A1) Il pleure dans mon cœur (Paul Verlaine)
Il pleure dans mon cœur
Comme il pleut sur la ville ;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon coeur ?
O bruits doux de la pluie,
Par terre et sur les toits !
Pour un coeur qui s’ennuie
Oh ! le chant de la pluie !
Il pleure sans raison
Dans ce coeur qui s’écoeure.
Quoi ! nulle trahison ? ...
Ce deuil est sans raison.
C’est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon coeur a tant de peine !
(Romances sans paroles)
A2) La tristesse (Alphonse de Lamartine)
L’âme triste est pareille
Au doux ciel de la nuit,
Quand l’astre qui sommeille
De la voûte vermeille
A fait tomber le bruit ;
*
Plus pure et plus sonore
On y voit sur ses pas
Mille étoiles éclore
Qu’à l’éclatante aurore
On n’y soupçonnait pas !
*
Des îles de lumière
Plus brillante qu’ici
Et des mondes derrière,
Et des flots de poussière
Qui sont " mondes aussi "
*
On entend dans l’espace
Des choeurs mystérieux
Ou du ciel qui rend grâce,
Ou d’un ange qui passe
Ou de l’homme pieux
*
Et pures étincelles
De nos âmes en feu,
Les prières immortelles
Sur leur brûlantes ailes
Nous soulèvent un peu !
*
Tristesse qui m’ inonde
Coule donc de mes yeux
Comme une onde féconde :
Il faut que l’homme pleure
Il faut que l’homme meure.
(Harmonies poétiques et religieuses)
A3) Il n’y a pas d’amour heureux (Louis Aragon )
Rien n’est jamais acquis à l’homme, ni sa force
Ni sa faiblesse, ni son coeur. Et quand il croit
Ouvrir ses bras, son ombre est celle d’une croix
Et quand il croit serrer son bonheur, il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
Il n’y a pas d’amour heureux
*
Sa vie, elle ressemble à ces soldats sans armes
Qu’on avait habillés pour un autre destin
A quoi peut leur servir de se lever matin
Eux qui ’on retrouve au soir désoeuvrés incertains
Dites ces mots " Ma vie " et retenez vos larmes
Il n’y a pas d’amour heureux
*
Mon bel amour, mon cher amour, ma déchirure
Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
Et ceux-là sans savoir nous regardent passer
Répétant après moi les mots que j’ai tressés
Et qui, pour tes grands yeux, tout aussitôt moururent
Il n’y a pas d’amour heureux.
*
Le temps d’apprendre à vivre il est déjà trop tard
Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l’unisson
Ce qu’il faut de malheur pour la moindre chanson
Ce qu’il faut de regrets pour payer un frisson
Ce qu’il faut de sanglots pour un air de guitare
Il n’y a pas d’amour heureux
*
Il n’y a pas d’amour qui ne soit à douleur
Il n’y a pas d’amour dont on ne soit meurtri
Il n’y a pas d’amour dont on ne soit flétri
Et pas plus que de toi l’amour de la patrie
Il n’y a pas d’amour qui ne vive de pleurs
*
Il n’y a pas d’amour heureux
Mais c’est notre amour à tous deux
(La Diane française)
C1) Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! (Alphonse de Lamartine)
C2) Ton image en tous lieux peuple ma solitude
Ton image en tous lieux peuple ma solitude.
Quand c’est l’hiver, la ville et les labeurs d’esprit,
Elle s’accoude au bout de ma table d’étude,
Muette, et me sourit.
*
A la campagne, au temps où le blé mûr ondule,
Amis du soir qui tombe et des vastes couchants,
Elle et moi nous rentrons ensemble au crépuscule
Par les chemins des champs.
*
Elle écoute avec moi sous les pins maritimes
La vague qui s’écroule en traînant des graviers.
Parfois, sur la montagne, ivre du vent des cimes,
Elle dort à mes pieds.
*
Elle retient sa part des tourments et des joies
Dont mon âme inégale est pleine chaque jour ;
Où que j’aille, elle porte au-devant de mes voies
La lampe de l’amour.
*
Enfin, comme elle est femme et sait que le poète
Ne voudrait pas sans elle oublier de souffrir,
Lorsqu’elle me voit triste elle étend sur ma tête
Ses mains pour me guérir.
Charles Guérin (L’homme intérieur))
La Foi vient m’affermir quand la peine m’accable
Date | Nom | Message |