L’enseignement public saccagé pour la rentrée 2011

mardi 25 janvier 2011.
 

Le 22 janvier 2011, refusons le budget de pénurie de l’Éducation nationale !

1) L’école et le collège, principales victimes des réductions de postes

A la rentrée 2011, les effectifs enseignants vont fondre dans toutes les académies métropolitaines. Collèges et écoles vont subir les 16 000 suppressions de postes prévues au budget 2011. Depuis 2007, 66 000 postes ont disparu.

Jusque-là, une mauvaise anticipation du nombre de départs en retraite avait préservé l’école primaire, y laissant plus d’enseignants que les calculs ministériels ne le prévoyaient. Dans le second degré, même si les remplacements d’enseignants absents devenaient très aléatoires, les gains de postes restaient presque invisibles. Cette fois, le nombre d’élèves par classe devrait remonter. Tout un symbole.

Dans le premier degré, des classes seront fermées puisqu’on attend 8 900 nouveaux élèves et que 8 967 postes d’enseignants disparaissent. Dans le secondaire, 48 500 élèves supplémentaires sont attendus et il faudra faire avec 4 800 postes de moins. C’est essentiellement le collège qui sera ponctionné puisque le ministre Luc Chatel a promis des moyens constants pour installer sa réforme du lycée général. Alors que le groupe des élèves qui ne maîtrisent ni la lecture ni les mathématiques ne cesse de croître, ce sont les classes durant lesquelles se réalisent ces apprentissages de base qui vont être les plus touchées.

La répartition académique de l’effort vient d’être dévoilée. En février, chaque département connaîtra son contingent de profs et, en mars, chaque établissement. Syndicats et parents manifesteront le 22 janvier.

L’école primaire à laquelle la France consacre déjà 15 % de moins que la moyenne des pays de l’OCDE va voir diminuer encore un peu la scolarisation des moins de 3 ans, une partie des enseignants qui travaillaient sur les réseaux d’aide va être rapatriée dans les classes ainsi que tous les enseignants de langues vivantes.

Dans l’enseignement primaire, c’est l’académie de Lille qui, avec 336 postes en moins sur 20 938, subit en valeur absolue le plus de pertes, suivie par l’académie de Nancy-Metz avec 298 suppressions sur 12 243. Les documents ministériels indiquent cependant qu’une baisse des effectifs d’écoliers est attendue dans deux académies à la prochaine rentrée.

Ce qui n’est pas le cas sur tout le territoire. A la hausse des effectifs prévue pour la rentrée, l’entourage de Luc Chatel, le ministre de l’éducation, rétorque que le phénomène ne sera pas durable. "On aura quoi qu’il arrive une baisse du nombre d’élèves dans le premier degré ces prochaines années."

D’autre part, l’argumentaire ministériel insiste sur le fait que les coupes actuelles concernent "des surnombres accumulés ces dernières années" et "des enseignants qui ne sont pas devant les élèves, sauf de manière épisodique".

Ce à quoi les syndicats rétorquent que, d’une part, les maîtres en surnombre ont bel et bien été employés et que dans son savant calcul le ministère oublie de dire qu’outre les 5 600 postes en surnombre, il s’attaque aussi à 3 367 postes d’enseignants qui eux assuraient bien des enseignements.

Face à un tel bilan, le SNUipp-FSU, principal syndicat du primaire, dénonce une "asphyxie de l’école", alors même que le crédit de l’école primaire n’est plus aussi haut dans l’opinion publique et que les enseignants se battent au quotidien pour laisser le moins d’enfants sur le bord de la route. "Pour la première fois depuis plus de vingt ans, cette coupe claire historique se traduirait par une baisse du nombre d’enseignants devant les élèves. Dans les départements, seule la règle à soustraction fonctionnera", se désole le secrétaire général du Snu-ipp, Sébastien Sihr.

Dans l’enseignement secondaire (collèges et lycées), les académies les plus touchées en valeur absolue sont celles de Versailles (493 postes supprimés) Lille (470 postes), Créteil (426 postes) et Nancy-Metz (524 postes). Des grosses académies. En proportion, celles qui perdent le plus de postes sont la Martinique (moins 3,9 %) et Nancy-Metz (3,4 %). Le ministère justifie ces mesures par la baisse démographique dans ces deux académies, de même qu’il justifie par l’augmentation attendue des effectifs d’élèves les augmentations de postes en Guyane et, pour le seul secondaire, dans certaines collectivités d’outre-mer.

Cependant, des hausses du nombre d’élèves sont également attendues dans les académies de Lille et de Créteil, qui subissent respectivement une perte de 1,8 % et de 1,5 % de leurs postes. Pour le Snes-FSU, le plus puissant syndicat dans les lycées et collèges, "les suppressions porteront cette année sur des postes devant les élèves", et cela "au moment où le ministère annonce une augmentation des effectifs dans le second degré public de 48 500 élèves".

Ce nouveau coup de rabot n’est pas une surprise : le projet de loi de finances pour 2011, adopté le 15 décembre par le Parlement, avait confirmé la suppression de 16 000 équivalents temps plein (ETP), toujours en application de la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite.

Ce qui change, c’est la procédure adoptée. Cette fois, le ministère ne gère pas ces coupes depuis la Rue de Grenelle. Il s’en remet aux recteurs, qui lui-même travaille avec ses inspecteurs. "Il n’y aura aucun cumul des remontées des recteurs" donnant à voir le nombre de suppressions de postes "par catégorie" au niveau national, avait prévenu Luc Chatel, au printemps. "Les grandes lignes des gisements d’efficience ne seront pas connues", insistait-il. "Je ne veux pas de statistiques nationales qui diraient "voilà, on a trouvé tel gisement dans telle académie"", avait-il alors souligné.

En revanche, le ministre croit dans l’échange d’expériences. En clair, il aimerait utiliser pour récupérer des postes une mutualisation qui a bien du mal à voir le jour en ce qui concerne les bonnes pratiques pédagogiques.

En juin, Luc Chatel affichait une grande sérénité, confiant "ne pas être inquiet" sur la capacité du système à digérer cette nouvelle vague de coupes. "Il y a de la marge", ajoutait encore son entourage en septembre.

Côté syndical, la colère monte. Le 22 janvier 2011, pour protester contre ce "budget de pénurie", une journée nationale de mobilisation est prévue à l’initiative du collectif L’éducation est notre avenir, qui rassemble 25 organisations dont la quasi-totalité des syndicats d’enseignants et la plus grosse fédération de parents. Cette journée ne se traduira pas forcément par des grèves mais "prendra des formes variées dans les départements".

Reste que le mécontentement pourrait s’échelonner sur une partie du printemps puisque certains départements, élections cantonales obligent, ne connaîtront la répartition des coupes qu’après le scrutin.

Source : Le Monde

2) Les syndicats d’enseignants s’alarment des conditions de la rentrée scolaire 2011

Reporté puis déserté. Comme souvent lorsqu’il doit aborder des sujets qui fâchent, le comité technique paritaire ministériel (CTPM) chargé mardi 21 décembre d’examiner la répartition par académie des 16.000 suppressions de postes annoncées dans le budget 2011 a été largement boudé par les organisations syndicales. Ces dernières avaient déjà provoqué son report le 17 décembre en le boycottant.

Mardi, l’Unsa-Education a refusé de siéger pour dénoncer les conditions de préparation" de la rentrée scolaire 2011.

"Les suppressions de postes qui ne cessent de s’accumuler sont destructrices pour notre système éducatif. Alors qu’il est à la dérive, notamment pour les élèves les plus fragiles, comme vient de le démonter la récente enquête PISA, le gouvernement s’entête à poursuivre sa politique dogmatique de destruction de l’emploi public, dégradant aussi les conditions de travail des personnels", estime le syndicat Unsa-Education.

Le Sgen-CFDT et la FSU ont eux siégé puis quitté la séance, condamnant un "simulacre de concertation".

Une rallonge de 4 millions d’euros pour le privé

Pour les représentants syndicaux des enseignants, la coupe est pleine. Alors que l’étude PISA de l’OCDE a récemment mis en évidence l’incapacité de la France à tirer vers le haut ses élèves les plus fragiles, ils doutent de la capacité du système éducatif à s’améliorer, alors qu’il est saigné à blanc (65.000 suppressions de postes entre 2007 et 2011 en vertu de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite).

Ces coups de rabot passent d’autant plus mal que l’enseignement privé sous contrat, déjà favorisé par une moindre proportion de suppressions de postes (1.633 suppressions de postes programmées en 2011 au lieu de 3.200 logiquement dues) a, lui, obtenu une rallonge de 4 millions d’euros, soit 250 postes (100 équivalents temps plein) grâce au vote de l’amendement du sénateur UMP Jean-Claude Carle au projet de budget 2011.

De son côté, le gouvernement affirme pouvoir gagner en efficacité avec des postes en moins qui ne pèsent que 0,9 % des effectifs totaux, d’autant plus qu’il y a 20 ans, on comptait 45.267 enseignants de moins et 604.300 élèves de plus.

Quant au pic d’effectifs enseignants atteint il y a 10 ans, il n’a pas permis d’améliorer les résultats scolaires, argue-t-on rue de Grenelle. Il n’empêche.

A l’heure où le gouvernement prône les vertus de l’accompagnement scolaire personnalisé et des stages de rattrapage pour soutenir les élèves les plus en difficulté, les réductions d’effectifs paraissent paradoxales.

En l’absence de revalorisations conséquente de leur traitement, les enseignants craignent donc qu’à terme, l’Etat leur demande d’augmenter leur temps de service.

Déjà, l’enveloppe des heures supplémentaires est passée de 1,25 à 1,41 milliard d’euros dans le budget 2011.

Leviers d’économies

Malgré toutes ces récriminations, le CTPM étant une instance consultative, les suppressions de postes telles que réparties par académie vont être appliquées.

A partir de janvier, l’astuce de la suppression de l’année de stage pour les enseignants débutants n’ayant pu jouer qu’en 2010, les recteurs vont donc devoir chercher où et comment ils vont pouvoir supprimer 8.967 postes dans le primaire (qui intègrent en fait la résorption de 5.600 "surnombres") et 4.800 postes dans le secondaire.

Selon le schéma d’emploi 2011-2013 concocté par le ministère de l’Education nationale, il incombe en effet désormais aux académies, dans le cadre d’un "dialogue de gestion rénové", d’identifier et d’actionner les leviers qui correspondent le mieux à leurs "besoins" (déscolarisation des moins de 3 ans, augmentation des effectifs par classe, suppressions d’option, réaffectation devant les élèves d’enseignants dit "hors la classe"...).

Une responsabilité supplémentaire qui vaut aux recteurs de recevoir pour la première fois cette année une prime au mérite, en fonction de "la manière de servir et des objectifs atteints", selon les textes réglementaires publiés en novembre.

Cette part variable, qui s’étalera entre 0 et 6.840 euros, s’ajoutera à une part fixe de 15.200 euros (contre une prime fixe de 19.000 euros pour tous les recteurs auparavant).

Moins de candidats aux concours

A plus long terme, la "dégradation des conditions de travail" font craindre aux syndicats une désaffection pour la profession.

La réforme de la formation et du recrutement des enseignants, qui se solde par une entrée dans le métier plus brutale qu’auparavant (les débutants étant de surcroît souvent affectés dans des zones difficiles) largement médiatisée pourrait être un facteur dissuasif supplémentaire.

Certains perçoivent comme un signe annonciateur de futures difficultés de recrutement les chiffres publiés jeudi dernier par le ministère de l’Education nationale mettent en évidence une baisse des candidats aux concours enseignants :

18.000 à la session d’admissibilité de septembre 2010, contre 35.000 à la précédente session pour 3.000 postes ouverts dans le premier degré ;

21.000 candidats contre 38.300 à la précédente session, pour 8.600 postes ouverts dans le second degré.

Mais comme le fait valoir tant le ministère que les syndicats, l’année 2010 étant une période "transitoire" de la réforme (le calendrier ayant changé, les sessions 2010 et 2011 se sont tenues à quelques mois d’intervalle), il faudra attendre quelques années afin que se confirme ou s’infirme la tendance.

Source : La Tribune

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