Sarkozy engage au Sénat son vrai projet : une retraite par capitalisation massacrant la retraite par répartition

samedi 30 octobre 2010.
 

2) L’objectif du projet, c’est la capitalisation

En direct du sénat avec le sénateur François Autain

Sénateur du Parti de gauche

« Avec son amendement préconisant un changement systémique, adopté hier par la majorité de droite du Sénat, le gouvernement vise, à court terme, à remettre en cause notre système par répartition au profit 
de celui par capitalisation. C’est grave et d’autant plus paradoxal que dans l’article Ier du projet sur 
les retraites, il est écrit que le système par répartition doit rester le système unique pour les Français. 
C’est du double langage qui témoigne de la démarche du gouvernement. Il masque son objectif qui est, 
sur le fond, de compléter dans un premier temps 
le système par répartition par de l’épargne privée, pour ensuite le remplacer par le système par capitalisation.

Or, ce système, on le voit fonctionner aux États-Unis : les salariés américains ont vu, avec la crise, fondre 
du jour au lendemain leurs retraites. Confier sa retraite à des fonds de pension, aux marchés financiers, c’est plus qu’aléatoire. En aucun cas, le système par capitalisation n’offre les garanties du système solidaire par répartition. Même si aujourd’hui (mais est-ce 
un hasard  ?) de grandes compagnies d’assurances privées lancent des campagnes de publicité pour 
vanter les produits d’épargne retraite, les travailleurs ne sont pas dupes. Ils sont de plus en plus nombreux à mesurer les dangers d’un tel système basé uniquement sur les capacités contributives de chaque salarié où seuls ceux qui ont un bon salaire pourraient envisager 
la capitalisation, les autres n’ayant pas ou très peu 
de retraite.

Les salariés, qui jugent déjà ce projet 
de loi profondément inéquitable et injuste avec le recul à 62 ans pour le départ en retraite et 67 ans pour 
le taux plein, verront dans ce nouvel amendement 
du gouvernement la confirmation de leur refus 
d’une telle réforme. »

1) Amendement surprise au Sénat sur le régime par points

Adopté en pleine nuit par la majorité de droite du Sénat, l’amendement, véritable bâton de dynamite au coeur de la réforme des retraites, prévoit la mise en place d’uneretraite par points, individualisée, après l’élection présidentielle de 2012.

Cet amendement, présenté par le rapporteur de la commission des Affaires sociales, Dominique Leclerc (UMP), par le groupe de l’Union centriste (UC) et Gérard Longuet, président du groupe UMP, a été approuvé par 198 voix contre 140.

Il prévoit, à compter du premier semestre 2013, l’organisation d’une "réflexion nationale" sur "les objectifs et les caractéristiques d’une réforme systèmique de la prise en charge collective du risque vieillesse", selon ses termes officiels. Lesquels ne recouvrent pas la réalité . Le débat pourrait aussi porter sur "les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d’activité". Le Sénat a en revanche rejeté, par un vote à main levée, un amendement du centriste Jean Arthuis, président de la commission des Finances, qui proposait notamment d’introduire dans la réforme un article détaillant les modalités "d’un régime de retraite universel par répartition, transparent, équitable et lisible pour l’ensemble des Français".

Ce texte, appuyé par le ministre du Travail, Éric Woerth, prévoit d’ouvrir en 2013 « une réflexion nationale » en vue d’une « réforme systémique » de la retraite. Il s’agirait d’étudier « les conditions de mise en place d’un régime universel par points ou en comptes notionnels ». Cette initiative se voulait, à l’évidence, un geste dans une double direction. Celle des centristes, qui prônent une telle réforme, et dont les voix sont indispensables au Sénat pour garantir une majorité au gouvernement. Celle de la CFDT, qui réclame elle aussi un système par points. Peine perdue, de ce côté-là au moins  : la centrale de François Chérèque a aussitôt fait savoir que cela ne changeait rien à sa « vision » de l’actuel projet de réforme et à 
son « attitude ». Bernard Thibault, tout en réaffirmant l’hostilité de la CGT au système par points, a eu beau jeu d’ironiser sur un « gouvernement (qui) marche un peu sur la tête »  : « À quoi sert donc une réforme qui suscite autant de mécontentement si c’est immédiatement pour introduire le fait que d’ici à quelques années on va envisager de changer de système ? »

Un régime par points ou en comptes notionnels (sur le modèle suédois) serait lourd de dangers. Dans ces systèmes, même si le cadre de la répartition est maintenu, les retraites sont traitées comme dans la capitalisation, ou comme de simples assurances. Les cotisations donnent droit à des points ou à un capital virtuel. La pension est calculée sur l’intégralité de la carrière et, dans le cas des comptes notionnels, elle dépend aussi de l’espérance de vie  : le salarié a pour seul « choix » de retarder son départ pour pouvoir toucher plus... Il n’y a plus de taux de remplacement garanti. L’individualisation des droits prend le pas sur la solidarité au sein des générations et entre générations. Enfin, le Conseil d’orientation des retraites a lui-même souligné, dans un rapport début 2010, qu’une telle réforme ne garantirait pas l’équilibre financier du système.

Yves Housson


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