Messieurs qu’on nomme grands, sur l’échelle des valeurs humaines, vous ne valez rien ! (petites nouvelles du dimanche)

dimanche 19 décembre 2010.
 

1) "Aujourd’hui, j’ai quatre-vingt-cinq ans et neuf mois. Je quitte enfin ce monde."

Roger avait été hospitalisé.

En revenant à sa maison de retraite en Charente, la serrure de son logement avait été changée et la direction refusait de lui rendre ses affaires personnelles. Pourquoi ? En, gros, parce que ce locataire était un râleur. Hébergé dans un foyer pour SDF, démuni de son maigre patrimoine vestimentaire, Roger a pris une feuille, un stylo et a écrit sans faute d’orthographe :

"Aujourd’hui, j’ai quatre-vingt-cinq ans et neuf mois. Je quitte enfin ce monde" Ensuite, il ne s’est pas manqué.

Le même jour, un migrant a fait de même à Stains (Seine-Saint-Denis)

Les restrictions budgétaires (ici sur l’hébergement et sur l’accueil des personnes âgées) ont des conséquences humaines. Il serait temps de s’en apercevoir.

2) Multinationales du textile Vos vêtements sentent le sang et les larmes des femmes du Bengale

En ce mois de décembre, les 3 500 000 salariés des entreprises textiles du Bengale (dont 85% sont des femmes) ont engagé des grèves pour obtenir un salaire minimum mensuel de 30 euros.

Quelle a été la réaction des entreprises richissimes et leurs sous-traitants qui font travailler actuellement ces femmes pour 10 à 20 euros par mois, dans des taudis insalubres et dangereux (en décembre 2010, un nouveau bâtiment du textile a brûlé occasionnant 16 morts), à des cadences effroyables et sans droit du travail ? Des coups de bâton, distribués sadiquement aux grévistes par les policiers. Mais aussi des tirs à balles réelles contre celles qui ont eu l’outrecuidance de manifester : 4 morts.

Oui, Wal-Mart, H&M, Zara et les autres : Vos vêtements sentent le sang et les larmes des femmes du Bengale

Bangladesh : Contre H&M, Carrefour, Metro, Walmart, Levi Strauss... la lutte difficile d’ouvrières payées 19 euros mensuels

3) Quand de grands patrons sont condamnés pour "association de malfaiteurs" !

En 2004, le forum de Davos résonnait de morale « Vive l’éthique dans les affaires ! » « Vive l’entreprise morale ! » Exemple fréquemment donné alors : l’entreprise italienne Parmalat.

Comment Parmalat, au départ petite entreprise familiale avait-elle pu devenir une multinationale pesant en 2002, 7,6 milliards de chiffre d’affaires (plus que la Bolivie ou le Sénégal) et 37000 salariés ?

* en plaçant de l’argent dans les paradis fiscaux (île de Man, Pays-Bas, Luxembourg, Autriche, Malte, îles Caïmans, îles Vierges britanniques, Antilles néerlandaises).

* "au moyen d’un système frauduleux à base de malversations comptables, de faux bilans, de documents truqués, de bénéfices fictifs et de pyramides complexes de sociétés offshore emboîtées les unes dans les autres de manière à rendre impossible la traçabilité de l’argent et l’analyse des comptes" (Ignacio Ramonet)

La tribunal de Parme (Italie) vient de condamner les anciens dirigeants de la multinationale agro-alimentaire Parmalat pour banqueroute frauduleuse" et "association de malfaiteurs". L’ex-patron calisto Tanzi écope de 18 ans de prison. Savez-vous la meilleure : ils font appel.

4) Quand le pillage devient un mode de fonctionnement normal du système

Exemple parmi mille : En 2000, l’usine d’électronique Compétence (groupe Alcatel) compte un millier de salariés. Devenue une entreprise de sous-traitance pour Alcatel et reprise par Jabil, elle ne comprend plus que 692 salariés en 2002. En juillet 2009, le fonds américain Mercatech est choisi comme "repreneur" de l’usine et de ses 192 salariés : il reçoit 12 millions d’euros en échange de promesses d’investissement. Les promesses se sont envolées, les douze millions aussi mais c’est légal semble-t-il s’ils ont été investis dans une autre usine du vaste monde.

5) Mahmadou tué par taser

Début décembre 2010, les médias annoncent qu’un "sans-papier d’origine malienne" a été tué par les décharges électriques de taser tirées par des policiers dont l’attitude est justifiée par le ministre de l’intérieur en raison de "l’agressivité et la violence" de l’individu.

Que s’est-il passé ? En cette nuit du 29 au 30 novembre 2010, Mahmadou rejoint le bâtiment au 555 de la rue Gabriel Péri à Colombes (Hauts de Seine) où il loue un lit (prix moyen pour un sans-papier : 300 à 400 euros). Il a déjà payé cher pour venir du Mali en France et ainsi gagner un peu d’argent en travaillant, en envoyer à sa mère restée en Afrique.

En cette nuit du 29 au 30 novembre 2010, la porte du 555 est fermée. La police survient. Mahmadou "sans-papier d’origine malienne", fuit vers le douzième étage pour ne pas être obligé de quitter la France. La suite ?

L’autopsie du corps révèle qu’il est mort d’une "asphyxie aigüe et massive" avec "un coeur particulièrement contracté".

6) Eric, 56 ans, éducateur spécialisé

Quiconque a relevé de l’ANPE sait à quel point cela influe négativement sur sa personnalité. Ces dernières années, s’y ajoute une autre pression psychologique : la crainte permanente d’être radié sur un rien (500000 par an actuellement pour absence a un rendez vous, refus de deux offres d’emploi, refus d’un contrat aidé...).

Or ces décisions de radiation peuvent avoir des conséquences humaines dramatiques pour les demandeurs d’emploi qui en sont victimes. En effet, aujourd’hui les radiations sont quasiment automatiquement prononcées pour une durée minimum de 2 mois. Cela signifie donc très concrètement que la personne qui en est victime sera privée de toutes ressources financières pendant 2 mois pleins même après une seule et unique absence par exemple...

Quant aux emplois proposés, il s’agit de plus en plus souvent de CDD, de postes en intérim, à temps très partiels... Comme le dit Stéphane Guillou (CGT), Pôle emploi est devenu l’outil de gestion de la précarité dans le pays."

Exemple : Eric, 56 ans, éducateur spécialisé, reçoit l’offre d’emploi numéro 817296L ainsi libellée : "Pour l’animation de nos divers services de charme pour adultes sur internet... Utilisation de la Webcam... Travail de nuit"

7) Ah, qu’elles sont jolies les relations humaines au sein de l’UMP

La dernière livraison du Canard Enchaîné raconte l’entretien avec le chef de l’État du dépité Christian Estrosi, qui n’a pas été renouvelé à son poste de ministre de l’Industrie : « Tu t’es comporté avec moi comme une ordure. Je n’ai rien d’autre à te dire. J’étais avec toi, ce n’est plus le cas ».

Survenant après un incident du même genre avec le président du groupe UMP au Sénat, Gérard Longuet, qui aurait menacé Nicolas Sarkozy de lui « mettre sa main sur la gueule » pour des promesses non tenues de devenir ministre, on se dit que ces types donnent de belles leçons de savoir-vivre.

8) Communication sarkozhyène et réalité sociale : exemple de l’hébergement des sans-abri

Les statistiques officielles listent 341 sans-abri décédés cette année au 13 décembre. Ceux-là ne risquent pas d’atteindre la retraite version Sarko Fillon. Ils décèdent en moyenne à 45 ans.

Pourtant, en 2007, Nicolas, Paul, Stéphane Sárközy de Nagy-Bocsa, prend le ton qui convient à la télévision pour gagner la sympathie des gens qui croient ce qu’ils entendent à la télé " Je veux que d’ici deux ans plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir et d’y mourir de froid"

Pourtant, en 2008, François Fillon tonitrue l’accés au logement pour les sans-abri et personnes mal logées " grand chantier national de2008 à 2012" avec 1,76 milliards investis et 100 000 nouveaux logements en deux ans.

Mi-novembre 2010, le même François annonce une enveloppe de 63 millions d’euros pour les associations qui s’occupent de l’hébergement d’urgence.

Le 22 novembre, Benoist Vite-Apparu affirme en visitant le centre d’hébergement d’Ivry-sur Seine que "toutes les demandes d’hébergement d’urgence devront être pourvues cet hiver".

Pour quel résultat réel tout ce baratin ? Aucun !

La Fédération nationale des Associations de réinsertion sociale et le Secours catholique constatent que les restrictions budgétaires concernant l’hébergement d’urgence plongent "les associations dans une incertitude qui les empêche d’anticiper et de bien travailler."

La Fondation Abbé-Pierre déplore qu’à Lyon par exemple, 150 personnes chaque jour, ne trouvent pas de solution d’abri". Elle dénonce le "décalage entre le discours volontariste et les pratiques". "Pire encore : la rigueur a frappé ceux qui vivent au quotidien dans la contrainte de l’extrême rigueur".

Monsieur Fillon François, élève du collège privé Saint Michel des Perrais puis du lycée privé Notre-Dame de Sainte-Croix, est-ce là que vous avez appris à manquer de pudeur au point de faire de la communication mensongère sur un tel sujet ? Pour des leçons de dignité, je vous renvoie à l’article que nous avions mis en ligne début décembre de cette année :

Valeurs de la rue (échos du monde des SDF)

Les profiteurs rapaces, sacrés bienheureux du 21ème siècle. Jusqu’à quand ? (Petites nouvelles du dimanche 12 décembre)


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