GAZA. Le secrétaire général de l’ONU exige la levée de l’embargo (2 articles)

dimanche 6 juin 2010.
 

Alors qu’Israël s’appuie sur les États-Unis pour éviter toute condamnation et sanctions, la fin du blocus devient cruciale.

Les États-Unis veulent des sanctions d’ici le 21. Le ton est ferme. De celui qui sait qu’il peut imposer sa volonté aux autres membres du Conseil de sécurité de l’ONU. Mais il s’agit en l’occurrence de l’Iran. Pas d’Israël. Malgré l’attaque totalement illégale des bateaux par Israël dans les eaux internationales, malgré la tuerie qui s’y est déroulée (on parle d’au moins neuf morts), Washington continue à faire feu de tout bois pour éviter à son allié régional d’entrer dans le cycle des sanctions et des condamnations internationales. « Israël a tout à fait le droit de protéger ses intérêts en matière de sécurité », a même dit le vice-président américain, Joe Biden. Il peut bien réitérer le soutien de l’administration Obama à la tenue d’une enquête transparente et impartiale sur les circonstances de l’incident, celle-ci n’est pas encore prête à voir le jour.

Des déclarations qui ne pouvaient que mettre en confiance le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, qui s’est exprimé mercredi soir sur les chaînes de télévision de son pays. « Notre devoir est d’inspecter tous les bateaux qui arrivent. Si nous ne le faisions pas, Gaza deviendrait un port iranien, ce qui constituerait une menace réelle pour la Méditerranée et l’Europe », a-t-il affirmé. Vieilles antiennes  : « L’État d’Israël continuera à exercer son droit à l’autodéfense. La sécurité est au-dessus de tout », ou encore  : « Israël est victime d’un assaut d’hypocrisie internationale. »

Les pays pro-israéliens dans l’embarras

Pourtant, cette fois, il en faudra un peu plus à Israël pour s’en sortir. Surtout au vu de la catastrophe humanitaire qui touche non pas le Hamas mais le 1,5 million d’habitants de Gaza. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, qu’on n’avait jamais connu aussi énergique, a expliqué que le grave incident constitué par l’abordage sanglant par l’armée israélienne d’une flottille apportant de l’aide humanitaire à Gaza « met en lumière le blocus du territoire qui dure depuis longtemps ». Ce blocus est « contre-productif, intenable et immoral. Il doit être levé immédiatement ».

Du côté des pays pro-israéliens, on est dans l’embarras. Surtout pour ceux dont les ressortissants se trouvaient sur les navires et qui ont pu témoigner de la violence israélienne et des mensonges propagés par Tel-Aviv sur de supposées cargaisons d’armes. Le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, a préconisé, jeudi, la participation d’observateurs indépendants nommés par le quartet pour le Proche-Orient à une enquête israélienne sur l’assaut meurtrier de lundi. L’Italie s’est opposée, au sein de l’ONU, à l’ouverture d’une enquête internationale, tout comme les États-Unis et les Pays-Bas.

Selon les médias israéliens, Tel-Aviv négocierait avec les États-Unis en vue de la constitution d’une « commission » acceptable par les deux alliés. Parmi les options discutées avec Washington figure la création d’une commission d’enquête dirigée par un « juriste de renommée internationale » et composée de représentants israéliens et d’observateurs américains.

de Pierre Barbancey

2) Quand Israël tire à vue sur les humanitaires

En tuant 
une dizaine 
de militants 
de la paix 
qui voulaient briser le blocus 
de Gaza, 
Tel-Aviv montre 
sa détermination à agir à sa guise, 
au mépris du droit international. Seules des sanctions fortes peuvent 
le contraindre 
à renoncer à ce type d’exactions.

Pourquoi  ? C’est la première question qui se pose après le massacre perpétré par des commandos israéliens contre une flottille qui avait quitté Chypre dimanche et entendait livrer 10 000 tonnes d’aide humanitaire au 1,5 million de Gazaouis en brisant le blocus naval mis en place par Israël le long du territoire palestinien. Des centaines de militants de la paix avaient pris place dans ces bateaux. Pas pour en découdre, pas pour faire la guerre  : simplement briser un blocus inhumain imposé par Israël avec la complicité passive des gouvernements du monde entier, pays arabes compris.

Huit français étaient à bord du navire

Près de 20 personnes ont été tuées et des dizaines d’autres blessées lors de l’abordage de deux des bateaux, l’un turc et l’autre grec, qui plus est dans les eaux internationales. Huit Français se trouvaient à bord du navire hellène. Des affrontements ont eu lieu, les participants résistant à l’assaut israélien.

Face à l’émotion internationale, Israël ne cherche pas à se défendre. La meilleure défense, c’est l’attaque. Voilà donc le ministre travailliste de la Défense, Ehoud Barak, qui renvoie la faute du drame sur les organisateurs de la flottille, coupables selon lui d’être soutenus par des «  organisations terroristes  », c’est-à-dire le Hamas et al-Qaida. Le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, affirme de son côté que des armes auraient été trouvées à bord des bateaux. Des affirmations gratuites dans la mesure où elles sont invérifiables. Comme à leur habitude, les dirigeants israéliens cherchent à brouiller les pistes, à semer le doute. De toute manière, Ehoud Barak l’a dit et redit  : Israël est prêt à accepter les conséquences de ces actions. Évidemment  : pour l’instant, aucune action n’a jamais été entreprise contre Israël. Pis, les massacres de Gaza ont été récompensés par un rehaussement des relations avec l’Union européenne et une adhésion à l’OCDE qui entérine, de fait, l’apport des colonies à l’économie israélienne. La Maison-Blanche s’est d’ailleurs bornée à «  regretter  » les morts de la flottille. Netanyahou devait être aujourd’hui à Washington pour rencontrer Barack Obama, mais il a préféré regagner Tel-Aviv.

Alors, pourquoi Israël, qui avait déjà bloqué des flottilles de solidarité, s’est cru obligé de tuer  ? La réponse tient certainement dans l’isolement dans lequel se plonge Tel-Aviv, mois après mois. Les stratèges israéliens voient dans une escalade régionale – le Liban, la Syrie et la bande de Gaza pourraient s’embraser alors que les Arabes israéliens entrent dans une grève générale – le moyen d’éviter un retour au processus de paix, à des négociations directes ou indirectes. Alors que le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, vient de décréter un deuil de trois jours, on voit mal comment des émissaires palestiniens pourraient rencontrer leurs homologues israéliens. Pour parler de quoi  ? Pour engager quel type de coopération  ?

La balle est maintenant plus que jamais dans le camp de la communauté internationale. Soit elle se décide à sanctionner, à punir Israël, économiquement, politiquement et, pourquoi pas, culturellement, jusqu’à ce que ce pays cesse de se croire au-dessus des lois internationales, soit elle peut s’attendre à de nouvelles guerres dans la région.

Pierre Barbancey


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