Lucien Sampaix Un communiste combattant de l’Humanité

samedi 21 août 2010.
 

L’ajusteur, militant communiste reconnu dans sa région des Ardennes, devient journaliste 
puis secrétaire général 
à l’Humanité, dont 
il assurera la publication clandestine avant d’être arrêté puis fusillé à Caen 
en 1941.

Né le 13 mai 1899 à Sedan, Lucien Sampaix est le cinquième enfant d’une famille ouvrière qui en compte sept. Sa mère est ménagère. Après avoir obtenu son certificat d’études primaires, Lucien Sampaix entre en apprentissage comme ajusteur-mécanicien à l’âge de douze ans. Trois ans plus tard, la Première Guerre mondiale éclate.

À l’image de neuf autres départements, les Ardennes sont occupées par l’armée allemande. Un vent de panique souffle sur la région. Le récit des atrocités réelles ou supposées jette la population sur les routes de l’exode. La famille Sampaix se réfugie dans le département voisin de la Marne, où Lucien travaille chez des paysans avant d’être embauché dans une brasserie à Rouen. Mobilisé en avril 1918, il est incorporé dans un service infirmier.

Démobilisé en 1921, il retourne à Sedan. Il y trouve du travail comme ajusteur-mécanicien.

Il adhère d’abord au syndicat de la métallurgie affilié à la Confédération générale du travail unitaire, animée par des militants communistes comme Gaston Monmousseau. Lucien Sampaix rejoint ensuite le Parti communiste  ; il est alors âgé de vingt-quatre ans. Bientôt, il devient secrétaire du syndicat local des métaux et secrétaire du rayon communiste de Sedan, cumulant ces différentes responsabilités politiques et syndicales.

Lucien Sampaix est également membre de l’Association républicaine des anciens combattants, fondée par l’écrivain Henri Barbusse, et milite au Secours rouge international, ancêtre du Secours populaire. Dès lors, Lucien Sampaix participe à toutes les actions engagées par le Parti communiste. Peu à peu, il incarne le communisme dans la région. À tel point que le responsable de la rédaction du journal le Socialiste ardennais utilise le patronyme de Lucien Sampaix comme épithète, parlant des «  Sampaix  » et non plus des communistes  ! En 1929, Lucien Sampaix devient secrétaire régional du Parti communiste.

Il s’installe d’abord à Reims, puis à Charleville. Officiellement, ce déménagement a pour objectif de renforcer la direction régionale, qui se résume à Lucien Sampaix comme l’explique un militant de Saint-Quentin  : «  La région, la direction de la région, c’est Sampaix, le secrétaire régional, c’est Sampaix  ; le trésorier, c’est Sampaix, le secrétaire de rédaction de l’Exploité, c’est Sampaix  ; l’administrateur de l’Exploité, c’est Sampaix.  »

Tout le monde sait que la situation ne durera pas  ; d’autant plus que Sampaix est sous la menace d’une arrestation à la suite d’une condamnation pour provocation de militaires à la désobéissance. À la fin de l’année 1931, il est arrêté et n’est libéré qu’à la faveur de l’amnistie présidentielle qui suit l’élection d’Albert Lebrun à la présidence de la République, en mai 1932.

Quelques mois après sa libération, l’ancien ajusteur-mécanicien est embauché à l’Humanité, et devient journaliste au sein du service des informations générales et politiques. Chargé de suivre l’actualité de la gauche non communiste, Lucien Sampaix s’intéresse peu à peu à l’activité de l’extrême droite. Il s’emploie alors à dénoncer les agissements des organisations de cette mouvance «  aux ordres du grand patronat et des ennemis du pays  ».

Quatre ans après avoir été candidat aux élections législatives à Sedan, l’ancien secrétaire de la région Nord-Est du Parti communiste se présente à Paris contre l’ancien ministre de la Guerre et député sortant de droite de la deuxième circonscription du 10e arrondissement, Jean Fabry. Comme en 1932, le total des voix de gauche au premier tour est supérieur au nombre de suffrages obtenus par le candidat de droite. Mais en 1936, la gauche n’est plus divisée. Lucien Sampaix se désiste au profit du candidat radical-socialiste Jean-Baptiste Bossoutrot. Ce dernier l’emporte au second tour par 12 voix d’avance. En France, le Front populaire triomphe. Pour la première fois, le gouvernement est présidé par un socialiste, Léon Blum.

Au lendemain de la victoire électorale du Front populaire, Lucien Sampaix est nommé secrétaire général du quotidien communiste. Par ailleurs, il continue de réaliser des enquêtes et on lui confie la rubrique militaire.

En juillet 1939, le journaliste est poursuivi devant la justice pour avoir dénoncé les agissements de la cinquième colonne, comme le rappellera le directeur de l’Humanité Marcel Cachin au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Finalement, il est acquitté. Un mois plus tard, l’Allemagne et l’URSS signent un pacte de non-agression. Immédiatement, la presse communiste est suspendue puis interdite. En réponse à l’invasion de la Pologne, Londres et Paris déclarent la guerre à Berlin. Les députés communistes votent les crédits de guerre. Mobilisé, Lucien Sampaix est affecté dans une usine. Mais le patron refuse de le prendre.

Quelques semaines plus tard, le Parti communiste est interdit. Hors-la-loi, l’ancien journaliste participe à l’édition clandestine de l’Humanité jusqu’à son arrestation le 19 décembre 1939. Tout au long de l’année 1940, Lucien Sampaix est régulièrement transféré d’un lieu de détention à un autre. À la fin de l’année, il s’évade et se réfugie à Paris chez un ancien ouvrier de l’imprimerie de l’Humanité, où il est arrêté trois mois plus tard. Ce dernier est interpellé alors qu’il transportait des brochures illégales éditées par le Parti communiste clandestin.

Emprisonné à la Santé, Lucien Sampaix est traduit devant la section spéciale auprès de la cour d’appel de Paris. Contre toute attente, ce tribunal d’exception spécialement mis en place pour réprimer les activités communistes le condamne aux travaux forcés, et non pas à la peine capitale.

Mi-septembre 1941, il est transféré à la prison centrale de Beaulieu. Le 15 décembre 1941, Lucien Sampaix est fusillé à Caen en compagnie de douze autres otages. Le 15 mai 1943, l’aînée de ses enfants – sa fille Simone – militante clandestine communiste, est arrêtée à son tour. Internée au fort de Romainville, elle est déportée à Auschwitz d’où elle reviendra en 1945.

Alexandre Courban


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