tenant fermement les piquets de grève, en réquisitionnant les logements vides, en cachant les sans-papiers pourchassés, en désobéissant face à l’intolérable... ". Mais cette radicalité revendiquée n’a rien d’extraordinaire : tenir des piquets de grève est presque un travail de routine pour les syndicalistes en grève, investir des logements vides ou cacher des sans papiers sont des actions qui ont, par exemple, été menées par des mouvements chrétiens, etc.

Indépendance.

Mélenchon, l’ impur

Le NPA a évidemment raison de critiquer le PS pour son ralliement à une politique économique libérale, il a raison de critiquer la politique de la gauche plurielle qui a permis des privatisations notamment. Se poser des questions sur le ralliement possible du PCF et du PG au PS est aussi légitime. Et pour aller toujours dans ce sens critique, l’analyse du libéralisme du PS par le NPA reste très fragmentaire. Aucun travail exhaustif sur les mesures néo-libérales économiques et financières prises par le PS depuis les années 80 n’a été fait par le NPA. Le bilan est encore beaucoup plus lourd que son rabâchage sur les privatisations.

Mais sa vision des choses, encore une fois, est dépourvu de toute dialectique :

Lorsque Mélenchon se revendique des "années Mitterand, c’est par rapport aux acquis sociaux obtenus : nationalisations au début des années 80 suite à l’application du programme commun, retraite à 60 ans, loi des 39 heures puis de 35 heures, abolition de la peine de mort, et autres mesures sociales relatives notamment au monde de l’éducation de la culture. C’est à cela qu’il se réfère et non aux privatisations et au blocage des salaires dès les années 84. Le PS n’est pas l’ UMP.

L’action politique du PS n’est ni blanche ni noire : elle est contradictoire et ne voir qu’un aspect, en outre lacunaire, est faire preuve de formalisme dogmatique.

Jean-Luc Mélenchon s’est toujours situé à gauche du PS en constituant à diverses reprises des courants contestant la politique libérale de la direction. (Voir article de Wikipédia sur Mélenchon : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-L... )

Au lieu de rester isolé dans un groupuscule politique de type trotskiste (dont il est issu !), pour avoir une efficacité politique, il a préféré adhérer à un parti de gauche ayant un poids électoral, tout en essayant d’infléchir, de l’intérieur, ses orientations droitières.

En acceptant de devenir ministre de la formation professionnelle sous le gouvernement Jospin, il se trouvait forcément dans une situation contradictoire qu’il lui a fallu assumer.

D’un côté faire preuve de loyauté par rapport à son parti, dont l’orientation a été décidée démocratiquement après le vote des militants socialistes, loyauté par rapport au gouvernement et donc être obligé d’accepter certaines mesures économiques qu’il n’approuvait pas personnellement.

La question qu’il faudrait plutôt se poser est de savoir si Jean-Luc Mélenchon a eu une action néfaste dans le secteur dont il a eu la responsabilité en tant que ministre. Et là, silence radio ! Il est vrai que Mélenchon n’était pas chroniqueur à l’Express ou au Point comme Claude Allègre qui a réalisé l’exploit de se mettre à dos la totalité de tous les syndicats d’enseignants ! Ce qui vient d’être dit ici pour Mélenchon s’applique évidemment aussi pour les membres du PCF qui ont participé au gouvernement de la gauche plurielle.

Or c’est ce genre de contradiction dont la compréhension semble hors de portée pour le NPA : la référence à la pureté propre au clanisme, la quasi-absence de méthode de pensée dialectique enferment le NPA dans la prison de ses certitudes figées. Devenant un véritable étouffoir, un certain nombre de militants finissent par s’en échapper pour éviter l’asphyxie !

L’ Indépendance dépendante.

Il était rappelé lors du dernier congrès du NPA que : "... il faut poursuivre dans la voie de la construction d’un mouvement anticapitaliste clairement indépendant du PS." ( http://www.npa2009.org/content/apr%... )

Cette position est tout à fait compréhensible compte-tenu des orientations social-libérales du PS. On remarque que cette position est aussi celles du PG,PCF, du GU, c’est-à-dire du front de gauche.

Mais le fait de considérer que le front de gauche puisse faire alliance avec le PS au second tour des élections pour battre la droite l’empêche contradictoirement de prétendre à une telle construction, non pas dans les paroles, mais dans les des actes. En fait le NPA est hyper dépendant du PS car il conditionne la construction d’un programme anticapitaliste unitaire dont l’importance est vitale pour les travailleurs à un problème d’alliance électorale.

Pourtant, l’élaboration en commun, avec toute les force antilibérales ou anticapitaliste, d’un programme et d’un projet de société alternatifs ne devrait pas être subordonnée à des considérations d’alliances électorales mais constituer un travail politique à part entière.

Le NPA est obsédé par ce problème d’alliance jusqu’à considérer qu’un tel programme serait élaboré en faisant des concessions a priori au PS pour pouvoir maintenir une alliance de deuxième tour. Cette attitude est, en réalité, une attitude de capitulation par rapport au PS considérant implicitement que ce programme anticapitaliste unitaire serait minoritaire et ne pourrait remettre en cause l’hégémonie du PS sur le corps électoral de gauche.

Or l’objectif, dans une perspective offensive, est précisément l’inverse : mettre en minorité le PS muni de son programme social-libéral.

De fait, le NPA subordonne la construction d’un programme unitaire de masse à une simple stratégie électorale. Pour illustrer cette position, citons, par exemple, Jacques FORTIN

"L’unité aurait une dynamique propre, nous dit-on. Mais une dynamique vers quoi ? Question de rapport de force. Or les invocation de "la gagne", "être devant", le "score à deux chiffres" ne sont que méthode coué ou miroir aux alouettes. Surtout, encore une fois, quand cette unité ne comprend pas la ferme intention de tordre le cou aux directions du PS. Et je ne vois pas comment, en étant sérieux, on pourrait zapper cette question en arguant d’un bon programme, le contenu est indissociable de la stratégie, sinon alors, pour le coup, c’est très exactement du témoignage : on (mé)fait avec le PS en criant qu’il faudrait faire autre chose ! Ça s’est vu... " ( http://blogs.mediapart.fr/blog/jacq... ).

Or, répétons-le, la mise au point d’un programme et la mise au point d’alliances électorales demandent des réflexions politiques spécifiques.

Cette subordination de la construction d’un programme libérateur, émancipateur à des considérations d’alliances doctorales (en positif comme en négatif) constitue une forme d’électoralisme.

Contrairement à ses affirmations déclamatoires, le NPA est un parti électoraliste.

Un parti qui prétend intégrer les aspirations altermondialistes, écologiques, féministes, etc. devrait faire preuve de beaucoup plus d’ouverture et travailler activement avec toutes les autres forces : front de gauche, FASE,... Mais cela nécessiterait une maîtrise du matérialisme dialectique et historique, une mise à l’écart du clanisme.

La position 3 défendue lors de son dernier congrès, par une fraction du NPA, résume bien la situation :

"La crise du NPA renvoie à son orientation : le refus de s’adresser aux forces de gauche qui s’affirment en rupture avec l’orientation social-libérale du PS a jeté le trouble chez nombre de celles et ceux qui, en se tournant vers le NPA, cherchaient à construire de nouveaux chemins pour transformer radicalement la société. Sans parler d’un « nouveau » parti qui a eu les plus grandes difficultés à intégrer des traditions militantes diverses dans ses modes de fonctionnement. Que de temps perdu et d’énergies militantes gâchées !"

Mais il faut reconnaître que la tâche d’Olivier Besançon est extrêmement difficile, lorsque l’on lit, par exemple, un extrait de la position 4 (P4) du dernier congrès : " Le refus de la P1 a conduit la P2 à maintenir son propre projet d’appel, auquel nous avons apporté un soutien critique bien qu’elle ait refusé de répondre à notre proposition d’un appel commun P2-P4. Nous appelons la P2 à tirer les conclusions de son propre combat en mettant en œuvre la construction d’une grande tendance qui se batte pour rendre majoritaire le projet d’un NPA révolutionnaire." ,

On comprend qu’un certain nombre d’adhérents se sont dits du : "Qu’est-ce que je fais ici, dans cette galère ?" Et on comprend aussi pourquoi, la direction du NPA qui a tant de mal à maintenir l’unité de son propre parti, peut avoir des difficultés à construire une unité avec d’autres forces.

Le refus du NPA de travailler avec le front de gauche s’explique donc aussi par les contradictions internes qui traversent ce parti.

En conclusion : la catéchèse marxiste n’est pas dialectique.

Je signale, au passage, pour rejoindre mon introduction, une série documentaire sur Karl Marx, à France Culture, intitulée "chroniques marxiennes", rediffusion d’une série de 2009, dans l’émission les nouveaux chemins de la connaissance.

http://www.franceculture.com/emissi... .

Et, évidemment le site Actuel Marx : http://actuelmarx.u-paris10.fr

Des antidotes contre le marxisme religieux et catéchèses marxiennes :

Les problèmes de la dialectique dans Le Capital de Marx par M. Rosenthal

Explication et reconstruction du Capital par Jacques Bidet. Collection Actuel Marx Confrontation, PUF, 320 pages

Site : encyclomarx : le matérialisme dialectique : http://encyclomarx.ovh.org/index.ph...

Hervé Debonrivage


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