Qui veut la peau du Front de Gauche ?

vendredi 4 juin 2010.
 

À l’approche du congrès du Parti Communiste qui se tiendra les 18, 19 et 20 juin prochains à La Défense (92), différentes approches se font jour à leur manière. Après le départ annoncé d’une partie des cadres unitaires, et le texte lancé par l’association Communisme21 proche de Robert Hue, cette semaine de nouvelles positions émergent et tentent d’influer sur le débat. Au centre des préoccupations ; l’avenir du Front de Gauche, l’alliance politique - pour l’instant essentiellement électorale - lancée en décembre 2008 par le PCF et qui est parvenue à fédérer le Parti de Gauche et d’autres micro-formations de la gauche radicale. Parmi elles, on retrouve les Alternatifs, le M’Pep ou Gauche Unitaire le mouvement initié par l’ex-LCR Christian Piquet.

Les “orthodoxes” du PCF pour un repli sur soi

On les appelle les “orthodoxes”, ou parfois les “identitaires”, voire les “staliniens” pour certains. Ce sont les partisans d’une ligne qu’ils considèrent plus marxistes, moins corrompue par la social-démocratie incarnée par le Parti Socialiste. Souvent représentés au sein du parti par le député du Rhône André Gérin, ils voient en Jean Luc Mélenchon un “sous-marin” du PS. Pour ces militants, le Front de Gauche ne peut constituer qu’une impasse car incapable de mener une offensive idéologique marxiste. Le PCF doit alors se recentrer sur son identité, revenir à ses fondamentaux : centralisme et lutte de classe. Leur texte présenté au Congrès de Martigues a rassemblé prés de 25 % des suffrages (profitant de l’absence de texte présenté par les unitaires).

Le vent en poupe, ils ont créé depuis une sorte de plate-forme réutilisant l’intitulé de cette motion : “Faire vivre et renforcer le PCF”. Ils souhaitent donc en finir avec le Front de Gauche et ils le font savoir dans un texte publié il y a peu par leur réseau. Dans cette contribution, ils présentent le Front de Gauche comme un échec, et pointent la responsabilité de la direction du parti. Ils voient dans cette stratégie un effacement du PCF au profit de Jean Luc Mélenchon, président du Parti de Gauche. Ils dénoncent surtout les conditions qui sont celles du Congrès d’Étape. En effet celui ci, prévu lors des discussions du 34e Congrès, peine à s’inscrire dans un cadre statutaire qui ne prévoit pas de pareilles dispositions. Alors de plus en plus de militants, qu’ils soient orthodoxes ou au contraire partisans d’une alliance avec le PS y voient une occasion de revenir sur les décisions adoptées lors du dernier Congrès, à commencer par la mise en place du Front de Gauche.

Le parti de Gauche s’invite dans les débats

Ces derniers mois, Jean Luc Mélenchon avait déjà tendance à titiller responsables et militants du Parti Communiste en se déclarant “prêt” à incarner le Front de Gauche pour 2012. Patrice Bessac, porte-parole national et secrétaire de la fédération de Paris - quoique nouveau champion du parti à Montreuil - avait tenu à rappeler à l’ordre le sénateur européen lors d’une interview accordée à Libération . Il déclarait alors “le FDG n’est pas une autocratie”. Les dirigeants du Parti de Gauche ont compris le message, et c’est avec plus de tact qu’ils s’adressent à présent aux militants communistes.

Le 21 mai, la direction du PCF s’adresse à Jean Luc Mélenchon pour se dire prêts à discuter d’une candidature commune en 2012 aux élections présidentielles comme législatives. Cette proposition, à la veille du congrès d’étape, sonne comme un rappel à l’ordre des congressistes : hors de question de revenir sur la stratégie adoptée en décembre 2008. Elle constitue également une acceptation de fait de la proposition de “paquet électoral” chère au président du Parti de Gauche.

Probablement dans le but d’appaiser les tensions et d’éviter une personnification du débat, ce n’est plus Jean Luc Mélenchon qui s’adresse à eux mais ses seconds, à savoir François Delapierre et Éric Coquerel. Dans une lettre rendue publique le 24 mai et reprise par L’Humanité, les deux responsables du Front de Gauche accueillent “très positivement” la missive communiste. En revanche, ils marquent leur préférence envers un(e) “militant(e) politique expérimentée” plutôt qu’une “personnalité du mouvement social”. Traduction : pas question d’investir un Gérard Aschieri, ex-secrétaire national de la FSU et avancé un temps par la direction du PCF pour incarner le Front à la gauche du PS.

Enfin, MM. Delapierre et Coquerel choisissent la voix du débat - ou de l’affrontement - avec les opposants au Front de Gauche. Face aux tentations solistes du PCF, ils avancent une fois de plus la création d’un “parti commun” à la manière de leurs confrères allemands de Die Linke, réunis en congrès la semaine passée. Les responsables du PG voient eux dans le Front de Gauche l’embryon de ce parti commun, et souhaitent pour cela le doter d’un bureau, en permettant par la même occasion l’adhésion individuelle.

Alors ? Provoc’, stratégie ou lobbing ?


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