Madame Le Pen présidente : AVIS AUX MOUTONS LE GRAND MECHANT LOUP EST LA. SUIVEZ VOS BONS BERGERS !

jeudi 17 mars 2011.
 

Il y a le feu chez nous ! Enfants, craignez le loup et courrez vers vos bons bergers : madame Le pen est présidente. Le Front National est au pouvoir. Ou presque. Mauvaise blague. Mais un coup médiatique sans principe est en train de tourner au tremblement de terre politique. Le président Sarkozy ressort en chaussette de l’épisode. Dans quinze jour après le vote des cantonales, il ne lui restera même pas les chaussettes. Un monde est en train de basculer.. Un sondage bidonné suffit a provoquer un ouragan en Indonésie. L’effet papillon en politique est prouvé. Ben Ali et Moubarak en ont su quelque chose.

Profitant aussitôt de l’avantage concédé si facilement madame Le Pen pousse l’avantage. Elle porte plainte contre moi. Et contre la CGT. Dans les deux cas il s’agit pour elle d’obtenir que le FN soit considéré "comme un parti comme les autres". Pour les sondeurs et le journal "Le Parisien" elle est déjà "un parti mieux que les autres". Il s’agit donc de démontrer que la gauche, celle qui tient tête, elle, est "moins que les autres". Un coup monté de longue main où les compères ne manquent pas, à droite comme à gauche et dans les médias. Mais le cirque n’en a cure. Il est déjà aller battre la grosse caisse plus loin. Un rapide état des lieux s’impose.

Madame Le Pen porte plainte contre moi parce que j’ai dit qu’un « Français sur quatre n’est pas prêt à se donner à un fasciste ». Elle n’a pas lu Plantu, l’ami a dix mille euros du Qatar, et elle ignore donc que selon lui nous serions identiques. Assez blagué. Plainte ? Je l’attends de pied ferme ! Elle changera d’avis avant moi. Je ne suis pas accoutumé à défendre mes idées politique dans un tribunal notamment parce qu’il ne me semble pas que ce soit le lieu. Mais j’irai. Je demanderai moi-même la levée de mon immunité parlementaire. Elle est pourtant strictement réservée à ce genre de cas où la liberté de parole politique de l’élu doit être protégée. Madame Le Pen n’hésite pourtant pas à parler elle de « méthodes fascistes » à propos de l’invitation annulée à radio J sur l’injonction du président du CRIF. Lequel, elle sait comme moi n’est pas un fasciste. Juste quelqu’un qui veut exercer un pouvoir normatif communautaire sur la liberté de parole des autres. On l’a vu avec son interdiction de la réunion autour de Leila Shahid à l’ENS de Paris. Un pouvoir d’intimidation suffisante pour que, tout en protestant bien fort, madame Le Pen porte plainte de nouveau mais prudemment et bizarrement contre l’UEJF. Mais pas contre le CRIF. Pas téméraire la vague bleu Marine ! Quelques heures plus tard on apprenait qu’un nouveau sondage la plaçait en troisième position et que Strauss-Kahn redevenait le sauveur suprême de la gauche.

Ainsi, les rebondissements rocambolesques et inouïs de la société du spectacle qui ont suivi les jours après la publication du sondage bidon de l’institut Harris Interactive soulignent un changement d’époque politique. Je fais bref : nous voici dans l’ère du « Qu’ils dégagent tous ». Le système est à bout de souffle. Il tient par le spectacle qui distrait l’attention. Que pense-t-on du moment chez les Toulemonde ? ? Que la politique des libéraux ne mène nulle part. Inutile de dire pourquoi. Tous mes lecteurs le savent comme moi. Mais ce qui est, pour les esprits qui analysent et dissèquent, un fait politique est pour la masse des gens un fait de vie quotidienne. Elle voit un monde qui est non seulement injuste mais où on ne peut rien espérer. Un monde où tout doit être payé, cher, et où rien ne fonctionne vraiment comme prévu. Ni l’ascenseur du HLM, ni la hot line, ni le train, ni l’avion, ni les urgences, ni Pôle emploi, et ainsi de suite, toutes choses qui marchaient encore avant. Autrefois. C’est la grande régression que décrit Jacques Généreux. C’est un monde sans horizon. Sacrifice hier, sacrifice demain et après demain. Des efforts encore des efforts et des puissants qui se gobergent.

Les nôtres, à gauche, savent pourquoi. Ils ont l’apprentissage de la bataille collective, ils ont des traditions, des syndicats, des mots, de l’idée. Mais la droite populaire, la droite d’en bas ne sait rien. C’est à présent une meute affolée qui ne sait pas de quel côté se tourner. Son agitation exaspérée déstabilise à mort tout le système qui, au fond, ne repose que sur eux puisque les nôtres lui tournent déjà le dos. C’est dans ces moments que tout passe par la politique. C’est-à-dire par la capacité de mettre en mot le ressenti et de lui tracer un chemin. A droite cette fonction là est en panne totale. Pour moi tout part de ce fait qu’il n’y a plus de centre de gravité au pouvoir politique institutionnel.

L’écroulement de l’autorité de Nicolas Sarkozy à droite est le point de départ. Dans le vide, ce qui avance c’est la seule force cohérente qui combine en un tout une organisation, la notoriété d’un nom et une aptitude à donner un sens à la colère du grand nombre à droite et parmi les désorientés. Madame Le Pen est le vase communicant de la fuite de la droite populaire hors du camp Sarkozyste. Elle est en train de réussir dans son camp ce que nous, l’autre gauche, n’arrivons pas à faire dans le notre : siphonner les dominant, et prendre leur place, pour pouvoir enfin agir autrement que d’après les vieilles routines qui ont échouée. Comprendre sans perdre son sang froid, et balayer devant notre porte. Balayons : la division de l’autre gauche du fait du NPA nous cloue au sol. Les lenteurs et les frilosités du Front de Gauche étouffe sur la scène nationale une dynamique pourtant partout visible sur le terrain ! Ceci dit, ne perdons aucun des enseignements de ce qui vient de se passer pendant ces quelques jours.

Face au sondage bidon de l’institut Harris Interactive, il fallait résister ! Immédiatement ! Instantanément ! Comme lors de la parution du rapport du COR sur les retraites qui prétendait prévoir l’avenir sur quarante ans ! A l’époque nous avons résisté séance tenante. Et en deux jours étaient ridiculisés tous ceux qui s’y référaient. Ce point de départ nous facilita considérablement la tache de mobilisation contre la réforme Sarkozy. Cette fois ci je me suis senti un peu seul dans les heures qui comptaient, les premières. Sont en cause de misérables réflexes : le manque de sang froid, l’occasion médiocre de faire de coller sur le dos de tel ou tel autre la responsabilité de la situation, le gout de faire des bavardages sociologiques à deux sous, l’habitude de se coucher devant les injonctions de l’industrie du spectacle médiatique. Cependant ajoutons qu’il fallait répondre à un évènement dont personne ne savait rien. Il fallait donc jouer sur ses reflexes. Et précisément ce que l’on a vu n’était pas joli joli. Palme du cynisme, comme souvent à François Hollande qui a assumé de ne « pas critiquer les sondages » et aussitôt tiré parti du résultat pour exiger de tous les autres candidats de gauche qu’ils se retirent ! Ceci explique cela, évidemment. Je vais en parler. Finalement seule Ségolène Royal a aussi vu venir l’ennemi et sa grosse manipulation. Mais sur le champ, dans les heures d’émotion où des journalistes vous harcèlent pour répondre alors même que la plupart des éléments précis vous manquent, le nombre des résistants au bidonnage fut très restreint. Il fallait avoir une carcasse théorique solide ! Mais la suite a prouvé que mon reflexe était le bon !

Tachons de comprendre comment le bidouillage est désormais inscrit dans le code génétique des instituts de sondage. Aujourd’hui pire que jamais. Apprenez ceci. L’industrie du sondage butte sur un énorme problème. Le nombre de gens qui acceptent de répondre est déclinant. Les gens ne veulent plus participer à un exercice qui leur parait futile. D’ailleurs il est amusant de savoir qu’une « enquête » d’opinion a révélé que 54 % des sondés avouent mentir aux sondeurs. Ce qui laisse perplexe sur ce qu’il faut en conclure : mentaient-ils aussi à cette occasion ? Donc pour avoir une personne qui accepte de répondre dorénavant il faut faire vingt fois plus d’appels téléphoniques qu’avant. Vous suivez ? Quelle conséquence ? Il ne s’agit pas d’un aspect intellectuel. C’est une réalité matérielle. Cette situation fait que le cout de la réalisation d’un sondage augmente. D’où l’invention de nouvelles méthodes pour constituer un panel de personnes qui répondent. Dorénavant les sondeurs recrutent au hasard des gens qui acceptent d’être sondés. En échange il leur propose soit de l’argent (une camarade reçoit 2, 67 euros pour une série de question sur vingt huit minutes) soit contre participation à une loterie. Ce sont donc souvent des militants qui acceptent de s’inscrire. Mais eux-mêmes avouent qu’ils n’ont pas toujours le temps à perdre à pour se torturer le cerveau sur ce qui n’est pas de la politique. D’aucuns me disent qu’ils répondent donc n’importe quoi au bout de dix minutes. Le tout c’est de remplir toutes les cases pour arriver au droit d’être dans la loterie ou recevoir sa prime ou les deux à la fois. Harris Interactive met en place un tel système de participation à un jeu concours, très officiellement contrôlé par huissier. Il permet de gagner des lots qui sont en fait des chèques bancaires par tirage au sort. Selon le site d’information Mediapart, M. Lévy "est bien obligé de reconnaître" que son institut pratique une forme de "rémunération". "Pour attirer le chaland et le motiver à répondre à son enquête, réalisée sur internet. Au cas présent, comme tout le monde le sait maintenant, l’institut a organisé un jeu-concours et fait miroiter une récompense. Au final, on apprend que 7.000 euros ont été offerts à l’un des 1.600 membres du panel. Frédéric Dabi de l’Ifop, un autre spécialiste des sondages politiques, admet également que son institut dédommage les gens pour le temps passé à répondre. "Pour cela, on les inscrit à un programme de fidélisation, qui revient à 10 centimes d’euros par questionnaire, ce qui est extrêmement symbolique", a-t-il déclaré à l’AFP. "On ne veut pas instaurer avec eux de relations mercantiles". Ben voyons, c’est juste par amitié.

Apprécions mieux cette dimension de l’affaire en lisant cet extrait d’interview du patron de Louis Harris que j’ai trouvé dans Marianne 2. Voici la question : « Une personne « gratifiée » pour répondre à un sondage politique est-elle dans le même état d’esprit qu’un citoyen ? » Voici la réponse merveilleuse du manipulateur. « L’idéal de démocratie devrait amener les citoyens à participer sans le moindre stimulus. » Un détail : en quoi le fait de répondre a un sondage est-il un acte citoyen ? N’est-ce pas plutôt le contraire ? Voyons la suite « Aujourd’hui, on remarque que certaines catégories de population répondent plus facilement si elles entrevoient une forme de gratification potentielle ou envisageable. L’enjeu est évidemment de faire en sorte que le stimulus ne soit pas l’unique motivation à répondre à une enquête. » La phrase dit clairement que cependant la rémunération est une des dimensions de la motivation. Comment ce biais est-il lui-même ensuite corrigé ? L’est-il ?

« A Harris Interactive, déclare son patron, nous avons, après avoir effectué des recherches, opté pour la participation à une sorte de loterie. Il s’agit là de la stimulation ayant le moindre impact social. La probabilité de "gain", reste extrêmement faible. Tant qu’à la fin des questionnaires un nombre conséquent d’interviewés nous remercierons de leur avoir « donné la parole », nous pourrons considérer que « l’appât du gain » n’a pas porté atteinte à la sincérité des réponses. » Sans commentaire tant le cynisme est grossier. Notons que personne ne saura jamais qui, ni combien, ont remercié ce monsieur de leur avoir « donné la parole ». Ce que l’on sait : c’est cela que promet sa notice d’incitation à s’inscrire dans un panel de sondés « gratifiés » pour « influencer les décideurs ».

Ce sondage Louis Harris était donc un sondage « en ligne ». Il a donc été réalisé en questionnant des sondés « gratifiés » et bien clientélisés. Non seulement qu’il n’y a aucune certitude sur l’identité de celui qui répond mais il n’y en a pas non plus sur ses motivations : répondait-il à des questions ou avançait-il vers la case d’accès à la loterie ? Ce sondage était aussi un sondage « omnibus ». C’est-à-dire que les questions sur la présidentielle sont posées entre deux questions sur la mairie de Paris et sur la qualité de divers produits cosmétiques. Inutile de dire que tout cela aggrave considérablement tout ce que l’on dit d’habitude contre ce type « d’enquête ».

Mais tout de même ! Ca ne faisait pas bon genre de contester la validité du sondage. Des années de débat, des centaines de textes et de livres sur la question, tout Bourdieu (haï de la caste des médiacrates) tout Champagne, pour ne parler que d’eux ont été rayés de la carte intellectuelle par un petit monde cynique et avide de bons coups qui évitent de réfléchir et de créer des stratégie de conquête politique fondée sur de la conviction. C’est tellement plus confortable de commenter un sondage en se donnant le beau rôle sur le mode « ce n’est pas de ma faute c’est celle du voisin ». Dans ces heures difficiles, la voie doucereuses de la capitulation prend mille intonations sinueuses : « il ne suffit pas de casser le thermomètre pour faire tomber la température », « tout de même, il n’y pas de fumée sans feu », « il ne faut pas faire l’autruche ». Et ainsi de suite ! Il ne s’agit pas de nier que l’extrême droite avance. S’il en est ainsi c’est parce qu’elle se nourrit d’abord de l’extrême décomposition de la droite Et ensuite de l’effondrement de la sphère politique dans un spectacle sans contenu ! On le sait ! Mais dans ce cas il s’agit de ne pas participer à la manœuvre de ceux qui affirment sans fondement que le premier parti politique du pays serait le Front national et qu’un français sur quatre serait prêt à donner les clefs de la maison à l’extrême droite !

N’empêche, c’est bien joué. Le piège du sondage bidon de l’institut de massage électoral louis Harris a fonctionné à mille pour cent, avec la complicité plus ou moins consciente de bien des belles personnes. Le résultat de l’enquête a été pris pour argent comptant. Comme si avait un fondement la pseudo réalité que met en scène un sondage. Dés lors, ce qui n’existait que dans l’alambic bricolé d’un sondage omnibus est devenu une réalité. Puisqu’elle était en débat. Le débat a créée la réalité du résultat du sondage dans les esprits de ceux qui recevaient l’information. J’ai nommée « méta-réalité » cette réalité fondée par le fait « qu’on en parle ». Le mot désigne un « au delà du réel » comme le mot métaphysique désigne un discours qui prétend décrire la réalité au delà du monde physique. Un au-delà qui n’existe pas. Mais dont l’existence supposée fait agir très concrètement dans la réalité vraie. C’est ce qui s’est passé là. En plaçant madame Le Pen en tête du premier tour tout le débat politique s’est aussitôt recentré sur la magouille de la stratégie électorale. En ce sens la méta-réalité est un moment de la réalité. Il faut en jouer nous aussi. Appuyons nous sur l’indignation et le soupçon que déclenche cette opération pour frapper le système qui les produit. C’est le moment de militer pour la loi Sueur Leonnetti, adoptée à l’unanimité du Sénat. Quand viendra-t-elle en débat à l’assemblée ? Faisons d’une pierre plusieurs coups : discréditons les instituts de sondages, dénonçons le gouvernement qui ne veut pas d’une loi comme celle-ci et préfère la magouille.

En attendant, les pauvres progrès accomplis dans le débat sur le fond ont été aussitôt anéantis. Retour à la case départ. Pour affronter le diable de confort il faudrait se regrouper sans condition vers nos chefs de meute auto proclamés. Pour aborder cet aspect du sujet je vous donne à lire un éditorial que j’ai découvert dans les « Dernières Nouvelles d’Alsace ». C’est un texte réconfortant. Il l’est en ceci qu’il montre comment de tous côtés, et notamment parmi les professionnels des médias des interrogations se font jour, des remises en cause peuvent s’opérer par delà tous les corporatismes et les engagements. Car nombreux sont ceux qui sentent qu’une limite a été atteinte. Cette fois-ci un pallier dans la déchéance de la démocratie politique pourrait être franchi. Ce que vous allez lire rend plus urgent que la loi, expression de la volonté de tous fasse respecter l’ordre public démocratique qui est incompatible avec les mœurs de les mercantis du type de cet institut qui vendraient père et mère pour un coup de pub. Les consciences sont mures pour cette loi !

« Où va-t-on, amis journalistes ? L’éditorial d’Olivier Picard. Les Dernières Nouvelles d’Alsace – 9 mars 2011. « Et si on refusait, nous, les journalistes, de nous soumettre à la dictature des sondages ? De refuser d’entrer dans la ronde infernale de ces enquêtes d’opinion dont les rouages secrets nous échappent ? De rejeter l’abrutissement progressif que nous assène la mesure d’une majorité sur tous les sujets ? De ne pas répondre à ce besoin de vérifier que nous sommes comme il faut, que nous pensons comme il faut, que nous choisissons au supermarché comme il faut, que nous avons des comportements comme il faut à la maison, dans la rue et jusque sous la couette ?

Réaction, extrême sûrement, à une dérive extrême. Contestable, évidemment, par son manque de nuance, et par son utopie qui fait fi de la curiosité et de l’irrépressible tentation, tellement humaine, de comparer, de créer une compétition non seulement entre les hommes mais entre les concepts. De jouer, tout simplement… Nous ne sommes pas jansénistes après tout. Ah, l’excitation des classements, des projections avant le verdict des urnes, du calcul des rapports de force : qui niera, sans hypocrisie professionnelle, qu’elle produit l’adrénaline du feuilleton politique ? Ce vertige artificiel qui met en tension l’actualité du pouvoir et des réalités.

Cette lucidité salutaire, luxe démocrate, en appelle une autre : le sondage, et en particulier le mauvais sondage, est en train de tuer le débat politique. C’est un alcool fort. Une véritable addiction qui ravage peu à peu, élection après élection, la liberté des acteurs de la comédie du pouvoir. Stratégies, attitudes et jusqu’aux décisions majeures comme mineures sont guidées par les réactions supposées de ceux auxquels elles s’adressent. A ce degré, c’est nouveau.

Les communicants qui manipulent l’instrument sondagier comme une règle à calcul infaillible nous font glisser de la démocratie d’opinion, déjà risquée, à une reddition générale de l’instinct et de la raison politiques.

Et voilà qu’on découvre que de nombreux sondages sont régis, d’une façon ou d’une autre par des concours d’argent. Alors là, c’est le pompon clinquant d’un manège politique devenu fou. L’adoption rapide par l’Assemblée de la proposition de loi, votée à l’unanimité par le Sénat, qui exige la transparence d’enquêtes qui ont la puissance de manipuler le jeu politique serait un minimum. Elle ne suffira pas pour autant à réhabiliter une information politique largement décrédibilisée. Encore faudra-t-il, comme nous le faisons aux DNA, savoir dire non aux sondages qui n’ont aucun sens. Être scrupuleux. Sélectifs. C’est simple, après tout. Une question de volonté. Celle de résister à un spectaculaire vide, pour privilégier un journalisme affranchi. Une question de dignité pour des journaux qui doivent à leurs lecteurs ce respect et cette ambition élémentaires. Olivier Picard » Rien à ajouter.

« L’institut » Louis Harris a évidemment utilisé subtilement la sottise des premières réactions. Comme j’ai été le seul à critiquer la méthode elle-même et l’abus de confiance, le sondeur se sentait fort. Puisque personne d’autres que moi parmi les candidats ne contestait l’outil lui-même quelle critique restait-il ? La plus stupide et la plus contre performante ! Que l’on n’aurait pas sondé les bons noms. C’était bien le but de la manœuvre. C’est donc « à la demande générale » que le nom de Strauss-Kahn a été introduit dans le tuyau avec celui de ce pauvre Hollande comme faire valoir. Cette méthode a permis de faire d’une pierre deux coups. Premier but atteint : il ne resterait que Strauss ou Sarkozy dans chaque camp pour représenter la droite ou la gauche. Affirmation scientifique d’un institut de sondage qui a fait l’enquête à la demande des personnes concernées par le précédent sondage. Complément subliminal : l’un ou l’autre est automatiquement élu au deuxième tour. Car bien sur tout le monde sait que madame Le Pen ne peut pas être élue au deuxième tour. Jean Marie Le Pen, face a un Chirac perdu de réputation et pris jusqu’au coup dans les affaires avait été réélu avec quatre vingt pour cent des voix ! Est-ce pour masquer l’ampleur de la manœuvre que « le Parisien » titre « Sarkozy, Strauss-Kahn, Hollande : tous battus ! » Battus ? Mais au premier tour de ce sondage. Dans la vraie vie, au deuxième tour, n’importe lequel d’entre eux battrait marine Le Pen sans distribuer un seul tract.

Je donne encore la parole à un journaliste pour expliquer ce point. C’est Philippe Cohen, du journal Marianne. « A l’endroit ou à l’envers, selon le camp dans lequel on tricote sa pelote. Le terrible sondage Harris-Le Parisien souligne un drôle de paradoxe : désormais le candidat de l’UMP comme celui du PS va rêver d’affronter Marine Le Pen au second tour pour mettre de son côté toutes ses chances de gagner. Pour Nicolas Sarkozy, cette hypothèse est même en train de devenir la seule lui permettant d’espérer la victoire. Dès lors, la priorité absolue, à droite comme à gauche va être d’éliminer tous ses concurrents et d’imposer une candidature unique dans son camp. »

C’est évidemment François Hollande qui a frappé le plus fort, séance tenante pour réclamer un retrait général devant le candidat socialiste. Mais à droite aussi il y a eu des grands esprits aussi peu finauds pour saisir trop vite et trop fort l’occasion que préparait ce sondage. Evidemment l’éditorial de « Libération » était là pour monter en ligne dans la bataille des manipulateurs. « Une fois la compétition lancée, si la gauche radicale devait renvoyer Sarkozy et le candidat socialiste dos à dos, elle apporterait alors de l’eau au moulin frontiste. Une multiplication des candidatures à gauche, au-delà du raisonnable, affaiblirait aussi ses chances de victoire. » Hop ! On se souviendra que ce journal de donneur de leçon relégua en page huit mon débat avec Marine Le Pen et de surcroit en nous renvoyant dos à dos ! Mais j’étais à la une comme « L’homme qui veut faire battre Strauss Kahn ».

Mais c’est encore petite bière que ces grosses ficelles. Le pire a été le traitement médiatique qui a reproduit jusqu’à la nausée l’univers sémantique qui fait pousser dru le Front national. On ne compte plus les unes et les articles à l’accroche sensationnalistes le penisante. « Le sondage qui affole la classe politique » « Qui a peur de Marine Le Pen » et ainsi de suite. Rien n’est meilleur pour l’intéressée que cette façon de la mettre en championne de l’anti système. Juste auparavant les mêmes avaient reproduit en boucle encore les informations qui montraient un FN ralliés de tous côtés par des gens de gauche. Ici un syndicaliste CGT, là des militants du NPA et la liste s’allongeait. Aucune enquête, aucune indication de la manière dont ces informations étaient remontées jusqu’aux champions du journalisme d’investigation « je n’ai pas a vous donner mes sources »que nous connaissons tous. Vu de près, une fois décrypté un à un on découvre là encore la manœuvre. Le cégétiste l’était depuis quatre mois, la NPA n’a jamais eu de carte au NPA mais sa maman en avait une au FN, et ainsi de suite. C’est comme ça que dans une émission une zélée due l’investigation fit surgir contre moi un groupe de quatre membre d’une famille du Pas de Calais composé de deux communistes et deux socialistes passés au FN. Comme si l’extrême droite était composée de transfuge de la gauche.


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