Liberté de la presse : le parlement européen vote pour protéger… Berlusconi (à 3 voix près) !

mardi 27 octobre 2009.
 

Présentée par une large coalition de socialistes, libéraux, communistes et écolos, une résolution pour la liberté de la presse a été rejetée à 3 voix près au Parlement européen. Le résultat d’un gros coup de pouce de la droite conservatrice pour protéger Berlusconi, principale cible du texte.

Ils sautent, ils hurlent de joie, les députés du Parti populaire européen (PPE) ! « On aurait dit une finale de coupe du Monde ! », rapporte un eurodéputé italien. Sauf que leur victoire n’est pas sportive mais politique : par 338 voix contre 335, ils ont fait rejeter de justesse, mercredi 21 octobre, une résolution pour la liberté de la presse et contre la concentration dans les médias et les risques de pressions politiques sur les journalistes. Une victoire, mais pour une famille politique seulement : celle qui a sauvé les affaires de Silvio Berlusconi !

Aucune loi derrière ce texte mais un vrai geste politique de condamnation des dérives de la concentration des médias en Italie. « L’idée d’une résolution a été lancée en commission libertés publiques, début octobre, raconte Sandrine Bélier, eurodéputé Europe écologie ayant pris part aux discussions. Il s’agissait de lancer le débat sur les risques de conflit d’intérêt entre pouvoir politique et média en Italie pour condamner les dérives du système berlusconien. Le résolution comprenait une demande à la commission de création d’un vrai cadre juridique pour empêcher les concentrations excessives dans la presse, garantir la diversité et éviter les pressions. »

Tout pour sauver El Cavaliere !

Seulement voilà : dès le début de la manoeuvre, le PPE, le plus puissant parti du Parlement de Strasbourg, monte au créneau pour bloquer cette revendication. Clamant d’abord qu’une résolution concernant un seul pays n’avait rien à faire au Parlement européen, le président du groupe, Joseph Daul, se prononce ensuite contre le texte. Malheureusement pour lui, socialistes, libéraux, extrême gauche et écolos se mobilisent pour une mise au vote. Les conservateurs tentent alors d’enlever toute référence à l’Italie dans le texte : encore raté !

Lundi 19 octobre, le groupe demande à modifier l’ordre du jour pour repousser le vote. Le lendemain, les eurodéputés trouvent dans leur casier une flopée d’amendements signés du PPE pour ajouter des références à d’autres pays : la Hongrie, l’Allemagne, etc. Objectif : atténuer l’attaque contre l’Italie, et donc le Cavaliere. Soumis aux votes, les amendements de dilution sont tous rejetés.

« A trois voix près, certains ont dû hésiter jusqu’au dernier moment » Seulement, au moment du scrutin final, grâce à un tonitruant rappel des troupes conservatrices, le PPE remporte la timbale et rejette le texte : la liberté de la presse attendra, il fallait sauver le soldat Berlu ! Un succès auquel se sont bien sûr associés les représentants de l’UMP présents, dont Michel Barnier.

Derrière cette unanimité, le symbole d’une droite qui se protège elle-même et qui protège les chefs d’Etat, une façon de dire que les intérêts du Président du Conseil italien, pas plus que ceux des autres membres du Conseil européen, ne peuvent être inquiétés par la turbulente opposition du Parlement. Voilà qui méritait bien un satisfecit sur le site du groupe PPE : « le Parlement européen a justement refusé un débat national ». Car, c’est bien connu, les problèmes de confusion entre pouvoir politique et médias, ça ne concerne que l’Italie !

« Nous aurons d’autres occasions de ramener ce texte au vote : le débat sur la charte des droits fondamentaux, la commission droits de l’homme... Se rassure Sandrine Bélier avant de noter : pour que la résolution n’ait été rejetée que de trois voix, il y en a qui ont du hésiter jusqu’au dernier moment. » A trois voix près, on aurait pu être fier du Parlement européen. Dommage !


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