Assurances santé : l’ascension du privé

mercredi 28 octobre 2009.
 

Sur fond de recul progressif de la couverture de la Sécu, les assurances contrôlent une part croissante du marché de la complémentaire, au détriment des mutuelles à but non lucratif.

Voilà un marché qui ne connaît pas la crise. En sept ans, entre 2001 et 2008, les assurances complémentaires santé ont vu leur chiffre d’affaires bondir de 65 % (de 17,5 milliards d’euros à 29 milliards d’euros). Et 2009 ne contredit pas la tendance, avec une hausse de 6,6 % au premier semestre. Cet essor spectaculaire de l’activité des organismes complémentaires d’assurance-maladie (Ocam) répond directement au recul de la couverture obligatoire, et solidaire, de la Sécurité sociale.

Rançon des déremboursements de médicaments, forfaits et autres franchises instaurés ces dernières années, la Sécu ne rembourse plus que 75 % des dépenses de santé, tandis que les Ocam en prennent désormais en charge près de 14 %, les ménages payant directement le reste (9,4 %). Les complémentaires prospèrent donc grâce au désengagement progressif de l’assurance-maladie, méthodiquement organisé par les gouvernements de ces dernières années.

Trois types d’organismes se partagent le marché. Les mutuelles à but non lucratif en contrôlent encore la majeure partie – 57 % en 2008. Les institutions de prévoyance, elles aussi à but non lucratif, spécialisées dans les contrats collectifs d’entreprise, en détiennent près de 18 %. Et les assurances, dont la règle est la recherche du profit, près de 26 %. Mais le marché de la complémentaire santé connaît de fortes évolutions. La concurrence s’y fait de plus en plus rude, à mesure que le transfert de charge de la Sécu vers la sphère privée s’accélère. Et la bataille tourne à l’avantage des assurances, qui ont grignoté 5 % de part de marché depuis 2001, essentiellement au détriment des mutuelles.

Depuis quelques années, sous l’influence des directives européennes, qui ont imposé aux mutuelles les règles de l’assurance, le secteur est en pleine restructuration. Pour réduire leurs coûts, afin de capter de nouveaux clients, les complémentaires multiplient alliances, regroupements. Le nombre de mutuelles est tombé de plus de 8 000 (pour 25 millions d’assurés), en 1973, à 1 996 (pour 38 millions de personnes), en 2006.

La montée en puissance des Ocam se solde par une aggravation des inégalités sociales. Si l’accès à la complémentaire s’est généralisé (94 % de la population couverte), le poids d’un contrat dans le budget des ménages est beaucoup plus élevé pour les plus pauvres (10,3 % du revenu) que pour les plus aisés (2,9 %), indique une étude de l’Irdes (Institut de recherche et de documentation en économie de la santé). Et pourtant, les contrats des ménages les plus pauvres offrent en moyenne des garanties inférieures à ceux des plus riches. L’exact opposé du principe de base de la Sécu  : assurer chacun, non selon sa capacité à payer, mais selon ses besoins.

Yves Housson


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