En quoi les traités de Maastricht et Amsterdam ont-ils gene l’action de Lionel Jospin ? Fera-t-on ce qu’on veut malgré la constitution Européenne ?

lundi 23 juillet 2012.
 

Nous ne confondons évidemment pas la politique menée par Lionel Jospin avec celle menée par Chirac-Raffarin Mais si nous avons souligné, depuis le 21 avril, en France, la profonde différence entre la droite et la gauche, c’est justement pour ne pas l’effacer au niveau européen. Au niveau européen, les libéraux sont tellement à l’offensive pour démanteler les acquis sociaux des peuples, qu’il est encore plus nécessaire qu’en France de ne pas leur laisser les initiatives, de ne pas travailler au consensus avec eux. Il faut les combattre.

Il faut se rappeler ce que cela nous a coûté, de laisser s’ombrer la frontière entre la gauche et la droite lors du sommet de Barcelone en mars 2002. Lors du sommet de Nice, Lionel Jospin s’était félicité en expliquant qu’il réparait “le calamiteux traite d’Amsterdam”. Puis voilà qu’on a expliqué qu’on était obligé d’accepter les " petits pas " de l’élargissement, hélas, sans approfondissement. Aujourd’hui, tous les socialistes regrettent de n’avoir pas, à temps, bataillé pour que l’élargissement se fasse différemment. Alors, on nous dit que la Constitution va effacer le calamiteux traité de Nice : cette façon de faire des "petits pas " qu’on regrette aussitôt, pour en refaire dans le même sens, ne reste pas sans conséquences.

Ne pas oublier le 21 avril 2002

En toutes choses, il faut considérer la fin et, la fin de l’expérience du gouvernement de la gauche plurielle, c’est la catastrophe du 21 avril 2002.

Il est certes possible de considérer que cette catastrophe est la faute de Chevènement, de Taubira, d’Arlette, du facteur ou de Hue. Il resterait encore à comprendre pourquoi ils ont pu avoir l’oreille du peuple de gauche. Il serait aussi possible de considérer que c’est la faute du peuple qui n’a pas compris. Il resterait donc la solution de changer de peuple. Chacun reconnaîtra que ce n’est guère réaliste.

Un bilan mitigé

Il n’est donc pas possible d’échapper à la nécessité de dresser le bilan de la politique menée par le gouvernement de Lionel Jospin. Or, ce bilan est mitigé et la pression exercée par l’Union européenne n’est pas étrangère à l’aspect négatif de ce bilan.

Certes, le gouvernement de la gauche plurielle a de nombreux aspects positifs.

Il a su imposer au patronat la 1ère loi Aubry et mettre en place les emplois jeunes et la Cmu. L’aspect positif de son bilan ne s’arrête d’ailleurs pas là : il a, également, fait adopter une loi d’autonomie pour répondre aux besoins de personnes âgées dépendantes, le Pacs, la parité hommes-femmes, l’instauration d’un seuil communal de 20 % de logements sociaux ...

Mais les aspects négatifs de ce bilan sont, eux-aussi, fort nombreux.

Tout d’abord, le gouvernement de Lionel Jospin n’a pas défait ce que la droite avait fait : ni la loi quinquennale Balladur-Giraud sur l’annualisation du temps de travail ni la contre-réforme Balladur de nos retraites. D’ailleurs, le sommet de Barcelone en 2002 et les conclusions signées par Lionel Jospin et Chirac allaient dans le même sens que cette contre-réforme.

Ensuite, après avoir abandonné les salariés de Renault-Vilvorde à leur sort, alors que les représentants de l’Etat et des salariés étaient majoritaires au conseil d’administration de Renault (9 sur 15), le gouvernement de la gauche plurielle a, sous la pression des directives européennes, accéléré les privatisations partielles des entreprises publiques : France-télécom, Air-France, Gan... Il a, sous la même pression, discuté de la libéralisation partielle du marché du gaz et de l’électricité. Chaque socialiste a pu, depuis, mesurer la portée de ces décisions. Le gouvernement de Lionel Jospin a, également, mis en place un plan d’allégement de l’impôt sur le revenu, pourtant le seul impôt qui soit progressif. Il a également diminué l’impôt sur les sociétés, sous la pression du dumping fiscal européen, découlant de l’absence de toute politique d’harmonisation fiscale de l’Union européenne.

Le gouvernement de la gauche plurielle, n’a pas su répondre à l’urgence sociale en refusant de mettre en place une nouvelle forme d’ " autorisation administrative de licenciement " pour riposter aux " licenciements boursiers " et il a différé chaque année la tenue d’une conférence annuelle sur les salaires, il n’a pas lutté contre les délocalisations, concédant que " l’Etat ne peut pas tout ".

Il n’a pas, non plus, su répondre à cette urgence sociale parce que le traité d’Amsterdam (signé par Lionel Jospin et Chirac) restreignait la possibilité de déficits budgétaires et donc le financement d’une politique de grands travaux qui auraient permis, notamment, de casser les " ghettos " et de fournir du travail à des centaines de milliers de chômeur. A ceux qui, justement, entendaient le gouvernement affirmer que " cela allait mieux " mais qui, pour eux, ne voyaient rien venir. A ceux qui étaient toujours victimes, après cinq ans de gauche, de la fracture sociale.

Et, le 21 avril 2002, nombreux sont ceux qui ont voté à l’extrême-gauche ou se sont abstenus, reléguant ainsi, hélas, hélas, Lionel Jospin à la troisième place, derrière Chirac et Le Pen...

La même question se pose pour l’avenir

En effet, l’adoption du projet de Constitution européenne qui impose, jusque dans les détails les politiques libérales, n’interdirait pas (quand il y a une volonté, il y a un chemin, la lutte paie...) mais rendrait encore plus difficile toute politique de transformation sociale en France.

Or, les élections régionales et européennes de 2004 n’ont pas tourné la page du 21 avril. Le vote des Français est constant : le 21 avril comme le 28 mars ce qu’ils ont sanctionné, c’est le libéralisme. Ils ne sont pas les seuls en Europe : les Britanniques, les Allemands, les Espagnols et les Italiens empruntent le même chemin.

Et demain, il en irait de même pour tout gouvernement de gauche qui, sous contrainte de la Constitution européenne, ne mènerait pas une véritable politique de transformation sociale. Autant donc éviter, en approuvant le projet de Constitution européenne, de donner nous-mêmes, les bâtons pour nous faire battre.

Parce que, dernier argument, inlassablement repris par les partisans du " oui " : " nous serions isolés " de nos partenaires européens. Certes, des dirigeants du Pse, qui ne consultent pas leurs militants, et qui conduisent des politiques antisociales, comme Blair et Schröder aujourd’hui. Mais ce n’est donc pas seulement à cause de notre refus du traité que nous sommes " isolés ", c’est aussi, n’est-ce pas, parce que notre projet 2007 ne veut, en aucun cas, imiter Schröder et Blair... C’est parce que nous, nous tirons, des leçons du 21 avril, et que nous voulons un vrai programme de transformation sociale ! En France comme en Europe, de façon cohérente. Soyons certains que des dizaines de milliers de socialistes européens réduits au silence parce que l’on ne leur a pas donné l’occasion de débattre, espèrent avec ferveur qu’en France, nous disions " non ". Or cette constitution, c’est la politique de Chirac-Raffarin-Sarkozy institutionnalisée, nous la combattons ici comme à Bruxelles.


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