Face au marché, mettre les régions au service du seul bien commun ... (par Pierre Laurent, tête de liste Front de Gauche en Ile de France)

mercredi 13 janvier 2010.
 

HD. Sur quels axes repose le programme des listes du Front de gauche ?

P. l. Je viens de le dire : barrer la route à la droite en contrant sa poli­tique actuelle, et commencer dans les régions à construire d’autres choix. Les vœux de Nicolas Sarkozy ont été indécents. Il nous a dit : tout va bien et je continue. Pendant ce temps, des millions de gens viennent de passer les fêtes dans la difficulté. Chômage, pauvreté, mal-logement, pouvoir d’achat. .. tout le monde s’inquiète pour l’avenir. La crise est devant nous si les choix politiques de la droite sont maintenus. Ils sont incapables de solutionner leur crise. Ils se présentent comme les cham­pions de l’écologie, mais entre l’é­chec du sommet de Copenhague et l’annulation de la taxe carbone, leur politique est un fiasco. Pour faire face à la crise, on a besoin de plus de services publics, ils les saccagent. L’enjeu des élections régionales, on peut le résumer simplement : va-t­on livrer les régions aux appétits des marchés financiers, comme le gou­vernement le fait dans tous les domaines, ou, au contraire, mettra­t-on concrètement et quotidienne­ment les régions au service des logiques de bien commun, de tout ce qui est vital pour le développement humain, pour le quotidien et le futur de nos concitoyens, le logement, la santé, l’éducation, les transports collectifs, la qualité de l’environne­ment. .. Quand on voit comment la gabegie du vaccin antigrippe A engraisse les profits des grands labo­ratoires pharmaceutiques, on se dit qu’on n’a vraiment pas envie de laisser les régions se faire manger par les mêmes logiques de marché.

HD. Faire barrage à la politique de la droite, aux ravages de la crise et du libéralisme, c’est possible à l’échelon régional ?

P.l. Dans les régions, on ne peut pas tout, mais on peut construire des logiques qui s’opposent aux poli­tiques actuelles. En tout cas, on peut faire des choix : mettre les territoires en concurrence, en en délaissant cer­tains ? Ou au contraire parier en toute circonstance sur la solidarité, l’égalité de traitement, miser sur des politiques de service public ambi­tieuses ? En matière de logement, de transport, de santé ou d’éducation, choisir l’une ou l’autre voie, cela change tout pour la grande majorité des familles. Les richesses existent pour cela mais il faut les orienter autrement. Nous proposons donc des fonds publics régionaux et de nouveaux pouvoirs pour les salariés et leurs familles. Il y. a dans les régions un très grand enjeu démocratiqueque. Le gouvernement mène une réforme des collectivités locales qui signerait la mort lente de la démocratie locale. Au contraire, il faut faire des régions, en lien avec les autres échelons institutionnels, des lieux d’épanouissement pour une véritable démocratie.

HD. La gauche gère déjà 20 régions sur 22 ...

P. L. Oui, et ce n’est sûrement pas le moment de les rendre à la droite. Cela dit, face à cette droite, et à la crise que viennent de provoquer les choix capitalistes, c’est vrai que la gauche doit sérieusement relever le niveau de ses ambitions et de ses réponses. Avec les listes du Front de gauche, nous voulons que s’affirme dans la gauche et dans les majorités régionales une force combative, porteuse de solutions et décidée à combattre la droite avec plus de détermination que ne le font les majorités régionales actuelles. Le bilan de la gauche dans les régions n’est pas dénué d’acquis, mais il faut changer de braquet en s’attaquant avec plus de courage aux logiques du marché. C’est ce que veulent por­ter les listes du Front de gauche au premier tour de l’élection.

HD. Pour l’instant, les enquêtes d’opinion annoncent un vote sanction contre la droite. Cela peut-il suffire à assurer la victoire de la gauche ?

P.l. Plus les gens auront le sentiment que la gauche peut mettre en œuvre des politiques différentes, ambitieu­ses socialement, plus la sanction contre la droite sera forte. Miser seulement sur le vote sanction serait une erreur. Si nous voulons que la sanction soit forte, nous devons porter haut et fort des idées nouvel­les pour des politiques régionales de gauche.

HD. les divisions au PS peuvent-elles avoir une incidence sur ces régionales ?

P.l. Bien sûr que la gauche a été han­dicapée par les divisions et la guerre des ego qui ont traversé le PS. Et ne nous y trompons pas, cela traduit des débats, des doutes, des renonce­ments sur la possibilité de mettre en œuvre des politiques radicalement différentes de celles menées par la droite. Mais ce qui me frappe, c’est que le peuple de gauche, lui, ne cesse d’envoyer des messages à l’opposé de ces images de renoncement et de division. Regardez ce qui s’est passé avec la votation citoyenne contre la privatisation de La Poste, ce qui se passe tous les jours dans des mobili­sations sociales qui touchent tous les secteurs de la société. Nous vou­lons donner confiance et espoir à toutes celles et tous ceux qui se ras­semblent dans ces batailles ou les soutiennent. Et leur dire, avec les lis­tes du Front de gauche, reconstrui­sons l’espoir, pour tout de suite et pour la suite. C’est aussi ce qui fait la force du Front de gauche : cette capacité à ouvrir la dynamique d’une unité populaire à des forces et des acteurs sociaux, y compris à ceux qui ne sont pas engagés dans des formations politiques.

HD. Comment interprétez-vous la montée d’Europe Écologie ?

P. l. Ce vote exprime la montée des préoccupations écologiques, c’est certain. Ensuite, elles sont présen­tées comme répondant au besoin de nouvelles offres politiques, puisque tout le monde sent bien qu’il faut du neuf. .. Mais la limite de ces listes Europe Écologie est très sérieuse, car elles rassemblent dans la plus totale ambiguïté des candidats sou­cieux de combattre les logiques capitalistes et d’autres totalement prêts à les accepter, notamment au plan européen. Or, les logiques financières nourrissent non seule­ment les dérèglements sociaux, mais aussi les dérèglements climatiques. À nos yeux, et c’est en cela que notre proposition est originale, il n’y a donc pas de solutions écologiques durables sans s’attaquer aux logiques productivistes capitalistes, sans inventer une écologie sociale, on pourrait dire une écologie du développement humain. En effet, peut-on se battre afin de respirer un air parfaitement pur en laissant par exemple 8 millions de Français vivre sous le seuil de pauvreté et plus d’un milliard d’êtres humains souffrir de la faim, comme c’est le cas au­jourd’hui ? Il faut impérativement tenir les deux bouts, la nature et l’humain, les arracher aux seules logiques du marché capitaliste.

HD. La direction du NPA fait une nouvelle fois cavalier seul ...

P. L. Ceux qui ont choisi de ne pas s’engager dans la démarche unitaire qui est la nôtre seront une nouvelle fois incompris, notamment par les électeurs. Face à une droite très agressive, il faut faire avancer de pair la force des idées et la capacité à se rassembler autour d’elles. Il n’y a pas de victoire possible, ni sociale ni électorale, sans associer des conte­nus de changement exigeants et une détermination à construire le ras­semblement le plus large possible. Je crois que la démarche du Front de gauche l’emportera sur le fait que certains, une fois encore, ne sont pas au rendez-vous.

HD. Le PCF semble engagé durablement dans la démarche du Front de gauche. Entendez-vous lui préserver un rôle spécifique ?

P. L. Nous sommes déterminés à être totalement au service de cette démarche de rassemblement, que nous avons initiée il y a plus d’un an, avec le Parti de gauche, puis avec la Gauche unitaire. Il s’agit aujourd’hui de franchir d’autres étapes, de rendre cette démarche réellement populaire, de l’enraci­ner davantage dans le pays, dans la proximité. La force militante du Parti communiste peut être extrê­mement utile. Nous changeons nos pratiques en avançant. Nous vou­lons être cette force de proposition au service du rassemblement le plus large possible.


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