La droite fascisante au pouvoir en Hongrie va présider l’Union européenne, bien muette

lundi 3 janvier 2011.
 

3) Protégeons-nous de la "Garde Hongroise", des partisans de la « Grande Hongrie » et des nostalgiques de Horthy (un grand article de Karel Kostal)

Pour accéder au texte de l’article, cliquer sur le titre ci-dessus.

2) Liberté de la presse supprimée par la droite hongroise. Sarkozy et son gouvernement refusent de prendre position

Le président hongrois, Pal Schmitt, a promulgué aujourd’hui hier la loi qui tire de facto un trait sur la liberté de la presse dans un pays qui va présider l’Union pour six mois à compter du 1er janvier. Ce texte, qui donne à une émanation du pouvoir politique le pouvoir de sanctionner lourdement les médias qui publieraient des contenus manquant « d’objectivité politique », entrera en vigueur samedi matin. Déjà, en Hongrie, des journalistes de télévision et de radio ont été relevés de leurs fonctions pour avoir critiqué cette loi avant même qu’elle n’entre en vigueur.

Si l’Allemagne et le Luxembourg, tout comme l’OSCE, les groupes libéral et démocrates et vert du Parlement européen, les organisations de défense des droits de l’homme, comme Amnesty International, ou les syndicats internationaux de journalistes ont condamné cette loi, les institutions communautaires sont pour l’instant silencieuses, tout comme la plupart des États membres de l’Union, dont la France, la « patrie des droits de l’homme ». J’ai donc appelé aujourd’hui Laurent Wauquiez, le tout nouveau ministre délégué aux affaires européennes. De notre entretien de ce soir, il ressort que Paris « refuse d’aller dans le mur en donnant des leçons à la Hongrie », ce qui ne pourra que « braquer les gens »…

En clair, la France ne veut pas rappeler publiquement à la raison démocratique le gouvernement hongrois. Une attitude a priori curieuse, puisque ce pays viole clairement la Charte européenne des droits fondamentaux (article 11) et que cette loi sur les médias, si elle avait existé à l’époque, aurait tout simplement empêché l’adhésion de la Hongrie. Le jeune ministre estime que la nature de ce texte, « dont je ne dis pas qu’il ne pose pas des problèmes », dépendra largement de la façon dont il sera appliqué par l’autorité de contrôle des médias (composée uniquement de membres du Fidesz, le parti du premier ministre Viktor Orban). Là aussi, la rhétorique est étrange : une loi viole ou ne viole pas une norme qui lui est supérieure, en l’occurrence le droit européen. Le fait que son application soit plus ou moins douce est tout à fait hors de propos : la loi existe, elle viole les valeurs européennes et, même si elle n’est pas appliquée sévèrement, elle créé en soi une insécurité juridique telle qu’elle contraindra les médias à l’autocensure.

Wauquiez croit néanmoins savoir que les autorités hongroises sont « prêtes à faire des adaptations », ce dont on peut légèrement douter, vu que la loi vient d’être promulguée sans même attendre un quelconque dialogue avec les autorités européennes, ce qui montre en quelle estime Viktor Orban tient l’Union.

En réalité, la France, comme la plupart des pays de l’Union, sait que le Fidesz bénéficie d’un très large soutien de la population hongroise (moins de 2000 personnes ont manifesté contre la loi sur les médias…) et qu’une pression étrangère ne fera que le renforcer. La montée du populisme en Europe est une réalité, y compris en France, et, au fond, la plupart des États de l’Union ne rêveraient-ils pas d’une loi sur les médias à la hongroise ? Avec dix-neuf pays sur vingt-sept gouvernés par les conservateurs et les libéraux, parfois en alliance avec la droite extrême, Orban sait qu’il joue sur du velours. On attend désormais avec beaucoup d’intérêt les prochains reproches que l’Union fera à la Turquie en matière de droits fondamentaux. Les standards sont clairement à la baisse.

Source : Libération

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1) En Hongrie, la culture sous la pression du nationalisme

On joue Mein Kampf, cette saison, au Théâtre national de Budapest. Ce n’est pourtant pas la farce écrite par George Tabori (1914-2007), un émigré d’origine hongroise, retraçant la genèse de la carrière d’Adolf Hitler, qui a fait de cette institution le lieu d’un psychodrame sur l’art et les valeurs patriotiques. Mais la décision du directeur, Robert Alföldi, d’accueillir un concert organisé par l’ambassade de Roumanie, le 30 novembre, à la veille de la fête nationale roumaine, où l’on devait jouer des oeuvres du Roumain George Enesco et du Hongrois Bela Bartok.

M. Alföldi espérait "rapprocher par la culture et l’art" deux nations européennes longtemps séparées par "un passé tumultueux". Il avait sous-estimé les réactions, car, pour des millions de Hongrois, le 1er décembre marque un deuil : la perte de la Transylvanie (Erdély, en magyar), rattachée à la Roumanie en 1918, après l’effondrement de l’Empire des Habsbourg. Pendant des décennies, les dirigeants hongrois de tous bords se sont acharnés à la récupérer. Le sujet allume encore les passions, comme la guerre d’Algérie en France.

"Vous ne fêtez pas la réconciliation des peuples le jour où vous avez tué mon père !, s’indigne Zsolt Várkonyi, membre du Jobbik, le parti d’opposition d’extrême droite. Et nous pensons qu’Alföldi, un juif homosexuel, n’est pas apte à diriger une telle institution. Sa place est dans une cave du 7e arrondissement (le quartier juif de Budapest), où il est libre de monter des spectacles d’avant-garde, pas au Théâtre national."

Le concert a été annulé, sous la pression du Jobbik, mais aussi du Fidesz, le parti conservateur du premier ministre, Viktor Orbán, et de ses alliés démocrates-chrétiens. M. Alföldi, soulignait un communiqué du Fidesz, "aurait dû être conscient que, pour la majorité des Hongrois, la perte de la Transylvanie représente un traumatisme et ne saurait être célébrée dans un lieu symbolique tel que le Théâtre -national".

Aux yeux du Jobbik, ce rappel à l’ordre ne suffit pas. Il exige la tête du directeur, accusé de "vandalisme" culturel. A l’étranger, ses productions sont remarquées : l’adaptation provocante du roman du Russe Vladimir Sorokine, La Glace, a été invitée cette année au prestigieux Festival de Vienne. En Hongrie, on lui reproche de faire étalage de nudités, de heurter les valeurs de la majorité.

Robert Alföldi a aggravé son cas en programmant une nouvelle pièce : Magyar Unnep ("Fête hongroise"), de Pal Zavado, mettant en scène plusieurs familles de Transylvanie - des juifs, des membres de la minorité allemande, des Hongrois moyens ou des extrémistes pronazis - entre 1940 et 1946, quand Hitler a rendu Erdély à la Hongrie, en échange de son appui. Le 1er décembre, deux groupes de manifestants se sont opposés devant le Théâtre national : Jobbik contre partisans de M. Alföldi, qui ne donne pas d’interviews. D’un côté comme de l’autre, les troupes étaient maigres. L’extrême droite voit son électorat rallier le Fidesz. Quant à l’opposition de gauche ou libérale, elle était réticente.

"Il y avait plus de réalisateurs de cinéma et d’écrivains que de gens de théâtre, même si les grands noms étaient là", constate la critique Andrea Tompa. Avec ses collègues de l’Association des critiques hongrois, elle a lancé une pétition internationale, mais déplore "l’apathie" des milieux culturels. "Nous sommes en train de perdre la liberté de parole que nous avions obtenue il y a vingt ans", précise-t-elle.

Comme le cinéma, frappé par les mesures d’austérité, le théâtre indépendant (140 troupes, qui assurent un tiers du total des représentations en Hongrie) tremble pour sa survie. Une loi adoptée en 2008 sous le gouvernement socialiste lui garantissait 6 % du total des subventions destinées au théâtre, soit 4,4 millions d’euros. Le cabinet de Viktor Orban revient sur cet engagement. Ce qui est ôté aux troupes "off" en 2011 devrait aller aux associations magyares dans les pays voisins.

Le secrétariat d’Etat à la culture a été confié à Géza Szöcs, poète et ancien dissident de Transylvanie, qui avait dû fuir la Roumanie de Ceausescu. Dès sa nomination, il a annoncé un programme "Frère Julianus", qui vise à identifier, à l’aide de tests ADN et d’études linguistiques, les origines du peuple magyar.

Le Monde n’a pu interroger M. Szöcs sur ce projet ni sur l’éviction de la direction de l’Opéra de Budapest. Dès l’été, le directeur artistique, Balázs Kovalik, a été remercié. "L’Opéra est le jouet de forces politiques", s’est-il plaint. Son crime ? Confier à un Italien la mise en scène de l’épopée nationale Bank Ban, du compositeur Ferenc Erkel (1810-1893). La production a été annulée pour raisons budgétaires.

Le directeur musical, le chef d’orchestre Adam Fischer, a démissionné en septembre. Fin octobre, le directeur de l’Opéra, Lajos Vass, et son adjoint étaient limogés à leur tour, pour mauvaise gestion.

Afin de relancer le navire, le gouvernement aurait sollicité l’ancien directeur de l’Opéra de Vienne, Ioan Holender - issu d’une famille juive de Transylvanie.

Joëlle Stolz (Budapest)

Source : Le Monde du 27 décembre 2010


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