La voie étroite d’Olivier Besancenot face à l’activisme de Jean-Luc Mélenchon (Le Monde)

mardi 22 février 2011.
 

L’année 2011 sera-t-elle celle de l’effacement d’Olivier Besancenot par Jean-Luc Mélenchon ? La question sera en tout cas dans toutes les têtes à la veille du congrès du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) qui se réunit du 11 au 13 février à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

Voici des mois que le président du Parti de gauche - candidat putatif du Front de gauche pour 2012 - est omniprésent dans les médias. Livre, émissions de télévision, radios, réunions publiques, on le voit partout. Un peu à l’image du candidat Besancenot un an avant l’élection présidentielle de 2007.

Depuis septembre 2010, ce sont les bons mots du député européen qui font le « buzz ». La gouaille du « candidat postier » semble presque oubliée. Lui qui était « le » candidat anti-Sarkozy, crevant les écrans en 2008, le seul opposant quand la gauche était aphone, a des doutes. Sur son organisation comme sur son rôle.

Depuis son échec aux régionales, en mars 2010, M. Besancenot s’est mis en retrait, préférant s’occuper de la société Louise-Michel, créée par le philosophe Daniel Bensaïd. Il ne veut plus être le seul leader populaire du NPA et réclame des porte-parole pour le seconder. Seul le mouvement des retraites l’a fait sortir de la sienne pour redevenir un « super-délégué syndical ».

Les sondages sont trop éloignés de l’échéance présidentielle pour départager sérieusement les deux challengers de la gauche radicale. Quand l’institut CSA donne Olivier Besancenot en tête, il est contredit par l’IFOP et Opinionway qui indiquent l’inverse en faveur de M. Mélenchon. « Les marges d’erreur sont encore trop importantes. On assiste plutôt à un combat d’image. L’un s’impose au PCF, l’autre a des questions existentielles », observe Vincent Tiberj, chercheur au Centre d’études européennes. Seule constance : Olivier Besancenot séduit toujours les jeunes et M. Mélenchon a un vrai écho dans l’électorat des plus de 50 ans (10 % selon un sondage IFOP pour Sud Ouest du 12 et 13 janvier réalisé auprès de 830 personnes).

Changer de stratégie

Les deux électorats sont proches : c’est celui de cette gauche radicale qui représente entre 10 % et 15 % des suffrages selon les scrutins. En 2002 comme en 2007, elle a voulu protester contre le discours jugé trop droitier du PS, et cela a profité à M. Besancenot. Cette fois-ci, avec le fort désir de battre la droite, cette gauche pourrait changer de stratégie et tenter de peser sur les engagements des socialistes dans le cadre d’un futur gouvernement d’union de la gauche. Jean-Luc Mélenchon semble mieux à même d’y arriver. Le NPA avec son rejet de toute discussion avec le PS a renoncé à ce rôle.

Mais les deux leaders savent que la division va les pénaliser. M. Mélenchon a donc lancé à la veille du congrès de son challenger un appel à « ouvrir des discussions » pour une candidature « de rassemblement ». Les dirigeants du NPA ont aussitôt rejeté la proposition : « Sa déclaration de candidature est un acte de renoncement au rassemblement », a taclé Pierre-François Grond, membre de l’exécutif. « Les désaccords se sont creusés avec Mélenchon », ajoute-t-il, citant ses prises de position sur le Tibet ou sur la Wallonie.

Pour ne pas apparaître trop fermé, M. Besancenot lui répondra en proposant une « candidature issue du mouvement social ». « Une partie des syndicalistes, des altermondialistes ou des mouvements des »Sans« peut être disponible », veut-il croire. Et s’il ne parvenait pas à faire émerger cette candidature, alors le NPA se présentera sous ses couleurs. Le nom du « camarade Olivier » est le seul évoqué.

En attendant la conférence nationale qui, selon toutes probabilités, le désignera en juin, il veut faire « passer le souffle de la révolution tunisienne et égyptienne sur le NPA ». Histoire de rappeler que le vrai révolutionnaire, c’est lui.

Sylvia Zappi

(LE MONDE DU 11 FÉVRIER)

LE NPA A PERDU PLUS DE 4 000 ADHÉRENTS DEPUIS SA CRÉATION, EN FÉVRIER 2009

Ce devait être un « moment de consolidation ». Le congrès du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) est surtout celui des bilans amers. La déception est perceptible dans les travées du premier congrès réuni les vendredi 11, samedi 12 et dimanche 13 février à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Le parti qu’Olivier Besancenot, au plus fort de sa popularité, avait lancé voici deux ans est pris de doutes et traversé de tensions.

On savait que depuis les échecs successifs aux élections européennes de 2009 (4, 9 %) puis régionales de 2010 (2, 4 %), de nombreux nouveaux adhérents avaient quitté l’organisation. Les chiffres réels sont tombés, jeudi 10 : l’organisation a perdu plus de 4 000 adhérents depuis février 2009. Pis, dans un parti très militant, les congrès n’ont rassemblé que 3 500 votants. L’organisation a donc perdu près de la moitié de ses effectifs quand elle s’annonçait comme le « parti des 10 000 » quelques mois après sa fondation.

L’hémorragie n’est pas niée. « On a connu une sacrée déperdition », reconnaît Pierre-François Grond, numéro deux du NPA, qui admet que les effectifs représentent deux à deux fois et demi ce qu’étaient ceux de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant sa dissolution. « Au moment du lancement, on avait aspiré beaucoup de monde. Une partie n’a pas trouvé sa place », note Guillaume Liegard, trésorier. Le modèle se voulait ouvert aux nouvelles formes de militantisme, accueillant pour des militants peu politisés et surtout attractif à l’égard de franges de la gauche radicale. « On n’a pas su renouveler nos manières de débattre », admet encore M. Liegard.

Les erreurs ne sont pas que formelles. Le projet politique maintes fois répété - rassembler la gauche anticapitaliste sur un programme rénové d’extrême gauche mais en rupture avec la gauche traditionnelle - a douché l’espoir de cette nouvelle génération politique qui a cru en Olivier Besancenot. Les militants adhéraient à l’ouverture proclamée. Ils n’ont pas compris le refus de toute discussion avec le Front de gauche du PCF et du Parti de gauche lors des élections européennes et régionales. « Pour une partie, il y a eu tromperie. Dès la première échéance électorale, on s’est repliés », affirme Monique Migneau, membre minoritaire de la direction.

La présentation d’une candidate portant le foulard sur la liste aux régionales dans le Vaucluse a aussi secoué les rangs. Beaucoup n’ont pas accepté que l’organisation, jusqu’alors toujours porteuse d’une laïcité et d’un féminisme militants, se fasse représenter par une candidate affichant ses convictions religieuses. « De gros départs ont eu lieu après », souligne M. Grond. Le congrès devrait encore voir partir quelques figures qui avaient rejoint le NPA, comme Leila Chadli, animatrice du collectif L’appel et la pioche, ou le syndicaliste Yann Cochin.

La direction fait le gros dos. Elle est affaiblie en interne, avec une majorité difficile à trouver et une contestation de la centralisation des décisions. Elle jure cependant que le « ressac » est derrière elle. Le NPA est désormais présenté comme « le premier pas » du regroupement anticapitaliste souhaité. Olivier Besancenot devrait lancer un appel public pour une « candidature de rassemblement anticapitaliste » visant à attirer des personnalités du mouvement social.

L’initiative ressemble à un écran de fumée dans l’attente de la conférence nationale de juin, qui devrait le désigner comme le candidat du NPA pour 2012. L’organisation compte sur la popularité de son porte-parole pour remobiliser autour d’elle. « On a été ramenés à ce qu’on pèse réellement mais on est planté dans le décor », insiste M. Besancenot qui, dans une pirouette, cite NTM : « On est encore là. »

Sylvia Zappi


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