Au Maroc, Mohammed VI
 n’est plus épargné (7 articles)

mercredi 27 avril 2011.
 

Des milliers de personnes ont manifesté dimanche 24 avril pour réclamer plus de démocratie et de justice sociale. Les mesures annoncées par le roi du Maroc ne font pas recette.

Le roi du Maroc Mohammed VI, sous pression, n’est plus épargné. Plusieurs milliers de Marocains sont descendus dimanche dans les rues de grandes villes du pays pour réclamer davantage de démocratie et de justice sociale. Malgré la récente annonce de révision constitutionnelle par le souverain, les manifestants veulent pousser l’avantage de leur mobilisation pour obtenir des réformes en profondeur. Il s’agit du troisième rassemblement de grande ampleur après ceux du 20 février, qui a donné son nom au mouvement de contestation, et du 20 mars derniers.

Plus de 15 000 personnes ont défilé à Casablanca, le pôle économique du Maroc, et presque autant à Rabat, la capitale. Des rassemblements ont eu lieu dans une dizaine de villes, notamment à Marrakech, Tanger et Fès. Les manifestants réclamaient des changements politiques, la limitation des pouvoirs du roi, désormais ciblé, l’indépendance de la justice, « plus d’égalité et moins de corruption », ainsi que des emplois pour les jeunes. Des islamistes ont participé aux défilés avec pour slogan la libération des détenus.

Les jeunes du Mouvement du 20 février sont particulièrement remontés contre la tournure prise par les débats sur la révision constitutionnelle depuis le discours de Mohammed VI, début mars. Soutenus par l’association marocaine des droits de l’homme (AMDH), Attac Maroc, de nombreuses associations et personnalités de la société civile, des partis de la gauche radicale, le PSU et Nahj Addimocrati (Voie démocratique), ils jugent insuffisant le lest lâché par le roi. Pour eux, la Constitution actuelle a vécu. Ils veulent une assemblée constituante et exigent aussi la dissolution du Parlement, de la commission de révision constitutionnelle installée par le monarque et la démission du gouvernement.

Projet constitutionnel :simple lifting ?

La commission consultative, présidée par le socialiste Abdellatif Menouni, doit remettre au souverain un projet de révision constitutionnelle le 16 juin. Excepté le PSU, la Voie démocratique et l’AMDH qui ont décliné l’invitation, la commission a déjà rencontré la plupart des partis politiques. S’agira-t-il d’un réel changement ou d’un simple lifting du texte fondamental  ? Aucune de ces formations ne s’est prononcée ni pour une monarchie parlementaire, ni pour une limitation des pouvoirs du monarque, ni pour l’abolition de l’article consacrant l’inviolabilité et la sacralisation de la personne du souverain.

Il existe aussi un profond sentiment d’injustice parmi les Marocains à l’égard des richesses accumulées par la monarchie à leurs dépens. Le palais se taille la part du lion par le biais de sa holding, la Société nationale d’investissement. Sur l’un des calicots aperçus dans la foule à Casablanca, cette holding était présentée comme une pieuvre, aux tentacules symbolisant ses filiales, avec ce commentaire  : « L’argent ou le pouvoir. » Le roi du Maroc est un des hommes les plus riches du monde. L’essentiel de sa fortune a été amassée par son père Hassan II en ponctionnant l’économie marocaine. Elle est en grande partie investie dans les biens immobiliers et fonciers au Maroc et à l’étranger. De quoi donner le vertige dans un pays où le salaire minimal ne dépasse pas 200 euros.

Bernard Duraud, L’Humanité, 26 avril 2011

6) Au Maroc, la contestation populaire s’amplifie

Source : http://www.lepartidegauche.fr

Depuis le 20 février à l’appel des jeunes, le Maroc est soulevé par une vague de fond pour appeler à une transformation de la société marocaine, pour exiger de vrais changements démocratiques..Depuis plus d’un mois, partout au Maroc et même dans de petites villes, se sont créés des comités à l’origine des manifestations. En réponse à cette situation, le pouvoir makhzénien a alterné, tolérance de façade, propagande et répression brutale. Bilan de la répression : la mort du jeune Karilm Chraib de Sefrou, de nombreux, blessés et des incarcérations.

Le13 février, à Casablanca, le siège du PSU, a subi l’assaut des forces de l’ordre avec pour conséquences, blessés et arrestations habituelles. Il faut savoir que pParmi les personnes arrêtées, certaines ont été condamnées à des peines allant jusqu’à dix ans de prison. Dans ce contexte, le mouvement pacifique du 20 février, issu de la société civile, porté par les jeunes, fait preuve d’une grande détermination. Aussi, le roi Mohamed VI a-t-il décidé de répondre à « ses sujets » et s’est adressé à eux le soir du 9 mars.

Ce discours de Mohamed VI a été salué par les USA, par l’UE, par la France. Les partis qui participent au gouvernement y ont vu une grande avancée. Pourtant il apparaît nettement que les manifestants qui se veulent des citoyens et non des sujets n’y ont pas trouvé de réponses satisfaisantes. C’est pourquoi, ils ont appelé à de nouvelles actions pour continuer à porter leurs revendications. Les points cruciaux qu’ils mettent en avant, sur fond de crise et de corruption, sont : la sortie d’une monarchie absolue (avec un souverain Commandeur des croyants), la séparation des pouvoirs, la mise en œuvre d’un processus démocratique réel. Or l’annonce de la créations de commissions choisies et constituées par le Roi ne répond en rien aux attentes du mouvement du 20 février qui aspire à la sortie d’un système soumis au « fait du Prince ». Les marocains savent parfaitement que les 5 constitutions marocaines successives n’ont rien changé au fait que le roi règne et gouverne à la fois.

Cette ardente jeunesse marocaine inspirée par les révolutions Tunisienne, Egyptienne et qui recolle les morceaux de son histoire (mouvements des années 60, Ben Barka) poursuit sa construction, dépassant les peurs issues des années de plomb. Elle demande une démocratie qui rompt avec les traditionnelles requêtes portées par les partis de l’opposition classiques habitués aux miettes du pouvoir.

La France qui entretient des relations de complaisance avec le pouvoir marocain réitère les mêmes erreurs historiques qu’en Tunisie et en Egypte. Alain Juppé à la tribune de l’ONU, le 17 mars, a qualifié de « courageux et visionnaire » la mise en place d’une monarchie constitutionnelle et le 18 mars, l’ambassadeur de France à Rabat, rencontrait un groupe de jeunes issus de partis politiques marocains pour les dissuader de continuer à manifester dans le cadre du mouvement du 20 février.


Le 20 mars dernier a été un jour de grande mobilisation : 50 000 personnes dans les rues de Casablanca. Les jeunes entraînent avec eux les hommes et les femmes de toutes générations, d’origines sociales diverses, les associations, les partis politiques qui aspirent aà plus de justice, plus de liberté, au partage des richesses. Ils empruntent ainsi le vrai chemin du changement : la lutte populaire sur le terrain.

Le Parti de gauche est solidaire de la lutte légitime et courageuse des comités du 20 février. Il soutient leurs revendications pour une constitution démocratique votée par une assemblée constituante. Il est aux côtés du comité de soutien marocain de suivi du 20 février qui s’est constitué pour mobiliser et mener des actions dans le cadre du mouvement, en France.

Mardi, 29 Mars 2011

5) MAROC : grandes manifestations et grèves de lycéens et étudiants

Le dimanche 20 mars était une journée de manifestations dans toutes les villes du pays, une participation record de toutes les couches populaires.

Les grèves se généralisent, aujourd’hui les lycéens et les étudiants démarrent une grève qui a un très fort tôt de participations, leur revendications peuvent se résumés en un enseignement de qualité (dans certains collèges, on est à 60 élèves par classe).

D’autres secteurs organisent soit des sit-in soit des grèves comme les journalistes, les diplômés chômeurs ... etc.

Comme d’habitude les medias sont silencieux sur ce qui se passe.

Vive la lutte du peuple marocain.

4) Maroc, imposantes manifestations

À l’appel 
du Mouvement du 20 février, des rassemblements et des marches ont eu lieu dans une soixantaine de villes dont Casablanca, Rabat, Fès, Marrakech, exigeant des changements radicaux.

« Il faut se rendre à l’évidence, il y a un avant et un après 20 février », disait Amine Abdelhamid, vice-président de l’Association marocaine des droits de l’homme, rencontré le 8 mars dernier à Rabat. Les faits semblent lui donner raison. Le Maroc a connu hier ses plus grandes manifestations depuis celles du 20 février dernier qui avaient mobilisé plus de 350 000 personnes  : marches et rassemblements ont touché une soixantaine de villes dont Rabat, Casablanca, Fès, Tanger, Marrakech, Agadir, Oujda, Tetouan, Hoceima…. La mobilisation de ce 20 mars, lancée par le Mouvement du 20 février, initié sur le réseau social Facebook, a été un succès, et ce, onze jours après l’annonce de réformes politiques par le roi Mohamed VI que les capitales occidentales se sont empressées de saluer. Et, signe que les choses bougent, l’USFP (socialistes, membre de la coalition gouvernementale) a décidé au dernier moment de participer aux manifestations  !

« Non au clientélisme et à la corruption »

À Casablanca, ils étaient plus de 50 000 manifestants. Le cortège, sur l’avenue Hassan II, s’étalait sur un kilomètre et demi. « Du jamais-vu depuis des années. On est là pour la liberté et la dignité », affirme à l’Humanité l’artiste Ahmed Senouci, tabassé par des policiers dimanche dernier lors d’une manifestation à Casablanca. « Non au clientélisme et à la corruption », « un roi règne et ne gouverne pas », « le peuple demande la dissolution du gouvernement et du Parlement », « plus d’équité sociale », scandaient les manifestants. « Nous soutiendrons ce mouvement (20 février) jusqu’à la satisfaction de ses revendications car le palais n’a pas répondu aux demandes de la jeunesse », a ajouté (joint également par téléphone) Abdelmoumène Chbari, ancien détenu du sinistre bagne de Tazmamart et dirigeant de la Voie démocratique (gauche marxiste). La jeunesse du PJD (islamiste) a également rallié les manifestants en dépit des consignes de la direction du parti de ne pas y prendre part. Des contre-manifestants, soutenant le roi, ont tenté, sans succès, de mobiliser la rue.

À Rabat, la capitale, près de 30 000 manifestants ont marché le long des remparts de la ville avant de se rassembler devant le Parlement, scandant les mêmes mots d’ordre qu’à Casablanca. Pour Amine Abdelhamid, « les jeunes revendiquent aussi l’emploi, le droit à l’éducation et à la santé gratuitement et à une vie digne ». De leur côté, des islamistes ont réclamé la libération des détenus condamnés suite aux attentats de mai 2003 à Casablanca.

En dépit d’une faible médiatisation – les médias marocains n’ont pas du tout relayé les appels du Mouvement du 20 février –, l’imposante mobilisation de ce dimanche va certainement changer la donne sur le terrain. Si le roi Mohamed VI a fait un premier geste en concédant que le Maroc avait besoin de réformes politiques, dans le but évident de désamorcer une contestation qui prenait de l’ampleur, il n’a cependant pas répondu aux attentes de la jeunesse. « Elle ne veut pas d’un relooking de la Constitution (…) une Constitution qui met un responsable au-dessus de la loi, au-dessus de tout contrôle, ne peut pas être démocratique », assurait sur un site en ligne Hamza Mahfoud, un des animateurs du Mouvement. Quoi qu’il en soit, c’en est fini de l’« exception marocaine », idée mise en avant par des médias marocains pour expliquer très sérieusement que le Maroc n’est ni la Tunisie ni l’égypte et qu’il était, bien avant tous les pays arabes, un « modèle de réformes et de démocratisation ». C’est raté.

Hassane Zerrouky, L’Humanité

3) Maroc. Le roi Mohamed VI, sur la défensive, lâche du lest

En annonçant une réforme constitutionnelle, satisfaisant une partie des revendications populaires, le souverain marocain tente de désamorcer l’aspiration à la démocratie d’une jeunesse encouragée par le « réveil » du monde arabe.

« Je suis profondément déterminé à donner un puissant élan aux réformes substantielles en cours et dont une Constitution démocratique est à la fois la base et l’essence », a déclaré Mohamed VI dans un discours à la nation. Il a chargé une commission de la réforme constitutionnelle, présidée par le constitutionnaliste Abdelatif Menouni, proche de l’USFP (socialiste), d’élaborer, en concertation avec les partis politiques, les syndicats et les organisations de la société civile, des propositions d’ici au mois de juin, avant leur adoption par le Parlement et par référendum populaire.

Toutefois, le souverain marocain a pris soin de baliser habilement le terrain des réformes, précisant les points, au nombre de sept, sur lesquels planchera cette commission. Ainsi, s’il n’est pas question de toucher à l’article 19 stipulant que le roi est « le commandeur des croyants », consacrant la fusion du religieux et du politique, il a admis que les prérogatives du premier ministre doivent être renforcées, qu’il doit être choisi, et non désigné par le roi, parmi la formation émanant « de la volonté populaire exprimée à travers les urnes et jouissant de la confiance de la majorité à la Chambre des représentants ». Mieux, il sera responsable devant le Parlement et pas uniquement devant le souverain. Le Parlement verra son pouvoir de contrôle sur l’exécutif, renforcé, dit encore le roi. Il en sera de même de l’indépendance de la justice, tant décriée ces derniers temps. Enfin l’amazigh (berbère) sera constitutionnalisé. En outre, si les domaines de souveraineté du roi (défense, intérieur) ont été volontairement ignorés dans le discours royal, ce sera à la commission des réformes de préciser les lignes rouges constitutionnelles à ne pas franchir.

Car si Mohamed VI a consenti, sous la pression de la rue, à lâcher du lest, il entend garder les clés de la maison Maroc, et continuer de régner et de gouverner. De ce fait, la réforme constitutionnelle qu’il veut mettre en œuvre ne changera pas fondamentalement la nature du régime  : le Maroc ne sera pas une monarchie parlementaire à l’espagnole. Ni l’USFP (socialiste), ni le PPS (post-communiste) pour qui le roi doit garder son statut de commandeur des croyants, ni encore moins l’Istiqlal (islamo-nationaliste) ou le PJD (Parti de la justice et du développement, islamiste), qui siègent au Parlement, n’en veulent. Ils souhaitent tout au plus une loi fondamentale qui aménagerait une sorte de partage du pouvoir entre le roi et les partis. Hier, tous ces partis, inquiets par l’irruption du Mouvement du 20 février sur la scène politique, se sont bruyamment félicité des propositions du roi.

Des concessions sous la pression de la rue

En effet, le discours de Mohamed VI intervient à moins d’une dizaine de jours du 20 mars où l’on attendait du côté des organisations à l’initiative (dont les partis de la gauche radicale) un million de personnes dans les rues. Le puissant syndicat UMT (Union marocaine du travail) s’était joint au Mouvement. Tout en répondant partiellement aux revendications de la jeunesse, le souverain marocain, qui a compris que le Maroc n’est plus à l’abri de la contagion démocratique arabe, vise à la désamorcer en allumant un contre-feu constitutionnel faisant consensus parmi une classe politique fragilisée par une jeunesse qui ne se reconnaît pas en elle. Une chose est sûre, son intervention va sans doute semer le trouble parmi ceux qui revendiquent un changement radical de constitution. « On risque d’être les seuls à demander une réelle Constitution démocratique limitant les pouvoirs du roi. Les autres vont marcher dans la combine », s’inquiète Abdelamoumène Chbari, dirigeant de la Voie démocratique et ancien détenu du bagne de Tazmamart.

Hassane Zerrouky, L’Humanité

2) Maroc Halte à la répression ! Manifestation à Paris ce 6 mars (article national PG)

La soif de changement des Marocains a été plus forte que la peur, plus forte que la campagne de désinformation, plus forte que les consignes des autorités. Ils veulent s’inscrirent dans le grand mouvement vers la démocratie qui souffle de l’est. En sortant dans la rue pour réclamer leurs droits au grand jour, ils ont dépassé le traumatisme des années de plomb.

On ne peut pas parler de liberté, de droits civiques, et politiques au Maroc sans rappeler ce que furent les "années de plomb". Quand le régime a pratiqué une politique systématique de répression musclée à toute opposition. Les méthodes dites makhzéniennes (système au service des intérêts d’un gouvernement absolu) se sont caractérisées par l’arbitraire et une barbarie d’un autre âge.

Certes, l’avènement, il y a plus de dix ans, de Mohamed VI a été porteur d’espoir, le nouveau souverain marocain a tenu un discours annonçant une rupture avec les méthodes condamnables qui caractérisaient le régime de son père. La mise en place d’une instance équité et réconciliation IER . a pu asseoir l’image nationale et internationale d’un monarque réformateur.

Mais force est de constater, plus de 10 ans après cette levée d’espoir, que le régime marocain est resté le même. Il s’agit toujours de faire cohabiter deux systèmes :l’un parlementaire et artificiellement pluraliste qui sert de façade à l’autre, le pouvoir royal, assisté de ses conseillers, qui s’appuient sur un système féodal appelé le Makhzen. Le roi est l’acteur majeur de l’économie nationale , sa holding opère dans tous les secteurs stratégiques. Ce système a ses corollaires : la corruption, la défense d’intérêts particuliers, il est aussi le terrain des appétits des investisseurs étrangers.

Le contexte makhzénien associé à celui de la crise du capitaliste, inflige au peuple marocain en plus de droits civiques restreints, des conditions insupportables, il subit de plein fouet au quotidien le manque d’accès aux produits de première nécessité, au travail, à la santé, à l’éducation, au logement.

Le 20 février, ils étaient près de 200 000 à manifester pacifiquement dans de nombreuses villes, les revendications qu’ils ont portées sont d’ordre

- politique : mettre fin à un simulacre démocratique, liberté d’expression

- économique : sortir des mesures dictées par le FMI qui servent les intérêts particuliers

- social :chômage, pauvreté, santé, logement

Le Parti de gauche exprime tout son soutien aux citoyens marocains qui ont manifesté pacifiquement ces jours-ci, le 20, le 26 et 27 février et dénonce les violences intervenues à Rabat,Fès, Agadir, Sefrou, celles subies par les habitants des bidons villes des Carrières centrales de Casablanca. Il dénonce les incarcérations des étudiants, des lycéens , des militants d’organisations non gouvernementales (AMDH, ATTAC, Annahj Addimocrati, PSU…). Le Parti de gauche salue la mémoire du jeune Chaïb Karim, 21 ans qui a succombé à ses blessures suite à la répression de la manifestations pacifique de Sefrou et celle de Fadoua Laroui, mère de deux enfants qui s’est immolée par le feu à Souk Sebt, première femme dans un pays arabe à exprimer aussi violemment son désespoir.

Il condamne le silence complice sur la situation au Maroc : silence du gouvernement français plus prompt à signer des contrats commerciaux qu’à défendre les droits de l’homme, silence des hommes politiques qui y passent tranquillement leurs vacances, silence des médias, même Aljazeera ne couvre plus l’actualité marocaine. Il s’interroge sur le « statut avancé » accordé par l’Europe pour l’effort en termes « de réformes politiques, de consolidation de l’Etat de droit, d’une meilleure justice, de réformes économiques, de cohésion sociale et de lutte contre la pauvreté ».

Il n’y a pas « d’exception marocaine ». Au Maroc, comme en Tunisie, en Egypte, en Algérie, en Libye, le peuple, et particulièrement la jeunesse porte des revendications émancipatrices liées à l’exigence d’un autre partage des richesses, à la liberté d’expression, aux droits politiques et sociaux. Les principes qui guident ces revendications sont universels et les violences qui sont faites aux personnes s’en réclamant sont contraires au droit international. C’est pourquoi nous soutenons le mouvement du 20 février dans ses revendications légitimes et appelons dans le cadre du comité de soutien de suivi du 20 février au

Rassemblement à Trocadéro

Parvis des droits de l’Homme

Dimanche 6 mars à 15h

Paris 16ème Métro Trocadéro

1) Fadoua est morte, le Makhzen est bien vivant

Source : http://takhouar.wordpress.com/2011/...

Fadoua n’était pas une héroïne, elle n’a rien fait dans sa vie qui mérite d’être rapporté. Car Fadoua a mené ce genre de vie banalement misérable, qui aurait pu se prolonger pour ressembler à celles de millions d’autres, pour s’éteindre un jour, victime du manque de lits ou de personnel médical dans un hôpital public.

Fadoua avait sûrement une télé dans cette sorte de construction moyenâgeuse qu’elle devait appeler maison. Elle regardait sûrement ces chaînes nationales, où l’on y évoque à longueur de journée les avancées en matière de développement économique et social, des avancées non chiffrées, pour lesquelles personne n’a été consulté. Faut-il rappeler les irrégularités, connues par tous, inhérentes à ce genre de projets dans le plus beau pays du monde ?

Pendant que le Makhzen était occupé à s’enrichir, à tabasser les marocains libres, à orchestrer sa propagande médiatique que plus personne ne croit, Fadoua devait attendre patiemment son tour, une charité qui viendra, un jour, au hasard du bon vouloir d’un je ne sais quel responsable, ou je ne sais quelle autre visite royale.

Je n’ai jamais connu la misère. A peine l’ai-je vue. Cet état persistant de faim, du futur incertain, de crainte de cette maladie ou cette calamité qui raflerait le peu d’économies familiales. Et encore, avez-vous déjà essayé de vous faire soigner dans un hôpital public ? Avez-vous déjà eu affaire à un avocat commis d’office pour vous défendre d’une injustice devant une cour de justice aux abois ? Même avec l’argent qu’il faut, même avec les connexions qu’il faut, le marocain peine à trouver une école correcte pour ses enfants, une clinique avec des médecins compétents pour se soigner, et le travail de la justice se réduit souvent à un combat de pots-de-vin et de pistons. Triste réalité.

Fadoua voulait un toit décent. Peut-être une première étape pour se sentir un tant soit peu en sécurité, peut-être avait-elle des projets, un petit commerce, un petit boulot pour que ses enfants échappent au sort terrible que la vie lui a réservé, à elle. Mais un responsable quelque part en a décidé autrement. Sous prétexte que c’est une mère célibataire, donc ne pouvant être chef de famille, elle n’aura pas accès à son logement social, et la destruction de son taudis a été décidée. Elle se retrouve donc à la rue. Avec ses enfants. Elle n’a pas pu le supporter.

Peu avant son geste tragique et spectaculaire, elle fit un discours, une sorte de dernière volonté, “sarqouli berrakti” répétait-elle, avant de s’immoler – On m’a volé mon gourbi. Fadoua aurait pu mettre un terme à ses souffrance plus discrètement, mais ce n’était pas là son objectif. Si elle voulait simplement fuir l’âpre vie, elle aurait mis fin à ses jours d’une manière moins douloureuse. Car c’est bien ce qu’elle voulait : attirer l’attention, fût-elle posthume, de la société sur sa situation. Peut-être espérait-elle que l’affaire soit médiatisée, et que ses enfants bénéficient d’une certaine charité qui les sauverait de la précarité à laquelle sont destinés la plupart de nos compatriotes*. Elle n’a même pas eu, à la fin, droit à une dépêche MAP. Indigne Etat.

“On m’a volé mon gourbi ! ”. Elle n’a pas nommé un responsable. A-t-elle réussi à en identifier un ? Probablement pas. Dans un pays qui respecte ses citoyens, une enquête aurait été diligentée pour donner des noms, punir ceux qui le méritent, pallier à l’incohérence juridique s’il y en a une. Ce n’est pas le cas chez nous, car le responsable est tout un système, celui-même auquel les jeunes du 20 février voulaient mettre un terme. Cet espèce de monstre sans âme porte un nom : le Makhzen.

Un jour viendra, où ça sera au tour du Makhzen se consumer dans les flammes de notre volonté de changement. La situation des Fadoua n’en sera pas améliorée du jour au lendemain, je le concède. Mais la responsabilité ne sera plus celle d’un corps politique abstrait et ubique qui n’oeuvre que pour sa propre survie, mais celle de toute la société, de tous les individus, de tous les sujets désormais citoyens. Et je crois sincèrement qu’une fois leur destinée entre leurs propres mains, les Hommes en font le meilleur usage possible.


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