Quinze écolières aspergées de vitriol dans la ville de Kandahar

samedi 15 novembre 2008.
 

Quinze adolescentes afghanes ont été aspergées d’acide tandis qu’elles se rendaient, mercredi 12 novembre, en début de matinée, à leur école de Kandahar, carrefour du pays pachtoun dans le sud de l’Afghanistan et ancienne « capitale » du mouvement taliban. Trois sont dans un état grave et les autres sont blessées à des degrés divers.

Les agresseurs, non identifiés, circulaient à moto. Les victimes portaient la burqa - la longue robe bleue qui couvre les femmes de la tête au pied - et les assaillants les auraient forcées à se dévoiler avant de leur projeter l’acide au visage à l’aide d’un pistolet à eau, selon l’agence de presse Reuters.

« Nous avons appelé au secours, des gens sont venus et les hommes ont fui », a raconté à l’Agence France-Presse Atefa, 16 ans, de son lit d’hôpital. « Je ne sais pas pourquoi ils ont attaqué. La ville n’est pas sûre mais on ne peut pas rester enfermé chez soi. Il faut qu’on reçoive une éducation », a-t-elle ajouté alors que sa soeur, Shamsia, 18 ans, défigurée, hurlait de douleur à ses côtés.

Des enseignants du lycée de filles Mirwais-Nika, où étaient scolarisées les adolescentes, se sont rendus à l’hôpital de Kandahar pour exprimer leur consternation. A Kaboul, le président afghan, Hamid Karzaï, a condamné l’agression, l’imputant aux « ennemis de la paix et de la prospérité ».

LETTRES DE MENACE

L’attaque n’a pas été revendiquée mais tous les soupçons se dirigent vers les talibans, qui avaient interdit d’éducation des filles quand ils étaient au pouvoir en Afghanistan (1996-2001). Depuis qu’ils orchestrent la rébellion contre le régime de M. Karzaï soutenu par les Occidentaux, ils ont multiplié les actes d’intimidations et les violences contre les établissements scolarisant des jeunes filles. Lettres de menace, destructions d’écoles et assassinats d’enseignants ont miné les efforts du gouvernement et de la communauté internationale pour rétablir les femmes dans leurs droits à l’éducation.

Le handicap est lourd. Le taux d’illettrisme est de 86 % pour les femmes contre 57 % pour les hommes. En 2004, le taux de scolarisation des filles était de 34 % dans l’enseignement primaire mais de seulement 9 % dans l’enseignement secondaire.

La situation est devenue d’autant plus précaire pour les femmes dans le sud et l’est afghan que ces régions sont le bastion de l’insurrection des talibans. A Kandahar, la célèbre policière Malalai Kakar, chef du département des crimes contre les femmes, avait été assassinée le 28 septembre. Toujours à Kandahar, le chef adjoint des services de renseignement afghans était à son tour tué le 4 novembre.

Mercredi, quelques heures après l’agression des écolières, un attentat au camion-citerne piégé a fait six morts et une quarantaine de blessés à proximité de bâtiments officiels du gouvernement provincial de Kandahar. Une attaque revendiquée par les talibans.

Ahmed Wali Karzaï, le très controversé frère du président Karzaï - nombre de critiques l’accusent d’être lié au trafic de drogue -, était sur les lieux au moment de l’explosion en sa qualité de président du conseil provincial de Kandahar, mais il n’a pas été blessé.

BOBIN Frédéric


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