LEÇONS DE LA TEMPÊTE ET CATASTROPHES FUTURES DU SARKOZYSME

dimanche 14 mars 2010.
 

QUELQUES LEÇONS DE LA TEMPÊTE

Comme je crains d’être trop abstrait à propos de ce que je dis sur la perte de légitimité du discours libéral je vais l’appuyer sur un exemple et une démonstration. Je vais prendre l’exemple de la tempête qui vient de tuer tant de monde sur les côtes ouest du pays. Pour dire les choses simplement on dira qu’elle a montré les limites d’un urbanisme non maîtrisé, quand se produit un étalement des constructions et une gestion anarchique du foncier avançant largement jusque dans les zones hautement inondables. On sait à présent que cent mille logements ont été construits dans les zones inondables depuis la tempête de 1999. Il faut écouter la parole des officiels pour mesurer le recul de la vulgate néo libérale. Tous ne parlent que de règlements, et même, dans le cas de De Villiers de sanction des promoteurs qui devraient selon lui dédommager les gens qui leur ont fait confiance. Le gouvernement se répand donc partout pour dire qu’il faut plus de rigueur dans les règles d’urbanisme, pour éviter les constructions anarchiques. Sarkozy le 1er mars 2010, comme d’habitude en rajoute : « une réflexion va être engagée sur le plan de l’urbanisme pour qu’une catastrophe de cette nature ne se reproduise plus ». Il est temps. Et madame Jouanno, secrétaire d’Etat à l’écologie de préciser avec cette profonde pensée novatrice : « Il ne faut pas construire dans des zones qui sont derrière des digues. Il faut durcir les règles dans ce sens. ». Je ne vais pas m’amuser du degré de généralité de tels propos. Vous le ferez à ma place ! Ce qui frappe c’est qui sont ceux qui les tiennent et quelle capitulation en rase campagne ces mots contiennent. Où sont donc passées leurs certitudes libérales en matière d’urbanisme ? Il faut se souvenir de la violence et de l’arrogance qui prévalait en matière de pensée sur l’urbanisme il y a peu encore. Lisez attentivement cette citation du président Nicolas Sarkozy dans son discours sur l’urbanisme et la ville, lors de l’inauguration de l’exposition sur le Grand Paris, le 29 avril 2009. Voici : « Le problème c’est la réglementation. » Exactement le contraire de ce qu’il dit aujourd’hui. Puis il ajoutait et c’est a peine croyable : « Pour libérer l’offre il faut déréglementer, élever les coefficients d’occupation des sols et rétablir la continuité du bâti dans les zones denses, permettre à chaque propriétaire d’une maison individuelle de s’agrandir, d’ajouter une pièce ou un étage, » Puis il complétait par ces mots qui ont une résonance bien spéciale aujourd’hui, il fallait selon lui « rendre constructible les zones inondables pour des bâtiments adaptés à l’environnement et au risque, utiliser les interstices, les délaissés d’infrastructures… Il faut changer nos procédures, notre façon d’appliquer le droit, sortir du respect passif d’une réglementation de plus en plus pesante, non pour laisser le champ libre au marché mais pour que la ville vive, respire, évolue, se développe en respectant des règles fortes, compréhensibles, efficaces, écologiques. J’ai demandé que soit conduire une réflexion approfondie sur ce changement de philosophie de notre droit de l’urbanisme. » On peut penser que personne n’a entendu. Mais le fond musical de l’idéologie dominante a été celui là sur tous les sujets depuis combien d’années ? Et maintenant les gens ont sous les yeux les maisons englouties. La démonstration et le doute qu’une telle image instille après de tels discours sont terribles. Et c’est bien normal ! Chacun sent confusément que ce genre de conséquence de la gestion libérale ne fait que commencer.

LE CYCLE DES CATASTROPHES

Le manque d’entretien des digues est symptomatique de la politique de l’appauvrissement des moyens des services publics. Sous prétexte que les digues sont pour moitié des propriétés privées, l’Etat les a laissées ses dégrader. Dès 2008, un rapport de la Direction Départementale de l’Equipement (DDE) de Vendée tirait la sonnette d’alarme sur le risque de submersion du littoral vendéen, faute notamment d’entretien des digues. Mais le gouvernement s’abritait régulièrement derrière une loi de 1807 qui rend les riverains responsables de l’entretien des ouvrages de protection contre la mer, pour refuser aux communes ou aux syndicats de digues tout soutien pour renforcer ces digues. Et les gouvernements de droite ont sabré depuis plusieurs années dans les effectifs de l’équipement. Depuis 2002, ce ministère a perdu 15 % de ses effectifs. Les DDE ont notamment largement abandonné leurs missions d’assistance et d’ingénierie auprès des communes. Ces dernières sont évidemment invitées à se tourner vers des prestataires privés. Ce sont pourtant des missions particulièrement décisives en matière de risques majeurs. Contre lesquels les petites communes sont très démunies techniquement et financièrement. Les catastrophes ont ainsi une origine politique davantage que naturelles. Et les politiques libérales ont amorcé un cycle de catastrophes directement lié aux décisions politiques prises.

LES CATASTROPHES FUTURES DU SARKOZYSME

Premier exemple, la privatisation de l’inspection et de la sécurité des navires. Il sera toujours temps de pleurer ensuite quand viendront les échouages et les naufrages de bateaux polluants. En effet, le gouvernement veut externaliser auprès de cabinets privés l’essentiel de la mission de contrôle de la sécurité des navires ! C’est aussi incroyable que ça. Alors même que l’expérience récente a démontré qu’il fallait faire exactement le contraire ! Sarkozy a oublié l’Erika ? En 1999, ce navire poubelle venait d’être inspecté et « certifié » par une société privée de classification, la RINA ! Face à cette impasse de l’inspection privée des navires, le gouvernement Jospin avait décidé d’investir massivement dans les Centres publics de sécurité des navires ! Ils sont aujourd’hui en cours de liquidation.

Deuxième exemple : le démantèlement du contrôle aérien contre lequel les aiguilleurs étaient récemment en grève. Là encore, sous couvert de coopération européenne, le gouvernement est en train de démanteler la Direction générale de l’aviation civile. Il met fin à l’intégration entre le contrôle aérien et l’inspection de la sécurité des avions. En effet le contrôle aérien doit être transféré à un organisme européen sans garantie suffisante en termes de contrôle public et de souveraineté sur l’espace aérien français.

Je finis par le plus effrayant. Les barrages mal entretenus. En 2007, une note d’EDF avait révélé que 200 barrages étaient vétustes. En dépit des efforts affichés par EDF pour relancer leur entretien, le contexte d’ouverture à la concurrence conduit au report de dépenses d’entretien. Ne pèsent-ils pas sur la sacro-sainte rentabilité. C’est le même risque que fait courir la mise en concurrence au nucléaire. Quel sera le prix à payer pour cette désastreuse astuce comptable qui a conduit à décider en 2003, pour améliorer la rentabilité, de reporter des investissements qu’EDF en allongeant de 30 à 40 ans la durée d’amortissement des centrales nucléaires ?


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