L’Etat dans la société capitaliste (exposé de formation LCR)

lundi 12 mai 2008.
 

Résumé :

D’OU VIENT L’ETAT ?

Des sociétés humaines ont vécu et se sont développées sans avoir constitué une administration spéciale, un corps de fonctionnaires chargé des « affaires publiques ».

L’Etat naît lorsque des fonctions qui étaient exécutées par l’ensemble des membres de la collectivité passent dans les mains d’un groupe d’hommes séparé :

- Dans une société de classes, l’Etat est toujours celui de la classe dominante.

- Dans la société capitaliste, l’Etat est celui de la bourgeoisie.

LES GRANDES FONCTIONS DE L’ETAT BOURGEOIS

Fonction répressive : Pour défendre la propriété privée, la bourgeoisie ne peut laisser aux travailleurs l’usage des armes et de la force, elle doit désarmer la population et disposer du monopole de la force publique.

Fonction idéologique : Mais la violence seule ne suffit pas pour maintenir une société inégalitaire. Les capitalistes cherchent à ce que les travailleurs acceptent comme inévitable et juste le fait qu’ils sont exploités. La fonction idéologique de l’Etat est d’empêcher les exploité-e-s de prendre conscience de leur situation et de leurs intérêts réels.

Fonction économique : La bourgeoisie a donc besoin d’un arbitre, d’une structure qui dépasse les intérêts immédiats et corporatistes : les sommets de l’appareil d’Etat assument plus ou moins bien cette fonction.

Ces fonctions peuvent s’appliquer de manière très différente selon les rapports de force et les besoins de la bourgeoisie.

LES DIFFERENTES FORMES DE l’ETAT CAPITALISTE

Tous différents, tous pour défendre les intérêts des capitalistes

La démocratie parlementaire : Pour la bourgeoisie, le système parlementaire vise à fournir une légitimité à l’Etat, à asseoir un pouvoir qui, placé en apparence au-dessus de la société, doit masquer le conflit entre classes antagoniques. Mais cette classe minoritaire et exploiteuse ne peut laisser à la population l’accès direct aux décisions politiques : elle doit donc limiter au maximum l’impact de la représentation populaire et la stériliser.

Dictatures, Etats fascistes et démocratie : Plus stable est la société capitaliste, plus elle peut se permettre le luxe d’accorder des libertés démocratiques aux opprimés. Plus elle est instable et secouée par des crises profondes, plus elle doit exercer le pouvoir politique par la voie de la violence : la répression monte à l’avant-plan de la scène politique.

Ces types d’Etats, malgré leurs grandes différences, ont un point commun : être au service de la même classe dominante, la bourgeoisie.

LES EXPERIENCES DU MOUVEMENT OUVRIER

Les périodes révolutionnaires se caractérisent souvent par la création d’instances de débat et d’action permettant aux travailleurs d’agir : des soviets, des conseils, des AG, des comités de grève, etc. Ces instances permettent de dépasser la séparation entre le producteur et le citoyen. Elles sont les embryons d’un Etat alternatif.

Cet Etat doit être un Etat facilement et directement contrôlable par la majorité de la population, et la durée du travail doit être réduite de manière importante, non seulement pour éradiquer le chômage, mais encore et surtout pour permettre à chacun(e) d’avoir le temps de réfléchir et de débattre des affaires de la société.

CONCLUSION

Nous ne refusons pas par principe de participer à un gouvernement. Mais notre objectif n’est pas de prendre le pouvoir dans l’Etat actuel, même pas de réformer l’Etat existant. Pour construire le pouvoir des travailleurs, il faudra démanteler cet Etat bourgeois et construire une autre manière de gérer la société.

Nous voulons mettre en place une démocratie socialiste fondée sur un autre Etat.

Le but du socialisme est la disparition des classes sociales, et donc de tout appareil de répression. L’avancée du socialisme se mesurera donc au recul de l’Etat dans le fonctionnement de la société.

Notre objectif final, le communisme, est une société qui continuera à discuter démocratiquement mais qui n’aura plus besoin d’Etat. L’établissement de cette société nécessite une évolution de long terme. Nous avons, en tant que marxistes, la responsabilité de réfléchir à la forme de l’Etat ouvrier que nous voulons pour approfondir la démocratie : il faut construire un Etat ouvrier qui puisse commencer à dépérir dès sa naissance, qui ne permette pas, comme cela a été le cas en URSS la consolidation d’une bureaucratie privilégiée.

Introduction

La LCR participe aujourd’hui de manière régulière aux élections, a des élus dans les collectivités locales et doit donner des réponses à celles et ceux qui nous demandent à quelles conditions nous sommes prêts à être dans un gouvernement, ou encore comment nous voyons une autre manière de gouverner.

Peut-on, sans changer cet Etat qui existe dans la société capitaliste, accumuler des réformes progressives qui permettraient de passer pacifiquement au socialisme ? En effet il serait assez facile pour les travailleurs d’enlever le pouvoir à la bourgeoisie, de l’exproprier, d’abolir la propriété privée s’ils n’avaient à combattre qu’une classe sociale extrêmement minoritaire et si celle-ci était prête à accepter de perdre ses privilèges sans se défendre par tous les moyens.

Mais la classe dominante s’appuie pour maintenir sa domination sur l’Etat, c’est-à-dire la police, l’armée, la justice, les institutions politiques. Et il faudra radicalement changer ces instruments aujourd’hui au service de la bourgeoisie pour que les travailleurs dirigent effectivement la société. L’Etat bourgeois est d’autant plus difficile à combattre qu’il est présenté par la classe dirigeante comme étant impartial, au-dessus des classes, de la masse des citoyens.

Il faut combattre cette fiction d’un Etat au service de tous et l’analyse marxiste de l’Etat nous permet de le faire.

D’où vient l’Etat ? Quelles formes différentes a-t-il pris durant l’histoire, pourquoi ? Quelles formes pourrait-il prendre après la prise du pouvoir par les travailleurs ?

D’où vient l’Etat ?

Des sociétés humaines ont vécu et se sont développées sans avoir constitué une administration spéciale, un corps de fonctionnaires chargé des « affaires publiques ».

Dans ces sociétés sans classes ni Etat (qu’il ne faut pas idéaliser, à cause de la pauvreté, de l’ignorance, des peurs, des croyances, et de la domination des aînés, des hommes sur les femmes… etc.), chacun portait des armes, participait aux assemblées qui prenaient des décisions concernant la vie collective et les rapports de la communauté avec le monde extérieur, réglaient les conflits personnels.

L’Etat naît lorsque des fonctions qui étaient exécutées par l’ensemble des membres de la collectivité passent dans les mains d’un groupe d’hommes séparé :

- une armée distincte de la masse des citoyens armés,

- des juges distincts de la masse des citoyens jugeant leur semblables,

- des chefs héréditaires, des rois, etc…, à la place de représentants désignés temporairement et révocables,

- des administrateurs : mandarins, scribes, bureaucrates, etc,

- des producteurs d’idéologie : prêtres, enseignants, philosophes, etc .

Cela devient possible avec l’agriculture, l’élevage et le développement de l’artisanat. Cet accroissement des forces productives permet l’apparition d’un surproduit social.

Une minorité s’approprie alors une part de ces richesses produites. Des classes différentes commencent à apparaître, avec un appauvrissement marqué pour les couches inférieures, très évident dans les sociétés où l’essentiel de la production est assuré par des esclaves, comme en Egypte, en Grèce ou à Rome.

C’est au moment où une catégorie de gens commence à avoir intérêt à exercer une contrainte, une coercition sur le reste de la société que l’Etat commence à se former : « en dernière instance, l’Etat est une bande d’hommes armés »

Mais une société de classe qui ne subsisterait que par la violence armée se trouverait en Etat de guerre civile permanente, en état de crise extrême. Pour consolider la domination d’une classe sur une autre, il est donc indispensable que les producteurs, les membres de la classe exploitée, soient amenés à accepter comme inévitable et juste le fait que la minorité s’approprie les richesses produites.

Dans une société de classes, l’Etat est toujours celui de la classe dominante.

Dans la société capitaliste, l’Etat est celui de la bourgeoisie.

Les grandes fonctions de l’Etat bourgeois

Fonction répressive

C’est historiquement la première des fonctions de l’Etat.

Pour défendre la propriété privée, la bourgeoisie ne peut laisser aux travailleurs l’usage des armes et de la force, elle doit désarmer la population et disposer du monopole de la force publique.

Elle constitue des corps spéciaux de répression, armée, police…, distincts de la population et isolés de celle-ci. Eux seuls peuvent réellement cantonner, si possible par la dissuasion, les luttes sociales dans des limites supportables par la propriété capitaliste.

L’armée a également pour rôle de défendre, le cas échéant, les intérêts de chaque bourgeoisie face aux intérêts des autres classes dominantes ou des peuples en lutte pour leur liberté.

Le système judiciaire et pénitentiaire a pour but principal la lutte contre les atteintes à la propriété privée.

Fonction idéologique

Mais la violence seule ne suffit pas pour maintenir une société inégalitaire.

Les capitalistes cherchent à ce que les travailleurs acceptent comme inévitable et juste le fait qu’ils sont exploités.

La plupart des individus réfléchissent à leur situation à l’aide d’idées apprises à l’école ou l’église, empruntées à la TV, aux journaux. La production d’idées, ou de système d’idées appelées idéologies est limitée : c’est une petite minorité de la société qui a le pouvoir de le faire.

Dans chaque société, l’idéologie dominante est celle de la classe dominante. Depuis les prêtres et sorciers des temps anciens jusqu’aux journalistes, aux universitaires, aux institutions diverses d’aujourd’hui, l’idéologie est fabriquée et diffusée par des gens rétribués pour cette fonction. Même s’il existe dans les institutions étatiques des tensions politiques en relation avec les luttes de classe dans la société, leur fonction essentielle demeure.

C’est ainsi que dans la société bourgeoise, l’idéologie dominante présente les citoyens comme tous égaux devant un Etat impartial, garant du respect de la devise républicaine « liberté, égalité, fraternité ». En réalité, le pouvoir du citoyen se réduit à l’usage occasionnel du bulletin de vote. Ses droits civiques sont limités par un droit supérieur, le droit de propriété de ceux qui possèdent les moyens de production et d’échange.

La réalité de la société capitaliste, c’est que tout est fait pour atomiser l’individu, le réduire à n’être qu’un électeur ou un consommateur parmi tant d’autres. La réalité de l’entreprise capitaliste où travaillent 8 heures par jour des salariés, c’est un lieu où règne le pouvoir patronal absolu, où n’existe pas la démocratie.

La fiction selon laquelle tous sont égaux devant l’Etat a pour but de faire croire à la population qu’un ordre naturel, indispensable, inévitable, se place au dessus de la société et guide ses pas, et que tous doivent s’y plier. Il s’agit de veiller à ce que l’individu ne prenne pas conscience de sa communauté d’intérêts avec les autres exploité-e-s et dominés-e-s, comme travailleurs, comme femmes, comme jeunes…

En dernière instance, la fonction idéologique de l’Etat est d’empêcher les exploité-e-s de prendre conscience de leur situation et de leurs intérêts réels .

Fonction économique

Les capitalistes sont divisés par la concurrence. Le libre fonctionnement du marché oriente la production vers le profit immédiat de chaque patron.

Or le développement du capitalisme exige

- que des productions non immédiatement rentables soient assurées : énergie, communications, transports, etc.. Pour mettre en place ces activités il faut des investissements supérieurs à ce que peuvent fournir des capitaux privés,

- une police des marchés, de l’argent et du crédit.

C’est l’Etat qui définit et met en oeuvre la politique économique qui permet ce développement, qui assure ces fonctions.

La bourgeoisie a donc besoin d’un arbitre, d’une structure qui dépasse les intérêts immédiats et corporatistes : les sommets de l’appareil d’Etat assument plus ou moins bine cette fonction

Ces fonctions peuvent s’appliquer de manière très différente selon les rapports de force et les besoins de la bourgeoisie.

La contestation de la classe ouvrière au XX° siècle a amené la bourgeoisie à acheter la paix sociale pour rester au pouvoir. Par exemple en France, la bourgeoisie à la fin de la seconde guerre mondiale, face à une grande combativité ouvrière inquiétante pour son pouvoir, a préféré concéder la création de services publics et de la sécurité sociale. Mais ces conquêtes partielles du mouvement ouvrier, si elles ont modifié notablement le rôle de l’Etat dans les dernières décennies, n’en ont pas changé la nature.

Lorsque le rapport de forces devient moins favorable aux travailleurs, la bourgeoisie remet en cause ces « avantages acquis », et particulièrement les acquis non étatiques, comme la sécurité sociale dans laquelle à l’origine était géré par des représentants des salariés une part socialisé du salaire.

Aujourd’hui, les politiques bourgeoises cherchent à remodeler le rôle de l’Etat :

- les fonctions économiques et sociales doivent être réduites au profit du libre fonctionnement du marché, pour diminuer autant que possible la masse salariale. Tout ce qui est rentable doit être privatisé. Sur ce qui n’est pas rentable, on fait le maximum d’économies. Toutes les règles qui mettent du sable dans les rouages du capitalisme (le code du travail) doivent être assouplies.

- par contre, il n’y a aucun déclin dans la fonction répressive de l’Etat.

Les différentes formes de l’Etat capitaliste

Tous différents, tous pour défendre les intérêts des capitalistes

Au XIX° siècle, il n’était pas difficile d’expliquer aux travailleurs que l’Etat n’était pas « neutre » dans la lutte de classes, mais était un instrument de défense des intérêts du capital contre ceux du travail.

Seule la bourgeoisie avait le droit de vote et les parlementaires, juges, hauts officiers, hauts fonctionnaires, évêques, tous venaient de la même classe sociale, tous étaient liés entre eux par les liens d’intérêt. Dès que les ouvriers se mettaient en grève, on envoyait les gendarmes ou l’armée, on leur tirait dessus, on les emprisonnait.

La démocratie parlementaire

Cette situation se modifie lorsque le mouvement ouvrier moderne prend son essor, arrache par des luttes très importantes le suffrage universel (d’abord seulement pour les hommes adultes) et les libertés d’organisation, de réunion, de grève, de manifestation, de presse, etc….

La conquête des libertés démocratiques permet à ce mouvement ouvrier de s’organiser, d’acquérir de l’assurance, de peser dans les rapports de force. Trotsky parle des « cellules de démocratie prolétarienne au sein de la démocratie bourgeoise » que représentent les organisations de masse de la classe ouvrière, la tenue de congrès, de manifestations, l’organisation de grèves, la possibilité d’avoir sa presse, ses loisirs, etc.

Mais c’est précisément parce que ces libertés démocratiques revêtent une importance capitale, qu’il importe de saisir les limites de la démocratie parlementaire bourgeoise même la plus avancée.

- C’est une démocratie indirecte : seuls quelques dizaines de milliers d’élus participent à la gestion de l’Etat. L’écrasante majorité des citoyens est exclue d’une telle participation, son seul pouvoir est de déposer un bulletin de vote dans une urne tous les 5 ou 6 ans.

- L’égalité politique dans une démocratie bourgeoise n’existe pas vraiment, elle est formelle. Formellement le pauvre et le riche détiennent le même droit de fonder un journal, d’acheter un temps d’émission à la télé. Seul le riche jouit de ces droits, peut influencer les électeurs, voire même tenir des journalistes qui dépendent de lui, des parlementaires par son poids financier. A quoi pourrait servir une égalité politique entre le riche et le pauvre, tant qu’existe une inégalité économique et sociale énorme, qui va en augmentant ?

Pour la bourgeoisie, le système parlementaire vise à fournir une légitimité à l’Etat, à asseoir un pouvoir qui, placé en apparence au-dessus de la société, doit masquer le conflit entre classes antagoniques. Mais cette classe minoritaire et exploiteuse ne peut laisser à la population l’accès direct aux décisions politiques : elle doit donc limiter au maximum l’impact de la représentation populaire et la stériliser.

Elle arrive à ses fins par :

- la séparation entre les élus du parlement et ceux qui exercent la gestion directe de l’Etat : le gouvernement,

- parfois l’existence d’une seconde chambre élues au suffrage indirect ( « grands électeurs »),

- la manipulation des lois électorales pour éliminer les contestataires du système,

- la construction d’institutions permanentes, non électives, non contrôlables, dans lesquelles les hauts fonctionnaires sont choisis pour leur fidélité aux intérêts de la bourgeoisie après une longue sélection (écoles, concours, promotions, etc..).

Il faut noter que, dans la période récente, comme si tout cela ne suffisait pas, la tendance à la réduction du parlement s’est accentuée dans tous les grands pays capitalistes :

- le pouvoir de l’exécutif s’est beaucoup renforcé . En France, cela passe par le Président de la République. Mais, partout, les gouvernements cherchent à rendre le minimum de comptes aux parlements,

- des institutions soit disant indépendantes ont été mises en place, comme la Banque centrale européenne qui n’a aucun compte à rendre aux élus.

Y compris dans les démocraties parlementaires, la nature de classe apparaît clairement :

- lorsqu’on examine son rôle répressif dans les conflits sociaux où la police intervient pour casser les piquets de grève, faire évacuer les usines occupées par les grévistes, disperser les manifestations. On ne connaît pas de cas où la police intervienne pour arrêter les patrons qui licencient, qui organisent la vie chère ou la fraude fiscale. Les défenseurs de l’Etat bourgeois nous diront que c’est parce que les ouvriers violaient la loi…mais c’est parce que la loi est une loi bourgeoise qui protège la propriété capitaliste, que les forces de répression sont au service de cette propriété et qu’elles se comportent très différemment selon que ce sont les ouvriers ou les capitalistes qui commettent des violations formelles de la loi .

- lorsqu’on examine ce qui s’est passé dans toutes les expériences où les élections ont permis la mise en place de gouvernements dont la politique ne convenait pas à la bourgeoisie (comme au Chili en 1969). Ces gouvernements ont vite constaté qu’ils ne maîtrisaient pas vraiment l’Etat : la haute administration et l’armée sabotaient les décisions, favorisaient la fuite des capitaux, etc. Et si les gouvernements en question ne s’alignaient pas, les sommets de l’Etat passaient à l’étape suivante : le coup d’Etat militaire, comme au Chili en 1973, en Espagne en 1936.

Dictatures, Etats fascistes et démocratie

Plus stable est la société capitaliste, plus elle peut se permettre le luxe d’accorder des libertés démocratiques aux opprimés. Plus elle est instable et secouée par des crises profondes, plus elle doit exercer le pouvoir politique par la voie de la violence : la répression monte à l’avant-plan de la scène politique.

Ainsi l’histoire est parsemée de diverses expériences de suppression de libertés démocratiques des travailleurs : dictatures militaires, voire le fascisme comme forme la plus brutale d’atomisation de la classe ouvrière.

Ces types d’Etats, malgré leurs grandes différences, ont un point commun : être au service de la même classe dominante, la bourgeoisie.

Cela ne veut pas dire que l’on soit indifférent à la forme que prend l’Etat bourgeois. Nous distinguons la démocratie parlementaire de la dictature militaire ou du fascisme, nous défendons les formes de liberté d’expression et d’organisation que permet la démocratie bourgeoise face aux dangers militaires ou fascistes, nous nous opposons à toute tentative de les limiter. Plus les travailleurs, les opprimés jouissent de liberté pour s’organiser, réfléchir, penser, défendre leurs idées, plus naissent les germes de la future société.

Dans les Etats capitalistes, comme la France, nous sommes en faveur de toutes les mesures :

- qui réduisent les pouvoirs de l’exécutif et le mettent sous le contrôle du Parlement. Ainsi, nous sommes pour la remise en cause des pouvoirs du président de la République ;

- qui introduisent plus de démocratie dans les parlements : élections fréquentes, élections à la proportionnelle, réduction des salaires des élus, etc.

- qui permettent de la transparence dans toutes les décisions et actions du gouvernement, des élus et de l’administration.

Mais nous n’avons pas d’illusions, pour mettre en place une société socialiste il faudra aller plus loin.

Les expériences du mouvement ouvrier

Les périodes révolutionnaires se caractérisent souvent par la création d’instances de débat et d’action permettant aux travailleurs d’agir : des soviets, des conseils, des AG, des comités de grève, etc.

Ces instances permettent de dépasser la séparation entre le producteur et le citoyen. Elles sont les embryons d’un Etat alternatif. Nous devons tout faire pour favoriser ces lieux d’auto-organisation qui sont les plus à même de constituer au moment de la révolution, les instances d’un Etat de type nouveau, à même de commencer à dépérir dès sa naissance. Elles sont un lieu privilégié d’éducation des travailleurs et de la population à la prise en charge de leurs affaires par eux-mêmes, et donc de commencer à dessiner la société future.

Lorsque ces instances se fédèrent et se dotent d’une direction, elles contestent le pouvoir de l’Etat bourgeois. Il se crée alors un double pouvoir : le pouvoir ouvrier conteste celui de la bourgeoisie, lui dispute sa légitimité. Se pose alors le problème de construire un nouvel Etat à partir de ces formes d’auto-organisation de la classe ouvrière et des formes anciennes de l’organisation de l’Etat. Le débat est ouvert dans notre courant sur ce sujet : faudra-t-il ou pas conserver d’anciennes formes de représentation, et si tel est le cas, comment articuler l’ensemble ?

Cet Etat doit être un Etat facilement et directement contrôlable par la majorité de la population, et la durée du travail doit être réduite de manière importante, non seulement pour éradiquer le chômage, mais encore et surtout pour permettre à chacun(e) d’avoir le temps de réfléchir et de débattre des affaires de la société.

Il doit donc :

- donner le pouvoir réel à la représentation de la population,

- réduire au maximum la machine administrative,

- instituer l’élection et la révocabilité non seulement de tous les élus, mais aussi des hauts fonctionnaires,

- donner la possibilité à tous d’accéder aux fonctions Etatiques,

- limiter les salaires et avantages des gestionnaires de l’Etat, qui ne doivent pas dépasser ceux d’un travailleur moyen.

Conclusion

Nous ne refusons pas par principe de participer à un gouvernement. Mais notre objectif n’est pas de prendre le pouvoir dans l’Etat actuel, même pas de réformer l’Etat existant. Pour construire le pouvoir des travailleurs, il faudra démanteler cet Etat bourgeois et construire une autre manière de gérer la société. Une manière qui assure les fonctions socialement nécessaires qu’il remplit très imparfaitement aujourd’hui, en mettant au centre les besoins de la population et en faisant en sorte que le gouvernement soit exercé par la population elle-même.

De ce point de vue, les revendications démocratiques que nous mettons en avant visent surtout à renforcer les capacités d’action et d’organisation des organisations populaires et ouvrières.

Nous voulons mettre en place une démocratie socialiste fondée sur un autre Etat. Il faut garder ouverte la question de savoir ce qui proviendra de l’Etat ancien et ce qui proviendra de formes issues du processus révolutionnaire lui-même. Il est en effet probable que le processus révolutionnaire lui-même produise des formes de démocratie à la base de ce nouvel Etat.

La construction de lieux d’auto-organisation du mouvement ouvrier est essentielle même dans des phases non révolutionnaires comme instance de remise en cause de l’hégémonie de la bourgeoisie et de son Etat.

Le but du socialisme est la disparition des classes sociales, et donc de tout appareil de répression.

L’avancée du socialisme se mesurera donc au recul de l’Etat dans le fonctionnement de la société.

Notre objectif final, le communisme, est une société qui continuera à discuter démocratiquement mais qui n’aura plus besoin d’Etat. L’établissement de cette société nécessite une évolution de long terme.

Nous avons, en tant que marxistes, la responsabilité de réfléchir à la forme de l’Etat ouvrier que nous voulons pour approfondir la démocratie : il faut construire un Etat ouvrier qui puisse commencer à dépérir dès sa naissance, qui ne permette pas, comme cela a été le cas en URSS la consolidation d’une bureaucratie privilégiée.

Ce rapport est complété par les documents suivants que le lecteur peut trouver sur ce site en cliquant sur les titres ci-dessous :

Quel écueil menace la révolution de demain ? (Blanqui , « le toast de Londres », février 1951)

Qu’est ce que L’ETAT DANS LA SOCIETE CAPITALISTE ? (Engels extrait de L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat)

L’Etat (en France de l’Ancien régime à la Commune) par Marx (1871 extrait de la Guerre civile en France)

L’Etat (par Lénine : extrait de L’Etat et la révolution)

Démocratie bourgeoise et démocratie prolétarienne (par Ernest Mandel)

Pour une démocratie socialiste autogestionnaire (extrait du Manifeste de la LCR)


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